Le bombardement continu de Tripoli durant les 48 dernières
heures représente une nouvelle étape d'un des actes d'agression impérialiste
les plus flagrants depuis les guerres de conquête lancées par Hitler et
Mussolini dans les années 1930.
Des avions de combat ont frappé la capitale Libyenne 62 fois
entre mardi et mercredi matin. Les frappes de jour soulignent le fait que la
Libye, sa force aérienne et son système de défense anti-aérien ayant été
dévastés par les frappes précédentes, reste quasiment sans défense face au blitzkrieg
de l'OTAN.
Au moins 31 personnes ont été tuées et des dizaines
blessées. Les bombardements ont démoli des bâtiments publics civils, tout en
endommageant des logements, des hôpitaux et des écoles. Leur effet collatéral,
voulu, est de terroriser la population de Tripoli qui compte 1,7 million
d'habitants.
Cette escalade rapide de la campagne de bombardements
intervient tout juste après le déploiement des hélicoptères d'attaque
britanniques et français, largement considéré comme un prélude à une invasion
directe au sol.
Mercredi à Bruxelles, un sommet des ministres des affaires
étrangères de l’OTAN s’est mis d’accord pour poursuivre la
campagne de bombardements qui dure depuis déjà 10 semaines « aussi
longtemps que nécessaire, » pendant que le ministre de la défense Robert
Gates et le Secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen,
insistait auprès d’autres états membres de l’OTAN, dont
l’Allemagne, la Pologne, la Turquie et l’Espagne, pour qu’ils
participent au bombardement de cette nation africaine opprimée.
Il fut un temps où ce genre d’attaques était considéré
comme des « bombardements de terreur. » Ils étaient menés par la
Luftwaffe de Hitler contre des populations sans défense – à Guernica
durant la guerre civile espagnole en 1937, à Varsovie en 1939, à Rotterdam en
1940 et à Belgrade en 1941 – avec pour objectif d’annihiler les
forces armées du pays visé, de détruire l’organisation de l’Etat et
de briser le moral de tous ceux qui s’opposaient à l’occupation
étrangère.
En Afrique du Nord, des campagnes similaires
d’agression et de terreur ont été menées par le régime fasciste de
Mussolini contre l’Éthiopie et – hier comme aujourd’hui
– en Libye.
Il y a bien peu de différences entre ces actes
d’agression plus anciens – pour lesquels les chefs du troisième
Reich ont été poursuivis à Nuremberg – et la guerre actuelle menée par
les États-Unis et l’OTAN. Que ce soit dans leurs objectifs ou leurs
méthodes, ils sont très semblables.
Cette guerre des États-Unis et de l’OTAN est menée
sous le prétexte d’appliquer une résolution de l’ONU qui
autoriserait « toutes les mesures nécessaires » pour protéger la
population civile du pays. Les dirigeants des États-Unis et des grandes
puissances européennes admettent tous que cette résolution est une farce.
L’objectif réel de cette guerre, tout comme de celles
qui ont été menées dans les années 1930, est la conquête impérialiste. Les
États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’Italie veulent tous
« un changement de régime » en Libye, ils cherchent à faire tomber le
gouvernement en place de Mouammar Kadhafi et à imposer un nouvel état client
qui fonctionnera comme le pantin des grandes puissances et des conglomérats
énergétiques occidentaux.
Ils se sont emparés des soulèvements populaires qui balayent
le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord pour subjuguer ce pays faiblement
peuplé, placé stratégiquement entre les deux nations arabes où ont eu lieu les
soulèvements les plus lourds de conséquences– l’Égypte et la
Tunisie. Leur objectif n’est pas, comme l’ont cyniquement affirmés
Barak Obama et Hillary Clinton, de sauver le « printemps arabe, »
mais plutôt de se mettre en position de l’étrangler.
Agissant sous le prétexte d’appliquer une résolution
des Nations unies et de protéger des vies civiles, les États-Unis et leurs
alliés ont causé d’immenses souffrances parmi les civils libyens. Ils ont
également abandonné le contenu essentiel de la Charte qui a créé l’ONU,
laquelle déclarait illégales les guerres d’agression et affirmait le
principe de souveraineté nationale, interdisant l’intervention de ses
membres dans les affaires intérieures d’autres membres.
Ils ont mené des actes d’agression pour le but avoué
d’assassiner le chef de l’état Libyen et de détruire ses forces
armées et l’infrastructure de son état. Pour cela, ils ont bombardé le
centre de Tripoli et des parties d’autres villes, en ont fait des tas de
gravats, et ont tué des hommes, des femmes et des enfants innocents –
sans parler d’un nombre inconnu de soldats, dont beaucoup ne sont que des
appelés pouvant avoir 17 ans.
