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WSWS : Nouvelles et analyses : Afrique et Moyen-Orient

Explosion des prix du pétrole : Les États-Unis et l'Europe considèrent une intervention en Libye

Par Patrick O'Connor
26 février 2011
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L'administration Obama et les gouvernements européens coordonnent une position plus agressive envers la Libye, se réservant entre autres la possibilité d'une intervention militaire, en réaction aux craintes d'un choc international des prix du pétrole. La production quotidienne de pétrole de la Libye a chuté d'approximativement 50 à 60 pour cent et le prix du baril de pétrole est maintenant à son plus haut en deux ans, atteignant près de 110 $. Les bourses ont baissé aux États-Unis, en Europe et en Asie, reflétant les craintes que d'autres hausses de prix puissent provoquer de l'inflation et ralentir l'activité économique.

La plus grande préoccupation des puissances impérialistes est de restabiliser l'État d'Afrique du Nord et de relancer les exportations de pétrole. Les diverses critiques des chefs occidentaux faites à l'endroit du gouvernement libyen et de son recours à la violence sont totalement hypocrites – Mouammar Kadhafi a profité de relations des plus chaleureuses avec les États-Unis et l'Europe durant la dernière décennie. Son régime a été financé et armé par ces puissances, en récompense de son appui aux objectifs géostratégiques de Washington dans la région et de sa collaboration avec les sociétés pétrolières étrangères établies en Libye. De nombreux politiciens et personnalités bien en vue du monde des affaires se sont enrichis en collaborant avec Kadhafi, notamment l'ancien premier ministre britannique Tony Blair, qui visitait régulièrement Tripoli au nom de la banque d'investissement américaine JPMorgan Chase.

Maintenant par contre, le gouvernement à Tripoli semble sur le point de s'effondrer. Les forces d'opposition étendent leur contrôle des régions à l'est du pays jusqu'aux centres urbains à l'ouest, près de la capitale.

Le président des États-Unis Barack Obama a parlé pour la première fois hier soir de la crise en Libye, déclarant : « [J’ai] demandé à mon administration de préparer toutes les options qui s'offrent à nous pour réagir à cette crise ». La menace du recours à la force militaire a aussi été soulevée par la secrétaire d'État Hillary Clinton, qui avait affirmé plus tôt que Washington examinerait « toutes les options possibles » et que « tout sera mis sur la table ». (Lire: Obama and the Libyan crisis)

Hier, avant une réunion extraordinaire du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, un projet de résolution présenté par l'Union européenne (UE) a condamné « les récentes violations extrêmement graves des droits humains commises en Libye, dont les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires, la détention et la torture de manifestants pacifiques, qui, si elles sont répandues et systématiques, pourraient constituer des crimes contre l'humanité ». Cette référence à des crimes contre l'humanité est importante – le même prétexte avait été utilisé par les interventions de l'OTAN dans les Balkans dans les années 1990.

Une couverture pseudolégale pour une possible intervention est déjà en préparation à l'ONU. Une résolution du Conseil de sécurité a été adoptée mardi à l'unanimité, condamnant la violence et soulignant « la nécessité de faire répondre de leurs actes les personnes responsables d'attaques contre les civils ».

Les États-Unis et les puissances européennes seraient en train de préparer une série de sanctions économiques et diplomatiques contre la Libye. Le président français Nicolas Sarkozy a déclaré : « La communauté internationale ne peut pas demeurée spectatrice de ces violations massives de droits humains. » Il a demandé l’imposition d’une zone « d’exclusion aérienne » sur la Libye, qui serait dirigée par l’OTAN. Cela est survenu quelques semaines seulement après que l’administration Sarkozy a proposé que la police antiémeute française aide l’ancien dictateur tunisien Zine El Abidine Ben Ali à supprimer la révolte qui a déclenché la révolution à travers l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient.

La création possible d’une zone d’exclusion aérienne sur la Libye est présentement discutée internationalement. Des inquiétudes ont été émises aux États-Unis et en Grande-Bretagne quant aux probabilités que la Russie et la Chine approuvent cette mesure au Conseil de sécurité de l’ONU. Plusieurs reportages dans les médias ont sinistrement fait remarquer que Washington, Londres et d’autres gouvernements prennent une position publique « prudente » sur la question jusqu’à ce que leurs diplomates et leurs citoyens soient évacués de la Libye.

Cette évacuation massive est accompagnée d’un déploiement militaire important dans la mer Méditerranée qui pourrait plus tard être utilisé pour toutes opérations militaires des « États-Unis et de l’OTAN en Libye. La Grande-Bretagne, la Turquie et la Grèce y ont déployé des navires de guerre et plusieurs pays ont envoyé des avions de combat, incluant la France, la Hollande, l’Ukraine, l’Irlande et l’Italie.

Toute intervention menée par les États-Unis viserait d'abord à rétablir la production de pétrole en Libye et non à mettre un terme à la violence brutale déployée par les forces de Kadhafi. Les sociétés pétrolières étrangères, incluant Eni de l’Italie, Repsol YPF de l’Espagne, Wintershall de l’Allemagne et Total de la France, ont cessé la production ou l’ont diminué fortement. Les experts qui travaillent pour les industries étrangères et les sous-traitants tentent de fuir le pays.

