Le samedi 28 mai, après deux années de discussion, le Parti Socialiste (PS)
a adopté à l’unanimité un projet servant de socle commun pour
l’ensemble des futurs candidats du PS pour les élections présidentielles
de 2012. Le PS indique qu’il est prêt à succéder à Nicolas Sarkozy en
2012, tout en menant les mêmes politiques que ce dernier.
Dans l’article de Sylvain Courage du Nouvel Observateur intitulé Projet
du PS pour 2012 : la grande messe de Martine Aubry du 29 mai, le
journaliste écrit : « Aubry emploie le « nous » pour dire « nous
sommes prêts pour redresser la France comme en 1981 et en 1997 dans un grand
élan démocratique.» ». Le projet 2012 du PS signifie que ce parti est prêt
à prendre le pouvoir pour mener les attaques contre la classe ouvrière qui sont
indispensables pour la bourgeoisie française.
D’après les sondages, si les élections présidentielles avaient eu lieu
aujourd’hui, le PS serait élu. Suite à la réforme des retraites, le
président Sarkozy est devenu très impopulaire. Des personnalités de droite
comme Jean-Louis Borloo et Dominique De Villepin réfléchissent à
l’éventualité de se présenter pour les élections présidentielles. Le FN
fait une montée dans les sondages grâce aux lois contre la burqa et le débat
sur l’identité nationale lancés par Nicolas Sarkozy et qui avaient obtenu
le soutien du PS et de ces partis satellites.
Néanmoins, le programme du PS est profondément
pessimiste et n’annonce aucune mesure sérieuse pour améliorer les
conditions de vie des travailleurs. Il reflète la peur de la bourgeoisie
française face à la montée des pays émergeants et au déclin de pays moyens
comme la France—et en particulier une peur du développement de la lutte
des classes qui est parti du Moyen Orient et en particulier en Afrique du Nord.
Le PS reconnaît que les bases de la stabilité économique en France
à la sortie de la deuxième guerre mondiale « ont volé en
éclats ». L’amélioration économique de la France et de
l’Europe était liée au rôle joué par les Etats-Unis comme puissance
dominante du monde avec sa monnaie comme référence mondiale.
Le déclin du capitalisme américain ainsi que l’arrivée de pays
émergeants avec de bas salaires capable de concurrencer la France ont été un
facteur important dans le déclin de pays moyens. C’est ce que le
paragraphe 4 dit : « L’arrivée de nouveaux géants économiques
qui réclament leur part de bien-être matériel, conjuguée à un mode de
développement fondé sur l’exploitation de la nature, rapproche le monde
d’un point de bascule ».
Dans le paragraphe 5 du projet, le PS parle de toutes les promesses liées
à la chute du Mur de Berlin comme maintenant ajournée. Cet aveu de la part
du PS est remarquable car finalement le capitalisme—contrairement à ce
qui avait été dit lors de la dissolution de l’URSS par la bureaucratie
stalinienne--n’est pas un système stable et assurant la liberté pour
tous.
Comme l’a démontré le comportement des banques lors de la crise
économique, il emploie des mesures criminelles pour réaliser des profits en
s’attaquant aux acquis sociaux et aux droits démocratiques de la classe
ouvrière. Le PS présente la France et le monde comme étant entrés dans une
période de recul social plus ou moins inévitable.
Le PS n’est pas en mesure de proposer une autre alternative parce
que—comme les gouvernements sociaux-démocrates de GeórgiosPapandréou
en Grèce ou de José Zapatero en Espagne—il sont d’accord avec les
programmes d’austérité. Dans le paragraphe 7, le PS fait un bilan
dévastateur de sa propre action. Il fait une tentative malhonnête de déclarer
que le mouvement social-démocrate est seulement coupable de
« passivité » : « Pour accroître les profits, les
gouvernements libéraux ont affaibli la protection sociale et le pouvoir
d’achat—avec en Europe la passivité de certains dirigeants
sociaux-démocrates ».
Le PS ment lorsqu’il parle de passivité pour qualifier la politique
anti-ouvrière des sociaux-démocrates. En fait, depuis la constitution du PS
contemporain aux années 1970 en France, le PS au pouvoir a toujours servi à
mater les luttes ouvrières et à rétablir l’ordre capitaliste aux dépens
des travailleurs.
En 1983, soit deux ans après la première prise de pouvoir par le PS de
François Mitterrand avec l’aide du Parti Communiste, il a fait adopter un
plan de rigueur contre les travailleurs. Ceci a permis l’étranglement
définitif de la vague de grèves d’après 1968, et la poursuite même plus
déterminée par la bourgeoisie d’une politique de désindustrialisation de
privatisation, notamment contre la sidérurgie en France.
