Le Parti de l'Egalité socialiste (Socialist
Equality Party, SEP) condamne l'action illégale du ministère de la Défense
d'interdire la réunion publique du parti qui était prévue le 29 janvier à
Jaffna. Cette décision est une attaque contre les droits démocratiques du SEP,
un parti légalement reconnu, de pratiquer une activité politique tout à fait
légitime et légale.
Des responsables du ministère de la Défense,
en compagnie de personnel militaire, s'étaient rendus à l'administration de la
salle Weerasingham Hall, le local réservé par SEP, pour leur ordonner de ne pas
autoriser la réunion. Près de trois ans après la fin de la guerre civile,
l'armée continue d'opérer comme une force d'occupation à Jaffna en foulant aux
pieds arbitrairement les droits démocratiques au mépris complet de la
constitution et du système juridique du pays.
L'interdiction concernant la réunion
publique du SEP est arrivée trois jours après que l'armée avait détenu deux
membres du SEP, qui étaient en train de coller des affiches à Gurunagar, pour
leur demander des informations sur les membres du parti. Ces mêmes soldats
avaient suivi les membres du parti après leur libération pour les agresser
physiquement ensuite. Plus récemment, l'armée s'est rendue chez des membres du
parti dans le but de les intimider encore davantage. Aucune de ces actions
n'est légale.
Le SEP est tout à fait conscient de la
menace implicite des actions de l'armée. Au cours de ces cinq dernières années,
des centaines de gens ont été enlevés et, dans certains cas, assassinés par des
escadrons de la mort pro-gouvernementaux. Dans la vaste majorité des cas,
personne n'a été poursuivi et encore moins condamné. Ces escadrons ont pu agir
en toute impunité du fait de la duplicité des forces de sécurité.
En mars 2007, un membre du SEP, Nadarajah
Wimaleshwaran, et son ami Sivanathan Mathivathanan disparurent à Velanai. Ils
avaient été vus pour la dernière fois à l'approche d'un point de contrôle de la
marine et pourtant le personnel maritime ne fut interrogé ni par la police ni
par les tribunaux. Le SEP continue de tenir le président Mahinda Rajapakse et
l'armée pour responsables de leur sort.
Le ministère de la Défense tente de
justifier cette interdiction à l'encontre de la réunion du SEP en accusant, de
façon absurde, le parti de « soutenir le séparatisme. » En réalité,
le gouvernement et l'armée sont profondément hostiles à la campagne du SEP en
faveur de la libération des prisonniers politiques - le but de la réunion. Le
gouvernement continue de détenir sans procès des milliers de Tamouls, principalement
des jeunes, comme des « présumés terroristes » en violation flagrante
de leurs droits constitutionnels fondamentaux et démocratiques.
L'accusation que le SEP soutient le
séparatisme des Tigres de Libération de l'Eelam tamoul (LTTE) se trouve en
contradiction directe avec le programme et la longue histoire du parti. Le SEP
est la section sri lankaise du mouvement trotskyste mondial, le Comité
international de la Quatrième Internationale (CIQI). Le SEP et son
prédécesseur, la Revolutionary Communist League (RCL), ont fait campagne au
cours de ces quatre dernières décennies pour unir les travailleurs au Sri Lanka
et en Asie du Sud sur la base de l'internationalisme socialiste et contre de
toutes formes de nationalisme et de chauvinisme.
Depuis le début, le SEP et la RCL ont rejeté
la guerre communautariste menée par les gouvernements successifs de Colombo
contre la minorité tamoule. Toutefois, en exigeant le retrait des troupes du
Nord et de l'Est, le parti n'a accordé aucun soutien au programme séparatiste
tamoul du LTTE. Notre perspective demeure la lutte pour la mobilisation de la
classe ouvrière afin d'établir une République socialiste du Sri Lanka et de
l'Eelam comme partie intégrante des Etats socialistes unis d'Asie du Sud.
Le SEP a mené une campagne constante contre
le séparatisme tamoul en révélant au grand jour le caractère de classe du LTTE
qui représentait la bourgeoisie tamoule privilégiée et sa volonté de disposer
d'un Etat-nation capitaliste propre. C'est pourquoi, malgré la défense intransigeante
par notre parti des droits démocratiques des Tamouls, le LTTE avait détenu en
1998 quatre membres du SEP dans un souci de faire taire le SEP et ses partis
frères du CIQI.
Au Sri Lanka, toute personne ayant une
culture politique est consciente de la position de principe adoptée par le SEP.
