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La guerre intérieure de Bush : vers un état policier

par le comité de rédaction du WSWS
7 novembre 2001

Depuis les attentats terroristes sur New York et Washington le 11 septembre, les États-Unis ont connu une transformation radicale de leur structure gouvernementale, des rapports de la population avec la police et les forces armées ainsi que du cadre constitutionnel et judiciaire.

La Maison blanche s'est octroyée de nouveaux pouvoirs importants de répression intérieure, établissant en vertu d'un ordre exécutif un Bureau de la sécurité intérieure qui n'est pas supervisé par le Congrès. De plus, la nomination des membres de ce bureau n'est pas soumise à un vote d'approbation du Congrès. Une agence unifiée de police politique est en train d'être créée avec la loi «anti-terroriste» qui regroupe en fait le FBI et la CIA et abolit la vieille séparation entre l'espionnage à l'étranger et le contre-espionnage domestique.

En parallèle avec les bombardements en Afghanistan, l'administration Bush a déclaré qu'il y avait un deuxième front de guerre, la guerre à l'intérieur. Le gouvernement fédéral lance des «alertes à la terreur» vagues et sans justifications, qui créent une anxiété chez la population sans pour autant lui offrir la moindre protection. Les porte-paroles du gouvernement demandent à la population d'accepter des mesures telles que les fouilles policières à l'improviste. Les barrages policiers au hasard sont maintenant partie prenante du quotidien. Les troupes de la garde nationale patrouillent les aéroports, les ports, les ponts, les tunnels et même le Capitole à Washington.

Les garde-fous fondamentaux offerts par la Constitution, tel l'habeas corpus, le droit d'un accusé à connaître les accusations qui sont portées contre lui et même la présomption d'innocence, ont été foulés aux pieds pour des millions d'immigrants du Moyen Orient et de l'Asie centrale. Le droit à la vie privée n'est plus qu'un souvenir pour l'ensemble de la population, les agences gouvernementales ayant le feu vert pour installer des micros sur les lignes, contrôler les transactions financières et entreprendre toute autre forme d'espionnage, à toutes fins pratiques sans la moindre entrave.

Si le 10 septembre l'on avait montré les États-Unis d'aujourd'hui à l'Américain moyen, sa réaction aurait probablement été : «Ce n'est pas les États-Unis que je connais. On dirait plutôt un État policier.»

C'est une amère ironie qu'un tel assaut contre les droits démocratiques soit mené au nom de la guerre pour défendre la «liberté» et la «démocratie» contre le terrorisme. Mais ni l'administration Bush, ni son collaborateur qu'est le Parti démocrate, ni une presse soumise et complice ne se donnent la peine d'expliquer pourquoi le gouvernement américain n'a jamais, de tout le vingtième siècle, concentré de tels pouvoirs entre ses mains. Ni lors de la Première guerre mondiale, ni de la Deuxième, pas plus qu'au cours de la guerre froide, lorsque les adversaires étaient de puissants États lourdement armés, n'a-t-on vu une restructuration de l'appareil gouvernemental et judiciaire comparable à celui que l'on voit aujourd'hui. Pourquoi en est-il ainsi, alors que l'ennemi est censé être un petit groupe de terroristes basé dans des cavernes d'un des pays les plus pauvres du monde ?

La loi anti-terroriste

Un des éléments cruciaux de l'assaut contre les libertés civiles est la nouvelle loi «anti-terroriste» qui fut votée à toutes vapeurs par le Congrès et est entrée en vigueur moins de cinq semaines après les attaques terroristes. La loi définit le terrorisme de telle façon qu'elle pourrait être utilisée pour restreindre des activités politiques et le droit de parole garantis par la Charte des droits de la constitution américaine. Elle octroie de larges pouvoirs aux agences policières, leur permettant d'effectuer des fouilles secrètes, de mener des opérations très étendues d'écoute électronique et de détenir indéfiniment des individus soupçonnés de terrorisme. Quelqu'un n'ayant pas la citoyenneté américaine, y compris un immigrant reçu, peut se voir interdire l'entrée aux États-Unis pour avoir exprimé son opinion politique et peut être déporté si l'on juge qu'ils a des liens même anodins avec une organisation déclarée terroriste par le gouvernement. Le procureur général, John Ashcroft, a fait passer le nombre d' organisations jugées telles de 46 à 74 la semaine passée.

