Royaume-Uni : deuxième décès d’un permanent du Parti travailliste lié à des allégations de harcélement sexuel sans preuves

Un deuxième membre du parti travailliste se serait suicidé après des allégations d’inconduite sexuelle.

L’homme, qui aurait la trentaine, travaillait au quartier général du Parti travailliste à Victoria, Londres. Un porte-parole du parti travailliste a déclaré seulement qu’il est mort « soudainement et de façon inattendue » et a refusé de commenter davantage.

Cet homme dont le nom n’a pas été révélé aurait été suspendu à la suite d’allégations liées à de la « pornographie » – suite à un trucage par Photoshop mettant le visages de gens sur des photos de corps de stars du porno. Une source du Parti travailliste a déclaré au Sunday Times qu’une enquête venait d’être lancée qui en était « à ses débuts. Aucun fait n’a été trouvé et aucune conclusion de culpabilité n’a été tirée ».

Ces nouvelles surviennent juste une quinzaine de jours après le suicide du membre travailliste de l’Assemblée galloise Carl Sargeant. Père de deux enfants, âgé de 49 ans, il a été démis de ses fonctions de Secrétaire de cabinet aux communautés et aux enfants du gouvernement du Pays de Galle et suspendu de ses fonctions le 3 novembre, après des allégations non spécifiées d’« inconduite sexuelle ».

Sargeant avait protesté contre ces allégations en les qualifiant de « choquantes et affligeantes pour moi » et avait demandé une « enquête indépendante urgente […] afin de me permettre de m’innocenter ».

Bien que Sargeant n’ait même pas été informé des plaintes portées contre lui, le premier ministre du parlement gallois, le travailliste Carwyn Jones, a fait des déclarations aux médias lesquelles, selon l’avocat de Sargeant, « portent clairement atteinte à ce qui est censé être une enquête indépendante ».

La famille et les amis de Sargeant se plaignaient du fait qu’il avait été jeté aux loups et n’avait pas bénéficié de « la courtoisie, la décence ou la justice naturelle ». Dans une lettre aux responsables du Parti travailliste, son avocat, Hugh Bowden, a averti qu’une enquête dilatoire était « préjudiciable à la préparation de l’affaire de notre client mais aussi à son bien-être physique et mental ».

Le 7 novembre, son épouse, Bernadette, a trouvé Sargeant mort dans leur maison galloise. Les efforts déployés par la famille et les services d’urgence pour le réanimer ont échoué. Un autopsie a confirmé qu’il s’était pendu.

Dans toutes les allégations faites jusqu’ici de harcèlement sexuel, personne n’a été accusé d’une infraction pénale. Pourtant, le principe de la présomption d’innocence a été abandonné sur la base d’allégations non fondées, de rumeurs, d’insinuations et de ragots.

À Hollywood, aux États-Unis, ou la campagne a débutée, des carrières et des réputations ont été ruinées sans aucun souci du respect du droit. Ceux qui sont jugés coupables sans procès sont expulsés des projets de films et leurs récompenses annulées.

L’arrogance et le mépris des droits démocratiques de ceux qui soutiennent de telles mesures ont été résumés par la chroniqueuse de Teen Vogue, Emily Lindin. Elle a écrit sur Twitter, « si la réputation de certains hommes innocents doit prendre un coup dans le processus pour défaire le patriarcat, c’est un prix que je suis absolument prête à payer ».

En Grande-Bretagne, où la campagne s’est concentrée sur le parlement de Westminster, deux hommes ont pris un tel « coup » que leur association, non prouvée, avec des atteintes sexuelles les a amenés à se suicider. Ceux qui ont instigué, alimenté et participé à cette campagne hystérique ont du sang sur les mains.

Il faudrait être naïf, stupide ou y avoir un intérêt direct pour écarter la possibilité que des allégations d’atteintes sexuelles soient utilisées à des fins douteuses.

Lorsque la campagne de harcèlement a éclaté au Parlement, elle s’est concentrée sur les conservateurs. Une liste d’une quarantaine de députés a été diffusée par voie électronique, les accusant d’un peu tout depuis des relations extra-conjugales jusqu’aux agressions sexuelles.

Le premier scalp pris était celui du secrétaire à la Défense Michael Fallon. Seulement une semaine avant sa démission, Fallon défendait le régime despotique de l’Arabie Saoudite, auquel le Royaume-Uni avait l’espoir de vendre plus d’armes alors qu’il poursuit sa guerre criminelle au Yémen. Mais ce ne sont pas de tels exemples de vénalité politique qui ont détruit Fallon, mais des informations selon lesquels il a touché le genou d’une journaliste.

