Perspectives

L'ouragan Florence: une autre catastrophe d'origine humaine qui se prépare

L'ouragan Florence devait atteindre la côte de la Caroline hier soir et qui devrait être l'une des tempêtes les plus destructrices à frapper les États-Unis.

Alors que Florence se dirigeait mardi vers la côte atlantique, le président Trump s’est félicité de la réaction de son administration à l’ouragan Maria à Porto Rico l’année dernière comme un «succès incroyable et inédit». Il a ajouté sur Twitter que son administration a mérité des «notes parfaites» pour sa réponse à l’ouragan Harvey à Houston et l’ouragan Irma en Floride. Les habitants de la Caroline du Nord et du Sud pourraient s'attendre à une réponse similaire de la part du gouvernement, a-t-il laissé entendre: «Nous sommes prêts pour le gros qui arrive!»

Le «succès inédit» de Trump à Porto Rico était une opération de secours qui a laissé des millions de personnes sans électricité ou sans eau courante pendant plusieurs mois. Le gouvernement territorial a reconnu que le taux de décès, qui a été dissimulé pendant près d’un an, était de près de 3000 personnes, parmi lesquelles de nombreuses personnes sont décédées après la tempête en raison du manque de fournitures médicales et d’électricité pour faire fonctionner des équipements médicaux.

Soulignant les priorités de la classe dirigeante, l'administration Trump a récemment détourné 10 millions de dollars de la Federal Emergency Management Agency (FEMA) à des centres de détention pour immigrés dans le cadre de la politique fascisante de Trump visant à faire des boucs-émissaire des immigrés et des réfugiés.

Le caractère désastreusement inadéquat de la réponse fédérale aux ouragans de l'an dernier a été décrit dans un récent rapport du Bureau de la responsabilité du gouvernement, qui a conclu que la FEMA était en sous-effectif de 30 % et avait été déjà poussée aux limites de ses capacités par les ouragans Harvey et Irma quand l'ouragan Maria a frappé Porto Rico.

Les ouragans de l'année dernière, ainsi que les déclarations de Trump, indiquent ce à quoi les habitants de la côte est peuvent s'attendre de l'ouragan Florence: une catastrophe naturelle fortement aggravée par l'indifférence et la négligence du gouvernement. Déjà, des scènes chaotiques, mais maintenant trop familières se déroulent: des bouchons de circulation qui s'étendent sur

des kilomètres comme les gens fuient la trajectoire annoncée de l'ouragan, et les pauvres, les personnes âgées et d'autres qui ne peuvent pas partir ou ne disposent pas des ressources nécessaires pour le faire sont abandonnés à eux-mêmes. Les rayons des supermarchés ont été vidés par les acheteurs qui se bousculaient pour acheter de la nourriture. Les fonctionnaires avertissent qu’il pourrait y avoir des pannes de courant pendant des semaines.

Treize ans après que l’ouragan Katrina a presque détruit la ville portuaire historique de la Nouvelle-Orléans et tué plus de 1800 personnes, rien n’a été fait pour protéger la population des États-Unis des ouragans et autres catastrophes naturelles. Rien n'a été fait pour améliorer de manière significative l'infrastructure de défense contre les ouragans, tels que les systèmes de drainage et les digues; aucun plan sérieux n'a été organisé et financé pour permettre une évacuation d'urgence et des abris; le financement des secours en cas de catastrophe reste très inférieur à ce qui serait nécessaire pour rendre les victimes des ouragans économiquement protégés.

Katrina a mis à nu les niveaux stupéfiants de pauvreté et d'inégalités aux États-Unis et les conséquences de la contre-révolution sociale, où l'élite financière a les mains libres pour piller les ressources de la nation et voler ses travailleurs.

Cela a été suivi par la marée noire de BP en 2010, qui a causé des dommages économiques et environnementaux incalculables sur une grande partie de la côte du Golfe.

L’année dernière, les inondations généralisées ont démontré que le système de drainage de la Nouvelle-Orléans demeure en très mauvais état. La ville voisine de Baton Rouge avait subi des inondations encore plus graves l’année précédente.

Au moment même où la côte est se prépare à l'arrivée de l'ouragan Florence, la Californie est aux prises avec les plus importants feux de forêt de son histoire. La sévérité et la fréquence de tels événements ne feront que s’accroître dans les années à venir en raison du réchauffement climatique provoqué par l’homme.

Cependant, la vulnérabilité des États-Unis face aux catastrophes naturelles provient non seulement du réchauffement climatique, mais surtout de la structure dysfonctionnelle, irrationnelle et grotesquement inégale de la société américaine. Les États-Unis sont gouvernés par une oligarchie financière – au moyen des démocrates et des républicains – qui vit aux dépens de la société et qui est impitoyable dans la défense de sa richesse et de ses pouvoirs immenses.

