Grève du 5 décembre: travailleurs et jeunes se radicalisent à Marseille

Sur Marseille, la manifestation pour la grève du 5 décembre a rassemblé 150.000 personnes selon les syndicats, ou 25.000 personnes selon la police. La manifestation est partie du Vieux Port avant de passer devant l’Hôtel de Ville.

Devant l'Hôtel de ville, les manifestants ont scandé «Gaudin assassin!», pour dénoncer le maire de Marseille Jean-Claude Gaudin, tenu pour responsable de l'effondrement de deux immeubles dans le quartier ouvrier de Noaille faisant plusieurs morts.

Le WSWS a rencontré Philippe, gilet jaune travaillant dans la Défense venu dénoncer «le système»: «On nous fait payer des impôts et on nous montre du doigt. On nous fait croire que ce sont les chômeurs, les gens qui touchent le RSA, qui sont responsables de la situation, mais ce sont les financiers qui nous prennent tout. On fait croire que l'on donne pour les gens qui sont dans la misère pour leur permettre de vivre afin qu'ils se taisent mais sont des mensonges on ne leur donne rien.»

Concernant la réforme des retraites, Philippe a dit au WSWS: «Ils sont en train de nous diriger vers un système privé d'assurance. Le gouvernement veut nous mettre au pied du mur. Soit on reste dans ce système qui soit disant n'est plus bon, soit on passe à un système par points. On est en train de nous enlever tous nos droits, on revient en arrière. Il faut empêcher ça.»

Questionné sur cette journée d'action à l'appel des syndicats, Philippe a dit ne pas leur faire confiance: «Je suis moi même syndiqué, mais les syndicats se sentent largués parce qu'ils sentent que l'on peut faire sans eux. Il faut une unité des luttes parce que nous sommes tous des citoyens mais il ne faut pas que les syndicats nous imposent les choses en nous disant d'arrêter.»

Sur l'appel à des comités d'action pour exproprier l'aristocratie financière fait par le PES, Philippe a dit: «Oui, il faut que l'on soit indépendants, pas que les syndicats nous dirigent. Nous pouvons nous même nous gérer. Avec internet, le niveau d'instruction à augmenté, nous avons accès aux informations.»

Michel lui aussi gilet jaune a parlé au WSWS: «Nous les gilets jaunes, nous voulons l'égalité et la redistribution des profits. Nous sommes solidaires des luttes à l'étranger, si nous pouvions converger ce serait le but recherché. »

Interrogé sur la capacité des syndicats à mener une lutte contre la réforme des retraites, il a affirmé que «les syndicats ne pourront rien faire contre la réforme, ils n'y sont jamais arrivés tout seul et ils n'y arriveront pas. C'est tout le monde qu'il faut mobiliser. Il faut revoir le système, ce n'est pas seulement Macron le problème. Il faut renverser le pouvoir, mais pour cela il faut revenir à la révolution par ce que la révolution avait amené, ils nous l'ont enlevée et on est retombé dans les mêmes problèmes.»

Jérémy, infirmier en réanimation délégué syndical chez SUD a parlé au WSWS des conditions de travail dans le milieu hospitaler: «Il y a un manque de moyens, il n'y a pas assez de personnes pour prendre en charge les patients. Cela commence à devenir lourd. Cela a des conséquences sur notre corps et notre santé psychique, et cela se répercute sur nos patients qui se sentent oubliés. On en devient maltraité, ce qui n'est pas la raison qui nous a poussé à faire ce métier.»

Jérémy s’est opposé à toute augmentation de l’âge de départ à la retraite, comme le veut la réforme proposée par Macron: «Je travaille en service réanimation, c'est physique. J'ai une collègue de 58 ans qui a du arrêter de travailler: elle avait des problèmes de dos trop compliqués pour porter les patients. Si on décale l'age de la retraite, ce n'est plus vivable.»

Interrogé sur les luttes des travailleurs et des jeunes dans le monde Jérémy a sougligné les similarités de toutes les luttes à travers le monde: «On voit qu'il y a des points commun de partout, cela s'est déclenché sur les problèmes de la vie quotidienne, en France c’était l’augmentation du prix de l'essence, au Chili le prix du métro. Mais c'est juste que l'on a besoin de ça pour vivre. C'est (ce) qui fait que cela explose de partout.»

Jérémy s’est dit confiant vu la grande détermination de couches de plus en plus larges de travailleurs qui se mobilisent autour de la grève du 5 décembre: «Il y a un rapport de force qui s'est installé, je n'ai jamais vu autant de participation. Il y a des routiers, des avocats, des enseignants. On peut faire reculer le gouvernement comme en 1995, où nous avons réussi à faire faire marche en arrière au gouvernement. Mais c'est à nous d'être vigilant.»

Enfin le WSWS a rencontré Corentin, diplômé en relations internationales venu «pour lutter contre la réforme des retraites et plus globalement contre la politique d'austérité de Macron. Moi je ne suis pas le plus touché mais l'assurance chomage a été touchée il y a quelques mois. Cela me concerne, mais à plus long terme la vision de la société voulu par Macron est inacceptable. Le régime qui glisse vers une retraite par capitalisation. Je suis contre. La population va vieillir, on va réduire la valeur du point pour justifier les baisses des pensions. C'est une réforme contre les Français.»

Sur les luttes à l'internationale, Corentin a dit: «Les gens se rendent compte qu'ils se sont fait spolier par un capitalisme débridé depuis 40 ans. En France, on est dans cette même mouvance.»

Sur les négociations entre les syndicats et le gouvernement, Corentin y est hostile: «La consultation sociale, c'est de la foutaise. On fait croire que c'est un gage de démocratie mais c'est un gouvernement qui tombe dans l'autoritarisme et unilatéralisme. Les partenaires sociaux sont des plantes vertes mais les choses sont négociées dans des officines macronistes.» Il a trouvé que l’appel du WSWS aux travailleurs à former des comités d’action indépendants des syndicats était «une bonne idée. Mais pour cela il faut dynamiser le discours de classe.»

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