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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

L'ancien directeur du FMI accusé de délit sexuel

Par Kumaran Ira
3 avril 2012

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Lundi dernier, l'ancien directeur du Fonds monétaire international (FMI) Dominique Strauss-Kahn a été mis en examen pour « complicicité de proxénétisme aggravé en bande organisée. » Le « recel d'abus de bien social », autre chef de mise en examen, n'a lui pas été retenu dans l'affaire dite du Carlton de Lille.

Il avait été interrogé deux jours durant, le mois dernier, sur des questions préliminaires concernant son rôle dans l'affaire. L'affaire avait éclaté en octobre dernier peu après qu'un juge de New York eut prononcé un non-lieu sur des accusations de viol fabriquées, portées contre Strauss-Kahn en mai 2011 par Nafissatou Diallou, une femme de chambre du Sofitel.

L'allégation contre Strauss-Kahn comprend le lien qu'il entretenait avec un « réseau de prostitution » et le fait d'avoir eu des relations avec des prostituées que des chefs d'entreprises de sa connaissance auraient payées en détournant des fonds de leurs sociétés. Selon les juges qui ont interrogé Strauss-Kahn, les prostituées interrogées dans l'affaire ont dit avoir eu des relations sexuelles avec Strauss-Kahn en 2010 et 2011dans un hôtel de luxe à Paris, dans un restaurant de la capitale française et aussi à Washington D.C, où il vivait lorsqu'il travaillait pour le FMI basé à Washington.

Strauss-Kahn a nié les accusations portées contre lui, disant qu'il ignorait que les femmes qu'il avait rencontrées lors de ces soirées à l'hôtel Carlton de Lille, ou à Paris et Washington, étaient des prostituées.

L'un des avocats de Strauss-Kahn, Henri Leclerc a dit à la presse: « Ce dossier est creux, vide, surfait. » Il a ajouté, « Si un homme qui couche avec plusieurs prostituées est proxénète, alors il faudra mettre en examen un paquet de monde. »  

Richard Malka, autre avocat de Strauss-Kahn a dit que son client déclare, « Avec la plus grande fermeté n'être coupable d'aucun des faits qui lui sont reprochés et n'avoir jamais eu la moindre conscience que certaines femmes rencontrées lors de soirées libertine à Paris ou Washington pouvaient être des prostituées. » Il a ajouté, « Le fait d'avoir une relation avec une escort ne constituerait pas une infraction et relèverait d'un comportement privé parfaitement licite. »

Strauss-Kahn a dû payer une caution de 100 000 euros pour rester libre. Il lui est interdit d'entrer en contact avec les témoins du dossier et d'autres personnes impliquées dans l'affaire. Il lui est aussi interdit d'évoquer l'affaire dans la presse. Il encourt jusque 20 ans de prison et une amende de trois millions d'euros en cas de condamnation. Huit autres personnes sont impliquées dans cette affaire de prostitution, dont deux hommes d'affaire et un commissaire de police.

Il est impossible de comprendre les accusations à l'encontre de Strauss-Kahn si l'on ne les relie pas au contexte de l'élection présidentielle qui se tiendra dans trois semaines. L'impopulaire président sortant Nicolas Sarkozy cherche à remonter dans les sondages, en exploitant les relations étroites qu'il entretient avec la police et les services du renseignement pour manipuler l'opinion publique durant les dernières semaines précédant l'élection. Ceci apparaît tout à fait clairement, notamment dans la manière dont le gouvernement de Sarkozy a réagi lors de la récente vague de fusillades à Toulouse.

Après la fusillade de sept personnes dont le coupable présumé est Mohamed Merah, le gouvernement Sarkozy a orchestré une campagne médiatique sur les thèmes de la sécurité et de la police pour faire basculer la campagne électorale à droite. Hollande qui s'est rangé sur ce thème risque de voir s'effondrer son soutien. Des reportages sur les liens étroits que Merah entretenait avec les services du renseignement français soulèvent cependant des questions sérieuses sur le rôle de l'Etat dans cette affaire. (Voir: Reports indicate Toulouse gunman was French intelligence asset.)

