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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

La « gauche » petite-bourgeoise française et la montée du vote néo-fascisme

Par F. Dubois
1 février 2012

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La campagne pour l’élection présidentielle de 2012 en France a vu les candidats des deux partis bourgeois ayant assumé le pouvoir en alternance ce dernier quart de siècle, le parti conservateur UMP (précédemment RPR) et le Parti socialiste (PS), talonnés dans les sondages par le parti néofasciste Front national (FN).

Ce parti était arrivé second au premier tour de l’élection présidentielle de 2002 devant le candidat du PS, le premier ministre alors en exercice, Lionel Jospin. Cela avait produit une crise politique sérieuse entre les deux tours, où la jeunesse en particulier s´était mobilisée contre le FN. Tous les partis de la « gauche » officielle, ainsi que la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) petite-bourgeoise qui a mis sur pied le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) en 2009, avaient soutenu le candidat droitier Jacques Chirac, le président en exercice, face au candidat néofasciste, Jean-Marie Le Pen.

Il y a une réelle possibilité que le FN obtienne un nombre de voix lui permettant d’influencer directement la formation du prochain gouvernement. Ce parti a récemment adopté comme un de ses principaux slogans la « défense de la laïcité ». Il a profité du fait que tous les partis, de droite comme de « gauche », ont cyniquement enfourché ce slogan pour des campagnes anti-islamiques, et des attaques contre les droits démocratiques telles que l’interdiction de la burqa—une mesure discriminatoire et donc anti-laïque.

La principale responsabilité de cette situation incombe aux partis de la « gauche » bourgeoise, aux syndicats, et à la pseudo-gauche petite-bourgeoise.

Le NPA y joue un rôle particulièrement nocif. La réaction du NPA aux néofascistes se caractérise d’abord par une complète démoralisation, et cela à plusieurs titres. Le NPA est un parti marqué depuis ses débuts par une orientation vers la bureaucratie syndicale et des couches de la petite bourgeoisie et, par conséquent, par une totale absence de confiance dans la classe ouvrière. Sa démoralisation est profondément ancrée dans sa politique.

Le principal message du NPA à ce sujet est qu’il n’y a rien que la classe ouvrière puisse faire pour lutter contre une avancée des néofascistes et qu’il n’y a pas d’alternative à gauche.

Il dit en gros que puisque la candidate du FN, Marine Le Pen, est la plus démagogique, elle arrive à convaincre les ouvriers qui souffrent de la crise : « Le FN pousse jusqu’au bout cette démagogie tout en prétendant se faire le porte-parole des classes populaires. La ‘foire aux impostures’ qu’est la campagne des grands partis….. profite à l’imposture la plus cynique, celle qui, sans vergogne, flatte tous les préjugés. Marine Le Pen dame le pion à Sarkozy » (Journal du NPA, Tout est à nous, 19 janvier 2012).

La conclusion démoralisée et fausse qui découle d’une pareille analyse est que comme de plus en plus d’ouvriers souffrent de la crise, Le Pen aura de plus en plus de succès.

Voici comment son candidat à la présidentielle, Philippe Poutou décrit son rôle: « Il faut qu'on rame pour retrouver l'espoir de changer les choses! Si le NPA n'a pas la possibilité de changer les choses par les élections, ce vote pourra servir pour demain pour redonner confiance ».  Ou encore : « Nous défendons l'idée qu'il faut se battre, mais les gens n'y croient plus, même s'ils partagent nos idées ». (Interview au quotidien Libération, 11 janvier) 

Tout ceci n’est qu’un amas de mensonges. C’est précisément à cause d’un mécontentement social aigu que les électeurs abandonnent l’UMP et le PS. Ce qu’il faut expliquer, c’est pourquoi ces mêmes électeurs ne « croient plus » au NPA comme outil pour « se battre » contre l’austérité sociale et la crise capitaliste mondiale. La raison est à chercher dans les actes et les perspectives du NPA comme du reste de la « gauche » petite-bourgeoise.

Le NPA a dans les faits défendu l'imposition de l'austérité sociale, le président Nicolas Sarkozy dans sa guerre en Libye et ses menaces contre la Syrie. Le NPA n’a mené aucune lutte contre la propagande « laïque » charriée par Sarkozy, le PS, le PCF, le FN et d’autres. Hostiles aux grèves ouvrières contre la réforme des retraites en France en 2010, ayant appelé seulement à une protestation « symbolique » contre leur répression par l’Etat, et hostile aux révolutions en Afrique du nord en 2011, il a servi d'outils à la réaction impérialiste. Ainsi a-t-il favorisé l'ascension du FN.

Après une pareille expérience, les travailleurs ont entièrement raison de ne pas avoir confiance dans le NPA.

