Perspectives

L’hystérie anti-Russie des démocrates prépare le terrain à la guerre

Des couches toujours plus larges de la population américaine détestent le gouvernement Trump. D’importantes manifestations ont éclaté au sujet de ses attaques contre les droits démocratiques, de sa persécution raciste des immigrants et de ses assauts frénétiques contre les programmes sociaux, la réglementation environnementale, l’art, la culture et la science. Selon le tout récent sondage réalisé par Gallup après la publication de la première esquisse budgétaire de Trump, son taux d’approbation était tombé à 37 pour cent, avec 58 pour cent d’avis défavorables. Aucun gouvernement dans l’histoire américaine récente n’a été aussi discrédité et impopulaire en si peu de temps après son entrée en fonction.

Néanmoins, le Parti démocrate a choisi de fonder son opposition à Trump, non pas sur les questions sociales et politiques vitales pour des dizaines de millions de travailleurs, mais sur un tout autre terrain : l’affirmation que Trump serait une marionnette de la Russie qui a remporté la présidence suite au piratage visant du Parti démocrate ordonné par Vladimir Poutine durant l’élection présidentielle de 2016.

L’axe farouchement anti-russe de la campagne menée par le Parti démocrate contre Trump a été mis en exergue lundi lors d’une audition devant la Commission du renseignement de la Chambre des représentants où le directeur du FBI James Comey et le directeur de la NSA Michael Rogers ont pour la première fois témoigné publiquement sur les affirmations de piratage russe au cours des élections de 2016 et sur les allégations de Trump que le gouvernement Obama avait illégalement placé sur écoutes ses bureaux au Trump Tower pendant la campagne présidentielle.

Comey et Rogers ont exprimé la réprobation que l’on pouvait attendre d’eux à l’égard des accusations lancées par Trump contre Obama sous forme de tweet en déclarant qu’il n’y avait aucune information justifiant ses affirmations. Mais, cela n’a pris que quelques minutes de l’audition de cinq heures. Lors de celle-ci, chaque représentant démocrate a soulevé certaines variations sur le thème que la présidence de Trump est le résultat d’un complot russe afin de détruire la démocratie américaine et de s’accaparer le gouvernement.

Le ton a été fixé par le long discours d’ouverture prononcé par le représentant démocrate de Californie Adam Schiff qui siège à la commission des représentants du renseignement et qui a élaboré la « théorie » des élections de 2016 du Parti démocrate, dans laquelle « une puissance étrangère adverse est intervenue afin d’affaiblir notre démocratie en influençant les résultats d’un candidat au détriment de l’autre. » Il a déclaré que la question la plus importante était « de savoir si les Russes avaient bénéficié de l’aide de citoyens américains, y compris de personnes associées à la campagne de Trump. »

Schiff a cité un long rapport de 25 pages discrédité établi par un ancien agent du renseignement britannique, parlant d’un accord dans lequel le gouvernement russe fournirait des documents préjudiciables à Hillary Clinton « en échange [selon Schiff] d’une politique pratiquée par Trump qui minimise l’invasion de la Russie en Ukraine en critiquant en lieu et place les pays de l’OTAN pour ne pas payer leur juste part des dépenses. Une politique qui tout récemment avec la rencontre pas plus tard que la semaine dernière du président avec Angela Merkel vient de se concrétiser ».

Les allégations du Parti démocrate rappellent les jours où le tristement célèbre sénateur Joe McCarthy avait déclaré détenir dans son porte-documents une liste des noms de 205 « membres encartés » du Parti communiste américain. L’on ne dira jamais assez combien cette campagne anti-russe est foncièrement frauduleuse. Les nouveaux McCarthy du Parti démocrate n’ont pas présenté la moindre preuve crédible pour étayer leurs allégations. Aucune accusation ne saurait résister à un examen critique. Mais, le discours est totalement débridé, une répétition inlassable de déclarations disant que le prétendu piratage russe durant les élections de 2016 était un « acte de guerre ».

À un moment donné au cours de l’audience, le directeur du FBI, Comey, a réitéré l’affirmation faite précédemment par les agences du renseignement américaines comme quoi Poutine était intervenu dans les élections américaines par pure haine pour la candidate démocrate Hillary Clinton, qu’il lui reprocherait le soutien accordé par Washington aux manifestations anti-Poutine à Moscou en 2011, quand Clinton était secrétaire d’État. Aucune preuve n’a été avancée pour appuyer cette affirmation brutale et stupide.

Aucun des membres du Congrès n’a pris la peine de demander au directeur du FBI de produire les preuves sur lesquelles il fonde cette « compréhension » des motifs de Poutine. Comment Comey sait-il ce que Poutine pense réellement ? De toute façon, si Poutine est vraiment le maître stratège que les médias américains dépeignent, est-il probable que ce Machiavel russe prenne des décisions politiques par « pure haine » ou tout autre assortiment d’émotions subjectives ?

Le seul but des auditions devant le Congrès – celle de lundi n’était que la première de toute une série – a moins à voir avec Trump qu’avec l’accélération et l’intensification des préparatifs de guerre avec la Russie. Cela a été confirmé par les remarques liminaires du président de la Commission du renseignement de la Chambre, le représentant républicain Devin Nunes, qui a déclaré que quels que soient ses désaccords avec les démocrates, « un avantage » de l’audition est déjà clair. « Elle a surtout porté l’attention sur les menaces pressantes que pose l’autocrate russe » et elle a préparé le terrain « pour des mesures fermes contre la belligérance russe. »

La classe ouvrière se trouve confrontée à un conflit entre deux camps vils et réactionnaires qui se querellent sur la façon la meilleure et la plus rapide d’arriver à la guerre. Les démocrates veulent que la Russie soit la cible numéro un. Trump, cependant, considère la Chine et l’Allemagne comme les cibles favorites dans la nouvelle lutte pour la domination mondiale.

Ce conflit entre deux bandes criminelles est une guerre de menteurs : les mensonges de Trump contre les mensonges des démocrates. Trump et les démocrates représentent et défendent les intérêts des banques de Wall Street et des grands groupes et qui sont prêts à sacrifier la vie de millions de travailleurs dans de nouvelles guerres pour la défense de la domination mondiale de l’impérialisme américain.

Il y a une leçon politique fondamentale qui doit être tirée de la sale procédure à Washington. La lutte de la classe ouvrière contre Trump doit être développée de façon totalement indépendant en opposition à la fosse d’aisance politique connue sous le nom de Parti démocrate.

La classe ouvrière doit mobiliser sa force sur la base d’une politique socialiste et anti-impérialiste à l’encontre de la politique d’ultra-droite du gouvernement Trump : la défense des travailleurs immigrés, l’opposition aux coupes budgétaires, dénoncer les menaces chauvines brandies contre le Mexique, la Chine ou tout autre pays ciblé par la classe dirigeante américaine. Mais, cette lutte ne peut et ne doit rien avoir à faire avec le Parti démocrate, qui cherche à polluer l’opposition de masse contre Trump avec sa propre sale politique impérialiste. En réponse aux démocrates et aux républicains, nous citons les propos de Mercutio de Shakespeare : « Peste sur vos deux maisons ! »

(Article original paru le 21 mars 2017)

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