France : Le Front de Gauche critique hypocritement la politique de Hollande dans la crise ukrainienne

Après avoir approuvé le coup d’Etat fasciste à Kiev qui a renversé en février le gouvernement élu pro-russe du président Viktor Ianoukovitch, le gouvernement PS (Parti socialiste) du président François Hollande s’aligne une fois de plus derrière Washington et Berlin. Il soutient les troupes du régime de Kiev et ses alliés fascistes au sein de la milice de Secteur droit dans leur répression des forces pro-russes en Ukraine orientale, en intensifiant le risque d’un affrontement militaire avec la Russie.

Alors que le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) a directement soutenu le coup d’Etat le qualifiant de soulèvement en faveur de la « démocratie », Jean-Luc Mélenchon, un dirigeant du Front de Gauche et ancien ministre PS, critique hypocritement la politique étrangère du PS et son alignement sur les fascistes ukrainiens.

Dans une note de blog du 24 avril intitulée « L’Ukraine, gouffre de la raison politique, » il écrit : « Les Etats-Unis et l’Europe, dans leur sillage, sont engagés en Ukraine dans une stratégie d’engrenage absurde face à la Russie. » Il fait remarquer que l’UE soutient à Kiev un régime qui est composé, « comme on le sait de ministre néo-nazis membres du parti Svoboda. »

Il cite la résolution 2012 de l’UE demandant aux « partis démocratiques siégeant au parlement ukrainien à ne pas s’associer avec le parti Svoboda, ni à approuver ou former de coalition avec ce dernier. »

Les critiques du PS faites par Mélenchon ne sont que de la démagogie vide de sens. Alors que les questions qu'il soulève montrent que la classe dirigeante française est engagée dans une politique criminelle et téméraire, elles sont avant tout un réquisitoire contre le propre rôle réactionnaire joué par Mélenchon.

Tandis que le PS soutient les fascistes en Ukraine en encourageant un affrontement avec la Russie qui pourrait aboutir en une guerre mondiale, il bénéficie de l’appui du Front de Gauche qui est composé d’alliés de longue date du PS comme le Parti communiste français stalinien (PCF), le Parti de Gauche (PG) de Mélenchon et diverses scissions du NPA. Mélenchon lui-même avait appelé à voter Hollande sans condition au second tour des élections présidentielles de 2012.

Une authentique figure de gauche qui formulerait les critiques de Mélenchon à l’encontre du PS lancerait un avertissement contre le risque d’une guerre nucléaire mondiale et le fascisme en cherchant à mobiliser l’opposition de la classe ouvrière contre le capitalisme et le gouvernement PS. Mélenchon et les autres démagogues petits bourgeois réactionnaires du Front de Gauche, par contre, font tout leur possible pour lier la classe ouvrière à l’impérialisme. Ils soutiennent le PS alors même qu'ils sont tout à fait conscients des dangers terribles que pose la politique de Hollande.

Mélenchon est resté totalement silencieux sur le massacre de vendredi des manifestants pro-russes à Odessa qui a été perpétré par la milice néo-fasciste de Secteur droit soutenue par le camp impérialiste.

Mélenchon excelle dans la formulation de critiques cyniques, limitées, de la politique gouvernementale en restant entièrement dans les confins de la politique pro-impérialiste. Il se lamente de ce que « l’alignement de François Hollande sur la politique internationale des Etats-Unis a rendu la France largement inaudible dans la crise ukrainienne. »

Suite au déploiement provocateur par la France de navires de guerre en Mer noire, Mélenchon a écrit : « Cette surenchère militaire française dans le sillage des Etats-Unis est une erreur politique. Je la condamne. Elle est absolument contraire aux intérêts de notre pays et à la nature de nos relations avec la Russie. »

L’attitude de Mélenchon qui se présente en homme d’Etat sage et pacifiste est une fraude répugnante. Malgré ses fréquents épisodes de rhétorique anti-américaine chauvine qui expriment son hostilité envers l’unité de la classe ouvrière internationale, Mélenchon a défendu toutes les guerres que l’impérialisme américain et français a menées conjointement ces derniers temps.

