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  WSWS : Nouvelles et analyses : Afrique et Moyen-Orient

Un an après la révolution égyptienne

Par Alex Lantier
28 janvier 2012

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Il y a un an exactement, des millions de travailleurs dans toute l'Egypte descendaient dans la rue, au premier jour des protestations révolutionnaires contre le président Hosni Moubarak. Revigorés par le renversement du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali suite aux protestations de la classe ouvrière onze jours plus tôt, les travailleurs égyptiens commençaient une lutte révolutionnaire de dix-huit jours qui mit fin aux trente ans de règne de Moubarak.

Malgré l’assistance de l’envoyé spécial Frank Wisner et la brutalité policière contre les manifestants qui coûtèrent la vie à quelque 840 personnes, Moubarak démissionna le 11 février dans la honte, remettant le pouvoir à une junte militaire soutenue par les Etats-Unis. Les gouvernements aux Etats-Unis, en Europe et en Israël furent abasourdis par l’effondrement d’un allié aussi précieux qui durant des décennies avait aidé à étouffer l’opposition des travailleurs à la pauvreté et l’oppression impérialiste au Moyen-Orient.

La victoire initiale contre Moubarak – 20 ans après que les classes dirigeantes eurent affirmé que la liquidation de la bureaucratie stalinienne de l’URSS signifiait « la fin de l’histoire » et le triomphe définitif du capitalisme sur la lutte des classes et le socialisme – stimula la classe ouvrière internationalement. Des célébrations et des grèves pour des conditions de vie et des salaires meilleurs se poursuivirent en Egypte des semaines durant. Des manifestations se propagèrent partout au Moyen-Orient, y compris finalement en Israël et aux Etats-Unis où les travailleurs luttant contre les coupes sociales du gouverneur du Wisconsin, Scott Walker, s’engagèrent à « marcher comme un Egyptien. »

La victoire initiale prépara le terrain pour une année de guerres et de luttes des classes acharnées. Un an plus tard et en dépit du retrait de Moubarak, la dictature militaire persiste, emprisonnant et torturant des milliers de personnes et forçant des masses de travailleurs à vivre avec des salaires de misère de 2 dollars par jour. Malgré son courage et sa détermination sans borne, la classe ouvrière ne pouvait pas tout simplement franchir d’un bond les problèmes historiques de perspective, de programme et de direction politiques posés par la lutte pour le renversement du régime Moubarak.

Dans les premiers jours de la révolution en février dernier, le World Socialist Web Site avait expliqué : « Cette révolution n'en est qu'à ses débuts. Les forces de classes déchaînées par cette explosion ne font que commencer à se définir elles-mêmes en termes de demandes distinctes. Les programmes ont à peine été formulés… Sortant de décennies de répression, la classe ouvrière n'a pas encore formulé son propre programme. Dans ces moments où la lutte se déploie, il ne pourrait pas en être autrement. »

Le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) a lutté pour exprimer une perspective politique indépendante pour la classe ouvrière, et distincte des autres tendances de classe qui avaient émergé lors du mouvement de protestation initial. Se fondant sur la théorie de la Révolution permanente de Léon Trotsky, le CIQI a cherché à expliquer que la bourgeoisie et la petite bourgeoisie, craignant la classe ouvrière et étant tributaire de l’impérialisme, ne pouvaient produire un régime démocratique. Au contraire, la démocratie ne peut voir le jour qu’en conséquence d’une lutte révolutionnaire pour le socialisme, dirigée par la classe ouvrière, afin de placer toutes les ressources de l’économie nationale et internationale sous le contrôle des travailleurs et des masses opprimées.

Le CIQI a cherché à expliquer les antagonismes qui ne cessent de s’aggraver entre les travailleurs et les sections des autres classes qui sont poussées dans la vie politique par la révolution : les couches bourgeoises – les partis islamistes partiellement interdits par Moubarak, les sections de la bourgeoisie libérale qui soutiennent Mohammed ElBaradei – et tout particulièrement les sections de « gauche » de la classe moyenne riche.

Les partis bourgeois se sont efforcés de trouver un accord avec l’armée pour diriger l’Egypte. La « gauche » petite bourgeoise, telle celle improprement nommée Socialistes révolutionnaires (SR) de l’Egypte et leurs condisciples internationaux ont cherché à collaborer avec Washington dans le but de manipuler et de contrôler les protestations populaires – créant ainsi un « un espace démocratique élargi » sous un régime militaire dans lequel il leur était possible de prospérer.