Le secrétaire général du SEP, Wije Dias, avait participé aux élections
présidentielles de 2005 et de 2010 contre Mahinda Rajapakse et le manifeste
électoral du SEP fait état des positions mentionnées ci-dessus. Contrairement
aux promesses non tenues par les partis gouvernementaux et d'opposition, le
programme du SEP constitue la base sur laquelle le parti lutte politiquement.
L'hostilité du gouvernement à l'égard du SEP
s'est intensifiée au fur et à mesure que ses propres mensonges étaient révélés
aux yeux des travailleurs partout sur l'île. Le SEP avait prévenu que les
affirmations du président Rajapakse selon lesquelles la fin de la guerre serait
synonyme de paix et de prospérité étaient fausses. Pour payer sa guerre
criminelle, le gouvernement avait été obligé d'emprunter de l'argent au Fonds
monétaire international et il applique à présent le programme d'austérité du
FMI. Dans le même temps, il s'apprête à recourir à des mesures d'Etat policier
instaurées durant la guerre afin de briser la résistance grandissante des
masses à l'encontre de sa politique socialement destructrice.
La guerre est terminée, mais le gouvernement
n'a pas réduit les dépenses militaires, n'a pas supprimé les zones de haute
sécurité ni mis fin à l'occupation militaire dans le Nord et dans l'Est. L'état
d'urgence a officiellement cessé mais des pouvoirs antidémocratiques similaires
sont inscrits dans la législation. L'autorité militaire a été étendue aux
domaines civils tel l'aménagement urbain. Le gouvernement opère comme une
cabale militaro-bureaucratique qui agit hors contrôle parlementaire et en
violation des normes légales et de la constitution.
Tel est le contexte des préparatifs du
ministère de la Défense pour une chasse aux sorcières contre le SEP. Son
objectif est de réduire au silence le SEP qui fournit l'unique alternative
viable pour les masses contre l'aggravation des attaques contre les droits
démocratiques et le niveau de vie.
Le SEP ne se laissera pas intimider. Nous
avons une longue et fière histoire d'opposition aux tentatives entreprises par
les gouvernements ou nos adversaires politiques pour nous faire taire. Comme
par le passé, nous sommes persuadés que les jeunes, les travailleurs et les
membres des professions libérales, tant sur le plan national qu'international,
se rassembleront pour défendre le parti dans une campagne plus générale de
protection des droits démocratiques des masses.
* En 1971, trois ans à peine après la
création de la RCL, le gouvernement interdisait ses publications en accusant à
tort le parti de soutenir le parti « terroriste » Janatha Vimukthi
Peramuna. Malgré le meurtre de deux membres du parti lors de leur garde à vue,
la RCL tint bon en poursuivit sa lutte politique contre la coalition formée par
le Sri Lanka Freedom Party, le Lanka Sama Samaja Party et le Parti communiste
stalinien.
* En 1984, après que la RCL eut exposé
l'implication du gouvernement dans le massacre des Tamouls en juillet 1983 et
se fut opposé au déclenchement de la guerre civile, la police arrêta Ananda
Wakkumbura, éditeur des journaux de la RCL, sur de fausses accusations de
« soutenir le terrorisme du LTTE. » Il fut relâché et les accusations
furent abandonnées après que la RCL eut mobilisé l'opinion publique.
* En 1986, Wije Dias et deux autres membres
du parti furent arrêtés en vertu des lois d'urgence alors qu'ils tenaient une
réunion pour la défense de l'éducation gratuite. Ils furent remis en liberté
après une intense campagne internationale menée par le CIQI et la RCL. La Cour
suprême statua plus tard que leur arrestation avait été une violation des
droits fondamentaux.
Dans chacun de ces cas, les attaques contre
la RCL/SEP ont coïncidé avec une profonde crise politique du gouvernement.
C'est la même chose aujourd'hui.
Le SEP ne prend pas les menaces actuelles à
la légère. Les gouvernements du monde entier, Etats-Unis en tête, sont en train
d'adopter des mesures antidémocratiques en recourant au militarisme à
l'étranger et à la contre-révolution à l'intérieur du pays. Mais nous sommes
convaincus qu'une campagne déterminée obtiendra une réponse puissante de la
classe ouvrière.
Le SEP mettra tout en oeuvre pour défendre
notre droit démocratique légitime d'éduquer et de mobiliser politiquement les
travailleurs, les pauvres ruraux et les jeunes tant localement
qu'internationalement pour la transformation socialiste du monde. Nous exigeons
que le gouvernement mette immédiatement fin aux menaces proférées et au
harcèlement pratiqué par le ministère de la Défense et l'armée à l'encontre des
membres du SEP à Jaffna.