La levée de la «séparation» qu'il y avait entre les agences du renseignement intérieur et extérieur est une des provisions les plus inquiétantes de la loi. La CIA a maintenant le pouvoir d'échanger des informations avec le FBI, et se trouve en fait à collaborer avec lui pour l'espionnage intérieur et la préparation des poursuites criminelles. De même, le FBI pourra transmettre à la CIA, sans qu'il soit nécessaire d'obtenir au préalable le consentement d'une cour, des informations recueillies lors de commissions d'enquête à huis clos, ce qui donnera à l'agence d'espionnage l'accès à des renseignements intérieurs qui lui étaient inaccessibles auparavant.

Le 4 novembre, le Washington Post a publié un article au titre menaçant : «Un géant du renseignement en gestation : la loi anti-terroriste donnera naissance à une organisation d'une ampleur sans précédent». L'article indique qu'en insistant sur les provisions de la loi ayant trait à l'écoute et à la surveillance électronique, la presse détournait l'attention des clauses qui modifiaient fondamentalement le fonctionnement des agences de renseignement américaines. Selon le Post, un des aspects les plus importants de la loi est le fait qu'elle «donne le pouvoir au gouvernement de faire passer la mission première du FBI de la résolution de crimes à la collecte d'informations à l'intérieur du pays».

La loi rend caduques les réformes législatives de la Foreign Intelligence Surveillance Act (loi sur le contre-espionnage) de 1978, qui séparait les enquêtes criminelles du FBI des opérations de collecte d'informations sur l'espionnage étranger et le terrorisme international. Le Post écrit: «la loi met en fait un terme à des mesures législatives de stricte séparation mises en place il y a 25 ans suite au Watergate, lorsque la population apprit avec stupeur que le président avait utilisé les services du renseignement contre des activistes politiques».

Ces changements dépassent la simple augmentation de certains pouvoirs d'enquête. Ils constituent une restructuration fondamentale de l'appareil de police et de renseignement pour accroître tant sa taille que la portée de ses activités.

Au cours des derniers jours, les représentants du gouvernement fédéral ont exigé que soient levées les limitations législatives sur les pouvoirs de la police municipale et de la police d'État. L'adjoint au procureur général, Larry Thompson, s'est plaint du fait que les agents du secrétariat à la Justice «n'ont pas assez d'yeux et d'oreilles» pour contrôler les personnes soupçonnées d'être des terroristes, et a ajouté que les limitations imposées aux services de polices municipaux «devraient être révisées».

Plusieurs services de police au niveau local ont déjà passé outre aux règles de collecte d'informations mises en place pour protéger les droits garantis par le Premier amendement. Le mois passé, la commission de la police de Los Angeles a voté pour assouplir les mesures qu'elle avait adoptées au début des années 1980 après des révélations publiques que la police espionnait des opposants à la guerre, des politiciens libéraux et d'autres dissidents politiques. Des corps policiers d'autres grandes villes se préparent à ressusciter les méthodes d'espionnage mises en oeuvre lors des opérations «escadron rouge».

Terroriser la population

Le 29 octobre, le gouvernement a émis sa deuxième alerte générale au terrorisme en moins de trois semaines. Déclarant qu'il fallait s'attendre à des attaques terroristes de grande ampleur contre les États-Unis ou des intérêts américains à travers le monde au cours des prochains jours, le Procureur général, John Ashcroft, n'a donné aucune indication sur les cibles, les moyens d'attaques ou les auteurs les plus probables. Il n'a donné aucune information qui viendrait appuyer son annonce d'un danger imminent, ni la moindre indication à la population sur la façon dont elle devait se préparer au danger. Toutefois, il a donné un conseil aux 18.000 agences de polices municipales et de polices d'État de «demeurer au plus haut niveau d'alerte et d'avertir immédiatement le FBI de toute activité inhabituelle ou suspecte».