Le bombardement par l’OTAN a également fait des
milliers de réfugiés fuyant pour sauver leur vie parmi les Libyens et les
travailleurs immigrés. Des centaines sont morts en tentant de traverser la
Méditerranée. On craint de plus en plus que cette guerre ne créée un désastre
humanitaire, privant la population civile de nourriture, d’eau et de
soins médicaux.
Ceux qui sont responsables de ces actes – Barack
Obama, David Cameron, Nicolas Sarkozy et d’autres – sont coupables
de crimes de guerre.
Lors de leur réunion à Bruxelles, les ministres des affaires
étrangères de l’OTAN ont reçu l’ordre de préparer « la Libye
post-Kadhafi. » On peut s’attendre avec certitude à ce que, si cela
se réalise, cet objectif prendra la forme d’une deuxième campagne
militaire – un règne de la terreur contre la population libyenne, visant
à écraser toute résistance à la domination étrangère.
Qu’est-ce que la Libye a fait aux pays – dont le
Danemark, la Norvège et la Suède – qui font maintenant pleuvoir les
bombes sur ses villes et sa population ? La réponse est : rien. Ils
participent à cet assaut impérialiste pour avoir leur part dans la curée du
pays, sur les réserves pétrolières et sur les dizaines de milliards de dollars
qui ont été « gelés » dans les banques occidentales.
En menant cette aventure impérialiste criminelle, les
États-Unis et l'OTAN ont pu exploiter l'absence à peu près totale de mouvement
anti-guerre que ce soit en Amérique ou en Europe.
Durant les quatre décennies qui ont suivi la guerre du
Vietnam, le sentiment anti-guerre organisé a joué un rôle politique sur les
deux continents. À la veille de l'invasion injustifiée de l'Irak en 2003,
des millions sont descendus dans la rue sur toute la planète au cours d'une
manifestation internationale sans précédent contre la guerre et l'impérialisme.
Et pourtant maintenant, alors que l'impérialisme américain
mène trois guerres d'agression à la fois, et que les grandes puissances
européennes s'y associent, l'opposition continue à la guerre ressentie par la
grande majorité de la population ne trouve aucune expression politique
significative.
Ce phénomène politique s'explique en grande partie par l'évolution
de toute une couche jadis « de gauche » venant des classes moyennes et
qui incluait la direction des mouvements anti-guerre de la période précédente.
Tout en prenant des formes politiques différentes – aux États-Unis, une
intégration de plus en plus profonde dans le parti démocrate et en Europe la trajectoire
prise par les Verts et d'autres formations politiques « de gauche » -- ces
évolutions ont des racines sociales et politiques communes : la richesse accrue
de cette couche et son accommodation à l'impérialisme sous le slogan tout à
fait hypocrite des « Droits de l'Homme. »
Il y a en particulier parmi eux une coterie
d'universitaires, ex « gauchistes », - représentés par Juan Cole, historien du
Moyen-Orient à l'université du Michigan – qui salive pratiquement à
chaque nouveau bombardement de l'OTAN, affirmant que chaque attaque est un coup
en faveur de la « Libye libre. » Dans la propagande de guerre éhontée de
certaines de ces canailles professionnelles, il y a un écho distinct des
positions adoptées par une couche similaire de la classe moyenne en Allemagne
durant la montée du nazisme.
Un nouveau mouvement anti-guerre, s'appuyant sur la classe
ouvrière et une perspective socialiste, doit émerger en réponse à l'assaut
contre la Libye, aux crimes toujours perpétrés en Afghanistan, au Pakistan, en
Irak, et aux nouveaux actes de militarisme qui ne manqueront pas de se
produire.
Ces guerres sont menées par une élite financière au pouvoir
dans une tentative de se décharger des conséquences catastrophiques de la crise
économique qui s'empare du capitalisme mondial et surtout de celui des
États-Unis.Le militarisme à l'extérieur est associé à une guerre sans répit
contre le niveau de vie et les droits sociaux fondamentaux des travailleurs de
chaque pays. Alors que la direction des anciens mouvements de contestation de
gauche évolue vers la droite, cette crise pousse les travailleurs vers la
gauche.
La lutte contre la guerre – pour mettre fin à
l'agression impérialiste contre la Libye, pour le retrait de toutes les troupes
américaines du Moyen-Orient et d'Afghanistan et pour une fin à la menace de
nouvelles guerres impérialistes encore plus meurtrières – ne peut être
menée que si elle fait partie d'une lutte pour mobiliser la classe ouvrière
politiquement contre le système d'exploitation, source du militarisme.
Pour réussir, ce mouvement doit s'appuyer sur une nouvelle
perspective et une nouvelle stratégie de socialisme international, pour unir la
classe ouvrière de chaque pays dans une lutte commune pour mettre un terme au
capitalisme et commencer la réorganisation socialiste de l'économie mondiale
afin qu'elle réponde aux besoins sociaux et non aux besoins de profits privés.