Montée des tensions entre la Russie et l'Ukraine après une provocation terroriste

Le régime ukrainien soutenu par l'Occident a annoncé jeudi qu'il mettait ses forces militaires en alerte maximum de combat alors qu’on fait monter les tensions avec la Russie suite à des informations sur une provocation terroriste en Crimée, gouvernée par la Russie. 

Pour sa part, Moscou a annoncé des manœuvres dans la mer Noire, où la marine russe s'entraîne à des tactiques pour repousser une attaque de la Crimée. 

Le gouvernement ukrainien, qui a envoyé jeudi son ambassadeur aux Nations-Unies afin de prendre la parole sur la question devant le Conseil de sécurité, a accusé la Russie d’avoir massé plus de 40.000 soldats en Crimée et sur la frontière ukrainienne. Comme la Crimée a été dans l’histoire la base de la flotte russe en mer Noire, elle a toujours comporté de nombreuses troupes. 

L'ambassadeur de Russie à l'ONU, Vitaly Tchourkine, a rejeté l'accusation, déclarant: «Au lieu de compter nos militaires, ils devraient mettre un terme au conflit » dans l'est de l'Ukraine où les forces du gouvernement de Kiev continuent d’attaquer une minorité russophone séparatiste, causant quelque 10.000 morts depuis avril 2014. 

Moscou a accusé le gouvernement ukrainien d'avoir organisé une attaque terroriste visant à frapper l'infrastructure vitale de la Crimée, un territoire que la Russie a annexé après un plébiscite où la population de la péninsule a voté pour une réunion à la Russie. L'action a suivi le coup d'État de février 2014, orchestré par Washington et l'Allemagne et dirigé par des forces ultra-nationalistes et fascistes dans le but d'intensifier la campagne des États-Unis d’encerclement et de subjugation militaire de la Russie.

Un responsable de l'OTAN a déclaré à l'agence de presse AFP que l'alliance militaire conduite par les Etats-Unis suivait avec attention la montée des tensions entre la Russie et l'Ukraine. « L'activité militaire récente de la Russie en Crimée ne contribue pas à apaiser les tensions » a-t-il dit.

La porte-parole du Département d'Etat Elizabeth Trudeau a qualifié la situation de « très dangereuse » et a réitéré la position de Washington, qui est que « la Crimée fait partie de l'Ukraine ». 

Tous deux ont rejeté la version russe des faits, que des actes terroristes avaient été menés contre le territoire de la Crimée par un commando d'opérations spéciales organisé par l'Ukraine. 

L'agence de sécurité russe FSB a rendu public une déclaration détaillée mercredi disant que les attaques avaient été menées dans la nuit du 6 au 7 août, conduites par la Direction principale du renseignement du ministère ukrainien de la Défense. D'autres tentatives d'infiltration avaient eu lieu le 8 août. 

Selon la déclaration, un agent du FSB avait été tué en essayant de détenir les agents ukrainiens, dont l'objet a été décrit comme le ciblage des « infrastructures et des installations critiques de soutien de vie » en Crimée. Un soldat russe aurait également été tué par les tirs des unités militaires ukrainiennes qui comptaient des véhicules blindés appuyant l'opération. 

Le FSB a affirmé avoir récupéré « 20 engins explosifs improvisés d’une puissance explosive totale de 40 kg [de] TNT », ainsi que des mines terrestres, des grenades et des armes spéciales d'assaut.

L'agence a également présenté des preuves fournies selon elle par un Ukrainien présenté comme un agent de renseignement militaire ukrainien et un chef des unités d'opérations spéciales, identifié comme Yevgeniy Aleksandrovich Panov. 

Le premier ministre de la Crimée Sergei Aksyonov, a porté l'accusation que la source réelle des opérations terroristes était Washington. « Les responsables ukrainiens n'auraient pas osé de telles actions ... Ce ne sont pas leurs propres actions et messages, » a-t-il dit, ajoutant: « derrière eux, il y a le Département d'Etat américain ». 

Il y a toutes raisons de soupçonner qu’il en est ainsi. La provocation en Crimée survient au milieu d’une escalade continue dans le langage et les mesures américaines contre la Russie. Les États-Unis ont intensifié leur armement et leur financement des milices liées à Al-Qaïda en Syrie pour tenter d’inverser les victoires des forces gouvernementales étroitement soutenues par l’aviation russe. Le 1er août, les djihadistes soutenus par les USA ont abattu un hélicoptère russe en mission de secours, tuant les cinq personnes à son bord. Dans les médias, d'anciens hauts responsables et chroniqueurs ayant des relations étroites avec le gouvernement ont appelé à des frappes aériennes américaines contre les forces soutenues par la Russie et l'imposition d'une « zone d'exclusion aérienne » ce qui ne manquerait pas de signifier un affrontement avec l'aviation russe. 

En Ukraine même, Washington a œuvré pour renforcer l'armée du régime droitier en crise de Kiev dirigé par l'oligarque Petro Porochenko. Une unité américaine de 500 hommes est actuellement sur place dans l'ouest de l'Ukraine formant des forces ukrainiennes, dont les membres des milices dirigées par les fascistes, tandis que des centaines, voire des milliers d'autres membres du personnel militaire et d'entrepreneurs militaires américains se relaient dans le pays. Le mois dernier, la marine américaine a rejoint des navires de guerre ukrainiens dans les exercices « Sea Breeze » visant à défier la Russie dans la mer Noire. En juillet, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a visité l'Ukraine pour des entretiens avec Porochenko, où il a réitéré le soutien de Washington aux revendications du régime de Kiev concernant la Crimée. 

Les tensions militaires dangereuses entre l'Ukraine et la Russie ont été déclenchées alors que dans la campagne électorale américaine, la favorite présidentielle, la candidate démocrate et ex-secrétaire d'Etat Hillary Clinton tente d'attaquer depuis la droite le candidat républicain fascisant Donald Trump, en particulier sur la question de la Russie.

Les démocrates ont organisé contre Trump une campagne de type maccarthyste, l'accusant d'être une marionnette de Vladimir Poutine, tout en accusant sans preuves le président russe d’être derrière la diffusion par WikiLeaks de courriels du Comité national du Parti démocrate exposant ses tentatives de truquer les primaires contre le sénateur Bernie Sanders, le rival de Clinton. 

On a entre autre accusé la campagne de Trump – sans substance, encore une fois – d’« édulcorer » le langage de la plate-forme républicaine sur l'Ukraine. La plate-forme, en fait, attaque le gouvernement Obama pour aider à une « résurgence de la Russie », soutient des sanctions contre Moscou et appelle à « une aide appropriée aux forces armées de l'Ukraine ». La plainte était que la plate-forme omettait de mentionner qu'on leur fournirait des « armes létales », ce que l'administration Obama elle-même affirme ne pas faire. 

Le fait que Clinton attaque ces politiques depuis la droite, avec un soutien croissant de personnages clés de l'appareil militaire et du renseignement ainsi que d’un nombre croissant de décideurs politiques républicains, constitue un net avertissement. Des préparatifs sont en cours pour une confrontation militaire directe avec la Russie en Europe de l'Est, des provocations comme celles montées en Crimée servant de déclencheur probable. Qu'une telle escalade dangereuse du conflit, impliquant deux des grandes puissances nucléaires, soit reportée jusqu'après novembre n’est en rien évident. 

(Article paru en anglais le 12 août 2016)

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