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WSWS : Nouvelles et analyses : Afrique et Moyen-Orient

Les soulèvements du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord sont causés par des forces agissant à l’échelle mondiale

Par Nick Beams
8 mars 2011

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La propagation des soulèvements au Moyen-Orient et en Afrique du Nord qui ont débuté en Tunisie en janvier, ont ensuite touché l’Egypte pour s’étendre ensuite à toute cette région du monde est parfois considérée comme une sorte de contagion.

Il ne fait pas de doute que les travailleurs et les jeunes d’un pays se soient inspirés et aient puisé des forces, et continueront de le faire, dans les mouvements sociaux de masse des autres pays. Mais, la rapidité de ces événements est, finalement, le résultat de processus plus profonds ancrés dans l’économie mondiale – processus qui sont à l’œuvre dans toutes les parties du monde.

La caractéristique commune la plus évidente à la Tunisie, à l’Egypte et à la Libye – jusque-là les trois principaux centres de la tempête – est qu’on a mis en place dans tous ces pays au cours de cette dernière période un programme très étendu de restructuration néolibérale de « libre marché ». Cette politique qui inclut une privatisation à grande échelle, la suppression de la réglementation économique et financière nationale, la destruction de dizaines de milliers d’emplois et la réduction des subventions publiques, a été supervisée par le Fonds monétaire international (FMI) pour le compte du capital financier mondial.

En octobre dernier, le FMI a publié un rapport dans lequel il déplore le « manque [général] de compétitivité au Moyen Orient et en Afrique du Nord ». Il y fait toutefois état de deux « réussites. »

La Tunisie était devenue le « centre de la délocalisation » de la région avec une « réglementation simplifiée, une infrastructure moderne, des incitations gouvernementales et l’engagement à une économie fondée sur la connaissance qui génère des travailleurs bien formés et à faible coût. » L’auto immolation d’un jeune chômeur en décembre dernier avait été le facteur déclencheur du soulèvement tunisien.

Quant à l’Egypte, elle avait attiré de considérables investissements informatiques mondiaux accompagnés de « réformes structurelles » ayant pour résultat des « améliorations dans l’environnement où se font les Affaires. »

La Libye aussi eut droit à des rapports enthousiastes. Le 28 octobre de l’année dernière, le FMI avait recommandé aux autorités libyennes « de faire des efforts pour améliorer le rôle du secteur privé de l’économie. » Il avait salué « les efforts entrepris pour consolider les marchés financiers » comme étant « louables » en précisant qu’il n’y avait plus de banques publiques et que les « partenaires étrangers » étaient impliqués dans six des 16 grandes banques du pays.

Le rapport du FMI notait aussi que des « progrès » avaient été réalisés dans la réduction du nombre des emplois publics, disant que sur 340.000 employés du service public transférés à l’agence centrale de l’emploi à des fins d’économies, environ un quart avait trouvé une autre source de revenu. Il avait réclamé que le programme de réduction des dépenses soit « accéléré. » Pas plus tard que le 9 février de cette année, à peine une semaine avant le début du soulèvement contre Kadhafi, le FMI avait fait remarquer le « programme ambitieux » de privatisation des banques et « de développement du secteur financier naissant. » Il avait salué les réformes structurelles dans d’autres domaines ainsi que les « importantes lois » passées l’année dernière comme étant de bon augure pour « la stimulation du développement du secteur privé et l’attraction d’investissements étrangers directs. »

Les directeurs du FMI avaient « félicité les autorités pour leur programme ambitieux de réforme » et pour les nombreuses lois adoptées l’année dernière et « complétées par une politique destinée à adapter la main-d’œuvre à la transformation économique. »

Considérés dans ce contexte, les soulèvements au Moyen Orient et en Afrique du Nord prennent une signification plus générale. Ils sont la première révolte contre le programme de « libre marché » qui a eu un impact tellement dévastateur sur la position sociale de la classe ouvrière au cours de ces 20 dernières années. La privatisation, l’accroissement des inégalités sociales, la hausse du chômage des jeunes, le manque d’opportunités pour les diplômés des universités et du secondaire, la baisse des salaires et l’accumulation de vastes richesses, dont une grande partie découle de ce qui ne peut être décrit que comme des activités criminelles de pillage – tout ceci n’est pas un phénomène propre au Moyen Orient mais bien mondial.

Si le programme du capital financier de « libre marché » a jeté les bases économiques objectives des soulèvements, les actions des autorités financières après la crise financière mondiale elles, ont fourni une impulsion initiale significative.

