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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le Socialist Workers Party de Grande-Bretagne cherche à dissimuler un changement de régime impérialiste en Syrie

Par Chris Marsden
20 février 2012

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La première réponse de Washington, Londres et de Paris aux soulèvements révolutionnaires en Tunisie et en Egypte avait été une campagne préventive pour un changement de régime en Libye, par le biais de mandataires locaux dont la tâche était de préparer le terrain à une intervention militaire. Ce scénario est en train de se répéter en Syrie.

Il incombe à diverses tendances, jadis de gauche, de dissimuler ces préparatifs derrière un soutien aveugle à l’opposition syrienne, en niant vigoureusement que sa direction soit en aucune manière le serviteur politique de Washington. Le Socialist Workers Party (SWP) de Grande-Bretagne est typique en la matière. Son rôle n’est rendu plus important que par l’importance relative de sa taille et par le fait qu’il dispose d’une organisation soeur en Egypte, les Socialistes révolutionnaires.

En écrivant le 7 janvier dans le Socialist Worker, Simon Assaf a fait valoir qu’alors qu’« il est clair que les puissances occidentales espèrent profiter de la disparition d’Assad », et qu’« on a pu craindre une ingérence occidentale lorsque la Ligue arabe a rejoint la campagne internationale pour des sanctions contre la Syrie, » aucun danger de ce genre n’existe en fait ! Au contraire, « l'idée que les Syriens ordinaires qui luttent pour un changement dans leur pays sont les laquais d’un ‘complot occidental’ est absurde » et «en fait, la Ligue arabe cherche à lancer une bouée de sauvetage au régime. »

C’est la position d’Assaf concernant la Ligue arabe qui est tout à fait absurde eu égard à l’étroite collaboration de cette organisation avec les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, d’abord en Libye et à présent en Syrie. Elle est actuellement présidée par le Qatar dont l’émir veut envoyer des troupes arabes en Syrie afin de passer une corde autour du cou d’Assad et non une bouée de sauvetage. De plus, ce ne sont pas les « Syriens ordinaires » dont il s’agit ici, mais du Conseil national syrien (CNS), de l’Armée syrienne libre (ASL) et d’autres organisations entretenant des liens étroits avec Washington et les puissances régionales telle la Turquie.

Tout au long des événements tumultueux qui se sont déroulés au Moyen-Orient, la ligne politique du SWP a été en conformité avec les intérêts des puissances impérialistes et s'est opposée à toute action indépendante de la classe ouvrière qui puisse menacer leurs mandataires locaux.

En Egypte, le groupe des Socialistes révolutionnaires a formé une alliance politique avec les groupes libéraux et islamistes. Ceci a servi à discréditer le socialisme de par son association avec les représentants profondément discrédités de la bourgeoisie comme Mohamed El-Baradei tout en renforçant la position des Frères musulmans et des Salafistes qui dominent à présent le gouvernement post Moubarak en alliance avec l’armée.

En Libye, le SWP a souligné que l’opposition du Conseil national de transition (CNT) était constituée de deux ailes, l’une révolutionnaire et l’autre pro-occidentale. Ceci lui a permis de prêter un plein appui au CNT qui était dominé par les piliers de l’ancien régime Kadhafi, les agents de la CIA et les Islamistes tout en se présentant comme les adversaires de l’intervention occidentale – alors même que le CNT fournissait le mécanisme par lequel l’OTAN avait conduit sa guerre en vue d’un changement de régime. Jusqu'à ce jour, il justifie encore l’appel du CNT en faveur d’une intervention de l’OTAN comme étant une réponse populaire de la part de la « révolution ». Assaf écrivait le 12 janvier 2012 dans International Socialism, « Pour survivre, la révolution libyenne avait besoin d'un soutien pratique immédiat de la part de ses voisins… Assiégés, les révolutionnaires n'avaient guère d'autre option que de s’en remettre à l’Occident. Malgré la position du CNT qu’il ne devrait y avoir aucune ingérence étrangère, il fut obligé de réclamer des sanctions internationales, une zone d’exclusion aérienne, puis des frappes aériennes, pour essayer d’arrêter l’offensive de Kadhafi.

