Trump appelle à «d'énormes villes de tentes» et à la détention illimitée des migrants

Le 1er novembre, le président américain Donald Trump a annoncé lors d'une conférence de presse une série de propositions sur l'immigration sans précédent dans l'histoire américaine. Dénonçant l'immigration comme une «invasion», Trump a déclaré qu'il prévoyait d'annoncer de nouvelles mesures dans un décret au début de la semaine prochaine.

Quelques heures auparavant, accueilli lors d’un meeting au Missouri aux cris de «USA! USA! » et «Vive ce mur», Trump avait exposé une vision de camps de concentration massifs et d’affrontements à la frontière entre soldats armés et demandeurs d'asile sans défense.

Un camp de détention à Tornillo, au Texas. Photo: DHS

Premièrement, Trump a déclaré qu'il avait déjà donné l’ordre aux agents de l'immigration de détenir indéfiniment tous les migrants arrêtés qui franchissaient la frontière, au lieu de les libérer en attendant le traitement de leurs dossiers par les tribunaux.

«Nous ne libérons plus personne», a-t-il déclaré. «Nous allons attraper. Nous n'allons pas libérer. Ils resteront avec nous jusqu'à ce que la délibération sur l'expulsion ou l'asile ait lieu. Donc, nous ne les libérons pas dans la communauté. Nous n'avons aucune utilité pour les personnes qui, au fil des ans, ont été relâchées dans la communauté.»

Deuxièmement, Trump a proposé de mettre fin au droit des immigrants qui franchissent la frontière américano-mexicaine sans papiers de demander l'asile.

«Grâce à ce plan, les étrangers en situation irrégulière ne pourront plus entrer librement dans ce pays en déposant des demandes d'asile injustifiées. Les migrants demandeurs d'asile devront se présenter légalement à un point d'entrée. Ceux qui choisissent d'enfreindre les lois et d'entrer illégalement ne pourront plus utiliser des demandes sans fondement pour être admis automatiquement dans notre pays. Nous les détiendrons longtemps, si nécessaire.»

Troisièmement, Trump a annoncé qu'il avait déjà ordonné à l'armée de construire un réseau de camps de concentration afin d’emprisonner les migrants détenus.

«Nous érigeons des villes de tentes massives. Les militaires nous aident incroyablement bien. Je veux remercier le Corps des ingénieurs de l’armée, ils sont si efficaces, si bons, si doués. On a des milliers de tentes, on a beaucoup de tout. On va les détenir là. On ne les laissera pas entrer.» Il a ajouté qu’il fallait «d’énormes installations […] nous construisons maintenant ces installations, un nombre énorme de tentes et nous les tiendrons sous des tentes.»

Trump a ouvertement menacé de massacrer la caravane d'ouvriers et de paysans fuyant la guerre et la pauvreté en Amérique centrale.

« Nous avons déjà envoyé des soldats américains à la frontière, et ils feront le travail», a déclaré Trump. «Ils se mettent en place maintenant et se préparent. Nous espérons que rien ne se passera, mais si c’est le cas, nous sommes totalement préparés ».

En réponse à un journaliste qui a demandé comment les troupes américaines déployée à la frontière sud réagirait si les membres de la caravane, dont beaucoup sont des femmes et des enfants, lançaient des pierres, Trump a dit:

«Nous considérerons cela comme une arme à feu, et qu’il s’agit d’une atteinte maximum, car ils lancent des pierres brutalement et violemment. Nous ne supporterons pas ça. S’ils veulent lancer des pierres sur nos forces armées, nos forces armées riposteront. Je leur ai dit [à l’armée] de considérer cela comme un fusil. Quand ils jettent des pierres, comme ils l'ont fait contre l'armée et la police mexicaines, dis-je, considérez cela comme un fusil.»

Les propositions fascistes de Trump jeudi s’ajoutent à ses mesures dictatoriales, comme sa proposition d’abroger par décret le 14e Amendement à la Constitution, afin d’éliminer le droit d’enfants nés aux Etats-Unis à la nationalité américaine, et l’envoi de 15.000 soldats à la frontière mexicaine. Les premiers détachements arrivaient sur place jeudi.

Aucun président - ni aucun politicien américain - n'a prononcé de telles paroles. L'application de ces politiques abrogerait presque chaque article de la Déclaration des droits, non seulement pour les migrants, mais pour tous, indépendamment du statut d'immigration.

