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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

France: Les travailleurs des fonderies votent la continuation de leur lutte contre les réductions des salaires et les licenciements

Par Antoine Lerougetel
4 octobre 2011

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Quelque 700 travailleurs se sont rassemblés jeudi dernier aux portes de la Fonderie Montupet à Diors, près de Châteauroux (Indre), pour soutenir les travailleurs de Fonderies du Poitou, autre fonderie du groupe, qui sont en grève depuis le 2 septembre contre une réduction de 23 pour cent des salaires. Les syndicats CGT (Confédération générale du Travail), proche du parti communiste, la CGT automobile et les organisations syndicales locales avaient appelé à la manifestation.


En entrant dans la fonderie

Le « plan de compétitivité » du groupe Montupet prévoit des licenciements de masse ou des fermetures d’usine si les travailleurs de Fonderies du Poitou Aluminium (FDPA) à Ingrandes-sur-Vienne près de Poitiers n’acceptent pas une baisse de leur salaire horaire de 23 pour cent.

Lors du rassemblement, les travailleurs de Fonderies du Poitou ont scandé « Rejoignez-nous, battez-vous avec nous » à l’adresse des travailleurs non-grévistes de la Fonderie de Montupet de Diors. Le site, où la CGT est le syndicat majoritaire, tout comme à Fonderies du Poitou, n’avait que partiellement débrayé. Ne représentant que près de la moitié des manifestants, les grévistes des Fonderies du Poitou étaient venus avec plusieurs autocars d’Ingrandes. D’autres délégations étaient venues d’usines automobiles et d'équipements de Paris, Blanquefort, La Rochelle, Le Mans et Bourges.

Les travailleurs de Diors sont également confrontés à une réduction de 6 pour cent de leur salaire horaire et à une prolongation non payée de leur semaine de travail.

La direction de Montupet a justifié les réductions au motif que, du fait de la situation économique, Renault devra aussi réduire les salaires dans ses usines. Le « plan de compétitivité » alignera les salaires de Fonderies du Poitou sur ceux des deux autres fonderies de Montupet en France, l’une à Diors et l’autre à Laigneville, dans l’Oise, où les travailleurs sont payés le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) de 1,200 euros (1.621 dollars US) par mois – soit une baisse de 300 à 400 euros. L’objectif du groupe est de réduire de 15 pour cent le montant total des coûts salariaux dans ses trois sites français.

L’auteur de l’article n’a trouvé aucun document syndical, que ce soit au niveau local de la CGT de l’usine d’Ingrandes ou au niveau national, appelant à une augmentation du salaire des travailleurs payés au SMIC pour atteindre le niveau de salaire de leurs collègues de Fonderies du Poitou.

Dans un article paru le 23 septembre dans le quotidien stalinien du Parti communiste (PCF), L’Humanité, Tony Garrot, secrétaire de la CGT à Fonderies du Poitou, a affirmé : « Nous savions depuis le début que, de toute façon, il s’agit bien de l’objectif final de Montupet, un PSE (plan de sauvetage de l’emploi), le mal nommé. » De plus, il a prétendu comprendre que la situation à son usine n’était qu’un élément de l’attaque perpétrée à l’échelle nationale contre les travailleurs automobiles : « La restructuration de la filière automobile française ne laisse rien présager de bon pour les travailleurs : fermetures de sites, suppressions d’emplois, attaques sur les salaires… » Mais Garrot n’avance aucune perspective de lutte contre ces attaques.

Construite par Renault en 1980 et revendue plus tard, la fonderie a eu plusieurs propriétaires depuis. L’on estime que depuis que Montupet l’a reprise en 2009, la productivité a augmenté de 30 pour cent du fait d’une exploitation accrue de la main-d’œuvre. La production totale de culasses de la fonderie est fournie à deux importants constructeurs automobiles : 85 pour cent vont à Renault et 15 pour cent à PSA Peugeot-Citroën.

Montupet possède quatre autres usines d'équipements : en Espagne, en Bulgarie, au Royaume-Uni et au Mexique. Dans un communiqué, la direction de Montupet avait qualifié le 31 mars ces trois dernières de « low cost » (à bas prix) disant que « Dans les années à venir, pour satisfaire les exigences de ses clients, ce sera principalement au Mexique, en Bulgarie et au Royaume-Uni que Montupet augmentera ses capacités de production en faisant d’importants investissements d’ici 2013. »


À l’intérieur de la fonderie

Afin de convaincre les travailleurs qu'il est possible de conclure des accords avec le gouvernement et les employeurs, la bureaucratie syndicale CGT a choisi d’ignorer le fait que l’industrie automobile mondiale, et pas uniquement française, procède à des restructurations tandis que les entreprises s’équipent pour une concurrence féroce dans le contexte d’une récession mondiale qui se poursuit. Ce processus contre les travailleurs automobiles est mené par l’industrie automobile américaine dans une offensive tripartite du gouvernement Obama, des patrons de l’automobile et du syndicat des Travailleurs unis de l’automobile (United Auto Workers, UAW).

La diminution des salaires est un élément clé de l’objectif du gouvernement Obama pour doubler les exportations américaines d’ici 2015. Le gouvernement, avec la collaboration de l’UAW, a été le fer de lance de la réduction des salaires durant les faillites forcées et la restructuration de General Motors et de Chrysler en 2009.

