Fillon et Juppé avancent au second tour de la primaire de la droite en France

Hier, François Fillon et Alain Juppé ont remporté le premier tour de la primaire des Républicains (LR). Ils s’affronteront donc d'ici une semaine au second tour, dont le vainqueur deviendra candidat de LR aux élections présidentielles d'avril-mai 2017.

La remontée inattendue de Fillon, qui a été longtemps le troisième voire le quatrième candidat LR, a repoussé à la troisième place l’ancien Président Nicolas Sarkozy, qui est éliminé avec 20,6 pourcent des voix. Fillon a remporté environ 44,2 pour cent, dépassant largement Alain Juppé, qui a recueilli 28,6 pour cent.

Les autres candidats, Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno Le Maire, Jean-Frédéric Poisson et Jean-François Copé ont remporté entre eux moins de 8 pourcent des voix.

Sarkozy a reconnu sa défaite depuis son quartier général de campagne, ainsi que Le Maire. Tous deux ont appelé à voter pour Fillon au second tour.

La participation au scrutin a été substantielle, car environ 4 millions d’électeurs s'étaient déplacés pour aller voter. Ce taux de participation a largement dépassé celui de la primaire du Parti Socialiste (PS) en 2011, où 2,6 millions d'électeurs étaient allés aux bureaux de vote afin de sélectionner le président actuel, François Hollande, en tant que candidat PS.

Le PS étant profondément affaibli par la vaste impopularité du programme d'austérité et de guerre de Hollande, les médias ont présenté les primaires LR comme le scrutin qui choisirait le candidat qui s'affrontera à Marine Le Pen du Front national (FN) au second tour des présidentielles en 2017. Ceci a sans doute joué pour beaucoup dans la hausse significative de la participation aux primaires.

En plus, les primaires LR se sont déroulées sous le coup de l'élection surprise de Donald Trump, un peu plus d'une semaine auparavant, en tant que président des Etats-Unis.

Après avoir été à la traîne par rapport à Juppé et Sarkozy pendant la plupart de la campagne, Fillon a peu à peu gagné du soutien au mois d’octobre, enregistrant une progression de 10 points en cinq semaines, de 12 pour cent d’intentions de vote à 22 pour cent au début de novembre. Après la victoire de Trump, un peu plus d'une semaine avant le scrutin en France, Fillon a fait un gros bond en avant dans les sondages, dépassant Juppé et Sarkozy avec 30 pourcent du vote prévu, comparé à 29 pourcent pour ces deux derniers, selon un sondage Ipsos.

Lors du dernier débat télévisé de la primaire de la droite, de jeudi 17 novembre, Fillon a été jugé « le plus convaincant » par deux sondages.

La progression de Fillon est venue principalement aux dépens d’Alain Juppé, qui les sondages donnaient systématiquement gagnant en octobre.

Juppé et Sarkozy sont tous les deux des candidats qui ont dirigé des gouvernements discrédités. Juppé est étroitement associé à la réforme ultralibérale qu’il a menée en tant de premier ministre sous le président Jacques Chirac, le « plan Juppé », qui a provoqué une vaste vague de grèves en 1995 pour défendre les retraites et la sécurité sociale.

Suite à l’élection de Trump, Juppé a rejeté toute affirmation selon laquelle il existe un « clivage » entre les peuples et les élites, expression qui avait servi de cri de ralliement à Sarkozy tout au long de sa campagne.

Dans une affirmation qui démontrait son hostilité aristocratique envers les masses, Juppé a dénoncé l'idée même qu'il existerait un gouffre sociale entre les masses laborieuses et les élites comme une «idiotie ». Il a ajouté : « On a besoin d'élites, c'est elles qui nous tirent vers le haut.»

Sarkozy, quant à lui, a vanté l’élection de Trump comme une validation de sa propre prétention à être le candidat de la « majorité silencieuse » et comme une victoire pour la démocratie et « l’écoute des peuples ». Trump n'est guère populaire en France, et ce soutien de Trump par Sarkozy a probablement contribué à l’élimination de ce dernier au premier tour.

Sarkozy a explicitement axé sa campagne sur la stigmatisation des musulmans, et aussi parfois en faisant des clins d'oeil à Moscou ; sa candidature était visiblement proche du FN.

Alors que le FN passera presque certainement au second tour des présidentielles, vu l’impopularité et le discrédit du PS, la tentative de sélectionner d’un candidat qui aura la meilleure chance de battre Marine Le Pen au second tour a sans doute pesé pour beaucoup dans les choix des électeurs LR. En tant que candidat moins ouvertement dédaigneux des électeurs que Juppé, et moins agressivement lié à la droite nationaliste que Sarkozy, Fillon a pu par son profil médiatique plus bas tirer profit des difficultés de ses rivaux.

Toutefois, le programme de Fillon démontre avant tout que tous les candidats LR et toute la classe dirigeante se préparent à mener une guerre sociale contre la classe ouvrière.

Le programme de Fillon n’a guère de différences significatives avec celui de Sarkozy. Il veut lancer des attaques massives contre les droits de la classe ouvrière, y compris des réductions d'emplois dans le secteur public, une diminution drastique des impôts pour les entreprises et les couches les plus riches et le renforcement de pouvoirs répressifs de la police.

La nature des mesures proposées par Fillon et Juppé doivent servir d'avertissement aux travailleurs. Après les guerres, les mesures d'austérité, et les politiques d'Etat policier sous Hollande, les milieux dirigeants préparent encore une série d'attaques profondes contre la classe ouvrière.

Fillon et Juppé soutiennent tous deux les attaques contre les droits sociaux des travailleurs et les mesures d’Etat policier, telles que l’état d’urgence actuel.

Face à l’opposition immense à l'austérité dans la population française, le fait que les candidats LR avancent un programme aussi ouvertement antiouvrier renforcera sans doute le FN et Le Pen.

Le FN cherchera à tirer profit de leur promotion unanime de politiques réactionnaires afin de présenter sa campagne démagogiquement comme étant la seule à mener une lutte contre les hommes politiques traditionnels et les élites dirigeantes.

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