COVID-19 aux États-Unis: La campagne pour relancer les profits des grandes entreprises s’intensifie, même si les infections et décès augmentent partout

Malgré le fait que plus de quatre milliards de personnes sur la planète soient en isolement à un degré variable, le nombre de nouveaux cas dans le monde continue de croître à un rythme constant d'environ 75.000 par jour. Le nombre stupéfiant de décès quotidiens de 5000 à 7000 nous rappelle la nature mortelle de la pandémie qui a immobilisé une grande partie du monde.

Fosse commune sur Hart Island à New York City

Près de 800.000 cas ont été signalés aux États-Unis, ce qui représente 32 pour cent de toutes les infections à l'échelle internationale. Le nombre de morts à ce jour est de 42.458, près de 2000 pour le seul jour de lundi. Les États-Unis représentent un quart du nombre total de décès.

Le nombre de cas dans les quartiers très touchés de New York et du New Jersey continue d'augmenter régulièrement, avec des décès à un rythme bouleversant. Lundi, neuf États ont confirmé chacun plus de 1000 nouveaux cas. De toute évidence, étant donné l'accès encore très limité aux tests, les chiffres des infections et des décès dus au COVID-19 sont sous-estimés.

Voilà la situation de la santé publique où plus de 90 pour cent de la population américaine est sous une forme ou autre de confinement depuis que le président Trump a déclaré l'état d'urgence il y a plus d'un mois. La calamité économique et sociale résultant de ces mesures pour freiner la pandémie ne se reflète que partiellement dans le nombre record de personnes – plus de 22 millions – qui ont fait la demande pour des allocations de chômage au cours des quatre dernières semaines. Des millions de personnes licenciées ont perdu leur couverture d’assurance maladie et des milliers font la queue dans les banques alimentaires des villes du pays pour nourrir leur famille.

Cependant, plutôt que d'utiliser les vastes richesses du pays pour prendre soin des gens, l'establishment politique, du fascisant Trump au Congrès et aux deux grands partis d'affaires, en passant par un nombre croissant de gouverneurs et de maires d'État, travaille de concert pour forcer une reprise prématurée du travail qui ne fera qu'ajouter plus de carburant humain au feu viral.

Il n'y a aucune preuve, malgré le discours constant des médias «d'une amélioration», que la pandémie est maitrisée. Les fausses «directives» pour la réouverture de l'économie annoncées par Trump la semaine dernière marquent la fin d’un semblant d'effort coordonné au niveau national pour circonscrire la maladie. En réalité, elles donnent un feu vert pour forcer les travailleurs à retourner au travail, sans aucune protection en place contre le virus, pour satisfaire l’appétit des grandes entreprises américaines d’engranger de nouveaux profits, même au prix de milliers de vies.

Les établissements de soins de santé de Boston, Detroit, New York, Chicago et Los Angeles continuent d'être submergés de patients atteints de COVID-19. Il y a plus de 180 remorques réfrigérées stationnées derrière les hôpitaux de New York pour stocker des cadavres dans des conditions où les pompes funèbres et les morgues sont complètement saturées. Dans un cas, plus de 20 corps ont été empilés sur le trottoir devant une pompe funèbre de Brooklyn. Beaucoup de morts qui ne sont pas réclamés seront enterrés dans des fosses communes avec des milliers d'autres oubliés.

L'État de l'Ohio, avec près de 13.000 cas, a fait la une des journaux indiquant que 73 pour cent des détenus de la prison de Marion étaient infectés par le COVID-19. Les tests effectués sur les détenus ont révélé que 1828 détenus étaient positifs pour le virus, ce qui représente 20 pour cent de tous les cas dans l’Ohio. Parmi ceux-ci, 109 étaient des membres du personnel de l'établissement.

Le Michigan a également constaté qu'un nombre important de ses prisonniers et de son personnel ont été testés positifs au coronavirus. Cependant, il n'existe actuellement aucune politique de dépistage du COVID-19 dans les populations carcérales. Claire Chevrier, l'avocate de l'American Civil Liberties Union Ohio, a déclaré sur son compte Twitter: «C'était un choix politique.»

Le gouverneur de l'Illinois, JB Pritzker, a indiqué que les hospitalisations ont augmenté de 7 pour cent, et la majorité des cas dans l'État est concentrée à Chicago et dans les comtés voisins. Les zones les plus durement touchées sont les quartiers les plus pauvres du comté de Cook et du sud de Chicago, dont les couches afro-américaines et hispaniques de la classe ouvrière.

Le Massachusetts se classe désormais troisième dans le nombre de cas de COVID-19, à mesure que de nouvelles éruptions sont signalées dans les quartiers pauvres de Boston. Le nombre de morts devrait dépasser les 2000 cette semaine. Selon le gouverneur Charlie Baker, les hôpitaux commencent à sentir les effets de la vague de cas.

La semaine dernière, au Colorado, l'usine de conditionnement de viande JBS à Greeley a dû fermer après que plus de 50 de ses employés aient contracté le coronavirus. Le syndicat qui représente les 3000 travailleurs de l'usine a indiqué que deux travailleurs étaient morts.

