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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le parti dirigeant perdant son soutien, la « gauche » grecque se rapproche du PASOK

Par Christoph Dreier
28 mars 2012

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Après une série d’attaques incessantes contre leur niveau de vie et leurs acquis sociaux, des millions de Grecs en colère sont en train de tourner le dos aux partis politiques traditionnels. Selon de récents sondages d’opinion, le soutien en faveur du parti social-démocrate PASOK est tombé de 44 pour cent en 2009 à entre 8 et 15 pour cent. Dans ces conditions, un nombre de partis de pseudo-gauche oeuvrent pour stabiliser la situation et préparer le terrain pour un nouveau gouvernement capable d’imposer de nouvelles coupes sociales.

La force motrice qui se cache derrière un gouvernement de partis « de gauche » est la coalition de la Gauche radicale (SYRIZA). Elle a à maintes reprises fait appel au Parti communiste de Grèce (KKE) et à la Gauche démocrate (DIMAR) afin de coopérer dans un tel projet mais, jusqu’à ce jour, ces deux organisations ont décliné l’offre.

Tsipras en route vers l’Hôpital de la Croix Rouge

La semaine passée, lors d’une conférence de presse qui s'est tenue à l’Hôpital de la Croix Rouge à Athènes, le président de SYRIZA, Alexis Tsipras, a renouvelé son appel en faveur d’une collaboration entre partis. Durant ces deux dernières années, des réductions massives ont été imposées à l’hôpital et, en conséquence, les infirmières ne gagnent souvent que 500 euros (659 dollars US) par mois. L’hôpital est également confronté à une privatisation partielle qui a entraîné une série de protestations de la part du personnel.

Lors de sa conférence de presse à laquelle a participé un petit groupe de salariés, Tsipras s’est prononcé contre le projet de privatisation en réclamant davantage de moyens pour l’hôpital. Il a cherché à convaincre les travailleurs présents qu’un gouvernement de « gauche » serait en mesure de désamorcer les tensions sociales et de revenir sur certaines réductions.

Le discours de Tsipras a nourri les illusions que des « salaires décents, des retraites, des écoles et des hôpitaux » pourraient être obtenus en dépit des mesures drastiques de l’Union européenne (UE) et qu’il était possible d’obliger l’aristocratie financière à faire des concessions grâce à des négociations. De vastes couches de la population laborieuse grecque ont tiré des conclusions tout à fait différentes des expériences de ces derniers mois. Tsipras a cherché à dissimuler son appel en recourant à une rhétorique radicale pour souligner la « contradiction existant entre le capital et le travail » et qui, a-t-il dit, était en train de s’intensifier dans la crise actuelle.

Dans son discours, le dirigeant de SYRIZA n’a demandé ni l’expropriation des banques ni la mise en place d’un gouvernement ouvrier, révélant ainsi son hostilité à une perspective socialiste dirigée contre le capitalisme.

Alors que la situation en Grèce révèle l’impossibilité de défendre les droits des travailleurs sans briser le pouvoir de l’élite financière, Tsipras planifie un gouvernement de « gauche » qui accepte les dictats de l’Union européenne en organisant les futures coupes de manière telle qu’elles puissent facilement être imposées à la population. C’est ce qui est clairement ressorti du discours prononcé par Tsipras à l’hôpital.

Lorsque des partisans du WSWS ont souligné que sa revendication de revenir sur les coupes sociales était incompatible avec son soutien pour l’Union européenne qui depuis deux ans prescrit des réductions drastiques à la Grèce, Tsipras a répondu en précisant que SYRIZA n’était pas pour un retrait de l’UE. Il a clairement fait comprendre qu’il était prêt à s’asseoir autour d’une table pour « négocier » avec les responsables mêmes de l’UE qui ont saigné à blanc la Grèce ces dernières années.

« Si nous réussissons à former une coalition dirigeante » a déclaré Tsipras, « et que le pouvoir est transféré à ceux qui défendent les intérêts des travailleurs et du peuple, alors nous chercherons bien sûr à dénoncer les mesures d’austérité et la politique actuelle. Nous entamerons des négociations farouches à la fois au niveau européen et international en recourant à tous les moyens possibles pour arriver à un résultat favorable au niveau européen. »

Etant donné que l’UE a joué dès le départ un rôle central dans les attaques perpétrées contre les droits des travailleurs grecs, le mot « renégocier » représente une acceptation tacite des mesures d’austérité. Ce qu'il dit de la contradiction entre le « capital et le travail » n’est que de la poudre aux yeux pour autant que Tsipras est disposé à reconnaître comme partenaire de négociation l’une des plus importantes institutions capitalistes.

La position de Tsipras quant à l’UE est même encore plus évidente si l’on examine quels sont les partenaires qu’il envisage pour une alliance. Dans son discours, Tsipras a admis que le dirigeant de la Gauche démocrate (DIMAR), Fotis Kouvelis, avait jusque-là refusé toute coopération mais Tsipras était sûr qu’il finirait par entendre raison et accepterait la nécessité de collaborer avec SYRIZA.

