Perspectives

L'armement de l'Ukraine par les Etats-Unis et le danger d'une Troisième Guerre mondiale

Le World Socialist Web Sitecondamne sans équivoque le projet en cours du gouvernement Obama visant à équiper, à hauteur de milliards de dollars, le régime ukrainien d'extrême-droite avec des armes de pointe. Ce plan risque de déclencher un conflit direct entre les Etats-Unis et la Russie, deux puissances possédant l'arme nucléaire, et de provoquer une Troisième Guerre mondiale.

Les discussions sur la fourniture d'armes au gouvernement de Kiev, soutenu par l'Occident, se tiennent au moment où l'offensive lancée le mois dernier contre l'est de l’Ukraine par le président ukrainien Petro Poroshenko subit des revers. Selon le New York Times de lundi, « après une série de revers frappants subis ces dernières semaines par les forces de l'Ukraine, le gouvernement Obama porte un regard neuf sur la question de l'aide militaire. »

Washington a déjà envoyé des instructeurs militaires en Ukraine et promis 350 millions de dollars d'aide militaire « non létale » à Kiev. A présent, écrit le Times, les hauts représentants de l'administration Obama sont de plus en plus unis sur « un rapport indépendant (…) de huit anciens hauts responsables américains, qui exhortent le gouvernement américain à envoyer pour 3 milliards de dollars d'armes et d'équipement défensif à l'Ukraine ». Ce financement fournirait au régime de Kiev des « missiles antichar, des drones de reconnaissance, des Humvees blindés, et des radars capables de localiser les tirs de roquette et d'artillerie de l'ennemi. »

Cette escalade irresponsable est ourdie par une cabale criminelle de responsables gouvernementaux, d'agents militaires et du renseignement et de groupes de réflexion qui leurs sont liés, parmi lesquels la Brookings Institution. Elle est dictée par les intérêts de l'oligarchie industrielle et financière qui, dans sa poursuite de l’hégémonie mondiale, met en péril l'avenir même de la civilisation humaine.

Les implications de ces projets ont été cachées au peuple américain et au reste du monde. L'un des rares examens sobres provient du journal allemand Sueddeutsche Zeitung, qui prévient dans un article publié lundi que, « La fourniture d'armes américaines à l'Ukraine serait, et on peut presque le prendre au sens propre, une déclaration de guerre à Moscou ».

Le journal cite un expert militaire russe, Yevgeny Buchinsky, qui prévient que, en réaction à une offensive de Kiev contre le Donbass, « La Russie sera obligée d'intervenir et puis, pour parler franchement, de prendre Kiev. Alors l'OTAN serait dans une situation difficile. Et alors on serait obligés de commencer la Troisième Guerre mondiale, ce que personne ne veut ».

Ces déclarations font suite à des mises en garde de Mikhail Gorbatchev, le dernier président de l'Union soviétique, qui a dit récemment qu'une guerre européenne au sujet de l'Ukraine « mènerait inéluctablement à une guerre nucléaire. »

Comme toujours, les plans de guerre des Etats-Unis et de leurs alliés impérialistes sont formulés en termes défensifs, dans le cas présent on parle de « résistance à l'agression russe ». En fait, l'escalade du conflit au sujet de l'Ukraine est le produit d'une campagne menée par les Etats-Unis, l'Allemagne et l'Union européenne pour s'emparer de Kiev et faire de l'Ukraine un avant-poste militaire de l'OTAN visant le coeur de la Russie européenne.

Cela fait un an ce mois-ci, qu'un putsch mené par les milices fascistes de Secteur droit et soutenu par Washington et Berlin a destitué le Président ukrainien pro-russe Viktor Ianoukovitch. Il a été remplacé par une coalition impopulaire et instable de partis droitiers qui ne cachaient pas leur hostilité virulente à l’égard de la Russie.

Les actes du nouveau gouvernement, dont le meurtre de masse de manifestants pro-russes comme dans le massacre d’Odessa en mai 2014, a provoqué une résistance armée dans certaines zones de l'Ukraine orientale à forte population russe de souche. Le régime a riposté par des offensives sanglantes menées par des milices fascistes contre les villes de Donetsk, Lougansk, Marioupol et Slaviansk. Des milliers de gens sont morts l'année dernière dans des attaques menées en coordination avec la CIA, dont le directeur John Brennan a visité l'Ukraine en secret.

