Le gouvernement hongrois approuve le travail obligatoire pour les chômeurs

S’appuyant sur une majorité des deux tiers, le parti au pouvoir Fidesz, dirigé par le premier ministre Victor Orban, a adopté le 11 juillet au parlement hongrois une loi permettant de soumettre les chômeurs à un service de travail obligatoire. Ceux qui refusent d’accepter de telles formes d’emplois obligatoires perdront tous leurs droits aux allocations. Ce soi-disant « programme de l’emploi hongrois » fait partie de la dernière série d’attaques brutales perpétrées par Orban contre la population hongroise et s'accompagne d'un renforcement supplémentaire des structures d’Etat autoritaire.

Ce programme de l’emploi permettra au gouvernement d’économiser 225 millions d’euros par an et rendra aussi plus facile une réduction massive du niveau national des salaires. Le salaire perçu en échange de ce travail forcé est fondé sur le taux de l’aide sociale de 28.500 forints (110 euros) par mois, soit une somme inférieure à la moitié d’un salaire mensuel minimum de 78.000 forints.

Ces dernières années des milliers de salariés du public ont été licenciés, ce qui a provoqué un manque de personnel dans certains secteurs. Le programme de l’emploi permettra de libérer des travailleurs pour qu’ils soient exploités dans des projets de travaux obligatoires pour le compte de grands projets publics liés à l’infrastructure et à l’agriculture. Les médias hongrois ont fait état de construction de terrains de football, de chantiers routiers, d’entretien du système de drainage et de construction de barrages d’irrigation comme exemples du nouveau « travail d’intérêt général. »

400 000 Hongrois sont immédiatement éligibles pour effectuer ce genre de travail. Dans une récente interview, Orban a clairement dit, qu’à son avis, un tel travail obligatoire s’imposait de toute urgence. A l’avenir, des barrages seront construits, « non pas en recourant à la technologie du 21ème siècle (…), mais à la main. »

Le programme prévoit que le chômeur peut être utilisé soit pour des projets publics soit « prêté » à des entreprises privées. Ce n’est certainement pas une coïncidence que ces programmes ont été annoncés lors de la récente visite en Hongrie du premier ministre chinois Wen Jiabao. Outre le rachat à grande échelle d’obligations d’Etat, la Chine projette également d’investir dans des projets industriels et d’infrastructure du pays.

Afin d’accroître l’armée de travailleurs forcés potentiels, la durée de paiement des allocations chômage passera de 270 jours actuellement à 180 jours. Parallèlement, le ministère de la Santé a annoncé que les dossiers d’environ 220.000 retraités titulaires d’une rente d’invalidité seront réouverts. Leur état de santé sera réexaminé. Ceux considérés être en mesure de faire un travail quelconque perdront alors leur statut d’invalide, et seront par là déclarés aptes pour le travail obligatoire.

Dans le même temps, la nouvelle loi fournit un certain nombre d’avantages aux employeurs qui, comme l’a déclaré le Wall Street Journal, donnera « aux entrepreneurs une plus grande marge de manœuvre. »

    Les règles concernant les chômeurs ont été drastiquement resserrés. Si la distance entre le lieu du travail obligatoire et leur domicile dépasse un trajet de deux heures, ils seront hébergés sur place dans des casernes locales.

La minorité Rom hongroise qui compte pour près de 8 pour cent de la population a été la plus durement touchée par ces mesures. En raison de la discrimination omniprésente le taux de chômage avoisine plus de 50 pour cent dans la communauté Rom et, dans certaines régions, il est proche de 80 pour cent.

D’après le gouvernement, des groupes de travailleurs forcés seront surveillés par des policiers à la retraite. Des milliers de policiers à la retraite qui ont du mal à joindre les deux bouts avec leur retraite de misère seront plus ou moins obligés de reprendre le travail.

On ne peut attendre aucune opposition au « programme d’emploi » de la part du parti socialiste d’opposition (le Parti socialiste hongrois, MSzP). Il y a trois ans, le gouvernement précédent dirigé par le MSzP avait avancé des projets identiques. A l’époque, les syndicats avaient certes critiqué le gouvernement mais seulement parce que la suppression d’emplois stables à plein temps affaiblissait le « pouvoir de négociation » des syndicats.

Encouragé par la duplicité des syndicats, Orban a pris d’autres mesures en faveur de structures d’Etat autoritaire. Le gouvernement a récemment pourvu tous les cinq postes vacants à la Cour constitutionnelle avec ses propres candidats. Les cinq nouveaux juges sont fidèles au gouvernement et certains sont mêmes des membres influents du Fidesz. Le nouveau juge à la Cour constitutionnelle, Istvan Balsai avait autrefois été ministre de la Justice et est actuellement député de Fidesz, tandis que le procureur Peter Szalay assiste de nombreux dirigeants du parti en matière juridique. ­

Les nominations sont basées sur une nouvelle loi qui accroît le nombre de juges à la Cour constitutionnelle. Précédemment, un poste vacant avait été pourvu par Istvan Stumpf, ancien chef de cabinet du gouvernement Orban.

Le parlement a aussi approuvé une disposition permettant à la police « dans des cas exceptionnels » d’interroger des « suspects » pendant 24 heures sans la présence d’un avocat. Ceci représente une réduction de la période initiale (de 48 heures) proposée par le gouvernement, mais ne change rien au fait qu’un Etat membre de l’Union européenne et qui a assuré la présidence de l’UE durant les six premiers mois de l’année, permette à présent que des personnes soient interrogées en toute absence de témoins et de conseil juridique.

A la mi-juillet, la loi sur les médias a aussi connu un durcissement en Hongrie. Cette mesure était allée de pair avec une véritable purge en ce qui concerne les journalistes. La semaine passée plus de 570 sur un total de 3.400 membres du personnel des quatre groupes de médias publics – Magyar Radio, MTI, Duna TV et MTI – ont été démis de leurs fonctions. Les renvois ont été rendus publics entre le 6 et le 8 juillet et se poursuivront cette semaine dans les studios régionaux de cinq grandes villes. Des centaines d’autres licenciements sont prévus pour la fin de l’année.

Le président de la Fédération européenne des journalistes, Arne König, a déclaré : « Ceci ressemble à une véritable purge qui a lieu quelques jours à peine après la fin de la présidence hongroise de l’UE et après l’entrée en vigueur effective de la nouvelle loi sur les médias… Nous sommes alarmés par le nombre d’emplois concernés et aussi par le soupçon que certains de ces licenciements pourraient être politiquement motivés. »

De plus, la pression est renforcée sur les chaînes de TV et les stations de radio. Elles ne seront plus autorisées à demander l’attribution de fréquences de diffusion si elles ont des dettes envers l’autorité de surveillance des médias (NMHH). De telles dettes peuvent être sous forme de droits ou d’amendes. En vertu de la loi passée en décembre, des amendes peuvent être infligées par la NMHH pour ce qu’elle considère être un contenu éditorial anti-gouvernemental.

Par ailleurs, il est permis à la NMHH de décider annuellement quelles chaînes de télévision et quelles stations radio continuent à opérer. La production de nouvelles des organismes du service public MTI et de Duna TV, de la radio et des agences de presse MIT a déjà été soumise à un contrôle par un soi-disant « centre d’information ».

Ces mesures fermant des avant-postes susceptibles d’émettre des opinions critiques ont été prises délibérément par le gouvernement Fidesz en prévision de la vaste opposition sociale contre les coupes sociales qu’il va perpétrer.

(Article original paru le 21 juillet 2011)

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