Alors qu'il demandait à la population d'accepter les mesures extraordinaires, tels les barrages ou les fouilles aléatoires par la police ou la garde nationale, ou encore les interrogatoires par le FBI, Ashcroft a dit : «Nous demandons la patience et la coopération des Américains si jamais ils devaient subir des mesures supplémentaires prises par les agents de la paix municipaux, les autorités fédérales ou d'autres personnes responsables d'assurer la sécurité de la population».

Conséquence immédiate de l'alerte, les troupes de la garde nationale furent déployées dans plusieurs États à des centres de transport, des usines de traitement des eaux et des centrales nucléaires. Ces troupes venaient s'ajouter à celles déjà en place dans les principaux aéroports depuis les événements du 11 septembre.

À la fin de la semaine, le leader de la minorité en Chambre, Richard Gephardt, a annoncé que le Congrès avait obtenu l'appui des deux partis pour que des soldats armés soient affectés au Capitole. La Cour suprême a plus tard annoncé qu'elle interdirait l'accès du public à ses procès.

Le gouvernement a déclaré que les «alertes au terrorisme» avaient pour but d'avertir et de protéger la population. Mais sans informations plus précises sur la menace imminente, par exemple où et quand les terroristes ont-ils l'intention de frapper, qu'attend-on au juste de la population ? Des alertes aussi vagues sont essentiellement frauduleuses. Elles ont pour véritable objectif d'accoutumer la population aux invasions de la vie privée, au démantèlement des garanties constitutionnelles et à la militarisation généralisée de la société. Les autorités veulent que la population accepte le déploiement des troupes sur les sites des aéroports, des édifices publics, des ponts, des postes douaniers et dans les rues comme étant un fait normal de la vie.

L'administration Bush a saisi l'occasion que lui offraient les attaques à l'anthrax pour forcer la population à accepter d'autres atteintes aux libertés civiles. Même si les informations publiées à ce jour portent à croire que ce sont des éléments d'extrême-droite du genre Timothy McVeigh qui sont les principaux suspects dans cette affaire, la Maison blanche et les médias ont constamment suggéré que c'était Oussama Ben Laden qui était responsable des attaques à l'anthrax, décrivant Al Qaida comme une menace toute-puissante et pernicieuse.

Les alertes comme celles du 11 et du 29 octobre ont pour but de favoriser la consolidation d'un nouvel appareil de répression intérieure. Le 29 octobre, le jour même de la dernière alerte, Bush présidait la première réunion du Conseil de la sécurité intérieure. Cet organisme nouveau et sans précédent a pour membres, en plus de l'ancien gouverneur Tom Ridge qui fut nommé au poste de directeur, le vice-président, le procureur général, les secrétaires de la Défense, du Trésor, des Transports, de la Santé et des Ressources humaines ainsi que les dirigeants du CIA et du FBI. Les pouvoirs de ce Conseil aussi bien que ceux du Bureau de la sécurité intérieure sont vagues et indéfinis, et par conséquent pratiquement illimités.

À la suite de cette réunion, Bush a annoncé qu'une autre agence serait formée sans qu'il ne précise les pouvoirs policiers qui lui seraient dévolus : «la commission pour pourchasser les terroristes étrangers», dirigée par Ashcroft. La création de cette commission fait partie d'une nouvelle politique sur les frontières qui permettra au gouvernement d'interdire plus facilement l'entrée au pays aux immigrants qui auraient des liens présumés avec des terroristes et de prendre des mesures énergiques contre les demandeurs ou les détenteurs de visas étudiants.

