Un rapport du Bureau du journalisme
d'investigation (BJI) de Londres a établi que l'Agence de renseignements
extérieurs américaine, la CIA, a délibérément attaqué des sauveteurs et des
cortèges funéraires au cours de frappes secondaires qui suivaient des attaques
de drones contre des rebelles dans les zones tribales du Pakistan. Les faits
ont été rendus publics sur le site web du groupe et repris par le Sunday
Times de Londres.
D'après l'organisation, qui comprend des
journalistes britanniques et pakistanais, au moins 50 civils ont été tués au
cours des frappes secondaires pendant qu'elles tentaient de porter secours aux
victimes d'une frappe initiale de drones de la CIA. Des dizaines d'autres ont
été tuées par des frappes de missiles visant les funérailles de victimes des
attaques de drones.
En tout, le groupe a établi que « Depuis
qu'Obama est entré en fonction il y a trois ans, la mort d'entre 282 et 535
civils a été annoncée de manière crédible, dont celle de plus de 60 enfants. »
Les représentants du Pakistan et les travailleurs des associations humanitaires
ont annoncé un nombre bien plus élevé de décès dans les zones tribales du
Pakistan, allant jusque plusieurs milliers.
Parmi les cas de meurtres en masse détaillés
dans ce rapport, il y a :
- Le 16 mai 2009 : un drone américain a
frappé un groupe de militants talibans dans le village de Khaisor, tuant une
dizaine de personnes. Alors que les villageois sortaient les corps des
décombres, deux missiles supplémentaires ont frappé, portant le bilan à au
moins 29 morts.
- Le 23 juin 2009 : une frappe de la CIA
a tué Khwaz Wali Mehsud, un commandant taliban du Pakistan, et cinq de ses
compagnons. 5000 personnes se sont rendues aux funérailles organisées le jour
même. Des drones américains ont fait une nouvelle frappe tuant 83 personnes,
dont dix enfants.
- Le 17 mars 2011 : le jour qui a suivi
la libération par le Pakistan de Raymond Davis, contractuel de la CIA qui avait
été détenu durant deux mois pour avoir tué deux Pakistanais à Lahore, une
attaque de drones de la CIA a tué 42 personnes au Nord Waziristan, frappant ce
qui d'après un officier de l'armée pakistanaise n'était qu'une réunion tribale
pour résoudre un problème de propriété sur des terrains, et non un
rassemblement de talibans.
Les experts de droit international ont
caractérisé ces frappes secondaires de drones comme des crimes de guerre. Clive
Stafford Smith, qui a lutté pour la libération de nombreux innocents détenus à
Guantanamo, a déclaré au BJI que les frappes de drones « sont comme
attaquer la Croix-Rouge sur le champ de bataille. Ce n'est pas légitime
d'attaquer quiconque n'est pas combattant. »
Christof Heyns, rapporteur spécial des Nations
Unies sur les exécutions extrajudiciaires, a déclaré au groupe : « Les
allégations de frappes secondaires arrivant après une demi-heure, lorsque les
équipes médicales sont sur les lieux, sont très inquiétantes. Viser des civils
constituerait un crime de guerre. »
En programmant les frappes secondaires pour
qu'elles tuent des gens venus aider les victimes d'une première explosion, la
CIA a employé une tactique que les représentants américains ont régulièrement
dénoncée comme étant du « terrorisme » lorsqu'elle était pratiquée
par les rebelles pendant la guerre en Irak. De telles attaques sont
délibérément menées pour infliger un maximum de pertes à la population civile.
Le gouvernement Obama a été atteint par le
rapport du BJI. En effet ce rapport a été publié quelques jours seulement après
qu'Obama a dit au cours d'un forum sur YouTube, dans un commentaire largement
diffusé, que « Les drones n'ont pas causé un grand nombre de pertes parmi
les civils. » Il a décrit ces frappes comme « un effort ciblé,
précis, contre des gens qui figurent sur une liste de terroristes actifs. »
Le New York Times, dans son compte-rendu de l'intervention, a cité « un
responsable de haut niveau de l'antiterrorisme américain » qui accusait
ceux qui rendaient publique la réalité des meurtres de masse américains au
Pakistan d'être « des éléments qui n'aimeraient rien de mieux que discréditer
ces efforts et d'aider Al Quaïda à gagner. »
Ce commentaire revient à une menace de mort
contre les journalistes impliqués et leurs sources d'informations, les dénigrant
comme des soutiens d'Al Quaïda. En citant cette déclaration sans mentionner le
nom du responsable, le Times se rend complice de cette menace de
représailles.
Ce rapport du BJI est une preuve de plus que
les officiels du gouvernement Obama, du Pentagone et de la CIA devraient être
poursuivis en justice pour crimes de guerre devant un tribunal international.
Les atrocités commises durant ces frappes de
drones ne sont pas des aberrations, elles démontrent en fait la nature profonde
de l'intervention américaine en Afghanistan et au Pakistan, qui en est à sa
onzième année. L'appareil militaire et de renseignements des États-Unis,
soutenu par ses alliés de l'OTAN, est engagé dans une guerre impérialiste
barbare contre les masses opprimées des deux côtés de la frontière.
Les travailleurs aux États-Unis et partout
dans le monde doivent exiger le retrait immédiat de tous les soldats américains
et de l'OTAN, du personnel des services de renseignement et des contractuels
militaires d'Afghanistan et du Pakistan et mettre fin à la politique américaine
qui consiste à faire pleuvoir la mort et la destruction sur des gens innocents
et sans défense.