La décision de la LCR de construire le NPA en 2009 en tant que parti explicitement non-trotskyste était un signal politique vis-à-vis de l’élite dirigeante. Hostile à la construction d’un parti marxiste révolutionnaire, le NPA voulait « rassembler » des forces dans les universités et la bureaucratie syndicale pour constituer une sorte de remplacement au Parti Communiste Français (PCF) discrédité par la chute de l’URSS. Ce parti aurait tenté de s’établir en tant que force électorale durable sur la « gauche » de l’échiquier parlementaire français, jouant sur une rhétorique héritée des étudiants des années 1970.

Ainsi le but essentiel de l’opération était d’élever une nouvelle barrière entre la classe ouvrière et la construction d’un parti fondé sur une perspective révolutionnaire.

Mais ce nouveau parti dont la LCR avait espéré qu’il constituerait à un pôle d’attraction n’a pas eu le succès escompté. Alors que les milieux politiques petit-bourgeois menaient de plus en plus ouvertement une politique hostile aux travailleurs durant la crise économique, les ouvriers n’ont pas vu le NPA—qui avait misé sur la popularité médiatique de son principal porte-parole, Olivier Besancenot—comme un outil de lutte.

Les médias eux aussi pour leurs propres raisons, s’en sont détournés. Il y a quelques mois, Besancenot s’est désisté comme candidat à la présidentielle.

Le nouveau candidat du NPA, Philippe Poutou, dit à qui veut l’entendre qu’il n’y a pas d’alternative à gauche, même pas lui. Tout ce que la LCR a réussi à faire est de faire remonter un peu le score du PCF et de son Front de gauche -- conduit par Jean-Luc Mélenchon, qui obtient à présent l’attention des médias – qui atteint à présent 7 pour cent dans les sondages, par rapport à son score de 2002, le plus bas de son histoire.

Incapable d’expliquer les raisons de sa propre défaite, le NPA impute à la classe ouvrière sa propre démoralisation : « Tout cela contribue à une démoralisation et à un sentiment d'impuissance. La préoccupation des gens, c'est avant tout de garder leur emploi et de boucler leurs fins de mois. Nous défendons l'idée qu'il faut se battre, mais les gens n'y croient plus, même s'ils partagent nos idées. C'est ce désespoir qui est récupéré par le Front national ». (Poutou dans Libération, le 19 janvier)

Il accuse encore les travailleurs de ne pas lutter et tente de leur faire porter la responsabilité de l’avancée des néofascistes : « Le Pen répète ‘Moi, je ferai’, cela parle aux gens qui ont besoin qu'on les prenne par la main parce qu'ils n'ont plus la force de se battre » (Poutou, Libération 19 janvier).

En fait, si des masses de travailleurs ne voient pas encore une perspective révolutionnaire, la responsabilité en incombe entièrement aux mensonges et à l’hypocrisie du NPA et des autres partis de la « gauche » bourgeoise. Le NPA ne mentionne une responsabilité des partis de la « gauche » officielle que parce qu’elle est devenue une évidence. Mais il le fait seulement pour cacher sa propre responsabilité dans cette situation, dans laquelle sa perspective politique se confond de plus en plus avec les partis de la « gauche » bourgeoise comme le PS.

Pour le NPA, « une perspective démocratique fondée sur la solidarité des peuples…. est la seule voie pour contrer la montée du populisme réactionnaire ». En fait, ceci ramène le NPA à la perspective d’un Europe capitaliste « démocratique », qui ne se distingue aucunement de l’Union européenne actuelle. Comme le dit le traité de constitution de l’Union européenne, Article 3: « L’Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples (…). Elle promeut la cohésion économique, sociale et territoriale, et la solidarité entre les États membres (…) ».

Ceci n’empêche pas le NPA d’appeler cyniquement sa perspective d’une Europe capitaliste de « l’internationalisme » !

La perspective du NPA n’a rien à voir avec l’internationalisme socialiste. Une telle perspective signifie au niveau européen l’instauration d’Etats socialistes unis d’Europe au cours de luttes communes de la classe ouvrière européenne, c'est-à-dire une union d’Etats ou la classe ouvrière a pris le pouvoir et où l’économie est réorganisée sur des bases socialistes.

Pour le NPA, l’Europe capitaliste est stable, la politique des néo-fascistes pas vraiment réalisable. Un effondrement de l’Union européenne n’entre pas dans ses vues : « Cette politique [celle de Le Pen] qui ne pourrait s’appliquer que dans le contexte d’un effondrement de l’Europe capitaliste, représenterait une régression dont les travailleurs et la population seraient les victimes ».

Ce dont les petits-bourgeois suffisants et à la vie confortable du NPA ne se sont manifestement pas rendu compte, c’est que l’Europe capitaliste s’effondre déjà sous nos yeux et que déjà les travailleurs en ont assez d’être les victimes des régressions négociées, avec l’aval du NPA, entre Sarkozy et les syndicats.

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