Perspectives

Berlin et Washington fomentent la guerre civile en Ukraine

Les récents événements survenus en Ukraine sont un avertissement à la classe ouvrière. Ils montrent clairement que les dirigeants politiques à Washington, Berlin et Bruxelles sont prêts à diviser le pays et, pour arriver à leurs fins géopolitiques, à le pousser vers la guerre au risque de déclencher un embrasement de toute la région.

Après l’échec de l’opposition ukrainienne et de ses partisans occidentaux dans le renversement du président Viktor Ianoukovitch au moyen de manifestations pour remplacer son régime par un gouvernement plus favorable à l’UE, des bandes fascistes armées sont mobilisées pour atteindre ce but.

Kiev a connu mardi les affrontements les plus sanglants depuis le début des protestations il y a trois mois. Vingt-six personnes, dont plusieurs policiers, ont été tuées et un millier d’autres ont été blessées lorsque des bandes armées de pavés, de fusils et de bombes incendiaires se sont livrées à de violentes batailles de rue avec les forces de l’ordre.

Même les organes de presse occidentaux, qui ont fait de la propagande en faveur d’un soutien de l’opposition, n’ont pu ignorer le rôle joué par les forces d’extrême droite dans ces violentes protestations. Le Financial Times a rapporté que « Certains manifestants, portant des tenues de camouflage, des casques et des gilets pare-balles, ont répliqué avec ce qui semblait être des pistolets. » Le même journal a écrit : « Le Secteur droit (Praviy Sektor), l’un des groupes de protestations les plus militarisés, a exhorté les citoyens possédant des armes à feu à rejoindre le camp des protestataires. »

La chaîne de télévision allemande d’informations en continu N24 a rapporté que les « radicaux du Secteur droit ont détourné le mouvement de protestation. » Relevant que le groupe se composait de partisans d’organisations d’extrême droite du pays entier, » elle a ajouté, « Avec leur visage dissimulé derrière des masques ou des casques, ils attaquent la police de Kiev à l’aide de gourdins et de barres de fer. »

Les gouvernements américain et allemand soutiennent ces groupes paramilitaires néofascistes dans le but d’accroître la pression exercée sur Ianoukovitch et son gouvernement. Le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung l’a exprimé carrément. « Peu importe que ce soit les opposants radicaux du régime ou les forces de sécurité qui ont recouru en premier à la violence mardi, » a souligné le journal. « La seule chose qui peut actuellement venir en aide c’est la rapide démission de Ianoukovitch. »

Lundi, la chancelière allemande, Angela Merkel, a chaleureusement reçu les dirigeants de l’opposition ukrainienne, Arseny Iatseniouk et Vitali Klitschko, mais sans accepter leur appel en faveur de sanctions. Après les émeutes sanglantes à Kiev, elle a toutefois changé d’avis en exprimant son appui pour l’imposition de sanctions contre le gouvernement Ianoukovitch. Lors d’une apparition commune avec le président français François Hollande, elle a dénoncé la brutalité des forces de l’ordre en Ukraine. 

Des commentaires identiques ont émané du gouvernement américain qui a demandé au gouvernement ukrainien de retirer sa police anti-émeute. « Il y aura des conséquences si les gens dépassent la limite, » a averti le président Barack Obama.

Le fait que Berlin et Washington sont prêts à exploiter à leurs propres fins les services de bandes paramilitaires fascistes démasque la propagande officielle affirmant que ce qui est en jeu en Ukraine c’est l’Etat de droit et la démocratie. En fait, l’objectif c’est le remplacement du régime d’Ianoukovitch par un régime se distançant de la Russie et se subordonnant à l’Union européenne, et qui soumette la classe ouvrière ukrainienne à une brutale politique d’austérité.

C’est également l’objectif de l’opposition dirigée par Klitschko, Iatseniouk et Oleg Tyagnibok, dont le parti Svoboda vénère publiquement le collaborateur nazi Stepan Bandera et défend l’antisémitisme et le racisme.

La bataille pour l’Ukraine fait partie des efforts entrepris par les Etats-Unis et les puissances européennes pour intégrer l’ensemble de l’Europe de l’Est dans leur sphère d’influence et isoler la Russie. Ce processus avait débuté avec la restauration du capitalisme et s’est poursuivi avec l’intégration des anciens pays du bloc de l’Est et des Etats baltiques dans l’OTAN et l’UE et doit à présent être élargi à de vastes portions de l’ancienne Union soviétique.

Avec son réseau de gazoducs énergétiques, de bases militaires stratégiquement importantes et son industrie lourde, l’Ukraine est une cible attrayante pour l’impérialisme américain et européen. Par deux fois au cours du siècle dernier, en 1914 et en 1941, l’impérialisme allemand avait envahi l’Ukraine. Durant la Deuxième Guerre mondiale, les armées hitlériennes ont massacré des millions d’Ukrainiens. 

L’Ukraine sert aussi de base pour attirer d’autres anciennes républiques soviétiques dans la sphère d’influence de l’UE. Dans un article rédigé pour Carnegie Europe, la journaliste Judy Dempsey a qualifié la crise en Ukraine « de chance à saisir pour l’UE. » Elle a poursuivi en disant : « Maintenant, le moment est venu pour l’UE d’avoir du succès et pas seulement en Ukraine mais aussi en Géorgie et en Moldavie. »

La mise en place d’un régime marionnette en Ukraine ou le découpage impérialiste du pays visent en dernier ressort la Russie même. Divers groupes de réflexion sont en train d’examiner les tensions ethniques et politiques qui sont susceptibles de provoquer un changement de régime en Russie ainsi qu’un démembrement du pays.

La politique poursuivie en Ukraine par Washington, Berlin et Bruxelles, avec le soutien de leurs alliés droitiers et fascistes, est dirigée contre les droits sociaux et démocratiques de la classe ouvrière. Ils courent le risque d’une guerre civile et accroissent le danger d’une confrontation militaire avec la Russie.

La classe ouvrière ukrainienne ne peut pas éviter ces dangers en soutenant le camp d’Ianoukovitch. Son régime est corrompu et en faillite. Il représente une autre faction d’oligarques que ceux qui soutiennent l’opposition. Ils sont tous d’accord lorsqu’il est question de piller les biens publics et d’appauvrir et de réprimer la population laborieuse.

L’unique voie pour aller de l’avant pour la classe ouvrière est la construction d’un parti socialiste indépendant luttant pour l’expropriation des oligarques et la nationalisation des banques et grands groupes, tout en rejetant de manière intransigeante l’impérialisme et le nationalisme et en menant une lutte pour unifier les travailleurs d’Ukraine aux travailleurs de Russie, d’Europe et du reste du monde.

(Article original paru le 20 février 2014)

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