Trump a répété une variante de ces propos lors d'un meeting électoral dans un hangar de l'aéroport de Columbia, dans le Missouri, pour appuyer le candidat républicain au Sénat Josh Hawley. La démagogie fasciste de Trump s'est intensifiée au cours des derniers jours de la campagne électorale. Il se bat pour construire un mouvement d'extrême droite en dehors du cadre des partis républicain et démocrate.

Lors du rassemblement sur le tarmac, il a proclamé qu'il construisait un «mouvement» sans précédent et historique, dont la force provient de sa capacité à «contourner les médias». Ses efforts sont couronnés d’un certain succès. Selon un sondage récent, les électeurs républicains étaient plus susceptibles de s’identifier à Trump qu’au Parti républicain.

A Colombia, Trump a menacé les manifestations contre sa politique, en affirmant que ses partisans se comportent « gentiment » à leur égard pour le moment et que les manifestants devraient en être reconnaissants, car les partisans de Trump sont «très costauds».

Il cherche de plus en plus à inciter ses partisans à l’anti-socialisme et au nationalisme. Au Missouri, il a traité le Parti démocrate «d’extrême gauche» et de «parti du socialisme, de l'ouverture des frontières et du crime ». Selon lui, les immigrants vivent dans des «nids», les Etats-Unis sont « envahis par une masse d'immigrés clandestins et des caravanes géantes» composées de criminels, de meurtriers et de violeurs, pas de «petits anges».

Selon lui, seuls «les ennemis du pays» profitent du droit du sol, et «des centaines de milliers d'étrangers clandestins sont automatiquement déclarés citoyens des États-Unis chaque année à cause de cette politique folle et délirante à laquelle nous pouvons mettre fin.»

Il a conclu en lançant l'appel suivant: «Nous sommes un seul peuple, une seule famille et un seul destin américain glorieux.»

Trump a prononcé ce discours moins de 24 heures après avoir diffusé une publicité électorale qui traitait les immigrés de meurtriers et de criminels. La publicité présente des images de la salle d'audience du procès d'un immigrant reconnu coupable de meurtre avec les mots, «Les démocrates l'ont laissé entrer ... qui d'autre les démocrates laisseraient-ils entrer?»

La démagogie de Trump a une logique mortelle. Sa rhétorique a déjà inspiré de violentes attaques, telles que le massacre au synagogue juif perpétré par Robert Bowers à Pittsburgh samedi dernier. Le langage de Trump et ses actions visent consciemment à créer des conditions où les immigrés seront non seulement détenus, mais également tués.

Le Parti démocrate joue un rôle criminel en laissant Trump mobiliser sa base fasciste contre les immigrés. Mercredi soir, l'animateur de CNN, Chris Cuomo, a demandé à quatre reprises à Tom Perez, président du Comité national démocrate, pourquoi son parti refusait de répondre aux menaces de Trump contre les immigrés.

Chaque fois, Perez a répondu que l'immigration n’est pas la vraie question et que les menaces de Trump n'étaient qu'une distraction. Il a dit que les démocrates ne croient pas en l'ouverture des frontières ni à l'amnistie pour les immigrants et qu'ils soutiennent des lois «sévères» sur l'immigration.

La réponse de l'ancien conseiller de Clinton et contributeur de CNN, Paul Begala, est typique: «Ma position sur la conférence de presse de Trump est qu'une caravane de républicains essaie de vous priver de vos soins de santé si vous êtes sous traitement.» D'autres démocrates, dont Claire McCaskill, ont été encore plus explicites. Elle a déclaré à CNN: «Je soutiens le président à 100 pour cent, faisant ce qu'il doit faire pour sécuriser la frontière.»

La «gauche» autoproclamée du Parti démocrate a ignoré les menaces mortelles de Trump. Dans un courriel de 1 200 mots mercredi qui demandait à ses partisans faire des dons, Bernie Sanders a refusé de mentionner l'assaut de Trump sur les immigrants.

Les paroles et les actes de Trump constituent un avertissement pour les travailleurs et les jeunes des États-Unis et du monde entier. Le choix fondamental auquel l'humanité est confronté est entre les horreurs des années 1930 - la guerre, les camps d'internement, les rafles et la promotion officielle du racisme et de la xénophobie - et la révolution socialiste.

(Article paru en anglais le 2 novembre 2018)

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