Le premier ministre grec Lucas Papademos,
arrivé au pouvoir sans que son programme n'ait été présenté aux électeurs, a
rencontré les dirigeants syndicaux mercredi pour obtenir leur soutien dans la
prochaine série de mesures brutales d'austérité dans le pays.
Papademos est devenu le nouveau chef du
gouvernement grec en novembre dernier après que son prédécesseur, George
Papandréou du PASOK social-démocrate, est tombé en disgrâce auprès des banques,
des lobbies financiers et des institutions européennes.
Durant son mandat, Papandréou avait introduit
pas moins de cinq budgets d'austérité, qui ont plongé le pays dans une profonde
récession et entraîné un énorme gonflement du chômage et de la misère sociale.
Les banques internationales et les principales institutions européennes ont
cependant conclu que Papandréou n'était pas allé assez loin dans le
démantèlement du système social du pays et des services publics. Ils ont mis au
point sa démission et imposés le banquier technocrate Papademos comme chef d'un
nouveau gouvernement non-élu.
Papademos, comme on pouvait s'y attendre,
s'est servi du discours de nouvel an pour demander à ses concitoyens de faire
de nouveaux « sacrifices ». Il a répété ce mantra à la réunion de mercredi avec
des représentants haut placés des syndicats grecs et de la fédération des
employeurs : « Nous devrons accepter des sacrifices limités pour empêcher un
résultat catastrophique – nous devons donner un peu maintenant pour ne
pas perdre beaucoup. »
En fait, le « peu » que demande maintenant
Papademos représente une atteinte fondamentale aux conditions de vie et aux
droits des travailleurs grecs qui ont déjà subi l'essentiel des précédentes
mesures d'austérité.
À la réunion de mercredi, Papademos a tracé
les grandes lignes de certaines des nouvelles mesures prévues. Au cœur du
dispositif, il y a une révision à la baisse du salaire minimal national, de
nouvelles coupes dans les salaires du secteur public et les retraites, ainsi
que la suppression des congés payés existants. Ce gouvernement voudrait
également changer le droit du travail du pays pour accélérer le démantèlement
des services publics par des licenciements directs.
La liste de Papademos se poursuit : des coupes
immédiates dans les aides sociales pour 14 milliards d'euros par an et des
coupes supplémentaires plus tard dans les dépenses pour les médicaments et les
soins médicaux. Jeudi, son cabinet a tenu une réunion à Athènes pour décider
des mesures suivantes pour en finir avec ce qu'ils appellent les « professions
fermées » du pays, ce qui permettrait encore plus de licenciements et de
réductions d'emplois.
Le contexte de cette nouvelle campagne du
gouvernement pour plus d'austérité a été dépeint par un de ses porte-parole,
Pantelis Kapsis, qui a prévenu mardi que si les mesures exigées par les banques
internationales et le Fonds monétaire international n'étaient pas appliquées,
la Grèce risquait de sortir de la zone euro.
Le journal allemand du monde des affaires Handelsblatt
a écrit mercredi que les « visions d'horreur d'un retour à la drachme »
décrites par les politiciens importants avaient un but défini. « Persuader la
population – et surtout les politiciens grecs – de la nécessité
d'accepter ces coupes imminentes. »
Les remarques de Kapsis concernant une possible
sortie de la zone euro ont été largement relayées, mais un autre commentaire
important de sa part le même jour a reçu moins d'attention. Néanmoins celui-ci
donne une indication sur les scénarios qui sont actuellement envisagés par le
nouveau gouvernement grec. Quand on lui a demandé où les nouvelles coupes
devraient être faites, Kapsis a répondu : « Je ne crois pas que ce soit si
facile d'imposer de nouvelles taxes, mais qu'est-ce que ça veut dire de faire
des coupes ? Fermer le secteur public ? Il n'y a pas de solution facile. »
Les dirigeants syndicaux qui se sont retrouvés
à la réunion de mercredi ont clairement fait savoir qu'ils n'ont aucune
opposition de principe aux coupes demandées par Papademos, mais ont demandé que
le fardeau soit imposé à d'autres secteurs. L'agence de presse Bloomberg
relate qu'après la réunion, Yannis Panagopoulos, président de la confédération
générale des travailleurs grecs (GSEE) déclarait qu'il était assez favorable à
des discussions avec le nouveau gouvernement sur des mesures pour réaliser des
coupes qui n'impliqueraient pas des réductions directes des salaires.
La collaboration étroite entre le gouvernement
et les syndicats a été un élément essentiel de l'application des précédents
plans d'austérité, qui ont eu des conséquences si dévastatrices pour les
travailleurs grecs.
Le chômage monte en flèche en Grèce, avec la
perte estimée de 20 000 emplois par mois. Le chômage des jeunes de 15 à 24 ans
dépasse 40 pour cent et augmente encore. Les dernières statistiques disponibles
pour l'augmentation de la pauvreté publié par l'Autorité de la statistique
grecque (ELSTAT) ne portent que sur l'année 2009. Néanmoins, ce rapport révèle
qu'à la fin de cette année-là, plus de 3 millions de grecs (27,7 pour cent)
vivaient sous le seuil de pauvreté ou dans une situation d'exclusion sociale.
27,8 autres pour cent ont dit qu'ils ont des difficultés à couvrir leurs
dépenses de logement.
Depuis lors, le pays a plongé encore plus
profondément dans la récession avec la perte de centaines de milliers
d'emplois. Au mois de novembre dernier, le gouvernement a licencié par moins de
14 000 fonctionnaires. L'augmentation des impôts pour les travailleurs
ordinaires fait partie intégrante des budgets d'austérité introduits par
l'ex-Premier ministre George Papandréou. Il ne fait aucun doute que la pauvreté
s'est largement répandue durant les deux dernières années.
Les mesures d'austérité déjà introduites ont
entraîné un profond effondrement économique. Le ministère des finances grec
devrait bientôt annoncer que le pays n'est pas parvenu à atteindre son objectif
de limiter le déficit budgétaire en 2011 à 9 pour cent. En conséquence, les
représentants de l'Union européenne, du Fonds monétaire international et de la
Banque centrale européenne qui doivent se rencontrer à Athènes plus tard ce
mois-ci vont certainement exiger de nouvelles mesures pour réduire les dépenses
publiques et les emplois dans le secteur public.
Alors que le pays entre dans sa quatrième
année consécutive de récession, les riches élites grecques transfèrent de
vastes parties de leur fortune hors du pays. En 2010, les millionnaires grecs
ont retiré 40 milliards d'euros, soit près de 53 milliards de dollars, en
dépôts du système bancaire national vers des « endroits sûrs ». Ce total
équivaut à 17 pour cent du PIB national.