Australienne abattue par un agent de police de Minneapolis

Samedi soir dernier, deux policiers de Minneapolis, au Minnesota, ont répondu à un appel d’urgence logé au service 911 par Justine Ruszcyk, une Australienne de 40 ans qui appelait pour rapporter ce qu'elle pensait être une agression sexuelle dans une ruelle de son quartier.

Peu de temps après leur arrivée sur les lieux, l'un des deux agents a dégainé son arme pour tirer à plus d’une reprise et abattre Ruszcyk, qui s'était identifiée en utilisant le nom de famille de son futur mari Don Damond. Le médecin légiste du comté de Hennepin a rapporté lundi soir que Damond était morte des suites d'un coup de feu à l'abdomen, ce qui fait de son décès un homicide.

L'agent qui a tiré a été identifié comme étant Mohamed Noor, le premier agent de police somalien-américain patrouilleur du district. Noor aurait fait feu sur Damond depuis le siège du passager de l’auto-patrouille et l'aurait atteint au travers de la porte du conducteur alors même que Damond parlait à son collègue Matthew Harrity, un policier âgé de 25 ans.

Conformément au scénario des autres meurtres policiers, Noor et Harrity ont été suspendus avec salaire en attendant que l'enquête en cours soit terminée.

Selon les responsables de l’enquête sur cet homicide, la caméra du tableau de bord de l’auto-patrouille n’a rien enregistré de l'incident et, bien que les deux agents portaient leur caméra corporelle tel que requis par la loi de l'État, les deux étaient éteintes.

Les agents de police de Minneapolis sont tenus de porter des caméras corporelles dans le cadre d'une politique visant à atténuer l'indignation populaire qui a éclaté suite à la mort de Philando Castile en juillet 2016. Alors que cette décision a été présentée comme une réforme progressiste de la police par le Parti démocrate et ses partisans, le meurtre de Damond expose bien le caractère purement cosmétique de cette mesure. Les agents peuvent en effet facilement dissimuler leurs actions en laissant simplement leurs caméras corporelles éteintes.

Le tir policier de samedi a eu lieu dans un quartier de classe moyenne du sud-ouest de Minneapolis présentant un taux de criminalité relativement faible.

Les amis et la famille de Damond ont tenu une veille dimanche soir aux abords de la ruelle pour exprimer leur colère face à ce meurtre. Don Damond, le fiancé de Justine, a déclaré que ses proches et amis «cherchaient des réponses désespérément».

«Connaitre les derniers moments de Justine avant l'homicide serait un petit réconfort pour nous alors que nous subissons toute cette tragédie», a-t-il déclaré aux journalistes lors d'une entrevue.

Zach Damond s’est exprimé après la mort de sa future mère par alliance dans une vidéo largement partagée sur Facebook: «Ma mère est morte parce qu'un policier l'a tirée pour des raisons que je ne connais pas, et je veux savoir!» Il poursuit en exprimant son opposition à la violence policière aux États-Unis: «Je suis tellement écœuré par toute cette violence. C'est de la merde – les États-Unis puent! Ces flics doivent être formés différemment.»

Le chef de la police de Minneapolis, Janeé Harteau, a déclaré que le Service de police avait demandé une «enquête externe et indépendante sur cette mort par tir policier impliquant un agent». En 2015, Harteau avait promis la même chose lorsque des policiers avaient brutalement tué par balle Jamar Clarke dans ce qui s'apparentait à une exécution, et l'enquête s'est terminée sans que la moindre accusation soit déposée.

La nouvelle de la mort de Damond a déjà fait les manchettes en Australie. Matt Omo, un ami de Damond en Australie, a déclaré à l'Australian Broadcasting Corporation: «Comment une personne qui enseigne la méditation et répand l'amour peut être abattue par la police alors qu'elle était en pyjama va au-delà de tout entendement.»

De race blanche, Damond est la sixième personne abattue par la police au Minnesota cette année, et seulement l'une des 662 personnes au moins qui ont été atteintes par des tirs mortels dans 48 des 50 États constituant les États-Unis. Son meurtre est un vif rappel que la question de la brutalité policière n'est pas fondamentalement une question raciale, n'en déplaise aux médias et à des organisations comme Black Lives Matter.

Bien que le racisme puisse jouer un rôle dans certains incidents de violence policière et qu'il entraîne un nombre disproportionné de victimes afro-américaines, des hommes et des femmes de toutes races et appartenances ethniques sont victimes de violence policière.

Selon la base de données cumulée par le Washington Post, 543 personnes auraient été abattues par la police cette année. Lorsqu'on répartit ces victimes par catégories raciales dans les cas où elles ont pu être identifiées, les Blancs constituent le plus grand nombre avec 233 morts, suivis par les Afro-Américains avec 121 morts et les Hispaniques avec 88 morts. Les victimes sont très majoritairement originaires de la classe ouvrière ou pauvres.

La classe dirigeante aux États-Unis fait face à une population de plus en plus hostile et elle ne cesse d'encourager la police à faire usage de force mortelle en toute impunité en ce qui a trait à la loi. Encore la semaine dernière, Jeronimo Yanez, l'agent qui a été acquitté lors du tir mortel de Philando Castile, a signé un accord pour une indemnité de départ d'un montant de 48.500 $US.

L'administration Obama s'est systématiquement rangée du côté des policiers dans tous les cas portés devant la Cour suprême et a travaillé en étroite collaboration avec les maires et les gouverneurs démocrates pour réprimer les manifestations populaires contre la violence policière qui ont suivi le meurtre de Michael Brown en 2014.

Les éléments les plus réactionnaires au sein de la police sont soutenus par le département de la Justice de l'administration Trump qui a éliminé même la supposée surveillance mise en place par l'administration Obama. Les meurtres policiers sont en bonne voie cette année d'égaler le nombre de victimes qui a été de près de 1000 morts en 2016.

(Article paru en anglais le 18 juillet 2017)

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