Les accusations inhabituellement graves portées contre Strauss-Kahn, pour des actes qui sont loin d'être inhabituels au sein de l'aristocratie financière, font le jeu de cette campagne de mauvais coups de Sarkozy qui cherche à obtenir un second mandat.

Avant que Diallo ne l'accuse de viol, Strauss-Kahn était le candidat du Parti socialiste (PS), parti de la « gauche » bourgeoise, le plus à même d'obtenir la nomination pour représenter le PS à la présidentielle. Suite à cette affaire, le PS a choisi François Hollande, un candidat plus faible et  moins influent, pour rivaliser avec Sarkozy.

Peu après que Strauss-Kahn eut été acquitté des accusations de viol, des preuves ont émergé révélant que des représentants du gouvernement de Sarkozy étaient fortement impliqués dans l'inculpation de Strauss-Kahn à New York. Un long article détaillé du journaliste d'investigation Edward Jay Epstein fut publié dans le  New York Review of Books en novembre dernier.

Epstein fait remarquer que lorsque John Sheehan, responsable de la sécurité à l'hôtel Sofitel, avait été alerté sur le « viol » en question, il avait appelé un numéro d'Accor, l'entreprise française propriétaire de Sofitel, commençant par l'indicatif régional 646. Le patron de Sheehan à Accor, René-Georges Querry est un ancien chef de cabinet à la Direction générale de la police nationale qui, écrit Epstein, « a travaillé en étroite collaboration dans la police avec Ange Mancini qui est à présent le coordinateur  du renseignement auprès de Sarkozy. » (Voir: Un article jette une nouvelle lumière sur la fabrication d'accusations contre Strauss-Kahn )

Un représentant de l'UMP (Union pour un mouvement populaire), parti de Sarkozy a dit à la presse: « Si DSK ne s'était pas fait pincer avec Nafissatou Diallo, il aurait certainement été désigné au moment de la primaire. » Le représentant a essayé d'utiliser ce fait pour  minimiser l'impact de l'affaire du Carlton en disant: « L'affaire du Carlton de Lille aurait explosé en pleine campagne et, là, ça changeait tout. » Mais son commentaire initial souligne les calculs politiques qui sous-tendent les procès contre Strauss-Kahn.

 Après l'inculpation de Strauss-Kahn, Le Parisien a écrit, «Le chef de l'Etat jubilait. 'Il y a combien d'étapes dans le chemin de croix?' s'interrogeait-il avec gourmandise. »  

La réaction des représentants du PS face aux accusations portées contre Strauss-Kahn a été une une réaction de capitulation lâche: Ils n'ont ni défendu leur ancien ministre ni essayé de démasquer les motivations politiques derrière ces accusations. Hollande a dit que l'affaire du Carlton était «une affaire privée, pénible mais sur laquelle je n'ai pas de jugement politique à formuler. »

Quand on lui a demandé si l'affaire allait entacher la campagne du PS, le directeur de campagne de Hollande a répliqué de manière absurde: «Chacun voit que ça n'a rien à voir avec le Parti socialiste. »  

En fait, que Sarkozy ait pu changer le climat politique à l'aide de scandales sexuels et d'une rhétorique sécuritaire en dit long sur le PS. Le PS n'est ni capable ni ne veut rassembler l'opposition populaire à Sarkozy car il fait essentiellement campagne sur la même plateforme: les coupes budgétaires, la rhétorique anti-immigration et le soutien aux guerre conduites par les Etats-Unis et l'OTAN. C'est ce qui permet à Sarkozy de faire avancer sa campagne en essayant d'attiser l'hystérie sur la morale individuelle de divers politiciens bourgeois.

 

(Article original publié le 31 mars 2012)

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