Déjà plus d’un milliard de dollars collecté dans la campagne présidentielle américaine

Les contributions financières pour les candidats démocrates et républicains briguant l’investiture présidentielle ont dépassé le milliard de dollars à la fin du mois dernier, surpassant de loin les chiffres atteints, au même stade, dans les élections précédentes. Une énorme portion de cet argent vient d'une poignée de donateurs super-riches qui ont profité de l'élimination des restrictions sur les dons à des « Super PACs » [Comités d'action politique] associés à des campagnes individuelles. 

Selon des données de l'Institut des finances de campagne rapportées jeudi 24 mars par USA Today, les sommes d'argent collectées à ce jour représentent plus du double des 402.7 millions de dollars collectés jusqu'à la fin de février lors de l’élection présidentielle de 2012. En 2008, dernière année où les deux partis avaient tenu des primaires, les dépenses électorales se montaient à 812 millions de dollars à la même période. 

Les Super PACs, qui ont le droit de lever des fonds illimités suite à une décision de la Cour suprême en 2010, la décision Citizens United [Citoyens unis], représentent près de 40 pour cent de la collecte de fonds, contre 22 pour cent en 2012. 

Selon USA Today, 108 individus, entreprises et groupes ont contribué au moins un million de dollars à des Super PACs, pour un total combiné de 232 millions de dollars. Autrement dit, un peu plus de 100 personnes ont contribué plus de la moitié de tous les dons aux Super PACs et assuré près d'un quart du financement de l'élection dans son ensemble. 

Des données séparées du Center for Responsive Politics montrent que, pendant la première semaine de mars, c’est de tous les candidats la favorite démocrate Hillary Clinton qui a levé le plus d’argent, 222,6 millions de dollars. Sur ce total, 62,7 millions de dollars ont été versés aux organisations extérieures associées à sa campagne, principalement son Super PAC Priorités USA Action, qui a collecté plus que tout autre groupe extérieur. 

Parmi les principaux donateurs pour Clinton et son Super PAC il y a le Soros Fund Management, géré par l'investisseur milliardaire George Soros (7 millions de dollars), Euclidean Capital (3,5 millions de dollars), Pritzker Group (2,8 millions de dollars) et Saban Capital Group (2,5 millions de dollars).

Le sénateur du Vermont Bernie Sanders a collecté près de 140 millions de dollars, en grande partie sous forme de contributions individuelles à sa campagne, la moitié provenant de dons de moins de 200 dollars. Lorsque les contributeurs individuels sont regroupés selon l'institution où ils travaillent, la plus grande (132.000 dollars) est Google, suivie de l'Université de Californie, Apple, Microsoft et Amazon. La présence d'autres entreprises de haute technologie et d’universités sur la liste est une indication du soutien pour Sanders parmi les étudiants et les travailleurs professionnels.

Du côté républicain, le sénateur du Texas Ted Cruz a collecté 119,2 millions de dollars, dont 44 pour cent proviennent de ses Super PACs. Les Super PACs Cruz Keep the Promise (Cruz tient la promesse) I, II et III ont chacun amassé plus de 10 millions de dollars.

Donald Trump a collecté 36,8 millions de dollars, la majeure partie sous forme de prêts du candidat à sa propre campagne, qu'il prévoit être en mesure de rembourser. Le promoteur immobilier milliardaire a promis de dépenser des fonds sans limites pour s’assurer la présidence

Le Center for Responsive Politics analyse également les dons de campagne par secteur. Les personnes associées à la finance, à l'industrie ou à l'immobilier ont contribué à ce jour 192,3 millions de dollars aux candidats et aux groupes périphériques; 67,1 millions de dollars au candidat républicain Jeb Bush (qui a abandonné), 40,1 millions à Cruz et 29,1 millions à Clinton. Les avocats et les lobbyistes ont contribué 26,2 millions de dollars, dont la moitié est allée à Clinton.

Le mois prochain, Clinton organisera une levée de fonds à San Francisco, en Californie, les places à la table principale (où figureront entre autres l'acteur George Clooney et sa femme Amal) étant réservées aux personnes qui contribuent ou collectent des fonds à hauteur de 353,400 dollars au Hillary Victory Fund (qui comprend tant sa propre campagne que le Comité national démocrate et les comités du Parti démocrate de 32 Etats).

Selon un article publié dans Politico, l'événement sera organisé par Jeffrey Katzenberg, PDG de DreamWorks et bailleur de fonds majeur de Clinton et précédemment de Barack Obama.

Dans l'ensemble on prévoit que l’élection de 2016, qui n’est que dans sept mois, sera de loin la plus coûteuse jamais tenue. On prévoit que les candidats et les groupes périphériques dépenseront jusqu'à 10 milliards de dollars sur les candidats à la présidentielle, aux législatives et autres, 40 pour cent de plus qu’en 2012.

Une analyse séparée du New York Times publiée la semaine dernière a calculé ce qu’a coûté en argent la couverture médiatique gratuite des différents candidats sur la base de tarifs publicitaires équivalents. Trump a reçu de loin la plus grande partie de cette couverture, l'équivalent de 1,9 milliard de dollars. On a estimé à 746 millions de dollars celle de Clinton et à seulement 321 millions de dollars celle de Sanders.

Sanders a constitué un défi important pour Clinton dans la course à l’investiture présidentielle démocrate en dépit de son manque relatif de couverture médiatique et d’accès aux grands donateurs. Si l’on s’attend largement à ce que Clinton remporte aisément l’adhésion du plus grand nombre des délégués, un sondage récent de Bloomberg donnait, avec 49 pour cent contre 48 à Clinton, une légère avance à Sanders au niveau national. D'autres sondages voyaient Clinton bien en tête avec un écart important.

Les résultats des sondages et les contributions financières pour Sanders reflètent le fait qu'il a surtout obtenu aux primaires le soutien des plus jeunes et des moins riches supporters du Parti démocrate. C’est aussi là l’expression du rôle qu’on lui a assigné: se servir d’un discours « socialiste» et anti-grand patronat pour rediriger le mécontentement vers le Parti démocrate, parti du statu quo.

(Article paru en anglais le 25 mars 2016)

 

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