« Nous pensons que notre proposition, » a indiqué le patron de SYRIZA, « trouvera une réponse non seulement de la part de la gauche, mais de tous ceux qui se rendent compte que nous sommes dans une situation où notre maison est assiégée, où nous nous faisons cambrioler par un voleur et où nous devons travailler ensemble pour chasser le voleur – même si à l’occasion nous avons des différences d’opinion mineures. »

Les forces avec lesquelles Tsipras n’a que des différences d’opinion « mineures » sont les défenseurs agressifs de l’UE et des banques.

Le porte-parole de DIMAR, Andreas Papadopoulos, a dit au WSWS que le fait de rester dans l’UE était un objectif stratégique primordial pour son parti. Si les institutions de l’UE une fois de plus cherchaient à imposer des réductions, un gouvernement impliquant son parti engagerait des négociations pour introduire « d’autres mesures qui seraient socialement compatibles. » Et même si cette stratégie échouait, le retrait de l’UE était hors de question. « Nous ne quitterions jamais l’UE, » a souligné Papadopoulos.

Kouvelis, le chef de DIMAR, ancien ministre, sait parfaitement que ceci signifie l’imposition d’une nouvelle série de réductions face à une résistance populaire croissante. A cette fin il appelle à des mesures autoritaires telles la création d’un nouveau ministère doté de pouvoirs spéciaux. « Nous voulons un ministre du budget auquel tous les autres ministres sont subordonnés, » a-t-il dit au quotidien allemand Die Welt. Un tel super ministre devrait être élu directement par le parlement plutôt que d’être sélectionné par le chef du gouvernement. « Ceci signifierait qu’il ne pourrait pas être remplacé lors d’un remaniement ministériel qui, en Grèce, est chose courante en politique, » a expliqué Kouvelis.

Un tel « ministre du budget » auquel tous les autres ministres sont subordonnés ne signifierait rien de moins que la transformation de la dictature financière de l’UE en une dictature politique du gouvernement grec.

DIMAR a été fondé en juin 2010 par des membres de SYRIZA qui voulaient voter en faveur du programme de coupes sociales du PASOK et qui cherchaient à former une coalition avec les sociaux-démocrates. Kouvelis avait dit à l’époque : « Nous voulons une gauche qui ne se sente ni obligée de défendre tous les droits durement acquis des travailleurs, ni ne courtise les syndicats pour les utiliser à des fins politiques mesquines. »

Pour SYRIZA le fait de former une coalition avec DIMAR équivaut à rejoindre une coalition avec le PASOK, le parti dirigeant, et pas simplement parce qu’un nombre croissant d’anciens politiciens du PASOK, tels des rats quittant le navire avant le grand naufrage, ont récemment rejoint DIMAR. Pour sa part, DIMAR poursuit activement une coopération avec PASOK. « Rejoindre le gouvernement nous intéresse, » a déclaré Papadopoulos, porte-parole de DIMAR : « Même si nous avons des différences, nous sommes prêts pour une coalition avec le PASOK. »

SYRIZA a déjà envisagé à maintes reprises une coalition avec le PASOK. En 2009, Tsipras avait dit aux représentants du Parti de la refondation communiste italien (Rifondazone Comunista) qu’il était prêt à former une coalition avec PASOK si ce dernier « reconnaissait la nécessité de changer la société grecque en l’infléchissant vers la gauche. » Il s’agit d’un énoncé vide de sens auquel des politiciens insaisissables pourraient souscrire sans difficulté en promettant de le respecter.

Le PASOK était entré au gouvernement en 2009 après des élections anticipées pour remplacer Nouvelle Démocratie (ND). Lors de sa campagne électorale, le PASOK avait appelé à accroître les dépenses publiques du gouvernement dans le domaine du social. En tant que parti gouvernemental, le PASOK avait organisé ses deux dernières années une contre-révolution sociale. Le PASOK est largement discrédité au sein de vastes couches de la population mais DIMAR et SYRIZA cherchent à insuffler une nouvelle vie dans le cadavre de la social-démocratie grecque.

A cet égard, SYRIZA peut compter sur le soutien d’une multitude de groupes anciennement de gauche qui adoptent une attitude quelque peu plus radicale mais qui s’entendent sur leur orientation de base. Une telle organisation est la section grecque du Comité pour une Internationale ouvrière (Workers’ International, CWI), Xekinima-Socialist Internationalist Organisation qui réclame également une coalition des partis de « gauche » qui soit en mesure de former un gouvernement après les prochaines élections. Des exigences identiques sont faites par le SEK (International Socialist Tendency, IST) ou l’OKDE (Organization of Communist Internationalists of Greece United Secretariat.)

En réalité, un tel gouvernement poursuivrait la logique du régime PASOK précédent et imposerait les dictats de l’UE à l’encontre des travailleurs grecs. Afin de s’opposer à la contre-révolution sociale, les travailleurs doivent s’organiser indépendamment de tous ces groupes en s’opposant directement à l’UE et à toutes ses institutions. Leur allié dans cette lutte est la classe ouvrière dans l’ensemble de l’Europe.

(Article original paru le 23 mars 2012)

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