47,2 pour cent des Américains en âge de travailler sont sans emploi, un record

Selon des chiffres récemment publiés par le Bureau des statistiques du travail (BLS), 47,2 pour cent des Américains en âge de travailler étaient sans travail en mai, le plus haut taux enregistré depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Ces chiffres sont basés sur le rapport emploi-population du BLS, qui divise la population active totale par le nombre de personnes travaillant effectivement. Cela donne une mesure plus précise du chômage que le rapport mensuel sur le chômage qui ne compte que les personnes recherchant activement un emploi.

Fin mai, le rapport emploi/population s’élevait à 52,8 pour cent; il était de 61,2 pour cent au début de l’année. En 2000, le ratio emploi/population avait atteint un sommet pour la période d’après-guerre de près de 65 pour cent.

Citant Torsten Slok, l’économiste en chef de la Deutsche Bank, CNBC a déclaré qu’il faudrait créer 30 millions d’emplois supplémentaires pour ramener le rapport emploi/population au niveau de janvier.

Le rapport du BLS précède de quelques jours la publication prévue cette semaine des statistiques officielles sur le chômage pour le mois de juin. Celles-ci devraient indiquer une baisse marginale du taux de chômage officiel de 13,3 pour cent en mai à 12,4 pour cent en juin. On ne sait pas si les chiffres de juin corrigeront le sous-dénombrement des chômeurs de mai et avril. Des millions de travailleurs avaient alors été mal enregistrés et le taux de chômage officiel baissé en conséquence d’environ 3 pour cent en mai et 5 pour cent en juin.

Une femme enceinte fait la queue avec des centaines de personnes dans une banque alimentaire, patronnée par Healthy Waltham pour ceux dans le besoin à cause de la pandémie, à l’église Sainte-Marie de Waltham, Mass. (AP Photo/Charles Krupa)

Le taux de chômage officiel reste au niveau de celui de la Grande Dépression dans un certain nombre d’États. Le Nevada, durement touché par la fermeture de l’industrie du jeu, avait un taux de chômage de 25,3 pour cent en mai, contre 4,0 pour cent un an plus tôt. Hawaii se situait à 22,6 pour cent en mai contre seulement 2,7 pour cent il y a un an, tandis que le Michigan enregistrait 21,2 pour cent contre 4,2 pour cent en mai 2019. En Californie et au Massachusetts, le taux de chômage s’élevait à 16,3 pour cent en mai.

Le chômage était le plus élevé dans le secteur des loisirs et de l’hôtellerie, 35,9 pour cent ; le commerce de détail, 15,1 pour cent ; la construction 12,7 pour cent et la fabrication 11,6 pour cent. 29,9 pour cent des jeunes de 16 à 19 ans et 23,2 pour cent des travailleurs âgés de 20 à 24 ans étaient sans emploi.

Malgré la réouverture précoce et irresponsable des économies des états au mois de juin, environ 1,5 million de nouvelles demandes d’allocations chômage ont été présentées chaque semaine. De nombreux travailleurs n’ont pas d’emploi auquel retourner ; notamment ceux employés dans de petites entreprises comme les restaurants, incapables de survivre au confinement. On s’attend également à une nouvelle vague de faillites plus importantes.

Le plein impact de cet effondrement économique se fera sentir vers la fin de juillet, lorsque le supplément temporaire de 600 dollars par semaine aux allocations chômage, inscrit dans la loi CARES, prendra fin. La cessation de ce versement, prévue pour la fin de la 4e semaine de juillet, réduira d’environ deux tiers les revenus de 20 millions de travailleurs et entraînera une recrudescence de la faim et des expulsions.

Le revenu personnel a chuté de 4,2 pour cent en mai, malgré les versements complémentaires. Cette baisse sera particulièrement dévastatrice pour les travailleurs à bas salaires, puisque les allocations chômage régulières ne couvrent que la moitié du salaire hebdomadaire.

Le moratoire sur les expulsions des logements subventionnés par le gouvernement fédéral, prévu par la loi CARES, doit également expirer fin juillet. Cela signifie que des millions de familles pourraient bientôt se retrouver à la rue. Selon la dernière «Enquête sur “le pouls” des ménages» du Bureau du recensement américain, 30 pour cent des locataires n’ont pas ou peu confiance dans leur capacité à payer leur loyer du mois prochain.