Confrontés au plus grand désastre économique de ces quatre-vingts dernières années, la réaction du gouvernement Obama et de la banque centrale des Etats-Unis a été de poursuivre la même politique que celle ayant entraîné le krach, tout en attaquant brutalement les conditions de vie de la classe ouvrière. Loin d’être réglementées ou contrôlées, et encore moins nationalisées, ou leurs directeurs poursuivis en justice pour leurs activités criminelles – les banques et les institutions financières ont été dotées de crédits ultra bon marché par la banque centrale, de façon à pouvoir continuer à amasser des profits au moyen de la spéculation et de la manipulation financière.

Comme le président de la banque centrale Ben Bernanke l’a déclaré explicitement dans un article publié par le Washington Post en novembre dernier, l’objectif de la politique du soi-disant « assouplissement quantitatif » (QE) par laquelle des centaines de milliards de dollars sont injectés dans le système financier, est pousser les cours de la bourse vers le haut. Non seulement les actions, mais toutes les valeurs comme l’immobilier, la terre, les matières premières et les denrées alimentaires sont à présent devenues des cibles pour des montants énormes de capital financier en quête d’une accumulation du profit par la spéculation.

Une étude récente réalisée par le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) a trouvé que le nombre de futures (contrats à terme) et d’options achetées et vendues à l’échelle mondiale dans les bourses de marchandises avaient quadruplé entre 2005 et 2010, le négoce des produits alimentaires représentant certes une « part petite mais en augmentation rapide. » Une spéculation accrue a contribué à  attiser la hausse de certains prix. L’indice des prix de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) pour un panier international de denrées alimentaires comprenant des produits laitiers, de la viande, du sucre, des céréales et des graines oléagineuses a fait un bond de plus de 30 pour cent entre juin et décembre de l’année dernière. Le prix des céréales, la denrée alimentaire de base comptant pour plus de deux tiers des calories alimentaires dans de nombreux pays en développement, a grimpé d’un « pourcentage ahurissant de 57 pour cent au cours de la même période. »

Cette étude a trouvé que les prix des denrées alimentaires n’avaient pas sensiblement baissé après leur période de pointe de 2007-2008 et étaient en moyenne environ 55 pour cent plus élevés en novembre 2010 qu’en mai 2007. Le rapport mettait en exergue l’un des facteurs clé de la force motrice des soulèvements. « Depuis 2008, » relevait-t-il, « les ménages pauvres ont épuisé les stratégies de survie, telles qu’avoir moins de repas, réduire les dépenses de santé, augmenter les dettes et avoir des horaires de travail plus longs dans le secteur non structuré et leur capacité de résistance est très limitée en 2011. »

La hausse des prix des denrées alimentaires et l’inflation générées par la crise du capitalisme mondial ont déjà eu des conséquences explosives au Moyen Orient et en Afrique du Nord. Elles risquent d’avoir des conséquences encore plus considérables en Chine. Là, le régime vit dans la crainte quotidienne d’une éruption dans la classe ouvrière, bien plus importante que celle qui s’était développée suite à l’inflation à la fin des années 1980 et qui avait conduit en juin 1989 au massacre de la place Tiananmen.

La hausse des prix des denrées alimentaires n’est qu’un des effets de la « restructuration » émanant de l’effondrement financier mondial. Un autre effet sont les coupes sociales radicales appliquées en Europe et par l’administration des divers Etats des Etats-Unis, dans le but de rejeter le coût du sauvetage des banques, s’élevant à des milliers de milliards de dollars, sur la classe ouvrière.

Et, un autre effet qui en découle est à présent imminent et menace d’avoir un impact direct sur ceux de pays comme l’Australie et le Brésil, qui ont jusque-là échappé aux pires conséquences de la crise économique mondiale en raison de leurs exportations de produits de base, tout spécialement vers la Chine.

Une grande partie de la demande, tout particulièrement pour le minerai de fer, est due à l’essor dans l’immobilier et dans le bâtiment en Chine, attisé par la politique d’argent bon marché appliquée par ses autorités financières et par la politique du QE de la Réserve fédérale américaine. Mais, plus cette bulle durera, et plus ses conséquences seront fortes. Cette semaine, Warwick McKibbin, l’expert australien en macroéconomie et membre du conseil de la Banque centrale d’Australie, a averti qu’elles pourraient même être plus importantes que celles de la crise de 2007-2008. L’impact de l’éclatement de la bulle causera des ravages, le produit intérieur brut (PIB) australien étant de 13 pour cent plus élevé qu’il ne le serait sans le boom des exportations de marchandises.

Quelle que soit sa forme particulière, la situation dans chaque pays est, comme l’a expliqué Léon Trotsky, « une combinaison originale des caractéristiques de base du processus mondial. » Par conséquent, a-t-il insisté, les luttes de la classe ouvrière dans quelque pays que ce soit, et quelle que soit leur forme initiale, ne pourront progresser que sur la base d’un programme international et par la construction d’un parti mondial de la révolution socialiste. Ceci est la perspective du Comité International de la Quatrième Internationale.

 (Article original paru le 5 mars 2011)

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