Il y a dix ans, après le krach financier du 15 septembre 2008, les administrations Bush et Obama ont alloué des milliers de milliards de dollars pour acheter les actifs financiers toxiques détenus par les banques et ont injecté des liquidités dans le système financier, poussant délibérément les cours des actions vers le haut pour permettre aux parasites financiers de non seulement récupérer leurs pertes, mais de faire gonfler leur richesse à des sommets.

En comparaison, le Congrès a autorisé l’année dernière seulement 90 milliards de dollars en aide aux victimes des ouragans, soit environ un tiers du coût total de la saison des ouragans de 2017. Porto Rico n'a reçu aucun soulagement de la surveillance financière imposée par Obama au nom des créanciers des banques et des fonds spéculatifs du territoire, qui ont imposé des réductions brutales des dépenses. Le résultat en a été une dégradation supplémentaire des infrastructures de l'île, y compris son réseau électrique déjà désuet.

La déréglementation des sociétés et l’allégement fiscal de 1500 milliards de dollars adoptés par le Congrès en décembre dernier ont poussé les profits à des niveaux record. Le Dow Jones Industrial Average a bondi de près de 10 000 points par rapport à son niveau de novembre 2016, gonflé par les rachats d'actions et les fusions et acquisitions.

L'oligarchie financière ne regarde pas les dépenses pour promouvoir ses intérêts mondiaux au moyen de violences militaires. En juin, les démocrates du Sénat se sont associés aux républicains pour adopter un budget militaire de 716 milliards de dollars, soit une augmentation de 82 milliards de dollars. Le financement des services de renseignement et de police américains et les guerres en cours portent le total des dépenses consacrées à la «sécurité nationale» à plus de mille milliards de dollars. La réponse du gouvernement aux grandes catastrophes naturelles comprend invariablement le déploiement de troupes de la Garde nationale pour réprimer les troubles et protéger la propriété capitaliste.

Dans la ville de Newport News, en Virginie, juste au nord de la trajectoire prévue de Florence à travers la Caroline du Nord, la marine américaine est en train de construire 10 nouveaux porte-avions à propulsion nucléaire, dont le coût de chacun équivaut à peu près au budget annuel total de la FEMA.

Les catastrophes naturelles révèlent de la manière la plus concentrée et la plus tragique les conditions sociales d’inégalité, de pauvreté et d’oppression qui sont omniprésentes dans les communautés ouvrières du pays. Dans certaines parties de Detroit, Chicago, Cleveland et d’autres villes dévastées par la désindustrialisation, on peut voir des scènes ressemblant au quartier Lower Ninth Ward de la Nouvelle-Orléans, qui a été en grande partie détruit par Katrina. L'empoisonnement par le plomb de l'approvisionnement en eau de Flint a été suivi par la fermeture de l'eau dans les écoles publiques de cette ville et de Detroit en raison des niveaux dangereux de contaminants.

Le système capitaliste est à l’origine de l’effondrement des infrastructures et de la réponse misérable aux catastrophes naturelles. Non seulement aux États-Unis, mais dans le monde entier – comme pour le récent effondrement du pont à Gênes, en Italie –, la classe capitaliste néglige les infrastructures de base, car ces dépenses sont perçues comme une perte de profits. La planification sérieuse pour résoudre les problèmes internationaux tels que le changement climatique, la pauvreté et les catastrophes naturelles est impossible dans un système fondé sur la propriété privée des moyens de production et l'anarchie du marché, opérant dans le système des États-nations rivaux.

Ces problèmes urgents exigent une solution socialiste et internationale. Cela comprend un programme de travaux publics de plusieurs milliards de dollars visant à moderniser et à reconstruire les infrastructures en décomposition, notamment des systèmes de digues plus solides et une protection contre les hausses soudaines des niveaux d'eau, des systèmes de drainage et un réseau électrique moderne. Il faut un plan intégré et coordonné d'évacuation et d'abris d'urgence pour écarter tous les résidents, quel que soit leur âge ou leur revenu, des dangers. Le programme fournira les ressources nécessaires pour que tous ceux qui subissent des pertes financières dues à la tempête soient économiquement dédommagés. Il fournira des centaines de milliers d’emplois bien rémunérés pour reconstruire les écoles, les routes et les systèmes d’approvisionnement en eau et fournira des logements sociaux de qualité et peu coûteux.

Les ressources pour un tel programme existent. Elles doivent être obtenues par l'expropriation de l'oligarchie financière. Dans un pays où les trois personnes les plus riches – Bezos, Gates et Buffett – possèdent plus de richesse que la moitié la plus pauvre du pays, prétendre qu'il manque d'argent pour un tel programme est une insulte à l'intelligence de la population!

Les banques et les grandes entreprises, notamment les secteurs de la haute technologie, des transports, de la logistique, de l’automobile, de l’acier, de l’énergie et d’autres secteurs clés de l’économie, doivent être placées sous le contrôle de la classe ouvrière. De telles mesures permettront la création d’une économie planifiée pour mobiliser les ressources de la société pour subvenir aux besoins humains et non pour satisfaire les intérêts du profit privé.

(Article paru en anglais le 13 septembre 2018)

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