Dans un effort pour limiter les dégâts, le vice-président Mike Pence a déclaré aux journalistes que son groupe de travail fournirait rapidement des ressources pour les tests de COVID-19. Entre temps, le gouverneur Jared Polis, un démocrate, a déclaré à CNN: «Elle restera fermée le temps nécessaire pour tester chaque travailleur et autoriser les travailleurs à retourner au travail. Ceux qui sont testés négatifs vont reprendre le travail après une brève fermeture… »

Le gouverneur de Géorgie, Brian Kemp, dont l'État a vu 1242 nouveaux cas lundi avec 94 décès, a annoncé qu'il autoriserait certaines entreprises, y compris des gymnases et des salons de coiffure, à rouvrir cette semaine, et que les hôpitaux pourraient reprendre les chirurgies électives le 24 avril. Des annonces similaires ont été faites par les gouverneurs du Tennessee et du Vermont.

Le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, a ouvert les plages le 17 avril pour des «activités essentielles». Le gouverneur démocrate de la Louisiane, John Bel Edwards, dans l'un des États les plus touchés, a déclaré qu'il espérait lever les restrictions liées à la distanciation sociale d'ici le 1er mai. Le Minnesota autorisera le début des activités récréatives comme le golf, la navigation de plaisance et la pêche cette semaine.

Le gouverneur de New York, Andrew Cuomo, dont l'État est l'épicentre de la pandémie aux États-Unis, a déclaré: «Il est temps de commencer à ouvrir la vanne lentement et prudemment», et a suggéré que l'État de New York pourrait rouvrir plus tôt que la ville de New York.

Dans un commentaire révélateur, le Wall Street Journal aécrit vendredi que Trump avait «demandé aux assistants de la Maison-Blanche des plans de réponse économique qui lui permettraient de s’attribuer le mérite des réussites tout en laissant suffisamment de marge pour attribuer la responsabilité des échecs aux autres».

Il prévoit de priver les États des ressources dont ils ont besoin jusqu'à ce qu'ils autorisent la réouverture des entreprises, tout en rejetant la faute sur les États en cas de répercussions.

Pratiquement toutes les institutions médicales et de santé publique réputées ont averti qu'un tel cours imprudent coûtera des milliers, voire des millions, de vies.

Un document interne obtenu par le Washington Post de l’Agence fédérale des situations d’urgence (FEMA) et des Centres pour le contrôle des maladies (CDC) prévient que le plan de la Maison-Blanche «entraînerait un risque important de résurgence du virus». La note déclare: «À la Maison-Blanche, il est clair pour les responsables depuis la semaine dernière que le débat est presque clos – du moins avec le président – sur le début du processus de réouverture le 1er mai… plutôt, le débat de cette semaine a été sur la façon de mettre en œuvre la reprise, quelles données pourraient être utilisées pour justifier la décision, et comment obtenir le soutien du public dans ce sens pour fournir au président une couverture politique maximale…»

Lundi, un nouveau rapport a été publié par l'Université d’Harvard en collaboration avec plusieurs institutions affiliées. Il indique que les États-Unis devraient fournir plus de cinq millions de tests par jour au début de juin, progressant jusqu'à 20 millions à la fin de juillet, pour tester suffisamment deux à six pour cent de la population et fournir une capacité suffisante pour tester ses travailleurs essentiels.

Depuis le 6 avril, les États-Unis n'ont effectué que quelque 150.000 tests par jour, malgré les vantardises répétées de la Maison-Blanche d'avoir effectué des millions de tests. Le manque de tests s’explique à plusieurs niveaux: problèmes de chaîne d'approvisionnement, centres de tests inadéquats, tests non validés, pénurie de réactifs nécessaires pour les tests PCR sérologiques et de prélèvements appropriés. De plus, parce que les tests ont été autorisés pour un usage public par la FDA (Agence de produits alimentaires et médicamenteux) dans le cadre de mesures d'urgence, ils n'ont pas encore été homologués, et de nombreux professionnels de la santé ont exprimé leurs préoccupations concernant les tests faussement négatifs.

Lors de la conférence de presse de lundi à la Maison-Blanche, le lieutenant-général Todd T. Semonite, commandant général du Corps des ingénieurs de l’armée américaine, a fait un exposé sur la construction d'hôpitaux de campagne à divers endroits du pays, tels que McCormick Place à Chicago, le Miami Beach Convention Center, le Colorado Convention Center, le TCF Center à Detroit et le Javits Center à New York. Ce sont des centres urbains densément peuplés.

Beaucoup de ces hôpitaux sont prêts et vides. Il est clair que le gouvernement se prépare à la deuxième vague de victimes. Le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, a déclaré lundi: «Le pire est à venir.»

Entre temps, une grande partie de l'attention des médias et de l'establishment politique est portée sur l'achèvement des négociations pour entériner une autre série de renflouements bipartites pour les grandes entreprises, sous la forme de 450 milliards de dollars supplémentaires attribués cyniquement au mal nommé «Paycheck Protection Program» (Programme de protection des salaires).

Avec chaque jour qui passe, il devient plus clair pour des millions de travailleurs aux États-Unis et dans le monde qu'il existe une divergence totale d'intérêts entre la grande majorité de l'humanité et la petite élite parasitaire qui domine l'économie mondiale et ses institutions politiques. La lutte pour mettre fin au capitalisme et instaurer le socialisme est littéralement une question de vie ou de mort.

(Article paru en anglais le 20 avril 2020)

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