Immigrants arrêtés en masse

Ces profonds changements ont lieu alors que l'étau de la sécurité nationale mis en place après le 11 septembre se resserre. Plus de 1.100 personnes sont maintenant sous les verrous. Bien que les représentants fédéraux refusent de dire combien de ces détenus ont été libérés, un porte-parole du département de la Justice a fait savoir qu' «une majorité» d'entre eux est encore en détention. L'arrestation de ces individus reste entourée de secret, le gouvernement ne fournissant aucunes informations quant à leur identité, les raisons de leur détention et les accusations portées contre eux.

Plusieurs sont gardés en isolement dans leurs cellules. Les familles de certains suspects sont sans nouvelles d'eux, tandis que d'autres n'ont pas d'avocat ou n'ont pas été autorisés à entrer en contact avec celui-ci. L'action légale lancée contre ces détenus se fait généralement devant des tribunaux siégeant en secret et dont les documents sont inaccessibles au public. Tout cela dans le but de garder les opérations que mènent les agences policières du fédéral et des états loin des yeux du grand public.

Des groupes de défense des droits et libertés, et quelques membres du Congrès, ont réclamé des informations à propos de ces détentions. Le département de la Justice a rejeté ces appels sans donner la moindre explication pour le maintien d'un si grand secret. Martin, directeur du Centre d'études sur la sécurité nationale, a jugé la conduite du gouvernement au cours de l'enquête «dangereusement proche de la pratique qui consiste en Amérique latine à faire 'disparaître' des gens».

Après chacun des deux états d'alerte nationale contre le terrorisme décrétés depuis le 11 septembre, le nombre de victimes de ces rafles policières a vite augmenté, triplant au cours des dernières semaines. L'un des buts premiers de ces états d'alerte est de lancer un signal à la police pour qu'elle intensifie ses activités de surveillance et emprisonne encore plus de suspects.

Bien que les attentats meurtriers sur le World Trade Center et le Pentagone aient servi de prétexte à ces arrestations en masse, pas une seule accusation liée aux attaques du 11 septembre n'a été portée contre un quelconque détenu. Le département de la Justice admet lui-même que des soupçons non prouvés de liens avec les pirates de l'air ne pèsent que sur 10 ou 12 de ces détenus. La grande majorité des arrestations vise un autre but, qui n'a rien à voir avec une quelconque enquête sur l'attaque terroriste : il s'agit d'intimider la population immigrée et d'habituer le peuple américain en son entier à des méthodes associées jusqu'à présent à des dictatures militaro-policières.

Une «guerre sur deux fronts»

Des représentants du gouvernement ont insisté sur le fait que les mesures anti-terroristes adoptées dans les dernières semaines ne devaient pas être considérées comme étant temporaires. Lors d'un point de presse le 29 octobre, Ridge a déclaré : «Nous voulons que l'Amérique soit en haut niveau d'alerte. Et de temps en temps, il se peut qu'on émette un nouvel avis d'alerte générale.»

Le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld a ouvertement affirmé dans le Washington Post du 1er novembre que le peuple américain devait non seulement accepter une guerre indéterminée contre le terrorisme, mais aussi «se préparer à la prochaine guerre, qui pourrait bien être très différente non seulement de celles du siècle écoulé, mais aussi de la nouvelle guerre contre le terrorisme que nous menons aujourd'hui». Autrement dit, l'Amérique se met sur un pied de guerre, non pas pour la durée d'un conflit déterminé en Afghanistan, mais de façon indéfinie. Par conséquent, les mesures policières intérieures prises aujourd'hui par le gouvernement doivent aussi être acceptées comme un état de choses permanent .

Un nouveau refrain a fait son apparition dans les déclarations officielles de l'administration Bush : l'Amérique mène «une guerre sur deux fronts». En lançant une alerte au terrorisme la semaine dernière, Ashcroft a déclaré : «J'ai confiance que le peuple américain comprendra le conflit dans son contexte, c'est-à-dire un front à l'étranger et un autre front ici aux États-Unis.»

