Des chercheurs critiquant les monopoles disent que le PDG de Google a fait pression sur un important groupe de réflexion pour les licencier

Une équipe de chercheurs de la « New America Foundation » (NAF), un groupe de réflexion installé à Washington DC qui a reçu plus de 21 millions de dollars de financement de Google et de ses dirigeants, a été congédiée après avoir publié une déclaration critiquant la société de moteur de recherche sur Internet. L’information fut divulguée par les chercheurs eux-mêmes cette semaine.

Ces chercheurs sont dirigés par Barry Lynn, qui a dirigé l’initiative « Open Markets » (Marchés ouverts) de la fondation. Ils ont déclaré dans un communiqué que Google « essaie de censurer les journalistes et les chercheurs qui luttent contre les monopoles dangereux ». L’équipe a depuis fondé son propre groupe, « Citizens Against Monopoly » (Citoyens contre le monopole).

« Lorsque notre équipe de recherche du New America Institute a critiqué les pratiques monopolistes de Google, le président de la société mère de Google [Éric Schmidt] a menacé de réduire son financement pour New America », ont écrit les chercheurs dans le communiqué publié lundi sur leur site. Schmidt était le président de New America jusqu’en 2016.

Le licenciement de ces chercheurs n’est que le dernier d’une série d’incidents dans lesquels le géant de la technologie a cherché à censurer et à manipuler les opinions. Alors que les médias ont largement fait état des événements liés à la New America Foundation et Citizens Against Monopoly, qui sont tous deux liés au Parti démocrate, ils sont restés silencieux sur l’acte de censure plus significatif et plus visible de Google : la constitution d’une liste noire des sites Web de gauche, dont le World Socialist Web Site, à travers la manipulation des résultats de recherche.

À la mi-2016, la présidente de New America, Anne-Marie Slaughter, professeur de l’Université de Princeton qui a travaillé au département d’État [ministère des affaires étrangères] sous Obama, a averti Lynn de ne pas affronter cette entreprise gigantesque lors d’une conférence organisée par l’initiative Open Markets. « Nous sommes en train d’essayer d’élargir notre relation avec Google sur certains points absolument essentiels », a-t-elle écrit dans un courriel mis à la disposition du New York Times, ajoutant : « RÉFLÉCHISSEZ sur la façon dont vous menacez le financement des autres. »

Le 27 juin de cette année, la Commission européenne a infligé une amende à Google de 2,42 milliards d’euros pour avoir enfreint les règles antitrust de l’UE et abusé de sa position dominante sur le marché en s’offrant un avantage injustifié sur l’un de ses services de comparaisons d’achats.

Le jour même, Lynn a publié un communiqué soutenant la décision, qui a été publié sur le site Web de New America. La déclaration a été supprimée après que Schmidt a contacté Slaughter, seulement pour être inexplicablement publiée quelques heures plus tard. Selon la déclaration des chercheurs, « les représentants de Google » ont menacé de « couper tous les fonds à New America ».

Dans un courriel diffusé par la suite au public, Slaughter, le directeur du groupe de réflexion a déclaré à Lynn le 30 juin qu’« il est temps pour Open Markets et New America de se séparer », déclarant que le travail de l’équipe « menaçait l’institution dans son ensemble ».

Google est la société américaine qui a le plus de liens avec la politique, elle a dépensé un record de 6 milliards de dollars pour le lobbying entre mai et juillet. Le New York Times a noté que Google fait des dons à 170 organisations à but non-lucratif, selon ses propres informations, contre 45 en 2010. Toutefois, les valeurs monétaires de ses dons restent secrètes.

Le géant du moteur de recherche « a consacré beaucoup d’argent à influencer l’opinion publique et à influencer les opinions des dirigeants du gouvernement de manière très dissimulée », a déclaré Robert Epstein, un chercheur de haut niveau en psychologie à l’American Institute for Behavioral Research and Technology au WSWS lors d’un entretien téléphonique. « C’est vraiment ce qui transparaît ».

« Ils ne s’arrêteront devant rien pour contrôler les opinions des gens », a ajouté Epstein, qui a écrit régulièrement sur les actions de Google. « Ils paient des savants pour rédiger des articles qui soutiennent leur point de vue et, dans de nombreux cas, les universitaires ne reconnaissent même pas qu’ils reçoivent de l’argent de Google. »

« Cela fait partie d’un schéma plus large, d’une tentative d’influencer les gens, à grande échelle. Ils descendent qui ils veulent descendre. Ils peuvent abattre n’importe quelle organisation, n’importe quel politicien. Tout domaine politique, déclaration ou idée, ils peuvent l’abattre. »

Les allégations des chercheurs ont été dénigrées par Google et la New America Foundation. Un porte-parole de Google a déclaré au Guardian britannique que le fait de blâmer le géant technologique pour le licenciement des chercheurs ne « serait pas une caractérisation équitable du tout ». Elle a ajouté : « Je peux confirmer que nos niveaux de financement pour 2017 n’ont pas changé en raison de la publication de la déclaration de la NAF en juin, Éric Schmidt n’a jamais menacé de supprimer le financement en raison de cela. »

Slaughter a publié un communiqué déclarant : « L’article dans le New York Times aujourd’hui implique que Google a fait pression sur la NAF pour expulser le programme Open Markets en raison d’un communiqué de presse. Je veux être clair : cette allégation est absolument fausse. »

Toutes les preuves disponibles, cependant, y compris la correspondance qui a déjà été publiée par la NAF elle-même, indiquent que les déclarations de Google et de la NAF sont une dissimulation.

Si Google est en train de mentir à propos de cet incident malgré des documents qui prouvent qu’il ment, sur quoi d’autre ment-il ?

Les révélations de la censure par Google des universitaires qui travaillent sur les méfaits des monopoles apportent du crédit aux révélations détaillées du World Socialist Web Site indiquant que Google manipule les résultats de son moteur de recherches pour réduire les liens vers les sites de gauche, progressistes et de lutte contre la guerre qui ont vu leur trafic provenant du moteur de Google s’effondrer depuis avril.

La censure par Google des sites Web de gauche est cependant un acte de censure à une échelle beaucoup plus grande, car le géant du moteur de recherche ne cherche pas simplement à influencer un seul groupe de réflexion, mais à rendre toute une gamme de discours, protégés par la Constitution, indisponible pour des milliards de personnes.

Notamment, le New York Times, le Washington Post, le Guardian et l’Intercept ont tous publié des articles ou des déclarations documentant et dénonçant la censure par Google des chercheurs d’Open Markets. Cependant, aucune de ces antennes des médias n’a même mentionné les révélations du WSWS ou la campagne lancée par le WSWS contre la censure d’Internet, qui a reçu un large soutien international. Plus de 3000 personnes de plus de 80 pays différents ont signé la pétition du WSWS en opposition à la censure de Google sur les sites de gauche.

Le silence de la presse sur cette question témoigne de la nature politiquement explosive des révélations du WSWS, et le point auquel la censure des perspectives socialistes fait partie intégrante de la stratégie du Parti démocrate, dont la ligne politique est suivie par tous ces organes de presse.

(Article paru d’abord en anglais le 2 septembre 2017)

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