Le « Plan Allemagne » du SPD – un nouveau virage droitier de la social-démocratie

Le dimanche soir, le chef du SPD et candidat social-démocrate à la chancellerie, Martin Schulz, a présenté à la Willy-Brandt-Haus, le siège du parti à Berlin, son « Plan Allemagne » pour une Allemagne moderne. Derrière la rhétorique du parti sur la « sécurisation de l’avenir », l’« innovation », la « société civile » et la « sécurisation de la paix », le SPD opère un virage encore plus prononcé à droite.

Lorsque, il y quelques mois, Schulz avait annoncé une « campagne électorale fondée sur la justice sociale », personne ne l’avait pris au sérieux. Tout le monde sait qu’au cours de ces deux dernières décennies le SPD avait durant 15 ans fait partie du gouvernement. Ce fut avant tout le SPD qui fut responsable des massives coupes sociales, des baisses de salaires, des réductions des retraites et de la misère sociale qui en résulta. Le SPD est associé aux mesures anti sociales Hartz IV et est détesté à juste titre.

La grande majorité des travailleurs ont accueilli la rhétorique de Schulz sur la justice sociale avec une hostilité croissante. Lors de ces trois dernières élections régionales (Sarre, Schleswig-Holstein, Rhénanie-du-Nord/Westphalie), le SPD a subi une défaite électorale après l’autre. Le parti a réagi à cette série de revers électoraux par un nouveau virage droitier, et ce à deux importants égards.

En politique intérieure, le SPD a adopté la politique de l’« Agenda » de l’ancien chancelier Gerhard Schröder en préparant un nouveau train de massives coupes sociales. C’est ce qui se cache derrière le slogan « L’alliance pour l’innovation de l’industrie allemande », qui vise à renforcer la compétitivité des entreprises allemandes.

En politique étrangère, le parti réclame une plus grande indépendance vis-à-vis des États-Unis en fixant explicitement comme objectif électoral d’emprunter la « voie vers une armée européenne. »

Schulz est allé jusqu’à adopter le mot d’ordre de la campagne de l’ancien chancelier Schröder « Innovation et justice [sociale] », au moyen duquel le SPD a causé des ravages sociaux il y a 20 ans. L’Allemagne est le « pays de l’entrepreneuriat » et doit le rester, écrit le SPD. Ceci requiert une « politique industrielle active » et surtout une compétitivité accrue, la promotion des petites et moyennes entreprises et de l’artisanat.

Dans la partie « Travailler et vivre dans une société numérique » du programme, le SPD promet « plus d’autodétermination dans le monde du travail ». En fait, ces mêmes phrases furent utilisées des années durant pour justifier la déréglementation sur les lieux de travail. « Plus d’autodétermination », ce sont des mots codés pour la suppression de toute forme de sécurité sociale et la création d’emplois précaires. Les travailleurs en sont parfaitement conscients et ne ressentent que du mépris et de la colère pour ce tissu de mensonges social-démocrate.

L’annonce du SPD selon quoi l’administration publique devrait être modernisée et numérisée est le prélude à de massives suppressions d’emplois dans le secteur public et à l’intensification de l’exploitation sur les lieux de travail.

Cet « Agenda 2020 » vise à intensifier considérablement l’exploitation afin d’accroître davantage encore les bénéfices des entreprises. Il va de pair avec une politique étrangère agressive. Le SPD se présente comme étant le parti le mieux à même d’imposer plus efficacement et de manière plus cohérente la nouvelle politique de grande puissance de l’impérialisme allemand que les partis conservateurs, l’Union chrétienne-démocrate (CDU) et l’Union chrétienne-sociale (CSU).

Le « Plan Allemagne » contient l’exigence d’un réarmement militaire massif. La partie du programme intitulée « Contre une nouvelle course à l’armement – pour un désarmement » stipule précisément sans équivoque la demande : « La Bundeswehr a besoin de plus d’argent pour lui permettre d’accomplir ses missions. » Les critiques également formulées dans cette partie contre l’« objectif des deux pour cent » [du PIB fixé par] l’OTAN n’ont rien à voir avec un « désarmement ». Le SPD tient simplement à veiller à ce que ses projets de réarmement servent les intérêts impérialistes de l’Allemagne et non ceux des États-Unis. Pour atteindre ces objectifs dans le monde entier, le « Plan Allemagne » appelle à la mise en place d’une armée européenne sous commandement allemand.

La force militaire des États-Unis sert de critère de référence. « L’efficacité des dépenses militaires en Europe ne représente que 15 pour cent de celle des États-Unis », écrit le SPD. « L’armée a besoin de plus d’argent pour accomplir ses tâches », indique expressément le plan. Pour s’assurer que cette mise à niveau militaire sert les intérêts impérialistes allemands, il est nécessaire de clarifier au sein de l’Europe et de l’OTAN, « pourquoi et dans quel but les dépenses de défense sont utilisées. Cela concerne aussi la consolidation de l’industrie de l’armement dans une Union européenne de la défense. » Le SPD prendra « la voie vers une armée européenne. »

Suite aux affrontements survenus en marge du sommet du G20 à Hambourg, le SPD en a ouvertement appelé aux couches militaristes qui sont attirées par le parti d’extrême-droite Alternative pour l’Allemagne (AfD). D’influents membres du SPD s’en prennent par la droite à la chancelière Angela Merkel (CDU) et aux partis conservateurs en prenant agressivement fait et cause pour la police et en attisant un nationalisme pur et dur.

Le ministre de la Justice, Heiko Maas (SPD), a exigé la création d’un fichier à l’échelle européenne des extrémistes de gauche en s’engageant pour la tenue d’un concert « rock contre la gauche » (Rock gegen Links). La direction du SPD se sert de l’expression « terrorisme de manifestations » pour criminaliser l’opposition croissante dans le pays contre de la politique de plus en plus réactionnaire et militariste. Quant à Schulz, il a débuté son « Plan Allemagne » par la phrase : « L’Allemagne est un grand pays. Et l’Allemagne peut en faire davantage. » Ce qui n’évoque pas par hasard les slogans de l’extrême-droite « Fier de l’Allemagne » (Stolz auf Deutschland) et « L’Allemagne par-dessus tout » (Deutschland über alles).

Plus la résistance à la politique antisociale et au réarmement militaire se manifeste et plus le SPD vire à droite. Il se présente comme le parti officiel de l’impérialisme allemand en rappelant que c’était avant tout le SPD qui avait défendu le régime bourgeois en situation de crise au cours du siècle passé et qui n’avait pas hésité à réprimer violemment la classe ouvrière.

Le Parti de l’Égalité socialiste (Sozialistische Gleichheitspartei, SGP) s’oppose avec véhémence au SPD et à sa politique droitière. Les principaux partis « d’opposition » – le parti Die Linke (La gauche) et les Verts – soutiennent la politique du SPD et ambitionnent une coalition gouvernementale dite rouge-rouge-verte. Le SGP est le seul parti à participer aux élections fédérales de cet automne sur la base d’un programme socialiste et internationaliste contre la guerre et l’inégalité sociale et en défendant les droits démocratiques.

Nous invitons instamment tous ceux qui s’opposent au retour du militarisme allemand, à la pauvreté croissante et à la croissance de l’extrême droite à soutenir le SGP et sa campagne électorale. Adhérez au SGP ! Le moment est venu de participer activement à la construction d’un nouveau parti socialiste de masse.

(Article original paru le 19 juillet 2017)

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