Ridge a déclaré le lendemain: «Nous sommes engagés dans une guerre sur deux fronts contre le terrorisme». Dans un discours prononcé le 31 octobre pour prôner son plan de stimulus économique, Bush a répété cette litanie: «Pour la première fois dans l'histoire de notre nation, une partie de la bataille se joue à l'intérieur du pays».

La signification exacte de cette «guerre sur deux fronts» n'est jamais expliquée. Mais à la lumière des mesures de sécurité extraordinaires prises par le gouvernement depuis le 11 septembre, les références à une bataille menée sur le «front intérieur» prennent un sinistre sens. Par leur tentative de créer une atmosphère de crainte et d'hystérie au sujet de menaces terroristes imminentes, les autorités veulent faire passer tous ceux qui ont été détenus dans le cadre de leur enquête, qu'il y ait ou non des preuves contre eux, comme «l'ennemi». Les mêmes méthodes seront utilisées contre ceux qui s'opposent à la guerre contre l'Afghanistan et aux autres politiques du gouvernement, tant sur le plan international que national.

Avant et après le 11 septembre

Les gestes posés par le gouvernement dans la période qui a suivi le 11 septembre constituent l'attaque sur les droits et libertés la plus sérieuse et la plus soutenue dans l'histoire des États-Unis. Personne ne devrait croire que c'est seulement en réaction aux attaques sur le World Trade Center et le Pentagone. De telles mesures sont réclamées depuis longtemps par les sections les plus à droite de l'élite dirigeante, qui ont exploité les événements tragiques du 11 septembre pour réaliser leur projet de politique intérieure, tout comme elles s'en servent pour lancer une intervention militaire américaine dans l'Asie centrale riche en pétrole.

Ces vastes changements sont le point culminant de deux décennies de réaction politique et d'assaut sur les droits démocratiques. Deux décennies qui ont vu un accroissement régulier des forces répressives de l'état, y compris l'emprisonnement de deux millions d'Américains, la mise de milliers d'autres en attente d'une peine de mort, des restrictions légales des droits des accusés, et l'extension des pouvoirs policiers d'espionnage et de surveillance électronique. Il y a parallèlement eu l'apparition d'une droite aux penchants fascistes sans grand soutien populaire mais jouissant d'une énorme influence au sein du parti républicain, du Congrès et maintenant à la Maison blanche.

Ceux qui prétendent que la récente escalade de l'assaut sur les droits et libertés n'est qu'une réponse au 11 septembre passent sous silence le fait critique que l'administration Bush est montée au pouvoir sur la base d'un assaut sans précédent sur le droit démocratique le plus élémentaire, le droit de vote. La campagne menée par Bush et le parti républicain pour voler l'élection et prendre le pouvoir, même après avoir perdu le vote populaire à l'échelle nationale, a été sanctionnée par une décision de la majorité de droite de la cour suprême américaine. Celle-ci a stoppé le décompte manuel prescrit par la loi dans l'état clé de la Floride, et donné ainsi la présidence à Bush. Un gouvernement qui prend le pouvoir au moyen de la fraude et de la conspiration doit gouverner par les mêmes méthodes.

Il s'agit d'une administration dont la politique intérieure et extérieure est taillée sur mesure pour la couche la plus riche et la plus privilégiée de la société américaine. C'est aussi une administration de crise. Avant les attaques terroristes, l'administration Bush montrait tous les signes d'un désarroi interne. Sa base sociale de soutien déjà mince se voyait minée par l'impact d'une récession économique grandissante, tant aux États-Unis qu'à l'échelle internationale.

