Les manifestations se généralisent contre le viol de Théo par la police d'Aulnay

Des manifestations de jeunes se répandent à travers la France pour protester contre les violences policières, trois semaines après le viol commis avec une matraque par des policiers sur Théo, un jeune d'Aulnay-sous-Bois, dans la banlieue de Paris.

Suite à un appel sur les réseaux sociaux, des élèves d’une dizaine de lycées parisiens ont bloqué leurs établissements, jeudi matin, sous le slogan «Blocus pour Théo», massivement diffusé sur Twitter. Des groupes de lycéens se sont réunis tôt dans la matinée pour rassembler des poubelles et des barrières de sécurité devant les portes de leurs établissements, pour empêcher leurs camarades et leurs professeurs d’y pénétrer.

Une manifestation non déclarée à la préfecture place de la Nation dans le 12e arrondissement de Paris en fin de matinée a rassemblé entre 800 et 1.000 personnes. La police l'a sévèrement réprimée. Selon la préfecture, 40 interpellations ont débouché sur 39 gardes à vue.

A Montpellier, une manifestation du même type a eu lieu également, forçant la police à bloquer des voies de circulation. Une nouvelle manifestation s’est également tenue sur Toulouse.

Sur Rouen, quelque 200 jeunes manifestants, selon la préfecture, s'étaient regroupés autour d'arrêts de bus très fréquentés près du Théâtre des Arts, non loin des quais de Seine. Les forces de l'ordre, gendarmes mobiles et CRS, avaient barré l'accès des rues commerçantes, où sont situées plusieurs agences bancaires. Avant même le départ de la manifestation, la police a procédé à « quelques interpellations », sans que la préfecture puisse en donner le nombre immédiatement.

Depuis début février, des émeutes ont éclaté après le viol sur Théo, pour protester contre la brutalité policière. Elles ont provoqué des affrontements mineurs et des incendies dans le quartier populaire des 3000 à Aulnay-sous-Bois, quelques jours après l'agression barbare commise par les policiers.

La semaine suivante, plusieurs manifestations se sont déroulées devant le tribunal de Bobigny en Seine-Saint-Denis, à Argenteuil, Drancy et Noisy-Le-Sec.

Le week end du 18 et 19 février, plusieurs manifestations se sont déroulées notamment à Paris, Dijon, Rennes, Poitiers ou Nice à l’appel d’organisations proches du PS dont SOS-Racisme, la Ligue des droits de l'homme, le Mrap ou encore la CGT et la FSU.

A Paris, quelques 2.300 personnes étaient réunies Place de la République, selon la Préfecture de police, 4.000 à 5.000 selon les organisateurs. Des slogans fusaient, dont « On n'oublie pas, on pardonne pas »!, « Police partout, justice nulle part », « C'est l'impunité et l'injustice, alors désarmons la police »!

Ce mouvement de protestation contre les brutalités policières est hautement explosif, car il se déroule dans le cadre l’état d’urgence imposé par le PS, ainsi que la campagne pour les élections présidentielles d'avril-mai 2017.

Le gouvernement PS a imposé cet état d'urgence après les attentats terroristes du 13 novembre 2015 à Paris par les réseaux islamistes mobilisés par les puissances de l'OTAN dans leur guerre en Syrie. Le PS a ensuite utilisé l’état d’urgence quelques mois plus tard lors des manifestations contre la loi Travail pour écraser le mouvement d’opposition des étudiants et des lycéens fin mars et début avril. Puis il l'a déployé contre les sections de la classe ouvrière qui étaient rentrées en lutte contre la loi, notamment dans les ports, la sidérurgie, l’aéronautique et les transports.

Il aura fallu la menace d’interdiction de manifester par le premier ministre Valls pour que les syndicats mettent fin aux manifestations contre la loi El Khomri.

Pourtant, les manifestations actuelles soulignent que l'opposition sociale révélée par les luttes contre la loi El Khomri est toujours présente, même si la reddition des syndicats à Valls en a bloqué l'expression.

La mobilisation actuelle en France fait partie d’un mouvement international d'opposition aux politiques d’extrême droite menées par les différents gouvernement, notamment lors des manifestations aux Etats-Unis et à travers le monde contre la politique de Trump.

Le profond discrédit du PS, la colère montant dans les banlieues ouvrières et le développement d’un mouvement lycéen conséquent font craindre au gouvernement l'éruption d’explosions sociales en France. Les responsables syndicaux et d'extrême-droite y réagissent en menaçant d'intensifier la répression.

Pour Jean-Claude Delage, secrétaire général du syndicat Alliance-Police nationale, proche du Front national, «laisser ces manifestations se dérouler dans le contexte des tensions en banlieue et en plein état d'urgence, ce n'est pas raisonnable».

Dans un communiqué publié ce dimanche, Marine Le Pen a demandé l'interdiction des rassemblements hostiles à la police : « je demande aux autorités compétentes d'interdire ces manifestations à haut risque ».

Les manifestations des lycéens pour soutenir Théo malgré l’état d’urgence soulignent la radicalisation croissante des jeunes et des travailleurs en France qui se manifeste par une opposition plus large à l’état d’urgence et à la politique du PS.

Le mouvement des jeunes révèle les explosions sociales qui se développent sous la surface de la vie politique pendant la campagne pour les élections présidentielles, et qui finiront par éclater après ces élections, si ce n'est avant. Dans cette élection présidentielle, tous les partis qui se présentent sont impopulaires, et tous soutiennent notamment le renforcement du financement et des pouvoirs de la police, déjà énormément accrus sous l'état d'urgence. Ils participent à la construction d'un Etat policier que rejettent massivement les jeunes et les travailleurs.

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