Le niveau de production maintenu dans les champs pétrolifères opérés par la société pétrolière d'État est inconnu et il est aussi difficile de savoir si les grèves des travailleurs du secteur pétrolier se poursuivent. Le Financial Times rapportait hier : « Selon des commerçants, la société pétrolière d'État de Libye a déclaré l'état de force majeure – une clause légale lui permettant de se dissocier des livraisons sous contrats – sur les produits raffinés. »

La production totale de pétrole de la Libye – qui était, avant la crise, de 1,6 million de barils – représente moins de deux pour cent du total de la production mondiale de pétrole. L’impact disproportionné de la crise pétrolière libyenne sur les marchés internationaux est dû à plusieurs facteurs.

Un de ces facteurs est que le pétrole libyen est de très haute qualité, et ne peut être simplement remplacé par l’augmentation de la production de l’Arabie Saoudite ou d’autres pays membres de l’OPEP. « Les réserves situées sous le désert de la région produisent du brut qui peut être raffiné facilement en diesel et en pétrole et qui contient également peu de soufre, le rendant plus propre à la combustion », a expliqué le Financial Times. « Elles [les compagnies de pétrole] devraient trouver des barils de qualité équivalente provenant d'Algérie, du Nigéria, de la région de la mer Caspienne ou de la mer du Nord. Les enchères pourraient faire monter les prix pour le brut de haute qualité qui est la référence pour les contrats de pétrole à terme standardisé et pourrait entraîner une réduction de la production des raffineries qui seraient incapables de le payer. »

Le soulèvement en Libye a aussi suscité des craintes sur les marchés financiers quant à l'instabilité d'autres pays producteurs de pétrole, comme l'Algérie et l'Arabie Saoudite, le plus grand exportateur de pétrole au monde. « Personne ne sait où cela va s'arrêter », a dit au New York Times Helima Croft, directrice chez Barclays Capital. « Il y a quelques semaines, c'était la Tunisie et l'Égypte. On croyait que le mouvement allait être limité à l'Afrique du Nord et aux pays pauvres en ressources du Moyen-Orient. Mais les manifestations à Bahreïn, le cœur du golfe, viennent alimenter les inquiétudes. »

Afin d'apaiser ces inquiétudes, le roi d'Arabie Saoudite, Abdallah ben Abdelaziz, a annoncé un programme de 36 milliards de dollars pour favoriser l'emploi, le logement et d'autres besoins sociaux. Il vise ainsi à contrecarrer tout mouvement des travailleurs et des jeunes saoudiens.

Des analystes des produits de la banque japonaise Nomura ont averti que le prix du baril de pétrole pourrait atteindre 220 $, « si la Libye et l'Algérie cessaient toute production de pétrole ». Des prix aussi élevés entraîneraient inévitablement un ralentissement marqué dans les économies des États-Unis et du monde.

Les champs pétrolifères libyens, comme la majorité du territoire du pays, semblent maintenant sous le contrôle des forces anti-Kadhafi.

À Benghazi et Bayda, les deux villes les plus importantes après Tripoli, les forces du gouvernement semblent être en déroute. Des journalistes internationaux commencent à avoir accès à la région en traversant la frontière égyptienne. Martin Chulov du Guardian rapporté qu'à Benghazi « tous les signes visibles du dictateur ont été retirés ou brûlés ». Des drapeaux nationaux datant de la vieille monarchie flottaient au-dessus des édifices gouvernementaux. Des soldats qui avaient fait défection s'étaient emparés de tonnes d'armes et de munitions des arsenaux militaires.

Hier, les forces d'opposition ont pris le contrôle de Misrata, à environ 200 kilomètres à l'est de Tripoli, après des jours de combats dans les rues de la ville. Faraj Al-Misrati, un médecin du coin, a communiqué à Associated Press que six personnes avaient été tuées et 200 blessées lors des affrontements. Il a ajouté que les résidents avaient formé des comités pour nettoyer les rues, protéger la ville et soigner les blessés. « La solidarité entre les gens est incroyable, même les infirmes offrent leur aide », a-t-il dit.

Les forces d'opposition affirment qu'elles contrôlent d'autres centres urbains dans la partie ouest dans la Libye dont Zawiya, située à seulement 50 kilomètres à l'ouest de la capitale.

À Tripoli, de nouveaux reportages font état de la poursuite du massacre de protestataires et de quiconque serait perçu comme un opposant du régime par la milice de Kadhafi et des mercenaires étrangers. Des vidéos rendues publiques sur le web montrent ces forces fouillant systématiquement les résidences. D'autres extraits semblent montrer des barricades faites de blocs de béton et de pneus en flammes érigées par les protestataires autour d'une place près du centre de la ville. Des manifestations ont été appelées pour aujourd'hui et demain, et des articles rapportent que l'opposition prévoit organiser une « marche » vers Tripoli vendredi.

(Article original anglais paru le 24 février)

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