Le Premier secrétaire d’État et vice-Premier ministre de facto, Damian Green, a également été accusé d’avoir touché le genou d’une jeune activiste et journaliste tory, ce qu’il a amèrement contesté. Il fait maintenant l’objet d’une enquête pour avoir regardé de la pornographie sur son ordinateur de la Chambre des communes – une allégation qu’il nie également, mais qui est tout aussi difficile à réfuter.

Les affirmations au sujet de la pornographie ont été faites par Bob Quick, ancien commissaire adjoint de la police métropolitaine. En 2008, Quick a supervisé une enquête de police extrêmement controversée sur la fuite de documents gouvernementaux, au cours de laquelle le bureau parlementaire et la maison de Green ont été perquisitionnés et où il a été détenu pendant plusieurs heures. Aucune accusation n’a jamais été portée contre Green, alors qu’une enquête sur les actions de la police a innocenté cette dernière. Quick a été forcé de quitter son poste en 2009 après avoir été photographié avec des documents confidentiels sans les cacher.

Green a qualifié Quick d' « ancien commissaire adjoint discrédité » impliqué dans « une diffamation peu scrupuleuse ». Dans une déclaration, il a dit que la police n’avait jamais suggéré que « des documents inappropriés avaient été trouvés sur mon ordinateur parlementaire » et a nié avoir un ordinateur personnel dans son bureau, comme cela avait également été affirmé.

Cela n’a pas empêché les médias d’affirmer que la pornographie trouvée était « extrême », tout en ajoutant de manière suggestive qu’elle « ne comportait pas d’images sexuelles d’enfants ».

Fallon et Green sont les principaux alliés politiques de May, chargés de superviser un cabinet et un gouvernement amèrement divisés sur le Brexit – une question qui devient de plus en plus litigieuse au fil des jours. Une grande partie des fuites contre eux vient des journaux Sun et Times de Rupert Murdoch, partisans de la stratégie du Brexit dur favorisée par les prétendants potentiels pour remplacer May à la direction, Boris Johnson et Michael Gove.

Mais c’est le Parti travailliste qui a été le plus touché par la campagne. La semaine dernière, l’ancien ministre Ivan Lewis a été suspendu et placé sous enquête pour des allégations de harcèlement sexuel. Lewis aurait été accusé d’avoir touché la jambe d’une jeune femme de 19 ans en 2010 et de l’avoir invitée chez lui.

Lewis a déclaré qu’il n’avait « jamais fait de commentaires sexuels ni d’avances sexuelles non consensuels aux femmes » et qu’il était « profondément attristé » par les allégations, qu’il contestait fortement. Il a regretté qu’il ait jamais fait quelque chose pour mettre une femme mal à l’aise, disant : « J’ai parfois invité des femmes avec qui je travaillais à boire un coup ou à dîner, ou j’ai développé des sentiments forts pour elles, et je suis sincèrement désolé si cela a été mal venu ou inapproprié dans les circonstances, et fait que quelqu’un se sente mal à l’aise. »

Le dirigeant travailliste Jeremy Corbyn n’a fait aucun effort pour s’opposer à cette opération diffamatoire, ni exprimé des inquiétudes du fait ce cet abus de droit. Au contraire, il a déclaré que les allégations devaient signaler un « moment de changement réel » en renversant une « culture déformée et dégradante » dans la société, traitant ainsi toutes les accusations comme de bon aloi en affirmant que les prédateurs sexuels « se cachaient en étant connus de tous ».

Deux autres députés, Kelvin Hopkins et Jared O'Mara, ont été suspendus par le Parti travailliste, et un autre, Clive Lewis, fait également l’objet d’une enquête. Le parti a également retenu les services de l’avocate renommée Karon Monaghan pour enquêter sur les allégations du militant du parti, Bex Bailey, selon lesquelles un responsable du parti lui avait dit de garder le silence quand elle les a informés qu’elle avait été violée en 2011 par un autre membre du parti. La mission de Monaghan va au-delà de cela, cependant : il y a des affirmations selon lesquelles elle conseillera également le parti sur la mise en place de procédures pour traiter de telles allégations.

Les adversaires de droite de Corbyn au sein du parti sont partis à l’offensive. Jess Phillips, la présidente du groupe du Parti travailliste des femmes au parlement, qui a déjà soutenu que Corbyn doive démissionner, a exigé qu’il dise clairement qu’il y aura une « tolérance zéro pour ce genre de comportement », ce qui abandonne encore une fois le principe de la présomption d’innocence.

Le sous-entendu est que les partisans de Corbyn – et plus généralement la gauche – sont des misogynes et des apologistes du viol. The Observer, qui, avec son journal frère The Guardian, a participé à la campagne, a rapporté de manière salace et sans preuve que plusieurs sources lui avaient dit qu’un autre allié de Corbyn se vantait de la façon dont son amitié avec le leader travailliste lui avait permis de s’approcher des femmes.

(Article paru en anglais le 1ᵉʳ décembre 2017)

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