Le NPA fait une critique cynique et impuissante des expulsions de Roms en France

Les expulsions racistes de Roms menées par Parti socialiste (PS), dont le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) a soutenu l’élection, révèlent le caractère réactionnaire du soutien apporté par le NPA au PS. Le NPA tente de cacher sa part de responsabilité dans la persécution des Roms en gardant un silence quasi-total sur le sujet.

L’unique commentaire publié par le NPA sur la persécution des Roms, daté du 5 octobre, adresse des critiques impuissantes et cyniques face à l’expulsion de Roms à Marseille.

Le 30 septembre, la ville de Marseille avait porté plainte pour obtenir l’expulsion des Roms installés dans un entrepôt désaffecté du 15e arrondissement. Le 27 septembre ils avaient fui leur campement, sous la pression d’un groupe d’habitants hostiles. Le magazine Médiapart du 2 octobre cite un Rom s'exprimant au sujet de l’expulsion : « Des personnes arabes et marocaines sont venues avec des bouteilles d’essences et des armes, ils nous ont dit de partir, sinon ils allumaient le feu. On a appelé la police mais les policiers aussi nous ont demandé de partir ».

L’expulsion s’est déroulée avec le soutien de la sénatrice PS des 15e et 16e arrondissements de Marseille, Samia Ghali, qui avait auparavant reçu la visite du ministre de l’Intérieur, Manuel Valls et de la Garde des Sceaux, Christiane Taubira. Taubira avait déclaré que l’ordre était revenu à Marseille. Suite à cela l’Etat avait permis à la police d’expulser les Roms—même après l’émeute réactionnaire du 27 septembre. Les derniers Roms de Marseille ont été expulsés la semaine dernière.

Le NPA a réagi en publiant un communiqué intitulé "Roms : à Marseille, les sinistres émules de Valls." Racontant l’arrivée de militants du Réseau éducation sans frontières (RESF) qui nettoient un coin de rue pour abriter des Roms expulsés, il écrit : « On pense bien sûr aux pogroms, aux milices fascistes. Quelque chose a changé : après la droite décomplexée, menant la politique dont le FN [le Front National néo-fasciste, ndlr] rêvait, c’est la gauche sécuritaire et raciste de Valls qui s’active, justifiant l’action des riverains ».

Ce commentaire d’un cynisme répugnant laisse sans réponse une question essentielle: Quelle est la position du NPA face au développement d'un climat et de tendances fascistes en France ?

Le NPA choisit de passer sous silence le fait qu’il a appelé à voter pour la « gauche sécuritaire et raciste » lors des élections présidentielles. Par ce geste sans ambiguïté, il a indiqué son soutien à François Hollande, alors même que celui-ci se préparait à se baser sur des forces sociales que le NPA compare maintenant à la Milice fasciste du régime de Vichy.

Le NPA ne peut pas prétendre qu’il ignorait qu’une fois élu président, Hollande mènerait une politique anti-Roms. Déjà au mois de février, presque trois mois avant son élection, Hollande avait annoncé qu’il apporterait une « solution » à la présence des Roms en France en limitant leur droit de circulation et en les mettant dans des camps. (Lire également : Le candidat PS à la présidentielle demande l'internement des Roms )

Le NPA a donc soutenu le PS « sécuritaire et raciste » en toute connaissance de cause. Maintenant que le caractère de la politique du PS est établi dans les faits, le NPA persiste dans son orientation envers le PS et « exige » mollement que Valls mène une politique moins réactionnaire.

Ainsi, dans son communiqué le NPA écrit que « l’Etat a les moyens de prendre les mesures nécessaires pour accueillir dignement les Roms. Nous exigeons qu’il le fasse et qu’il mette un terme aux surenchères sécuritaires et racistes qui visent à diviser les classes populaires ».