La ligne du SWP concernant la Syrie poursuit ce bilan contre-révolutionnaire. Mais le caractère pro-impérialiste évident de la direction du mouvement d’opposition ainsi que l’expérience tirée de la Libye nécessitent les nombreuses dérobades et autres propos ambiguës utilisés par le SWP pour masquer le fait qu’une opération similaire est en train de se monter contre le régime d'Assad.

Pendant des mois, le SWP n’a pas rédigé la moindre formule creuse sur le CNS et l’ASL et a ignoré leurs liens bien documentés avec les Etats-Unis, l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie. Le 3 novembre, le Socialist Worker écrivait au sujet de l’ASL et du CNS, « Des milliers de transfuges de l’armée régulière syrienne ont constitué l’Armée syrienne libre (ASL) et ont lancé des opérations militaires pour protéger les civils face au régime des forces de sécurité. Jusqu'ici, il n’existe pas de liens officiels entre l’ASL et les organisations civiles de la révolution, tels les Comités de Coordination, la Commission générale de la révolution syrienne et le Conseil national syrien (CNS) » (italiques ajoutés.)

Ce n’est que le 15 novembre que le SWP a prévenu du danger que la révolution « soit prise en otage – non seulement par l’Occident, mais par la Turquie, l’Arabie saoudite et la Jordanie, » Mais, en même temps il a chanté les louanges de l’ASL, organisation basée en Turquie et armée par l’Arabie saoudite, la Jordanie et le Qatar, comme protecteur des civils contre le régime.

Le 13 décembre, dans un bref compte-rendu, il fait remarquer « Certains, au sein du CNS, voudraient négocier un règlement avec les couches plus anciennes de la classe dirigeante. » Mais, ce n’est que dans l’article d’Assaf du 7 janvier cité précédemment qu’il reconnait pour la première fois que « L’apparition de l’Armée syrienne libre et du Conseil national syrien (CNS) d’opposition constituent un dangereux développement »

Malgré cela, il identifie le danger de la direction de l’opposition, constituée par des forces pro-impérialistes préconisant une intervention militaire occidentale, comme n’étant qu’« un défi à la direction révolutionnaire populaire au sein des Comités de coordination locaux, (CCL). »

Dans une évaluation du 7 février des groupes représentant l’opposition, le CCL est qualifié de « direction sur le terrain » et d’organisation « de base » qui « a lutté pour le maintien de son indépendance. »

Loin de représenter un danger, l’ASL est redevenu le défenseur des « quartiers face aux forces de sécurité très redoutées » en est félicitée pour son travail « de coordination avec le CCL. »

Seul le CNS est décrit négativement comme « se composant d’exilés, de groupes pro-occidentaux et d’initiés de [l’ancien] régime, » tandis que « l’ASL a gardé ses distances par rapport au CNS »

« De nombreux partisans du régime syrien ignorent les divergences entre le CNS soutenu par l’occident et la direction sur le terrain du CCL, » conclut-il, calomniant quiconque écrit honnêtement sur l’ASL ou le CCL en les décrivant comme des défenseurs du brutal régime d’Assad.

Dans un article daté du 4 février, Siân Ruddick est plus explicite dans ses dénonciations en prévenant que « Certains disent que la résistance fait partie d’un ‘complot’ de l’Occident ou qu’une victoire du mouvement aidera l’impérialisme occidental. Ce sont là des arguments dangereux. »

Le danger en question concerne ceux qui préconisent un changement de régime soutenu par l’Occident – ou comme le SWP, qui sont déterminés à dissimuler leur soutien à un tel résultat.

Le SWP est déterminé à blanchir l’ASL et à renforcer le CCL en tant que soi-disant contrepoids au CNS pro-impérialiste.

En fait, l’ASL a annoncé le 1er décembre 2011, qu’elle coordonnerait ses activités avec le CNS. Et, si le CCL est en train de lutter pour le maintien de son indépendance par rapport au CNS, alors il ne se bat pas très fort.

Le 20 septembre déjà, le CCL avait publié un communiqué proclamant son soutien au CNS « et sa décision de former un conseil politique général comprenant la majorité des tendances politiques et révolutionnaires. »

« Nous soutenons le CNS, malgré nos observations concernant le travail du Conseil, la manière dont il a été formé et les forces qui y sont représentées, » est-il ajouté (italiques ajoutés).

