Les cheminots manifestent contre la privatisation de la SNCF

Le 17 juin, environ 1.000 manifestants se sont réunis sur l'Esplanade des Invalides à Paris, à l'appel de la CGT et de SUD-Rail, pour manifester contre la tentative du Parti socialiste (PS) de privatiser la SNCF. Les cheminots qui ont parlé au WSWS ont souligné leur colère avec le gouvernement PS et le déchainement des médias contre la grève.

Les CRS ont attaqué au gaz lacrymogène un cortège de cheminots qui tentaient de quitter l'Esplanade pour marcher sur l'Assemblée Nationale.

Laurent et Nicolas, tous deux cheminots, ont fait part au WSWS des conditions de vie difficiles que rencontrent les cheminots, comme la vaste majorité des travailleurs : « Il n'y a plus de classe moyenne, ça se passe comme dans les pays étrangers. On ne sait pas ce qui se passe. On essaie de nous faire passer pour des privilégiés. Les médias voient la SNCF comme les conducteurs ; il n'y a que 1,600 conducteurs de TGV. Mais l'entretien des voies, on ne le voit pas. Les gens sont payés au SMIC. »

Laurent a rajouté :“J'ai 5 ans en boite et je reçois 1.300 euros par mois. Les jeunes sont embauchés avec de bas salaires. Pour obtenir 1.500 euros mensuels il faut faire de l'astreinte, des heures sup, revenir le samedi, et travailler le soir. Après la réforme, en plus, on ne fera plus le volontariat, ce sera forcé.”

« Mes deux grands-pères étaient cheminots, mon père était cheminot, on veut avoir une vie. On ne peut pas l'avoir sous n'importe quelles conditions ... Un studio à Paris fait plus de la moitié de notre salaire. Si on trouve à 800 euros [le loyer mensuel], on est un chanceux. Les cheminots ont des difficultés, mais il faut vivre un minimum décemment ... Et la vie familiale? Ils veulent notre statut ».

Les reporters du WSWS ont aussi parlé à un technicien de maintenance travaillant à la gare de Lyon, qui a voulu rester anonyme. Il a expliqué qu’il voulait que le gouvernment abandonne la réforme pour que la SNCF reste un service public, et que cette grève concerne tous les travailleurs : « On ne parle pas seulement de la réforme, mais des salaires aussi. Si on ne fait rien, alors on perd tout ».

Il a ajouté : « Cela fait un an et demi que l’on dit aux syndicats qu’ils expliquent ce qui allait se passer ». Il a comparé la situation à celle de 1995, quand une grève de masse des cheminots contre une réforme des retraites a débordé les syndicats.

Cette grève démontra aussi la banqueroute des partis de pseudo-gauche, comme le Nouveau parti anti-capitaliste ou Lutte ouvrière, qui sont intervenus dans les assemblées générales des cheminots pour étrangler le mouvement. Ils ont bloqué une lutte pour une grève générale politique et une lutte révolutionnaire contre le gouvernment, mettant fin à la grève en échange d’un retrait très partiel des réformes. Celles-ci ont été ensuite continuées depuis 1995 par les gouvernements de diverses colorations politiques.

Les appareils syndicaux aujourd'hui continuent à faire tout leur possible pour freiner la mobilisation des travailleurs et bloquer l'unification de la classe ouvrière en lutte contre la politique d'austérité du PS. Les fédérations syndicales ont dissous le rassemblement des cheminots devant le Ministère des Transports le 12 juin. Elles cherchent une sortie de crise, comme l’a expliqué dans une lettre adressée à François Hollande le secrétaire de la CGT Lepaon, qui a ajouté être d’accord sur le principe d’une réforme.

Le WSWS a aussi interviewé Cécile, cheminote, qui a souligné que la réforme toucherait les emplois puisque les points de ventes seraient retirés pour encourager les gens à aller chercher les billets sur les bornes informatiques. Elle a aussi dit : « que l’on va diviser la SNCF en trois pour pouvoir faire arriver la concurrence en 2022. Les financiers géreront la rentabilité du service qui sera plus cher et que cela entrainera moins de sécurité ».

Cécile a critiqué l'attaque contre le service public et la casse du « statut des cheminot, que le gouvernement veut voir à la baisse pour l’aligner sur ceux du privé ».

Cécile a indiqué aux reporters du WSWS qu’elle n’était pour aucun compromis et qu’elle n’avait plus confiance aux syndicats de compromission, tout en espérant que la CGT et SUD-Rail représenterait la majorité des travailleurs. Elle qualifie Hollande de « menteur, car il a dit qu’il lutterait contre la finance », ajoutant qu’elle avait voté pour Hollande « par défaut ».

Laurent et Nicolas ont également averti des conséquences qu’a eu la réforme ferroviaire en Suède : « On va vers la privatisation des chemins de fer. On voit ce que cela a donné en Suède, les chemins de fer suédois sont en grève, ils font des contrats à l'embauche et ils sont payés à la tâche ».

Nicolas a souligné que le but de la réforme en France serait d'attaquer non seulement les travailleurs, mais aussi les usagers : « Ce qu'ils veulent, c'est que ça rapporte. Mais c'est l'argent des citoyens. Nous, on est là pour rendre service au public.”

Laurent rajoute que « le TGV ça rapporte de l'argent, mais la maintenance ne rapporte pas. Donc, la société veut manger les salaires ».

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