Les républicains avaient perdu contrôle du Sénat, et au niveau international, l'administration Bush était de plus en plus isolée, tant ses alliés nominaux que ses ennemis condamnant sa posture agressive et unilatérale. Les événements du 11 septembre ont été vus par ceux qui dirigent l'administration Bush comme l'occasion de renforcer le gouvernement et rallier un soutien populaire en lançant un assaut militaire sur les supposés coupables. Il fallait au même moment se préparer à une éruption des luttes sociales face à la hausse du chômage, la récession grandissante et la politique pro-patronale du gouvernement. Pour ce faire, il fallait élargir et restructurer les pouvoirs répressifs de l'état.

La campagne «anti-terroriste» menée par l'Administration Bush à l'intérieur des États-Unis doit être un sérieux avertissement. Après la débâcle de la Floride en novembre et décembre 2000, de nombreux commentaires complaisants avaient paru dans la presse. Leur thème commun était que, contrairement à d'autres pays, la lutte politique amère ayant fait rage aux États-Unis ne s'était pas terminée avec l'apparition de tanks dans les rues. Maintenant les tanks sont dans les rues, et des soldats encerclent le Capitole, dans ce qu'on pourrait appeler un coup d'état au ralenti.

Toutes les normes traditionnelles de la démocratie bourgeoise aux États-Unis sont remises en question. L'administration Bush exprime le mépris pour la démocratie que ressentent de puissantes sections de l'oligarchie industrielle et financière des États-Unis, ainsi que leurs alliés aux penchants fascistes réunis au sein de la droite chrétienne, du lobby pour la possession d'armes à feu, et des milices. Tous ces éléments sont déterminés à aller aussi loin qu'ils le peuvent dans l'établissement d'un régime autoritaire. Des concepts tels que la séparation des pouvoirs entre les trois branches du gouvernement et le contrôle législatif de l'exécutif sont mis au rancart dans une tentative de renforcer les pouvoirs policiers de l'exécutif fédéral.

Ça vaut la peine de noter qu'au plus haut point de la grande peur de l'anthrax, à la mi-octobre, les républicains du Congrès réclamaient la fermeture et un ajournement indéfini du Congrès. Cela aurait facilité leur tentative d'aplanir tous les obstacles devant Bush, le FBI, la CIA et les forces armées, et de donner carte blanche à ces éléments dans les opérations qu'ils mènent tant à l'étranger qu'à l'intérieur du pays.

La guerre de l'administration Bush contre les droits démocratiques a mis à nu l'incapacité du parti démocrate à offrir la moindre opposition sérieuse aux forces d'extrême-droite qui dominent le parti républicain. En l'espace de quelques heures après les attaques du 11 septembre, les Démocrates promettaient un appui inconditionnel à la Maison blanche de Bush, déclarant que la dissidence politique n'était plus acceptable. La direction démocrate s'est non seulement mise au pas pour donner à Bush un mandat illimité pour mener la guerre à l'étranger, elle a aussi assuré le passage de sa loi «anti-terroriste». Elle a aussi torpillé toute enquête sur l'échec inexpliqué des services de renseignement qui a permis les attaques du 11 septembre, et cautionné la destruction des protections constitutionnelles.

L'effondrement politique du Parti Démocrate est le point culminant d'un long processus d'adaptation aux sections les plus à droite de l'élite dirigeante. Dans leur réponse pleine de lâcheté d'abord à la conspiration républicaine pour la destitution de Clinton, puis au vol des élections de l'an 2000, les Démocrates avaient déjà démontré qu'ils ne pouvaient, ni ne voulaient, défendre les droits démocratiques.

Même si pour le moment la grande majorité de ceux qui ont été saisis dans l'étau du gouvernement sont des immigrants originaires du Moyen-Orient et de l'Asie Centrale, c'est seulement une question de temps avant que ces méthodes anti-démocratiques ne soient plus largement utilisées. L'offensive tous azimuts sur les droits démocratiques ne peut être combattue que par l'organisation de la classe ouvrière en tant que force indépendante qui unisse toutes les sections des travailleurs, qu'ils soient immigrés ou nés aux États-Unis, dans une lutte politique contre l'oligarchie financière et ses représentants politiques.

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