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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le pacte fiscal européen

Par Peter Schwarz
6 mars 2012

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Le fait que l'Union européenne ait adopté le 2 mars un pacte fiscal alors même que l'économie européenne est en train de se contracter en souligne le caractère de classe profondément réactionnaire et anti-ouvrier.

L'expérience historique montre que la réduction des dépenses publiques aggrave une récession naissante. D'une perspective purement budgétaire, le pacte fiscal semble insensé. Comme le montre l'exemple de la Grèce, la perte de revenus publics causée par une récession majeure dépasse de loin toute économie faite par une réduction des dépenses, en augmentant finalement le déficit budgétaire et la dette nationale plutôt que de les diminuer.

Il serait naïf de croire que les chefs des gouvernements européens qui ont adopté vendredi lors du sommet de l'UE à Bruxelles le pacte fiscal n'en sont pas conscients. Au contraire, ils cherchent délibérément à causer une récession et ils le font pour des raisons politiques et de classe définies. Ils entendent recourir au chômage de masse comme machine de guerre pour réduire les salaires des travailleurs et démanteler les acquis sociaux et les services publics.

Ce n'est pas la première fois que la classe dirigeante a délibérément provoqué une récession pour créer les conditions favorables à une attaque contre la classe ouvrière. En 1981, la Réserve fédérale américaine avait relevé son taux d'intérêt clé à un taux sans précédent de 20 pour cent, étranglant par là les achats de maisons et de voitures ainsi que de biens de consommation et provoquant des fermetures d'usines et une série de faillites d'entreprises. Le résultat fut la plus profonde récession depuis la Deuxième guerre mondiale.

L'objectif fut de venir à bout du mouvement ouvrier qui, malgré la trahison des dirigeants syndicaux, avait été obligé, du fait de la résistance combative de la classe ouvrière, d'organiser une vague de grèves afin de maintenir les niveaux de salaire et ce malgré une inflation galopante. La culmination de ce mouvement fut, entre 1977 et 1978, une grève de 111 jours par 100.000 mineurs de charbon. Les mineurs avaient défié une injonction de reprise du travail délivrée par le président démocrate Jimmy Carter.

L'homme responsable de la hausse des intérêts à des niveaux record d'après-guerre, le président de la Réserve fédérale, Paul Volcker, avait été nommé à son poste en août 1979 par Carter. Il était resté le patron de la Réserve fédérale sous le successeur républicain de Carter, Ronald Reagan, et avait mené une politique de « désindustrialisation » impliquant le démantèlement des sections les moins rentables de l'industrie et un glissement de l'économie américaine de la production vers la spéculation et la manipulation financière.

Initiée par la destruction du syndicat des contrôleurs du ciel PATCO par le gouvernement Reagan en 1981 - effectué avec la collaboration de la direction de la confédération syndicale AFL-CIO - une campagne de dix ans fut lancée pour briser les grèves, attaquer les syndicats et monter des machinations judiciaires contre les ouvriers dans le but d'engager la destruction des salaires et remettre en question les acquis obtenus par les luttes de la classe ouvrière durant les décennies précédentes. L'inégalité sociale grimpa en flèche tout comme la richesse des revenus supérieurs.

D'une manière identique, les dirigeants européens sont à présent en train de poursuivre consciemment une politique déflationniste afin de détruire les améliorations antérieures des salaires et des conditions sociales gagnées par la classe ouvrière. La chancelière allemande, Angela Merkel, la force motrice derrière le pacte fiscal, a à maintes reprises souligné que l'Europe n'avait pas d'avenir si elle n'était pas capable d'accroître sa « compétitivité » - c'est-à-dire réduire les coûts de production en appauvrissant la classe ouvrière et en intensifiant son exploitation.

A première vue, il pourra sembler paradoxal que de tous les pays, ce soit spécialement l'Allemagne qui insiste sur une plus grande compétitivité elle qui a, de par sa réduction considérable des coûts de main d'oeuvre des dernières années, profité de l'euro plus que tout autre pays, enregistrant un vaste excédent commercial. Toutefois, la question pour l'Allemagne n'est pas seulement le marché européen mais plutôt le marché mondial où les salaires, dans des pays tels que la Chine, le Vietnam et le Bangladesh, sont de plus en plus considérés comme des niveaux de référence.

