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Pour sa réélection le président français Sarkozy
en appelle à l’extrême droite
Par Pierre Mabut
2 mars 2012
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Le 15 février, le président Nicolas Sarkozy a
officiellement annoncé son intention de briguer un second mandat en avril.
Le dernier sondage réalisé par OpinionWay en
février indique qu’il voit sa cote grimper par rapport au candidat du Parti
socialiste (PS), François Hollande, qui arrive en tête avec 29 pour cent
devant Sarkozy (27 pour cent) et Marine Le Pen du Front National
néo-fasciste qui arrive en troisième position avec 16,5 pour cent. Le
sondage montre qu’au second tour contre Hollande, Sarkozy perdrait avec une
marge de seize pour cent, 58 contre 42 pour cent, bien que l’écart se soit
réduit de deux points au cours de la semaine dernière.
Pour sa réélection, Sarkozy a reçu le soutien de
la chancelière allemande Angela Merkel avec laquelle il collabore pour
imposer une politique d’austérité et des gouvernements de technocrates aux
pays européens dont la Grèce et l’Italie.
Merkel a déclaré: « Je soutiens Nicolas Sarkozy
sur tous les plans car nous appartenons à des partis amis … Il est normal
que nous soutenions nos partis amis. » Le premier ministre conservateur
britannique, David Cameron, a tenu les mêmes propos. Merkel tient à
maintenir la dynamique créée avec Sarkozy pour imposer la rigueur sociale en
Europe par le biais du traité instituant le Mécanisme européen de stabilité
(MES) et de la « Règle d’or » interdisant des déficits budgétaires et qui
devrait être adoptée et inscrite dans la constitution de chaque pays.
Alors que Hollande et le PS soutiennent les coupes
sociales dans les budgets publics et les conditions de vie des travailleurs,
ils cherchent cyniquement à se distancer du bilan profondément impopulaire
de Sarkozy. En s’opposant à la « Règle d’or », Hollande a expliqué, « Je
veux croire que nous poursuivons tous le même but, celui de maîtriser la
dette publique, mais nous ne proposons pas le même chemin pour
l’atteindre. »
Sarkozy a tenté de surmonter sa profonde
impopularité au moyen d’une démagogie creuse et d’un appel aux sentiments
d’extrême droite. Le19 février, il a annoncé lors de son premier
rassemblement de campagne à Marseille qu’il était « le candidat du peuple ».
A Lille, il a déclaré, « Je veux être le porte-parole de cette France qui
veut vivre de son travail. »
La prétention de Sarkozy d’être le candidat de la
population laborieuse en France ne contribuera guère à sauver sa candidature
étant donné qu’elle se trouve aux antipodes de son bilan anti-ouvrier.
Sarkozy a défendu la classe dirigeante contre les
retombées de la crise financière de 2008 en renflouant les banques et
l’industrie aux dépens des travailleurs. Tout en promettant des centaines de
milliards aux banques et des milliards pour un plan de sauvetage français de
l’automobile qui a entraîné la fermeture de dizaines d’usines, Sarkozy a
supervisé une offensive contre les emplois et les conditions de vie des
travailleurs. Durant son mandat, 1,33 millions de travailleurs ont perdu
leur emploi, dont 500.000 postes dans l’industrie et les retraites furent à
plusieurs reprises réduites malgré une énorme opposition populaire et des
manifestations de masse.
Dans le même temps, Sarkozy a réintégré la France
dans le commandement militaire de l’OTAN en soutenant publiquement les
guerres américaines en Afghanistan et en Irak, avant de jouer un rôle de
premier plan dans le lancement d’une guerre impérialiste contre la Libye qui
a coûté 300 millions d’euros et 50.000 vies. Au taux d’échange du marché, le
budget militaire français s’élevait en 2010 à 65 milliards de dollars –
arrivant au troisième rang mondial après les Etats-Unis et la Chine.
Sarkozy fut le fer de lance des attaques profondes
contre les droits démocratiques. Un nombre record de 33.000 immigrants
furent expulsés de France en 2011 alors que Sarkozy appliquait des mesures
illégales telles que l’interdiction de la burqa et le ciblage ethnique des
Roms pour les déporter.
Ceci reflète la stratégie consciente de Sarkozy
pour tenter de rallier les électeurs du Front National (FN) d’extrême droite
en appelant aux sentiments néo-fascistes – une stratégie qu’il poursuit
actuellement dans sa campagne électorale. Ce fait a perturbé certains
éléments au sein de son propre camp. Dans une remarque extraordinaire,
Corinne Lepage, son ancienne ministre de l’Environnement, a trouvé
l’attitude de Sarkozy « extrêmement grave…. c’est comme ça qu’a commencé la
montée des fascismes en Europe dans les années 1930. »
Sarkozy poursuit néanmoins une série de gestes
calculés en direction du FN. En établissant son agenda en cas de réélection,
Sarkozy a réitéré son credo réactionnaire et paternaliste en faveur du
« travail », de la « responsabilité » et de l’« autorité » qui fut la base
de sa campagne en 2007. Dans une interview accordée le 10 février au
Figaro Magazine, il a dit : « Tout ce qui peut alléger le coût du
travail, récompenser l’effort, le mérite, faire la différence avec
l’assistanat, doit donc continuer à être mis en oeuvre de façon
systématique. »
A Marseille, Sarkozy a annoncé son intention en
cas de réélection, de recourir plus fréquemment aux référendums sur des
questions à propos desquelles il y aurait, comme il le dit par euphémisme,
« blocage» constitutionnel. Il en a cité deux exemples : les chômeurs et les
immigrés – tous deux serviraient de cibles pour attiser des sentiments
anti-ouvrier d’extrême droite.
Sarkozy demande un référendum pour obliger les
chômeurs à suivre une formation et pour accepter le premier emploi proposé
sous peine de perdre toutes leurs allocations.
Le 22 février lors d’une interview télévisée,
Sarkozy insista sur ses attaques contre la population laborieuse pour
mobiliser les préjugés droitiers contre les chômeurs de longue durée qui
touchent le Revenu de solidarité active (RSA – 418 euros par mois pour une
personne seule). Il leur demande de faire sept heures hebdomadaires de
travail obligatoire pour un salaire minimum de neuf euros l’heure. Un
million de chômeurs seraient touchés par cette mesure. « Le travail doit
être davantage récompensé que l’assistanat, » a dit Sarkozy faisant la leçon
aux chômeurs.
Des responsables de haut rang du gouvernement
Sarkozy lancent des appels déguisés en faveur d’un sentiment anti-immigrant,
comme le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, dans un commentaire du 4
février selon lequel « toutes les civilisations ne se valent pas ». (Voir
aussi :