Un patchwork d’interdictions temporaires d’expulsions au niveau local et à celui des États arrive à expiration ou est contesté par les syndicats de propriétaires. En Floride, une interdiction d’expulser devait expirer hier, sauf prolongation de dernière minute par le gouverneur. En Virginie, l’interdiction d’expulser dans tout l’État a expiré le 29 juin. À San Francisco, une interdiction à l’échelle de la ville est contestée devant les tribunaux. Une interdiction d’expulser avait expiré à New York début juin ; 50 à 60.000 cas d’expulsion pourraient bientôt être déposés devant les tribunaux du logement.

Andy Winkler, du Bipartisan Policy Center, a lancé l’avertissement, rapporté dans Politico, qu’un «tsunami» d’expulsions allait se produire suite à l’expiration du supplément chômage de 600 dollars.

Il est clair que les entreprises utilisent la crise causée par la pandémie pour procéder à des restructurations majeures, y compris en éliminant pour toujours un grand nombre d’emplois. Selon le Fonds monétaire international, l’économie mondiale se contractera de cinq pour cent en 2020 et le PIB des États-Unis diminuera de huit pour cent. Le PIB du Mexique et de l’Europe devrait baisser de 10 pour cent, tandis que la Chine ne connaîtra aucune croissance. Aux États-Unis, le deuxième trimestre devrait connaître la plus forte contraction trimestrielle depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Donnant une idée de ce qui va se passer, Airbus a annoncé 15.000 suppressions d’emplois dans le monde d’ici 2021, dans le cadre de la restructuration de ses activités dans le monde entier, soit une réduction de 11 pour cent. Dix mille suppressions d’emplois se produiront rien qu’en Allemagne et en France.

Graphique qui montre la forte baisse du rapport emploi-population

Ces dernières années, les porte-parole de la classe dirigeante se sont amèrement plaints de ce que des taux de chômage très bas avait entraîné des «marchés du travail tendus» et des demandes d’augmentation des salaires. Les entreprises utiliseront à présent la destruction de dizaines de millions d’emplois comme un gourdin pour exiger une nouvelle vague de baisse des salaires et des prestations. Les compagnies aériennes et le secteur public ont déjà utilisé de cette manière la pandémie contre les travailleurs.

Au milieu de toute cette dévastation, la bourse américaine a clôturé le mois de juin avec l’une des meilleures hausses trimestrielles de l’histoire. Le Dow Jones a augmenté de 216 points mardi. Au deuxième trimestre, il a augmenté de 16 pour cent, effaçant la plupart des pertes du premier trimestre de 2020. Apple, Home Depot, Dow et Microsoft ont été parmi ceux qui ont réalisé les plus fortes hausses. Le S&P 500 est monté de 19,1 pour cent pour le trimestre alors que le Nasdaq est en hausse de 11 pour cent pour l’année.

La hausse des marchés survient alors que les cas de COVID-19 se multiplient aux États-Unis, le nombre des nouvelles infections atteignant des records suite à l’abandon de tout effort de contrôle du virus par le gouvernement fédéral et l’administration des États. La hausse des action n’est pas due à une amélioration de l’économie réelle, mais à l’injection illimitée de liquidités par la Réserve fédérale américaine. Comme un toxicomane, la bourse compte sur des injections de liquidités toujours plus importantes pour maintenir ses taux gonflés. Pendant ce temps, l’attaque des emplois et du niveau de vie des travailleurs devient de plus en plus féroce, car l’oligarchie industrielle tente de récupérer l’argent sur le dos des travailleurs.

Les travailleurs ne doivent pas accepter de porter le fardeau économique de la réponse criminelle et inepte des autorités capitalistes à la pandémie de coronavirus. Les ressources massives qui vont aux marchés financiers doivent être réorientées vers la satisfaction de besoins humains urgents. Il faut que les revenus et les moyens de subsistance des travailleurs mis au chômage par la propagation du virus et les mesures sanitaires nécessaires soient protégés. Cela nécessite une mobilisation politique indépendante de la classe ouvrière sur la base d’un programme socialiste et internationaliste.

(Article paru d’abord en anglais 1er juillet 2020)

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