Apparition d’une souche de Covid plus infectieuse qui menace de se propager dans le monde entier

Des pays imposent des restrictions aux voyages en provenance du Royaume-Uni

La Grande-Bretagne a enregistré 33.364 nouveaux cas de COVID-19, 18.871 hospitalisations supplémentaires et 215 décès, alimentés par la nouvelle souche plus infectieuse reconnue pour la première fois par le gouvernement de Boris Johnson la semaine dernière.

Plus de 40 pays ont imposé au Royaume-Uni des restrictions de vol et de voyage pour contenir la propagation de la nouvelle souche, qui serait 70 pour cent plus infectieuse que les souches dominantes précédentes. Parmi eux figurent au moins 18 pays européens; ainsi que la Russie, l’Inde, le Canada, Hong Kong, Israël, l’Iran, le Maroc, l’Arabie saoudite, le Koweït, la Jordanie, l’Argentine, le Chili, la Colombie, l’Équateur, le Salvador et le Pérou. Les États-Unis devraient suivre.

21/12/2020. Londres, Royaume-Uni. Le premier ministre Boris Johnson préside une conférence de presse sur la Covid-19 avec le ministre desTransports Grant Shapps au 10 Downing Street. Photo d’Andrew Parsons/No 10 Downing Street

Mais le professeur Calum Semple, du Groupe consultatif scientifique pour les urgences (SAGE) du gouvernement, a averti que la souche mutée risque néanmoins de devenir la souche mondiale dominante. Interrogé par Sky News pour savoir si la souche mutante deviendra dominante au niveau mondial, le professeur Semple, professeur de médecine d’urgence à l’université de Liverpool, a répondu par l’affirmative, car elle touche plus de personnes: «Parce que le virus a l’avantage évolutif de se transmettre plus rapidement, il surpassera toutes les autres souches, et c’est donc ce qu’il fera naturellement».

Il a ajouté: «Au fur et à mesure que l’immunité se répandra dans la communauté, vous commencerez à voir plus de pression sur le virus et vous aurez plus de chances de voir la percée d’autres variations», avant d’avertir: «Nous n’avons pas encore d’immunité collective, malgré les personnes qui pensent que l’immunité collective va être le salut. Nous ne l’aurons pas tant qu’un très grand nombre de personnes n’auront pas été vaccinées».

Rien ne prouve que la nouvelle souche est plus mortelle que ses prédécesseurs, ou qu’elle est résistante aux différents vaccins en cours de déploiement. Mais son taux d’infectiosité plus élevé signifie plus de cas, d’hospitalisations et de décès et exige une campagne de vaccination plus rapide et plus étendue ainsi que des mesures de confinement beaucoup plus efficaces. Ni le Royaume-Uni ni les pays qui imposent aujourd’hui tardivement des restrictions de voyage n’imposent de telles mesures.

Les deux premiers échantillons du virus muté ont été recueillis le 20 septembre dans le Kent et un autre le 21 septembre à Londres. Mais le gouvernement n’a admis avoir connaissance de la gravité de la nouvelle propagation virale que le 14 décembre. Ce n’est que samedi que le premier ministre conservateur Boris Johnson a introduit un nouveau degré de confinement, le «niveau 4», plus restrictif. Il touche 16,4 millions de personnes, dont environ 9 millions dans tout Londres et une grande partie du sud-est de l’Angleterre. Mais cela laisse des millions de personnes aller travailler dans une région où la nouvelle mutation représente 60 pour cent des infections et n’a pas d’impact sur le reste du Royaume-Uni. Le gouvernement a admis que 10 à 15 pour cent des cas de la nouvelle souche, VUI-202012/01, se produisent déjà en dehors du sud-est.

Représentation du virus SRAS-CoV-2 (Institut national des allergies et des maladies infectieuses)

En conséquence, la porte est fermée aux voyages en provenance du Royaume-Uni après que la nouvelle souche se soit déjà échappée dans plusieurs pays européens, et avec deux cas confirmés aussi loin que l’Australie. On a détecté des infections avec la nouvelle mutation au Danemark, aux Pays-Bas, en Italie et à Gibraltar – sous administration britannique – en Espagne. L’Afrique du Sud, un centre de la pandémie, a enregistré une mutation similaire comme étant probablement responsable d’une augmentation du nombre de cas.

Lundi, Johnson était préoccupé par les négociations avec le président Emmanuel Macron qui visaient à annuler l’interdiction unilatérale française de 48 heures imposée aux camions de marchandises circulant entre Douvres et Calais, ainsi que dans le tunnel sous la Manche. Un cinquième de toutes les marchandises britanniques transitent par Douvres chaque jour. Cependant, le ministre français de la Santé, Olivier Veran, a déclaré à la radio Europe 1: «Il est tout à fait possible que le virus circule en France».