Ces forces ont conféré une légère coloration de « gauche » à la propagande de l’impérialisme américain : à savoir que Washington, en finançant des groupes politiques et des soi-disant syndicats « indépendants », aidait les protestations du Printemps arabe à effectuer une transition vers la démocratie dans l’ensemble du Moyen-Orient.

Un élément crucial de l’année dernière a été l’aggravation du conflit entre cette couche réactionnaire et les luttes révolutionnaires de la classe ouvrière. Lorsqu’au printemps, le mécontentement populaire grandissant à l’égard de l’armée a suscité des appels en faveur d’une « deuxième révolution », les SR se sont opposés à cette revendication. Au lieu de cela, ils ont contribué à organiser une campagne conjointe des partis d’« opposition », y compris les forces islamistes d’extrême-droite telles Gamaa Islamiyah, aliénant le soutien populaire et permettant en fin de compte à l’armée d’écraser les nouvelles protestations de juin-juillet sur la Place Tahrir.

Les grèves se sont multipliées de nouveau à l’automne, pour culminer fin novembre juste avant la tenue des élections parlementaires en Egypte, reflétant ainsi la colère populaire à l’encontre d’une fausse « transition démocratique » effectuée sous la loi martiale. Les élections qui se sont caractérisées par l’indifférence des électeurs, malgré une propagande pro électorale massive, ont fait pencher la balance du pouvoir en faveur des Islamiste au parlement. Ceci reflète non pas tant le rôle des Islamistes dans la révolution, rôle qui a été marginal, mais plutôt le soutien dont ils ont bénéficié de la part des partis de la classe moyenne et le financement dont ils ont joui de la part des classes dirigeantes d'Egypte et des émirats du Golfe persique.

Néanmoins, les SR insistent à présent pour transférer le pouvoir à un régime civil qui serait dirigé par des forces islamistes tels les Frères musulmans et l’extrême-droite salafiste.

Un tel gouvernement, élu à la pointe de la baïonnette et hostile aux aspirations sociales qui ont poussé les travailleurs à lutter contre Moubarak, ne pourrait être rien d’autre qu’un régime contre-révolutionnaire brutal servant de couverture à la poursuite du régime militaire. Les responsables islamistes ont affirmé dernièrement que l’armée avait « le droit de bénéficier d’une place spéciale dans la constitution à venir, plus que dans les précédentes. »

La « gauche » petite bourgeoise est tout aussi hostile aux intérêts de la classe ouvrière à l’extérieur de l’Egypte. Les SR et leurs affiliés internationaux, comme le Parti socialiste des travailleurs de Grande-Bretagne (Socialist Workers Party, SWP) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) en France, ont répété comme des perroquets les affirmations des puissances occidentales disant qu'ils luttaient pour la démocratie et les droits humains en intervenant dans la Libye voisine. L’OTAN s’est saisi de cette occasion pour commencer une guerre en Libye et une intervention à travers tout le Moyen-Orient.

En octobre, les forces menées par l’OTAN ont finalement renversé le régime libyen dans une guerre qui a fait au moins 100.000 victimes et consolidé la mainmise des grands groupes sur les champs pétroliers libyens et ont fini par assassiner Kadhafi. L’impérialisme américain a encouragé une guerre civile en Syrie et un affrontement militaire avec l’Iran dans le Golfe persique qui menace d’exploser en une guerre régionale dévastatrice voire même une guerre mondiale. L’impérialisme mondial et ses alliés de la classe moyenne se tiennent devant la classe ouvrière tout dégoulinants de pétrole et de sang.

A présent, alors que la junte égyptienne envisage une levée « partielle » de la loi martiale de peur d’une explosion révolutionnaire des masses, la théorie de la Révolution permanente se trouve confirmée par les évolutions survenus en 2011 en Afrique du Nord et au Moyen-Orient et qui marquent un tournant. L’impérialisme américain, la bourgeoisie égyptienne et leurs alliés de la classe moyenne ont échoué à créer la démocratie au Moyen-Orient ou à satisfaire les demandes sociales pressantes des travailleurs. L’avenir appartient à la classe ouvrière internationale et à la poursuite de sa lutte révolutionnaire contre l’oppression capitaliste et la guerre impérialiste.

(Article original paru le 25 janvier 2012)

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