Les banques d'investissement et les fonds spéculatifs qui contrôlent les marchés financiers internationaux exigent des rendements de 20 pour cent ou plus. De tels rendements ne peuvent être réalisés qu'avec des niveaux d'exploitation tels que ceux qui avaient prévalu durant les premiers jours du capitalisme industriel.

Le capitalisme allemand ne peut se maintenir sur le marché mondial que s'il peut compter sur l'Europe comme centre de production et comme marché interne (de là son adhésion à l'Union européenne et à l'euro) tout en réduisant en même temps les salaires et les niveaux sociaux européens à des niveaux internationaux (de là sa promotion du pacte fiscal).

Il arrive à l'occasion que les autres gouvernements européens râlent contre les dictats allemands. Mais, face aux tensions sociales grandissantes, la classe dirigeante en Europe serre les rangs contre la classe ouvrière. Ceci explique pourquoi 25 des 27 gouvernements de l'UE ont adhéré au pacte fiscal. Pour la même raison, des pays tels la Croatie, la Serbie et la Turquie restent déterminés à joindre l'Union européenne malgré la crise de l'euro.

Ceci explique aussi l'application de mesures d'austérité dévastatrices en Grèce. Il est à présent clair que ces mesures ne sauveront pas le pays de la faillite mais accéléreront plutôt le processus d'insolvabilité. L'objectif véritable est d'établir un nouveau critère pour l'ensemble de l'Europe. Les travailleurs doivent être forcés à s'habituer à des salaires de misère, à la destruction des services d'éducation, de soins de santé et autres services sociaux, ainsi qu'à l'élimination de centaines de milliers d'emplois dans le secteur public.

Tout retour à une politique de compromis social est impossible dans les conditions d'un effondrement mondial du système capitaliste qui a débuté avec le krach de Wall Street en 2008. Les divisions de classe en Europe ont atteint des niveaux ne permettant plus de demi-mesure ou de conciliation. Ceci est prouvé par le glissement du côté de la réaction de toutes les organisations, qui jadis promouvaient la réforme sociale, la démocratie et la paix. Les partis sociaux-démocrates, soutenus par les syndicats, assument un rôle de premier plan dans l'imposition des mesures d'austérité tandis que les anciens pacifistes Verts sont devenus le chef de claque pour la guerre impérialiste.

Celui qui prêche la réforme sociale de nos jours - tel le parti La Gauche (Die Linke) en Allemagne et des organisations identiques - ne le fait que pour tromper et désorienter les travailleurs. La crise européenne a des implications révolutionnaires qui ne peuvent être évitées.

Le pacte fiscal et ses conséquences ne peuvent être appliqués par des moyens démocratiques. En 1930, le chancelier allemand Heinrich Brüning avait introduit des mesures identiques dans le contexte d'une crise économique internationale. Deux ans plus tard, Hitler prenait le pouvoir en Allemagne.

Même les plus fondamentaux des droits démocratiques et sociaux ne peuvent être défendus de nos jours que sur la base d'un programme socialiste et de la mobilisation de masse de la classe ouvrière. Les travailleurs doivent s'unir à travers l'Europe pour lutter pour les droits les plus fondamentaux - le droit à un emploi, à un salaire décent, à une retraite sûre, à l'éducation, aux soins de santé, au logement - et briser le pouvoir de l'oligarchie financière et de son instrument politique, l'Union européenne. A la place des gouvernements bourgeois existants, les travailleurs doivent établir des gouvernements ouvriers qui placent les besoins sociaux avant les intérêts de profit du patronat. L'Union européenne doit être remplacée par les Etats socialistes unis d'Europe.

Une nouvelle direction doit être construite pour organiser cette lutte et l'armer d'un programme révolutionnaire. Ceci signifie la construction du Comité International de la Quatrième Internationale et de ses sections, les partis de l'Egalité socialiste.

 (Article original paru le 5 mars 2012)

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