Saint-Denis dans le banlieue de Paris sous occupation militaire pendant l’intervention du RAID

Les résidents dans le centre-ville de Saint-Denis, dans la banlieue nord de Paris, ont été réveillés à 4 h 30 du matin mercredi par une énorme explosion et des tirs nourris. Les forces de l’État avaient reliés des suspects dans les attentats terroristes à Paris à un appartement de la vieille ville et y avaient envoyé un groupe du RAID. 

Quand l’équipe est entrée dans le bâtiment, tout le centre-ville a été verrouillé. Des centaines de policiers, de gendarmes et de soldats de l’armée patrouillaient dans les rues et ont mis en place des points de contrôle. Lorsque les résidents du quartier ont ouvert leurs portes, les forces de sécurité les ont mis en joue avec leurs mitrailleuses et leur ont ordonné de retourner à l’intérieur, en leur criant de rester loin des fenêtres. Plus de 15 000 personnes vivent dans le quartier où cette attaque a eu lieu. 

Les transports en commun, les trains, les métros et les bus, et toutes les écoles ont été fermés pour la journée et des bouchons monstres se sont formés sur les routes menant à cette ville. 

Au moment où l’équipe de RAID approchait l’appartement, Hasna Ait Boulahcen, une femme de 26 ans a tiré sur eux avec une mitrailleuse et puis s’est fait sauter avec une ceinture d’explosifs. Boulahcen, qui vivait à quelques kilomètres à Clichy-sous-Bois, est la cousine d’Abdelhamid Abaaoud, que l’État français et les médias affirment être le recruteur principal de l’État islamique (EI) en Europe, et le cerveau derrière les attaques de vendredi dernier à Paris. 

La police ne pas pu indiquer immédiatement si Abaaoud était dans l’appartement puisqu’il y avait un homme dont le corps, criblé de balles et touché par des grenades lors de l’assaut, était méconnaissable. Cependant, le lendemain la Police scientifique a pu confirmer que le corps est bien de celui d’Abdelhamid Abaaoud. 

Il y avait trois autres personnes dans l’appartement. Les échanges de tirs, parfois plus d’une heure durant, se sont poursuivi jusqu’à environ 10 h 30, puis sont devenus plus sporadiques. On estime que cinq mille cartouches ont été tirées en tout. La fin du siège a été prononcée aux environs de 11 h 30. 

Trois hommes ont été arrêtés et placés en garde à vue à la fin du siège. Un homme, qui avait prêté son appartement aux hommes de l’EI, et une amie, ont été trouvés cachés sous des débris près de l’appartement et ont également été arrêtés. Deux autres personnes d’un autre appartement ont également été placées en détention. Cinq membres du RAID ont été légèrement blessés. 

Plus de 110 membres du RAID et de la BRI (Brigade de Recherche et d’Intervention), dans un rôle de soutien, ont pris part à l’opération. Ils ont été soutenus par 50 autres soldats (qui faisaient partie des dizaines de milliers de soldats qui patrouillent dans les rues tous les jours depuis les fusillades à Charlie Hebdo), sans compter les centaines de policiers et de gendarmes gardant le centre de Saint-Denis verrouillé. 

Ce raid démontre la militarisation de la France depuis les fusillades à Charlie Hebdo, et maintenant intensifiées sous l’état d’urgence décrété par le gouvernement depuis samedi dernier. Demain, l’Assemblée nationale votera pour prolonger l’état d’urgence pour trois mois. Le Président, François Hollande, a également décrit des changements dans la Constitution qui vont sérieusement compromettre davantage les droits démocratiques de la classe ouvrière française. 

La justification du gouvernement du Parti socialiste de Hollande pour l’introduction de ces mesures est le terrorisme de l’EI. Cependant, il convient de noter que la grande majorité des jeunes hommes qui commettent ces actes de terrorisme sont nés et ont grandi en France. 

En tant que tels, ils ont grandi au cours des 30 dernières années sous des gouvernements français successifs qui ont imposé de plus en plus d’austérité. Pour l’ensemble de cette période, les populations immigrées étaient confrontées à une discrimination économique et sociale de l’État et des couches de la petite bourgeoisie sur le ton : « le poste a été attribué », « l’appartement est déjà loué », etc. Ainsi, le chômage des immigrés, surtout de la jeunesse immigrée, est beaucoup plus élevé que chez les autres groupes sociaux. 

Au cours des 15 dernières années, les gouvernements successifs s’en sont pris à la classe ouvrière d’origine musulmane, africaine et tzigane, en les expulsant quand ils n’ont pas de papiers et en stigmatisant les musulmans avec la loi contre le port du voile dans les écoles et les lieux publics. 

En outre, depuis de nombreuses années ces communautés ont été la cible centrale des harcèlements policiers. En 2005, lorsque la police à Clichy-sous-Bois a pris en chasse deux garçons, l’un arabe et l’autre d’origine africaine, et les ont coincés dans l’enceinte d’un poste électrique sur le soupçon d’avoir volé quelque chose et que les deux sont morts d’électrocution, cela a déclenché des émeutes à travers la région parisienne et dans de nombreuses autres parties de la France. La colère de la jeunesse au sujet de telles attaques et la pauvreté croissante dans leurs communautés a conduit à une aliénation croissante envers un tel environnement hostile. Ces jeunes ont aussi vu les États-Unis, la Grande-Bretagne et plus récemment la France envahir l’Irak, la Libye et maintenant la Syrie et détruire leurs économies. 

L’EI a ainsi pu endoctriner certains de ces jeunes marginaux, souvent au chômage, et à la périphérie de la société française. Lorsque certains d’entre eux ont commencé à faire le voyage en Syrie, à rejoindre les milices islamistes dans la guerre soutenue par l’Occident pour un changement de régime, les services secrets français les ont laissé partir, se contentant de les interroger quand ils rentraient. 

Maintenant, Hollande appelle à l’unité nationale contre l’EI et il impose l’état d’urgence portant atteinte aux droits démocratiques. Mais c’était son gouvernement et les précédents, notamment celui de l’ancien président de Nicolas Sarkozy, qui ont alimenté l’EI, une organisation totalement réactionnaire, à travers leurs mesures d’austérité associées à la discrimination et au harcèlement de la police et de leur financement et l’armement de l’EI et d’autres forces similaires utilisées comme mercenaires dans leur les guerres impérialistes. 

La seule réponse que Hollande, le Parti socialiste et toute l’élite dirigeante française ont à proposer est de continuer à faire la guerre impérialiste pour leurs intérêts de classe et d’étouffer la colère croissante de la classe ouvrière en France grâce à la construction d’un État autoritaire. 

(Article paru d’abord en anglais le 19 novembre 2015)

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