En Allemagne, la presse britannique a cité largement Christian Drosten, directeur de la virologie à l’hôpital Charité de Berlin, pour ses remarques selon lesquelles les politiciens et les médias pourraient exagérer l’infectivité de la nouvelle souche et que ce n’était pas claire si la hausse des cas dans le Kent et le sud-est était due à la nouvelle souche. Mais Drosten a également déclaré qu’il s’attendait à ce que la nouvelle souche soit déjà en circulation en Allemagne.

Les implications pour la propagation de la pandémie en Europe et dans le monde sont graves. Samedi, Johnson a déclaré que le nouveau virus pourrait augmenter de 0,4 pour cent le taux de reproduction (R) au Royaume-Uni, ce qui signifie une augmentation substantielle des infections. Il s’agit peut-être d’une sous-estimation. Le groupe consultatif du gouvernement sur les menaces de virus respiratoires nouveaux et émergents (Nervtag) estime que la variante pourrait augmenter le nombre R d’une valeur entre 0,4 et 0,9.

Même si la propagation de la mutation est limitée, elle est déjà active sur le continent et n’est qu’un des milliers de mutations dans le monde, dont certaines présentent des caractéristiques similaires. Des scientifiques britanniques surveilleraient 4.000 souches de coronavirus. Parmi celles-ci, le variant D614G est devenu la souche dominante en Europe et s’est ensuite répandu dans le monde entier. On a identifié une nouvelle souche en octobre comme étant responsable de 90 pour cent des nouvelles infections en Espagne et s’est probablement répandue dans toute l’Europe en raison du tourisme.

Johnson a donné une conférence de presse lundi, accompagné de son conseiller scientifique principal, sir Patrick Vallance, et du ministre des Transports, Grant Shapps. Johnson et Shapps n’étaient enthousiastes que lorsqu’ils parlaient des négociations visant à mettre fin au blocus français du transport routier et traitaient les questions sur la pandémie avec des réponses superficielles et évasives.

21/12/2020. Londres, Royaume-Uni. Le conseiller scientifique en chef, sir Patrick Vallance, au N°10 Downing Street. Photo d’Andrew Parsons/No 10 Downing Street

Vallance a donc exprimé très ouvertement la réponse criminelle du gouvernement. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi des mesures de confinement plus strictes n’étaient pas en place au Royaume-Uni, il a admis: «La transmission est accrue. Nous ne pouvons pas dire exactement de combien, mais c’est clair qu’elle a considérablement augmenté, donc elle est plus transmissible». Il a ensuite prédit un pic dans les cas après une «inévitable période de fréquentations» pendant la période de Noël. Mais il n’a toujours pas proposé de nouvelles mesures de confinement.

Le gouvernement ignore une fois de plus les scientifiques éminents qui réclament un deuxième confinement national. Robert West, professeur de psychologie de la santé à l’Institut d’épidémiologie et de santé de l’University College de Londres et membre du SAGE a affirmé dans une interview: «Nous devons revoir notre stratégie et passer rapidement à une stratégie zéro Covid du type de celle que beaucoup proposent… L’alternative pourrait bien être un effondrement catastrophique de la confiance dans la capacité du pays à maitriser le virus et la catastrophe économique, humaine et sociale qui s’ensuivrait».

La seule préoccupation du gouvernement Johnson et de ses homologues dans chaque pays est d’augmenter la valeur des actions des grandes entreprises et de remplir les comptes bancaires des super-riches. Son attention sur Douvres n’a pas été motivée par la menace de pénurie de nourriture et de médicaments. C’est plutôt par la chute de 1,7 pour cent de l’indice FTSE 100 provoquée par les interdictions de voyage et de commerce, suivie de chutes encore plus importantes en Europe et aux États-Unis.

C’est pourquoi la politique d’immunité collective – refusant de mettre en œuvre de véritables mesures de confinement qui exigeraient la fermeture des lieux de travail et des écoles et entraveraient l’accumulation des profits – est menée dans le monde entier. Le prix à payer est estimé à plus de 1,7 million de vies humaines, dont près d’un demi-million en Europe. Des centaines de milliers de personnes risquent de mourir dans les semaines à venir.

Cette situation doit être évitée à tout prix. Des mesures d’urgence doivent être prises pour maitriser le virus!

Le Parti de l’égalité socialiste en Grande-Bretagne et nos partis frères du Comité international de la Quatrième Internationale dans le monde entier appellent aux travailleurs du monde entier à exiger la fermeture immédiate de toutes les entreprises et écoles non essentielles. Cette mesure doit s’accompagner d’une indemnisation complète pour les pertes de salaire et de revenus des petites entreprises.

Des billions doivent être investis dans les infrastructures de soins de santé pour traiter, contenir et éradiquer la COVID-19, et garantir que la société soit protégée contre la menace de maladies infectieuses à l’avenir. Les sommes massives monopolisées par l’élite financière doivent être saisies et consacrées aux besoins sociaux essentiels. Tous les travailleurs et les jeunes qui veulent se battre pour ce programme doivent contacter le PES dès aujourd’hui.

(Article paru en anglais le 22 décembre 2020)

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