Des manifestations éclatent en France contre la loi-travail régressive

Après que le gouvernement du Parti socialiste (PS) du Premier ministre Manuel Valls a annoncé mardi qu’il allait imposer la réforme impopulaire du droit du travail sans vote à l’Assemblée nationale, des manifestations et des émeutes ont éclaté dans des villes à travers la France contre la procédure manifestement antidémocratique du PS. 

Valls et le président François Hollande ont invoqué l’article 49-3 de la Constitution française, ce qui leur permet d’imposer une loi si l’Assemblée ne vote pas la censure du gouvernement dans les 48 heures, c’est-à-dire à partir de la fin de la journée, ce qui forcerait de nouvelles élections. Les trois quarts de la population sont opposés au projet de loi, qui allonge le temps de travail, compromet la sécurité de l’emploi et permet aux patrons et aux syndicats de négocier des contrats qui violent le Code du travail. 

Des centaines de manifestants se sont rassemblés mardi soir à Paris devant l’Assemblée nationale, dont le personnel avait barricadé les volets, craignant une émeute. Les manifestants ont dénoncé la décision de Valls comme une « insulte au peuple », en scandant des slogans tels que : « La vraie démocratie est ici » et « Assemblée nationale, assemblée du capital ». 

Un millier de personnes ont défilé à travers Toulouse criant : « Toulouse, lève-toi », et, « Nous ne voulons pas de cette société », mais ont été bloquées par un cordon de police avant de pouvoir arriver au siège PS du département. Des manifestations de plusieurs centaines de personnes ont également eu lieu à Lille, Tours, Marseille, Grenoble et Nantes, où les manifestants se sont heurtés violemment à la police. 

À Lyon, les manifestants ont scandé des slogans contre le PS en face de l’hôtel de ville, et plus tard ont attaqué un poste de police et ont pillé un siège local du PS. Un autre siège PS a été violemment mis à sac par quelques dizaines de manifestants à Caen. 

Le gouvernement PS et la bourgeoisie française espèrent, toutefois, que même si ces manifestations reflètent la colère ressentie par des dizaines de millions de travailleurs, elles ne provoqueront pas immédiatement l’éclatement d’une grève générale par la classe ouvrière, comme en 1936 ou en 1968. 

Le quotidien Le Monde a écrit : « Même si l’engagement du 49-3 a immédiatement entraîné une manifestation devant le Palais-Bourbon, le gouvernement fait le pari que son coup de force parlementaire ne va pas enflammer le climat social. « Le mouvement social et les manifestations existent, mais ils ne sont pas en développement », estime un proche du chef de l’État ». 

Les événements en France soulignent nettement l’importance de la crise profonde de la direction politique de la classe ouvrière. Les travailleurs et les jeunes montent des manifestations de masse contre la loi depuis plus de deux mois, elle est très largement contestée par la population, et le sentiment général chez les travailleurs en France et à l’étranger vire vers la gauche, sur fond de la colère sociale montante contre l’ensemble de l’establishment politique. Pourtant, un gouvernement PS désespérément faible et impopulaire, qui est largement considéré comme serviteur des banques, est sur le point d’imposer une loi largement détestée par voie législative. 

La responsabilité centrale en incombe à la bureaucratie syndicale et aux partis de pseudo-gauche proches du PS, comme le Nouveau Parti Anticapitaliste, qui ont monté le mouvement #NuitDebout, lequel a dirigé les jeunes loin de la lutte contre le PS et vers des réunions impuissantes sur les places de diverses villes. Ceci a démobilisé les protestations, a bloqué une campagne de mobilisation des couches plus larges de la classe ouvrière contre le gouvernement Valls, et redonné l’initiative temporairement au PS. Depuis, le PS, n’a pas perdu de temps en agissant pour forcer le passage du projet de loi à l’Assemblée. 

Il y aura une colère et une opposition puissantes dans classe ouvrière contre les tentatives d’utiliser le droit du travail pour miner ses salaires et conditions, compte tenu en particulier des méthodes antidémocratiques utilisées par le PS pour imposer la loi. La lutte de la classe ouvrière contre le PS et contre les gouvernements similaires dans toute l’Europe ne fait que commencer. 

Pourtant, il faut dire clairement que le PS est sur le point de réussir à forcer le passage du projet de loi au Parlement. Contrairement au mouvement #NuitDebout, dont la figure de proue des médias, l’économiste nationaliste Frédéric Lordon, a insisté sur le fait qu’il n’est pas important si oui ou non la réforme du code du travail passe, le WSWS avertit franchement que la loi-travail serait utilisée pour monter des attaques brutales sur les travailleurs. 

Son passage marquerait un recul important pour les travailleurs et les jeunes qui se battent contre le projet de loi, et constituerait la preuve irréfutable de la nécessité d’une rupture avec les organisations existantes, qui sont liées au PS et se sont avérées tout à fait en faillite. 

Cela inclut les tentatives faites par des sections de la bureaucratie syndicale et du Front de Gauche de Jean-Luc Mélenchon pour promouvoir des illusions dans les appels impuissants aux députés de l’Assemblée nationale pour qu’ils réécrivent partiellement ou mettent fin à la réforme du Code du travail. 

Ainsi Mélenchon a affiché un Tweet sur la loi-travail qui appelait apparemment à des manifestations conjointes avec les forces de droite et à une motion de censure pour faire tomber le gouvernement PS. Il a écrit : « Qui veut l’empêcher doit voter la censure ! Pas d’élégance des dégoûtés face aux dégoûtants. Oui, il faut des manifestations du front du refus le jour du vote. Et dès maintenant. ». 

Une motion de censure présentée par le Front de gauche et ses alliés a échoué mercredi soir, recevant moins de 60 votes. Aujourd’hui, une motion de censure est en cours de préparation par l’opposition de droite, le parti Les Républicains (LR), mais il semble peu probable qu’elle passe dans des conditions où moins de 60 députés du Front de gauche et du PS sont prêts à voter la censure du gouvernement.

Tout indique que la soi-disant faction rebelle du PS qui ont exprimé des objections légères et hypocrites à la réforme du Code du travail se préparent à s’aligner sur cette loi et ne voteront pas pour censurer le gouvernement PS. 

Benoît Hamon, l’un des dirigeants de la faction, a déclaré hier, « La motion de censure de la droite, il faut imaginer que vous avez beau être en désaccord avec Manuel Valls, préférer à Manuel Valls Nicolas Sarkozy […] c’est un peu compliqué de préférer ce projet-là à celui du gouvernement ». 

Le gouvernement Valls menacerait d’expulsion du PS tout député PS qui voterait la motion de censure des LR à l’Assemblée. 

(Article paru en anglais le 12 mai 2016)

 

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