Le CCL n’est pas opposé à une intervention occidentale. Il avait publié un communiqué le 5 novembre disant que, compte tenu « des violations sérieuses et systématiques des droits humains et de la loi internationale » en Syrie, il a présenté ses « vues sur la nécessité d’une décision internationale quelle qu'elle soit pour mettre fin à de telles violations. »

La déclaration est une supplique pitoyable qu’une intervention fondée sur la loi de la « responsabilité de la protection » de l’ONU « ne devrait pas gêner l’aspiration du peuple syrien à réaliser un changement pacifique par ses propres moyens ; ou conduire à considérer le peuple syrien comme étant une sphère d’influence de plus dans le grand jeu des nations. »

Sa liste d’exigences à l’adresse de l’Occident comprend la garantie « de la sécurité de réunion et de manifestation pacifiques, » « la sécurité pour la circulation de toutes les agences humanitaires des Nations Unies » partout en Syrie et une enquête sur les « crimes contre l’humanité » afin d’engager des « poursuites devant la Cour pénale internationale », suivie par une « transition démocratique » et « une aide à la formation et au renforcement des capacités des forces armées et des services de sécurité syriens. »

Tout ceci équivaut à la mise en place d’un régime soutenu par l’Occident et qui ne peut être accompli que par un déploiement militaire, quoiqu’en dise le CCL.

A ce sujet, le 21 octobre, le CCL publiait une déclaration félicitant « la révolution du peuple frère de Libye » pour avoir mis un terme « à l’ère Kadhafi de son histoire d’oppression, de tyrannie, de corruption et d’injustice. »

Cette apologie de la « troisième grande victoire de la révolution arabe » ne dit mot sur la façon dont la chute de Kadhafi a été garantie, ni sur la nature du régime établi sous la haute main de l’OTAN.

Le CCL est une tendance petite bourgeoise qui plaide en faveur d’un remplacement du régime Assad par un gouvernement bourgeois démocratique. Ce n’est pas une direction révolutionnaire pour la classe ouvrière syrienne. Le SWP en est conscient, et c’est pour cela qu'il n’a pas une seule fois cherché à déterminer son caractère de classe ni celui de n’importe quelle force existant au sein de l’opposition.

Le SWP n’a pas une seule fois analysé le rôle joué par les Frères musulmans en Syrie. Les Frères musulmans sont non seulement la force dominante au sein du CNS, mais ils disposent aussi d’une importante présence locale au sein d’une opposition qui a pris le caractère d’une insurrection sunnite concentrée dans ses bastions traditionnels et axée sur les mosquées.

Un article favorable à l’opposition et publié le 11 février dans le magazine Time montre ce que le SWP tente de dissimuler. Dans un compte rendu d’une réunion en Turquie de « rebelles issus du Nord de la Syrie, » il fait état des plaintes d’Abu Hikmat :

« Nous avons besoin d’argent pour des fournitures. L’opposition qui dispose de cet argent ce sont les Frères mulsulmans, [le cheikh religieux radical sunnite Adnan basé en Arabie saoudite] Arour, et le commandement de l’Armée syrienne libre. »

Un autre opposant, un médecin et apparemment un ancien partisan des Frères musulmans réplique, « [T]out le monde sait que [le commandant de l’ASL basée en Turquie] Riad al-Asaad est contrôlé par les Turcs », alors que les Frères musulmans « comptent sur un affaiblissement de la révolution pour arriver à bord de tanks étrangers. »

Le SWP n’a nullement l’intention de s’opposer à la guerre contre la Syrie. Ceci ne ferait qu'entraver les relations avec les diverses forces petites bourgeoises sur lesquelles il est fondé, des forces qui sont utilisées par la campagne de propagande médiatique hystérique menée par l’impérialisme. Ses dérobades, ses demi-vérités et ses mensonges sont une duperie consciente de la classe ouvrière. Le SWP désarme ces travailleurs et ces paysans opprimés de Syrie qui s'opposent au régime brutal d’Assad, sur le sort qui leur est réservé ainsi qu’à tous ceux dans le monde entier qui sont en quête d’un changement révolutionnaire authentique au Moyen-Orient, en lieu et place d’un avortement de style libyen.

(Article original paru le 15 février 2012)

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