La course vers le bas des salaires et des conditions de travail se produit à présent à un niveau mondial. Garrot, de la CGT, a indubitablement rejoint la course. Le titre de l’article du 22 septembre publié par l’Humanité résume la position de la CGT : « Montupet doit faire les investissement pour nous remettre dans la course. »

La perspective de la CGT pour Fonderies du Poitou se limite à une tentative de sauver cette usine en dehors d’une lutte pour l’unification des travailleurs automobiles en Europe et mondialement contre les groupes géants. La futilité d’une telle approche contredit les termes hypocrites de l’appel du 21 septembre de la CGT, appel à soutenir le rassemblement de jeudi à Diors. « Il est urgent de faire échec aux mises en concurrence et aux oppositions entre sites, qui sacrifient l’industrie automobile et l’emploi. » L’appel pose la question suivante : « Qui peut croire que le plan de compétitivité, dont l’objectif est de faire baisser les salaires de 25 pour cent s’arrêtera à Châtellerault [où est située l’usine] ? »

Le communiqué de la CGT continue par des sous-entendus chauvins à l’adresse des travailleurs des usines Montupet hors de France : « Les fonds publics ne peuvent servir à financer des délocalisations. »

L’appel de la CGT conclut en exigeant la réintégration de Fonderies du Poitou dans le groupe Renault et ce bien que le syndicat soit parfaitement conscient que Renault est aussi en train de recourir à un exercice de réduction des coûts qui impliquera « des fermetures de sites, des suppressions d’emplois, des attaques sur les salaires. »

Le gouvernement détient 15 pour cent des parts de Renault qui a été privatisé en 1996. Le comité intersyndical a écrit une lettre au président Nicolas Sarkozy lui demandant de soutenir cette demande et d’user de son influence chez Renault pour inciter Montupet à abandonner le plan de compétitivité. Le comité a aussi entrepris des démarches auprès de l’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Les syndicats affirment que le manque de pièces affecte gravement Renault.

Juste après le rassemblement de jeudi à Diors, les représentants du comité ont rejoint une réunion tripartite organisée sous l’égide du préfet avec le PDG de Montupet, Stéphane Magnan. Europe1 a rapporté les commentaires de Garrot : « Ça a échoué, Magnan ne veut pas retirer son plan. On a discuté presque quatre heures pour nous faire tourner en rond et à la fin il dit ‘je ne retire pas le plan.’ » Les travailleurs continueront de faire grève et de bloquer le site d’Ingrandes lundi.

Un incident étrange, illustrant l’étroite collaboration des syndicats avec l’Etat et les employeurs, s’est produit jeudi vers midi. La CGT avait regroupé les manifestants devant les grilles assez frêles de l’usine, en chantant l’« Internationale », puis elle a ouvert les grilles et commencé à faire circuler les manifestants dans la vaste usine déserte en insistant avant tout pour dire qu'il ne fallait pas toucher aux « outils de travail. » Aucun policier n’était présent et les propriétaires de l'usine étaient apparemment pleinement convaincus que la CGT serait en mesure de contrôler ses troupes, tout comme en était convaincu le chef de la police, en l’occurrence le préfet.

Une équipe de reporters du WSWS a distribué l’article France: Grève dans l'industrie automobile contre une baisse de salaire de 23 pour cent . Ils ont discuté des implications internationales de la lutte et de la faible mobilisation du soi-disant appel national lancé par la CGT pour soutenir le rassemblement, dépassant à peine le contingent de Fonderies du Poitou. Personne n’a été capable de citer un seul autre site ayant débrayé en solidarité.


Mikaël

La crainte des bureaucrates de la CGT de toute critique de leur perspective nationaliste et le pouvoir bien précaire qu’elle exerce sur les travailleurs a été révélée par le fait qu’une demie heure après avoir chanté l’« Internationale », la CGT attaquait l'unique force luttant pour une perspective internationaliste et socialiste présente à la manifestation.

Vers 12 heures 30, un groupe de responsables de la CGT portant ostensiblement leurs badges syndicaux et ne maîtrisant plus les effets de l’alcool ont entamé une discussion en prévenant agressivement les partisans du WSWS de partir faute de quoi ils auraient à faire à des militants de la CGT. Désignant le tract du WSWS, l’un d’entre eux a dit : « Vous dites que Bernard Thibault travaille avec Sarkozy. Vous venez ici pour semer le trouble. » Il a tenté en vain de s’emparer des tracts du WSWS.

Mikaël travaille depuis 13 ans à Fonderies du Poitou. Il a dit au WSWS : « Les conditions deviennent de plus en plus dures. L'action d’aujourd’hui ne suffit pas. Les syndicats sont responsables de cela. Nous devrions tous lutter ensemble ; J’espère qu’un jour ce sera le cas. L’avenir me fait peur. »


Bernard

Bernard, 51 ans, a 25 d’ancienneté à Fonderies du Poitou, il a dit être un militant de la CGT mais sans être adhérent. Il a fait état des conditions difficiles. Nombre de travailleurs ont dû subir un traitement pour des problèmes aux mains en raison du travail répétitif. « Deux hommes font actuellement le travail de quatre. Le directeur des ressources humaines nous convoque sans arrêt pour nous pousser à travailler plus. On l’a pris très mal en 2010 avec la défaite de la lutte pour les retraites.

« Je ne pense pas que Renault nous prenne sans une réduction des salaires. Je ne pense vraiment pas que c’est la solution. Si nos salaires sont réduits, la vie sera impossible. Les travailleurs ne seront plus en mesure de rembourser leurs prêts, ils ne seront plus en mesure de bénéficier de prêts. »

Anthony, électricien travaillant depuis trois ans à Fonderies du Poitou, a fait état de nombreux cas de maladie pulmonaire en disant qu’il y avait eu au cours de ces cinq ou dix dernières années, plusieurs cas de cancer causés par les conditions de travail dans l’usine. « S’ils réduisent nos salaires, je préfère être licencié. »

(Article original paru le 3 octobre 2011)

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