Le gouvernement PS du Premier Ministre Lionel Jospin, arrivé pour
stabiliser la présidence de Jacques Chirac ébranlée par les grèves de 1995, a
fini par mener une politique brutale de privatisation.
A présent, avec la crise économique mondiale et la crise de la dette en
Europe, les gouvernements sociaux-démocrates mènent tous des attaques profondes
contre les acquis sociaux des travailleurs. Loin d’être passifs comme le
prétend le PS, ils ont augmenté l’âge de la retraite en Grèce et en
Espagne, tout en attaquant les acquis sociaux et les conditions de travail.
La politique des pays gouvernés par les sociaux-démocrates tourne de plus en
plus vers la dictature. En réponse aux manifestations de l’année dernière,
le gouvernement a envoyé les forces de l’ordre—contre la grève des
contrôleurs aériens en Espagne, des routiers en Grèce, tout comme le
gouvernement Sarkozy qui a envoyé les CRS contre les travailleurs des
raffineries en lutte contre la réforme des retraites.
Le silence du PS sur cette question souligne qu’il se prépare
à mener une politique semblable en France. Il est d’ailleurs
complice de ces mesures d’austérité : à l’Assemblée Nationale
il a voté pour l’application de mesures de rigueur en Grèce.
Le PS critique la politique étrangère de Sarkozy en Méditerranée, mais il
donne finalement raison à Sarkozy sur sa principale initiative dans la
région : l’agression militaire par la France contre la Libye. Ainsi
le PS écrit que Sarkozy « a entamé le crédit de la France en déroulant le
tapis rouge à Kadhafi le massacreur quand les autres démocraties dénonçaient
ses forfaits. Lorsqu’il a agi, avec raison, trois ans plus tard, pour
empêcher le régime libyen de massacrer son propre peuple, il l’a fait
tardivement … »
Le PS reprend ainsi le mensonge cynique de Sarkozy—selon lequel la
guerre en Libye est menée pour protéger les citoyens libyens—pour
justifier son soutien à la guerre en Libye et aux bombardements par la
France et l’OTAN des civils libyens.
Le PS élabore une politique économique nationaliste, dont l’adoption
éventuelle aurait l’effet de provoquer de profondes divisions dans le
système commercial mondial. Il développe l’idée d’une position plus
indépendante des Etats Unis, tournée vers l’Allemagne : « une
défense réaliste de nos intérêts commerciaux face aux pays à bas salaires et
aux espaces protégés par les Etats. Pour y parvenir, donnons vie aux
‘coopérations renforcées’, proposons les contours d’un groupe
pionnier adossé à la France et à l’Allemagne ».
Le PS tente de donner une justification pseudo-sociale pour une politique
commerciale européenne ayant des implications aux relents autarciques. Le PS veut créer des outils politiques pour mettre
fin à l’accès en Europe aux produits des pays émergents, en fermant les
frontières européennes : « En cas d’échec durable des
négociations sur les normes dans le cadre de l’Organisation mondiale du
commerce (OMC), nous augmenterons les droits de douane au niveau européen sur
les produits ne respectant pas les normes internationales en matière sociale, sanitaire,
ou environnementale ».
Les mesures du PS sont dans la continuité de celles de Nicolas Sarkozy.
Le PS souhaite qu’il y ait une conférence salariale annuelle avec les
patrons, les syndicats et l’Etat pour établir un cadre général
d’évolution des salaires.
Les syndicats ont participé à toutes les mesures proposées par le
gouvernement Sarkozy pour essayer de réduire le niveau de vie de la classe
ouvrière au maximum. Les syndicats ont fait en sorte de contenir les
manifestations pour démoraliser la classe ouvrière et leur faire accepter les
réformes voulues par le gouvernement comme ce fut le cas avec les retraites, la
lutte des cheminots sans qu’il n’y ait d’explosions
politiques.
Mises à part des mesures protectionnistes, le PS annonce surtout des mesures dont le
contenu souligne le caractère anti-ouvrier de la politique qu’il mènera.
Comme pour souligner que la désindustrialisation continuera sous un
gouvernement PS, il propose de « renchérir le coût des licenciements
collectifs pour les entreprises qui versent les dividendes ».
Une fois arrivé au pouvoir, comme en 1981 ou en 1997, le PS a toujours
gouverné beaucoup plus à droite que les promesses qu’il avait faites lors
de la campagne. Son programme de campagne de 2012 n’est pas de
« gauche » (même de la « gauche » bourgeoise), mais un
programme de droite défendant la guerre et l’austérité sociale. Arrivé au
pouvoir au milieu d’une crise et d’une réorientation profonde du
capitalisme mondial, un gouvernement PS en 2012 serait un gouvernement de la
plus profonde réaction sociale.