Le
gouvernement français, inquiet de la déstabilisation du Mali après le coup
militaire du 22 mars qui a renversé le président Amadou Toumani Touré (ATT)
laisse entendre qu'il soutiendra une action militaire pour écraser la révolte.
La
révolte malienne s'est développée parmi des officiers subalternes et des
soldats mécontents de se battre contre des combattants touareg bien armés
entrant au Mali par la Libye où ils avaient combattu pour défendre le régime de
feu le colonel Muammar Kadafhi. Selon la BBC, ce coup militaire jouit d'un
certain soutien populaire dans le sud du pays, où il y a eu « peu de signe
de condamnation du coup. »Peu après le coup, la Commission européenne a annoncé
la suspension des programmes de développement pour le Mali.
RTBF
(Radio-Télévision belge francophone) fait état d'une manifestation à Bamako,
capitale du Mali, en soutien à la révolte de l'armée. Sur les pancartes et
banderoles on pouvait lire «A bas ATT », « A bas la France, »
« A bas la communauté internationale. »
Le
1er avril, lors du sommet des chefs d'Etat de la Communauté économique des
Etats d'Afrique de l'ouest (la CEDEAO) conduit par le président de la Côte
d'Ivoire Alassane Ouattara, des discussions ont eu lieu sur les événements du
Mali. Ouattara avait pris le pouvoir l'an dernier avec le soutien de l'armée
française durant une brève guerre civile qui avait renversé le président
Laurent Gbagbo. Ce sommet a demandé que les soldats rebelles retournent dans
leur caserne et a menacé, s'ils ne le faisaient pas, d'appliquer un
« embargo total » et de mettre en place une force de frappe militaire
de près de 2 000 hommes prêts à intervenir.
Sanogo,
qui est à la tête de ce coup militaire, a promis de réunir « une
convention nationale » sous les auspices de la CEDEAO pour organiser le
retour au régime constitutionnel.
Ont
participé à ce sommet, ouvert par Ouattara, une dizaine de chefs d'Etat et
représentants des Nations-Unies, de la France et des Etats-Unis, notamment
Yayi Boni, chef d'Etat du Bénin et président de l'Union africaine, Saïd
Djinnit, représentant les Nations-Unies en Afrique de l'ouest, et Alain Juppé,
ministre français des Affaires étrangères.
Juppé
a déclaré: « La situation se dégrade très rapidement ...nous pouvons aider sur
le plan logistique ou la formation, mais il n'est pas question de mettre des
soldats français sur le sol du Mali. »
Ouattara a ajouté que la CEDEAO
utilisera « Tous les moyens pour stopper cette rébellion et [faire en
sorte] que le Mali retrouve l'intégrité de son territoire. C'est un devoir pour
la sous-région. »
Le site RTBF de la
Radio-Télevision belge a dit hier : « La France a saisi le conseil de
sécurité de l'ONU. On se demande comment intervenir pour, à la fois empêcher la
partition du pays tout en faisant d'éventuelles concessions à la rébellion
touareg autonomiste, lutter contre les islamistes et faire plier la junte à
Bamako. »
La
porte-parole du Département d'Etat américain Victoria Nuland a commenté:
« Les Etats-Unis appellent de toute urgence tous les rebelles de l'armée
dans le nord du Mali à cesser les opérations militaires qui compromettent
l'intégrité territoriale de la République du Mali. »
Il semble que la France et ses intermédiaires
d'Afrique de l'ouest profitent de cette occasion pour renforcer leur présence
militaire dans la région. En juillet 2010, la France avait saisi l'opportunité
de rapports faisant état de l'exécution d'un humanitaire français par Al Qaïda
au Maghreb islamique (AQMI) pour accroître son intervention militaire dans ses
anciennes colonies de la région stratégique du Sahel en Afrique de l'ouest.
(Voir: Paris
saisit l'occasion de l'enlèvement au Niger pour semer la panique de la
« guerre contre le terrorisme »
Paris
s'inquiète particulièrement de ce que le coup militaire du 22 mars mené par le
capitaine Amadou Haya Sanogo n'ait ouvert la voie à une offensive militaire
touareg, laquelle s'est emparée de tout le nord du Mali. Les forces
séparatistes touareg avec la milice liée à Al Quaïda ont pris plusieurs villes
des régions désertiques du nord et se sont finalement emparées de Tombouctou
lundi après une opération militaire de 48 heures. Ils n'ont rencontré quasiment
aucune résistance de la part de l'armée malienne.
La
principale force nationaliste touareg, le Mouvement de libération nationale
Azwad (MLNA) se serait allié à AQMI pour conquérir les villes du nord. Mais les
islamistes souhaitent à présent expulser le MLNA de plusieurs villes, afin
d'instaurer la loi de la Sharia dans les zones qui sont sous leur contrôle. Des
reportages de RTBF disent que «Selon
plusieurs sources, ils ont pris le pouvoir à Tombouctou. Le MLNA est laïc et
veut l'autonomie du Nord du Mali et ne souhaite pas un régime islamiste. »
Le Mali, ancienne colonie française avait pris
son indépendance en 1960, mais la France a lutté pour maintenir son hégémonie
au Sahel. La rébellion séparatiste a commencé dans les années 1990. Les Touaregs,
peuple nomade comptant quelque deux millions de personnes, sont les habitants
historiques de la région du Sahel dans une zone étendue traversant l'Algérie,
le Burkina Faso, la Libye, le Mali, la Mauritanie et le Niger.
Le Mali arrive au 175e rang mondial en terme de
richesse, mais les régions du nord où vivent les Touaregs n'ont pas eu leur
part du développement même limité dont jouit le sud du Mali où est située la
capitale Bamako.
L'uranium
de la région est d'un intérêt crucial pour l'impérialisme français. L'industrie
nucléaire française, qui fournit 78 pour cent de la capacité de production
d'électricité du pays et fait des profits annuels d'au moins 3 milliards
d'euros, compte sur le Niger pour 25 pour cent des 12 400 tonnes de concentré
d'oxyde d'uranium qu'elle consomme chaque année.
L'entreprise publique française d'énergie
nucléaire, Areva exploite ces réserves d'uranium depuis 40 ans. Elle a investi
1,2 milliards d'euros dans le dépôt d'Imouraren qui devrait produire près de 5
000 tonnes par an durant plus de 35 ans.