Grève de deux jours de plus de 50.000 internes au Royaume-Uni

La décision sans précédent de 55.000 internes de ne pas fournir de soins d'urgence pendant la grève de 48 heures qui a commencé hier est une mesure de leur détermination à défaire l'attaque menée contre eux et le National Health Service (NHS, Services de santé nationaux) par le gouvernement conservateur.

La grève aura un impact majeur: au moins 12.711 interventions chirurgicales non urgentes et 112.856 consultations ont été annulées d'avance. Lors de ses quatre grèves précédentes depuis janvier, le syndicat des médecins BMA (British Medical Association) s’est assuré que les soins d'urgence soient donnés, comme cela a été le cas depuis la fondation du NHS en 1948.

La BMA a cherché à plusieurs reprises à trouver un compromis qui lui aurait permis d’annuler la grève. Lundi, le dirigeant de la BMA Dr Mark Porter a dit au gouvernement, «Si vous êtes d'accord pour suspendre l'imposition [du nouveau contrat contesté] le temps que les négociations reprennent, alors nous mettrons fin toute de suite à la grève.»

Mais les conservateurs ont repoussé toutes les offres qui leur ont été faites. Ils ne sont pas seulement résolus à imposer des conventions collectives qui mettent en danger la sécurité des patients, leur but est d'infliger une défaite décisive sur les internes afin d'intimider tous ceux qui cherchent à s’opposer à la réorganisation des hôpitaux publics qui vise leur privatisation complète.

L'organisme régulateur de la profession, le General Medical Council, a averti que les médecins grévistes pourraient être la cible de mesures disciplinaires ou même se voir radiés si leurs actions «occasionnent un préjudice physique grave aux patients». Pour leur part, les médias de droite cherchent à attiser une hostilité publique à la grève.

Les internes refusent de reculer devant toutes ces menaces et les travailleurs continuent à soutenir massivement ces mouvements de revendication. Mais le danger d'une défaite grandit chaque jour de plus que la BMA, les autres syndicats de la santé et le Parti travailliste garde la grève isolée.

Dès le début, la BMA a insisté sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un conflit politique, tandis que les syndicats tels qu'Unison, qui dispose de près d'un demi-million de membres, n'ont pas organisé une seule action en solidarité avec les médecins internes.

La semaine dernière, le président du comité des internes de la BMA Johann Malawana a écrit au ministre de la Santé Jeremy Hunt pour lui proposer d'annuler la grève si le gouvernement acceptait de ne pas imposer le nouveau contrat. Malawana a dit: «À une semaine avant le début de la première grève totale de médecins dans ce pays, je vous écris pour faire une offre claire dans le but d'éviter une grève. Autrement dit, si le gouvernement suspend l'imposition du contrat, les internes annuleront la grève de la semaine prochaine...» Il a encouragé le gouvernement à «revenir à la table» pour des négociations «à tout moment avant le début de la grève la semaine prochaine».

Hunt a répondu sèchement qu'il n'était pas possible de «changer ou retarder» la mise en œuvre de la convention collective.

Alors que le nouveau chef du Parti travailliste Jeremy Corbyn et le ministre des Finances de son cabinet fantôme John McDonnell ont dit quelques mots en faveur des internes, le Parti travailliste agit comme un ennemi implacable contre eux. Plus tôt ce mois-ci, la ministre de la Santé du cabinet fantôme Heidi Alexander a déclaré lors d'une réunion au parlement qu'elle ne s’était pas rendue à un piquet de grève des médecins internes et n'avait aucune intention de le faire. Elle joue désormais un rôle de premier plan pour tenter de mettre un terme à la grève.

Dimanche, un groupe de députés parlementaires de tous les partis, dirigé par Alexander, a écrit à Hunt proposant que s'il menait un programme pilote du nouveau contrat avant sa mise en œuvre à travers l'Angleterre, le BMA mettrait fin aux grèves. La lettre disait: «Si vous avez toujours l'intention de présenter ce nouveau contrat, nous croyons qu'il devrait être introduit comme projet pilote dans un certain nombre d’hôpitaux afin de mesurer l’impact sur les patients et le personnel et estimer “l'effet week-end” au moyen d’une évaluation indépendante.»

Cette proposition mettrait fin à l’opposition au contrat et ne ferait que retarder sa mise en œuvre à l'échelle nationale. Elle a été présentée par Alexander aux côtés du député conservateur Dr Dan Poulter, le député libéral-démocrate Norman Lamb et le Dr Philippa Whitford du Parti national écossais. La lettre a rassuré Hunt qu'un projet pilote pourrait non seulement mettre fin à la grève, mais «permettrait de véritables progrès vers votre engagement programmatique électoral de soins d'urgence de haute qualité sept jours sur sept».

Les médecins et les infirmières seront à juste titre écœurés par une telle déclaration au sujet d'un gouvernement qui a imposé des dizaines de milliards de livres de coupes budgétaires et de «gains d'efficacité», conduisant à la perte ou la réduction de nombreux services d'urgence de santé au cours des six dernières années. Pas étonnant donc que l'un des journaux britanniques le plus à droite, le Daily Mail, a déclaré que le gouvernement devrait envisager son acceptation.

L'offre a été une nouvelle fois rejetée. Un tweet de Hunt a expliqué que, «Tout retard supplémentaire signifie simplement que nous allons prendre plus de temps pour éliminer l’effet week-end.»

Selon le Guardian, le premier ministre David Cameron, «a dit à Hunt de maintenir sa position ferme dans le conflit acharné lors de deux conversations distinctes vers la fin de la semaine dernière. Le premier ministre a été catégorique qu'il ne devrait y avoir aucun recul dans la rhétorique dure et les tactiques combatives que Hunt a employées depuis les premières manifestations du conflit social en septembre.»

Lundi, une source gouvernementale a déclaré à la BBC que les deux grèves de cette semaine «visaient à renverser le gouvernement et le ministre de la Santé Jeremy Hunt». Il a dit qu'il ne pourrait y avoir aucun compromis, car les dirigeants de la BMA avaient radicalisé une «génération d'internes» et tout recul signifierait que le gouvernement aurait à affronter des grèves semblables d'autres syndicats, qui suivaient l'actuel mouvement social «de très près».

En réalité, les autres syndicats observent les internes dans l'espoir de les voir rappelés à l’ordre. Les internes ne peuvent gagner qu’en menant une lutte politique implacable pour faire tomber le gouvernement. Et pour y arriver, cela exige une stratégie et une orientation complètement différentes.

Les internes doivent construire leurs propres comités de la base afin d’enlever la conduite de la grève des mains de la BMA. Ils doivent appeler à une rébellion contre les autres syndicats de la santé par les 1,3 million de travailleurs employés dans le NHS et pour une grève sociale et politique unie contre le gouvernement. Surtout, ils doivent faire appel à une action de solidarité des millions de travailleurs et jeunes à travers le Royaume-Uni qui veulent défendre le NHS et qui font face à des attaques similaires sur leurs emplois, leurs salaires et leurs conditions de vie.

La campagne NHS Fightback du Parti de l'égalité socialiste fournit aux internes et autres professionnels de la santé les moyens permettant d'organiser une telle contre-offensive ainsi que le programme socialiste et la direction nécessaires pour la diriger.  

Pour toute information complémentaire, visitez le site en anglais:nhsfightback.org

(Article paru en anglais le 26 avril 2016)

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