Il fut ministre dans l’impopulaire gouvernement de la « gauche plurielle » dirigé par le PS lorsque la France s’était associée à l’invasion de l’Afghanistan par l'OTAN en 2001. Plus récemment, il a soutenu la guerre de l’OTAN en 2011 en Libye et, sous Hollande, l’invasion française du Mali en 2013, effectuée avec l’appui logistique et les services de renseignement de Washington.

Lorsque débutait la guerre au Mali, Mélenchon avait critiqué Hollande par la droite, lui demandant de dire franchement que les objectifs de la France étaient de piller l’uranium de ses anciennes colonies. Il avait dit, « Nous sommes là-bas parce que nous ne pouvons pas permettre que les autres pays de cette région, et donc l’extraction de l'uranium dont dépendent des centrales françaises, soient mis en danger. Il faut le dire ! »

Les guerres successives lancées par Paris n’ont fait qu’aiguiser l’appétit de Mélenchon de servir le gouvernement PS. L’année dernière, lorsque Hollande s’était effondré dans les sondages après le début de la guerre au Mali, Mélenchon avait proposé de devenir son premier ministre : « François Hollande avait une chance de faire quelque chose de bien, il l’a ratée. Il peut se rattraper… Il peut me nommer Premier ministre. Je n’ai pas peur. »

Hollande étant encore plus impopulaire qu’il y a un an, Mélenchon est terrifié à l’idée que la décision du PS d’attiser un conflit avec la Russie à propos de l’Ukraine ne déclenche une explosion d'opposition au sein de la classe ouvrière. Il émet en premier lieu ses critiques creuses à l’égard de Hollande dans une tentative désespérée d'étouffer, au sein de la classe ouvrière, le développement d’une opposition au PS et aux forces situées à sa périphérie, dont Mélenchon lui-même.

Cela reflète aussi sa crainte que dans le contexte du profond discrédit de la politique droitière du PS et de l’ensemble de l’establishment de « gauche » français, les positions du Front national (FN) néofasciste ne remportent le soutien d’une couche des membres du Front de Gauche et des syndicalistes alliés.

Effectuant le mois dernier une visite en Russie, la dirigeante du FN, Marine Le Pen, a dit que la Russie était « diabolisée » et qu’une campagne menée contre la Russie est concoctée en Europe avec le soutien des Etats-Unis. Elle s’est étonnée « qu’au sein de l’Union européenne, une guerre froide ait été déclarée contre la Russie, ce qui nuit à nos relations. »

Le FN a dénoncé l’UE et l’euro en réclamant le retour au franc français tout en critiquant l’alignement du PS sur Washington dans la crise ukrainienne. Il a minimisé ses liens avec le parti Svoboda, un parti fasciste qui œuvre au sein du régime fantoche pro-américain de Kiev.

Depuis la signature du traité de Maastrich qui a créé l’UE en 1992, et surtout depuis l’invasion américaine de l’Irak en 2003, les partis bourgeois de gouvernement de la France et ses partis de pseudo-gauche ont tous effectué une réorientation politique majeure. Curieusement, compte tenu des traditions de la politique impérialiste française, ils sont actuellement ouvertement et étroitement alignés sur les guerres américaines et sur la politique de monnaie forte de l’UE qui est fondée sur un euro fort. L’opposition à cet alignement émane avant tout du FN.

Le rôle de Mélenchon est de se faire l'écho, depuis l’intérieur de l’orbite du PS, d'une telle opposition nationaliste à la politique du PS.

Ses critiques sont creuses et réactionnaires. Son principal ennemi reste la classe ouvrière et son principal souci est de voir comment empêcher que celle-ci ne se mobilise dans une lutte contre l’impérialisme.

(Article original paru le 7 mai 2014)

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