Fiat Chrysler va licencier 1500 ouvriers de son usine d’assemblage de Windsor en juin

Fiat Chrysler Automobiles (FCA) a annoncé la semaine dernière que le 29 juin, le troisième quart de travail de son usine d’assemblage de Windsor, en Ontario, sera supprimé, ce qui entraînera le licenciement permanent de 1500 travailleurs.

«Cette décision survient alors que la société s’efforce d’aligner les volumes sur la demande tout en arrêtant progressivement la production de la Dodge Grand Caravan à la fin du mois de mai», a déclaré FCA dans un communiqué. La production de la Grand Caravan se terminera le 22 mai. Une «période de transition» commencera alors pour consolider une exploitation en deux équipes d’ici la fin juin.

Travailleurs à la sortie de l’usine d’assemblage de Windsor

Les suppressions d’emplois auront un effet d’entraînement immédiat sur le secteur des pièces automobiles de la ville. D’ores et déjà, on s’attend à ce que les fournisseurs locaux de FCA, Flex-N-Gate et Syncreon, suppriment au moins 200 emplois en raison de la réduction des effectifs chez Chrysler.

L’usine de Windsor, qui construit la minifourgonnette Chrysler Pacifica, la Pacifica Hybrid, la Grand Caravan et la Chrysler Voyager, fonctionne avec trois équipes depuis 1993. L’usine est le plus grand employeur de Windsor, ville dévastée par une réduction constante de la production automobile, et autrefois appelée la capitale automobile du Canada. Environ 6000 personnes travaillent actuellement à l’usine de Windsor, qui a été restructurée en 2015 pour construire la Pacifica. L’usine peut construire jusqu’à 1500 véhicules par jour.

L’annonce d’une date de licenciement définitif était attendue par les travailleurs de l’usine depuis un certain temps. Le constructeur FCA avait initialement indiqué son intention de mettre fin au troisième quart de travail en mars dernier, mais avait retardé la publication d’une date de fin définitive car il a calibré ses volumes de production avec les chiffres de vente en chute libre de ses modèles Grand Caravan et Pacifica. Les chiffres de vente du principal produit de l’usine, la Chrysler Pacifica, n’ont cessé de baisser ces dernières années. L’an dernier, les achats de ce modèle ont chuté de 17 % sur le marché essentiel des États-Unis et de 38 % au Canada. Les ventes de la Grand Caravan pour leur part ont baissé de 19 % aux États-Unis et de 15 % au Canada.

Le président d’Unifor, Jerry Dias, a une fois de plus présenté sa «solution» protectionniste de guerre commerciale qui apparait toujours de plus en plus minable pour décimer les emplois dans le secteur automobile au Canada. «Chaque pays du monde qui possède une industrie automobile importante a une stratégie nationale pour préserver les emplois, déclare Dias. Je regarde l’Allemagne. Je regarde le Japon. Je regarde la Corée. Je regarde les différents pays dans le monde.»

Dias, une fois de plus, ne colporte qu’une pseudo-solution nationaliste. L’annonce de FCA n’est que la dernière en date d’une série de licenciements massifs dans l’industrie automobile, qui reflète la saignée mondiale de l’emploi dans l’industrie automobile à la suite de l’aggravation de la crise capitaliste. Plus de 500.000 emplois ont été détruits l’année dernière en Europe, en Asie et en Amérique du Nord. Les analystes s’attendent à ce que les pertes d’emplois augmentent au cours de l’année 2020. Plus de 100.000 licenciements dans le secteur de l’assemblage automobile étaient déjà prévus par les entreprises du monde entier lors des annonces de fin d’année. Des centaines de milliers d’autres emplois liés aux pièces automobiles seront également supprimés.

Conscient de l’opposition croissante de la base à la prosternation d’Unifor devant les entreprises automobiles, le président de la section locale 444 d’Unifor, Dave Cassidy, a jugé nécessaire d’appeler ses membres à «faire confiance au syndicat». Mais en fait, les syndicats Unifor et son prédécesseur, le syndicat des Travailleurs canadiens de l’automobile, ont supervisé pendant des décennies une politique d’imposition de contrats de concession brutaux en échange de faux accords de sauvegarde d’emplois. La fermeture du troisième quart de travail à Windsor FCA, les 650 licenciements récents chez Ford Oakville et la fermeture de la production d’assemblage chez GM Oshawa l’année dernière ne sont que les dernières d’une série de suppressions d’emplois qui inclut la mise en veilleuse dévastatrice en 2010 des activités de GM Transmission à Windsor.