Sans aucune base sociale, hormis une couche étroite d'oligarques et de nervis fascistes, le régime de Kiev n'a pas réussi à vaincre les séparatistes de l'est de l'Ukraine, que Moscou a armés et soutenus. Washington réagit en préparant un bain de sang plus grand encore contre la population de l'est de l’Ukraine, ce qui présente le risque direct d’une véritable guerre avec la Russie.

La classe ouvrière internationale est confrontée aux conséquences géostratégiques désastreuses de la dissolution de l'Union soviétique par la bureaucratie stalinienne en 1991 et de la restauration du capitalisme. Cette trahison finale des staliniens a permis à l'impérialisme américain de manipuler et d'attiser les tensions ethniques à l'intérieur de l'ex-URSS.

L'objectif ultime des Etats-Unis et de leurs alliés est de réduire la Russie au statut de pays appauvri et semi-colonial. Une telle stratégie, qu’on associe historiquement au Conseiller à la Sécurité nationale du gouvernement Carter, Zbigniew Brzezinski, est encore une fois ouvertement promue.

Dans un discours l'année dernière au Wilson Center, Brzezinski avait demandé à Washington de fournir à Kiev « des armes conçues spécifiquement pour permettre aux Ukrainiens de pratiquer la guerre urbaine de résistance ». En conformité avec la politique recommandée dans le rapport de la Brookings Institution et d'autres groupes de réflexion qui appellent à fournir des armes au régime de Kiev, Brzezinski a appelé à fournir « des armes antichar (…) des armes capables d'être utilisées dans des combats urbains à courte portée ».

Si la stratégie décrite par Brzezinski est politiquement criminelle – elle consiste à piéger la Russie dans une guerre ethnique urbaine en Ukraine, qui menacerait de mort des millions, sinon des milliards de personnes – elle est entièrement dans la ligne de la politique qu'il prône contre la Russie depuis des décennies.

Suite à la dissolution de l'Union soviétique, Washington a poursuivi cette stratégie en organisant des « révolutions de couleur » afin d’installer des régimes pro-américains et anti-russes dans les anciennes républiques soviétiques, dont la Géorgie, l'Ukraine et la Biélorussie.

Une décennie plus tard, dans le contexte d’une crise économique et géostratégique bien plus profonde du capitalisme mondial, Washington procède de façon encore plus brutale. La crise en Ukraine est utilisée pour accroître massivement les forces américaines et de l'OTAN dans toute l'Europe de l'est; cela s'accompagne de nouvelles menaces et ultimatums.

L'unique alternative au désastre est la mobilisation de la classe ouvrière internationale dans une lutte contre l'impérialisme, sur un programme socialiste. Le nationalisme russe réactionnaire du régime de Poutine, représentant de l'oligarchie capitaliste sortie de la dissolution de l'URSS, est en faillite. Le gouvernement de Poutine, tout à fait incapable d'appeler la classe ouvrière internationale à s'opposer à la guerre, attise les tensions ethniques à l'intérieur de l'ex-URSS. Dans la mesure où il cherche à contrer l'agression de l'OTAN sur la base du nationalisme russe, il ne fait qu'ouvrir la voie à une guerre nucléaire.

En juillet dernier, le WSWS avait écrit (voir : Etes-vous prêt pour une guerre nucléaire?) sur l'intensification de l'agression contre la Russie: « Quels que soient les résultats à court terme du cours suivi par les Etats-Unis et les pouvoirs impérialistes européens, à long terme il mène inexorablement à la guerre, avec les conséquences cataclysmiques que cela implique. Le plus grand danger pour la classe ouvrière est que des décisions sont prises en coulisses, la masse des gens n’étant pas, pour la plus grande part, consciente des dangers auxquels la population mondiale est confrontée (...)

« Quiconque croit qu’une guerre nucléaire est impossible parce que les gouvernements modernes, à l’opposé de ceux au pouvoir en 1914, ne prendraient pas le risque d’une catastrophe, se fait des illusions. Les régimes existant aujourd’hui sont peut-être encore plus irresponsables que ceux de l’époque. Assaillis par des problèmes économiques et sociaux pour lesquels ils n’ont pas de solution progressiste, ils sont de plus en plus enclins à voir la guerre comme un risque valant la peine d’être pris. »

Cette mise en garde est confirmée alors que l'impérialisme pousse le monde vers une conflagration nucléaire. La construction du Comité international de la Quatrième Internationale, en tant que direction d'un vaste mouvement mondial anti-guerre, anti-impérialiste et anticapitaliste de la classe ouvrière, est de la plus grande urgence.

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