Cet aveu que le PS vise à diviser les travailleurs avec ses « surenchères sécuritaires et racistes » ne fait que souligner le caractère irréaliste et réactionnaire de l’illusion qu’une brève protestation du NPA infléchira sa politique. Le président Hollande poursuit des « surenchères sécuritaires et racistes », parce qu’il doit diviser les travailleurs pour mettre en place sa politique d’austérité impopulaire.

Alors même que l’encouragement de persécutions et de tendances néo-fascistes par le PS est évident, le NPA ne met pas en avant une perspective pour le renverser. C’est dire que le NPA soutient le PS malgré sa politique anti-Roms, et qu’il ne considère pas la montée de tendances d’extrême-droite comme menaçant ses intérêts de classes fondamentaux.

Entre la classe ouvrière et les couches sociales représentées au sein du NPA—la bureaucratie syndicale, une couche d’universitaires et d’étudiants, et la périphérie de la « gauche » bourgeoise au sein de la haute fonction publique—le gouffre social se creuse.

Les travailleurs sont en colère contre les mesures d’austérité et contre les licenciements de masse organisés par le PS. Hollande est récemment passé dans les sondages à 64 pour cent d’opinions négatives, et le gouvernement craint une explosion sociale. Il compte donc accélérer les attaques contre les Roms pour continuer à diviser les travailleurs et tenter de faire oublier les problèmes sociaux que sa politique va exacerber.

Le 15e arrondissement où s’est déroulée la persécution anti-Roms fait partie des quartiers les plus pauvres de Marseille, avec un taux de chômage élevé et une importante population immigrée durement frappée par la crise. La misère sociale y est de plus en plus visible, avec l’envolée du chômage. Avec le 16e arrondissement, il constitue le fief électoral de Samia Ghali.

Française d’origine algérienne, Ghali a commencé sa carrière en 1995 comme conseillère PS de Guy Hermier, maire de ce secteur et membre du Parti communiste français. Elle a adopté des positions de plus en plus proches de l’extrême-droite à mesure que le score du FN progressait dans le secteur, suite aux désillusions populaires face au clientélisme des PCF et PS locaux, et la politique anti-ouvrière menée par ces partis à l’échelle nationale.

Elle a attiré l’attention des journaux avec sa proposition réactionnaire de militariser les banlieues, pour mettre fin aux règlements de comptes entre bandes rivales se disputant le marché de la drogue à Marseille. Elle a déclaré au journal La Provence: « Aujourd'hui, face aux engins de guerre utilisés par les réseaux, il n'y a que l'armée qui puisse intervenir. Pour désarmer les dealers d'abord. Et puis pour bloquer l'accès des quartiers aux clients, comme en temps de guerre, avec des barrages. Même si cela doit durer un an ou deux, il faut tenir. »

Ces commentaires reflètent le virage très rapide vers la droite d’une section de l’administration locale française dont fait partie Ghali. La position incohérente du NPA provient du fait qu’il est orienté vers cette couche sociale, mais qu’il tente toujours, de temps en temps, de faire croire qu’il s’oppose à leur politique.

Ainsi, à la fin de son communiqué, le NPA propose « un plan d’urgence face au chômage, aux discriminations à l’embauche, au mal-logement doit être lancé afin que l’ensemble des quartiers Nord de Marseille, Roms compris, trouve une solution commune à cette crise qui attise les haines et aggrave la misère de toutes et tous ».

Le NPA ne s’adresse, bien sûr, pas à la classe ouvrière, qui est systématiquement absente de ses articles. Selon le NPA, il s’agit « surtout d’imposer à la préfecture l’organisation d’une solution ». Le NPA veut donc faire adopter son programme pour défendre les Roms aux dirigeants et à la police qui viennent de participer à l’expulsion des Roms !

La persécution des Roms en France est un avertissement sérieux à la classe ouvrière. Face à la montée des tensions politiques et des tendances sociales les plus réactionnaires, le NPA et toute l’ex-gauche petite bourgeoise se sont déjà rangés contre les travailleurs, du côté de la répression et de l’ordre établi.

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