En novembre, la Commission des relations de travail de l’Ontario a décidé que Nemak pourrait fermer son usine de pièces automobiles de Windsor en 2020. Le syndicat Unifor affirme que cette fermeture anticipée viole les termes d’un accord de concession qu’il vient de signer en 2020. Unifor a en effet mis fin à une grève de deux semaines des 180 travailleurs de Nemak en septembre dernier contre la menace de fermeture en leur disant de plutôt faire confiance à l’arbitrage, ce qui a eu ces résultats désastreux prévisibles.

Un travailleur d’expérience de FCA à Windsor a déclaré au World Socialist Web Site que les travailleurs n’avaient pas confiance en Dias. «C’était inévitable. Je savais que cela allait arriver, quoi que fasse Unifor. Nous allons supprimer progressivement la Grand Caravan le 22 mai et passer à deux équipes d’ici là. Tout le monde reste jusqu’au 29 juin. J’imagine que c’est pour essayer d’éviter le chaos.»

Ce n’est pas une coïncidence si les licenciements à Windsor doivent être effectués en juin, le même mois où FCA (ainsi que GM et Ford) entament leurs négociations contractuelles avec Unifor, dont les contrats avec les Trois Grands de Detroit expirent en septembre. On s’attend à ce que la production des trois constructeurs automobiles au Canada diminue encore de 27 % au cours de la durée du prochain contrat. FCA lance ainsi clairement un défi en insistant sur la poursuite des suppressions d’emplois et sur l’obtention de concessions supplémentaires afin de consolider sa rentabilité.

L’avenir de l’usine de moulage d’Etobicoke de FCA est déjà remis en question. Dans l’usine d’assemblage de Brampton, qui emploie 3400 personnes, la capacité de production est déjà largement sous-utilisée, car l’avenir des berlines Dodge Challenger, Dodge Charger et Chrysler 300 reste incertain.

Les travailleurs de l’automobile doivent se préparer dès maintenant aux batailles qui se profilent à l’horizon pour défendre leurs emplois et leurs salaires, leurs avantages sociaux et leurs conditions de travail. Ils doivent organiser avant tout des comités de la base qui seront indépendants d’Unifor propatronal et lutter pour préparer la plus large mobilisation possible réunissant non seulement les travailleurs de l’automobile, mais aussi toutes les sections de la classe ouvrière.

C’est là un combat international. On ne peut lutter contre des entreprises organisées au niveau mondial sur une simple base nationale. Les comités de la base formés au Canada doivent s’associer aux travailleurs des États-Unis, du Mexique, d’Europe et d’Asie pour mener une lutte commune afin de défendre les emplois et le niveau de vie.

Enfin, il s’agit d’un combat qui ne se limite pas à un employeur en particulier, mais qui est bien mené contre l’ensemble du système capitaliste, un système qui subordonne les besoins de la classe ouvrière – la grande majorité de la population de la planète – à la volonté implacable de l’oligarchie des entreprises et de la finance d’accroître les richesses privées.

La lutte pour la défense des emplois soulève la question de savoir qui doit diriger les usines. L’insistance sur le fait que les travailleurs ont le droit inaliénable à un emploi bien payé et sûr est un défi implicite au «droit» de Bay Street et des riches actionnaires de posséder et de contrôler les industries géantes, de les fermer et de détruire des communautés entières comme bon leur semble.

La plus large mobilisation industrielle de la classe ouvrière qui soit contre les suppressions d’emplois et les concessions doit aller de pair avec l’organisation d’une lutte politique basée sur un programme socialiste visant à transformer les usines automobiles en entreprises publiques placées sous la propriété et le contrôle démocratique de la classe ouvrière.

(Article paru en anglais le 3 mars 2020)

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