Troisième confinement national pour le Royaume-Uni tandis que le coronavirus échappe à tout contrôle

Le premier ministre Boris Johnson a annoncé lundi un troisième confinement national en Angleterre. Il a déclaré que les gens doivent rester chez eux pendant au moins six semaines, sauf en ce qui concerne leur lieu de travail, l’achat de nourriture ou de médicaments ou pour faire de l’exercice une fois par jour. Toutes les écoles et universités ont été fermées à partir de mardi.

Le confinement n’est pas aussi strict que celui imposé en mars dernier. Johnson a insisté sur le fait que les gens doivent sortir travailler s’ils ne peuvent pas travailler de la maison pour que les grandes entreprises puissent continuer à faire des bénéfices.

Détaillant les conséquences horribles de son programme meurtrier d’«immunité collective», Johnson a déclaré: «Rien qu’en Angleterre, le nombre de cas de Covid dans les hôpitaux a augmenté de près d’un tiers au cours de la dernière semaine, pour atteindre presque 27.000. Et ce nombre est 40 pour cent plus élevé que le premier pic d’avril». Le 29 décembre, plus de 80.000 personnes ont été déclarées positives pour la Covid-19 au Royaume-Uni, «un nouveau record», et «le nombre de décès a augmenté de 20 pour cent au cours de la semaine dernière et va malheureusement continuer à augmenter».

Le National Health Service (NHS) ne pouvait plus faire face à la propagation de la maladie. Les «médecins en chef du Royaume-Uni [d’Angleterre, du Pays de Galles, d’Écosse et d’Irlande du Nord] ont conseillé à tout le pays de passer au niveau d’alerte 5, ce qui signifie que si aucune mesure n’est prise, la capacité du NHS pourrait être dépassée dans les 21 jours», a-t-il déclaré. Il était auparavant au niveau 4 dans tout le Royaume-Uni. Le Guardian a indiqué que le passage au niveau 5 avait été recommandé par le Centre commun de biosécurité avant de recevoir l’accord des médecins en chef.

L’ampleur des décès en Grande-Bretagne est stupéfiante, le record de nouveaux cas étant battu presque quotidiennement. Lundi, on a annoncé 407 autres décès à la COVID-19 et un record de 58.784 nouveaux cas. Au cours des 10 jours qui se sont écoulés depuis le 26 décembre, 5.205 personnes sont mortes de la COVID-19, avec 490.412 nouveaux cas de maladie enregistrés. Cela représente 18 pour cent du total de 2.713.563 cas depuis que l'on a détecté le virus pour la première fois au Royaume-Uni, il y a un peu plus de 11 mois, le 31 janvier 2020.

Avant l’intervention de Johnson, la première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, avait annoncé un confinement national à partir de minuit jusqu’à la fin janvier. Les lois obligeront les gens à rester chez eux et à travailler de chez eux dans la mesure du possible. Les rassemblements en plein air sont réduits pour permettre aux gens de ne rencontrer qu’une seule personne d’un autre foyer. Les écoles fonctionneront par le biais de l’apprentissage en ligne et à distance.

La propagation du virus est fulgurante en Écosse, le nombre de cas positifs ayant atteint un record de 2.464 dimanche. La nouvelle variante du virus, détectée pour la première fois en Angleterre en septembre, est responsable d’au moins 50 pour cent des cas. Sturgeon a déclaré qu’il y avait des preuves «irréfutables» que la nouvelle variante était environ 70 pour cent plus infectieuse. Cela signifie qu’elle pourrait faire augmenter le taux de R (reproduction) du virus de 0,7. «Cette accélération de la propagation est sans aucun doute à l’origine de la situation très grave à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui… Les chiffres actuels – 1.905 nouveaux cas, dont 15 pour cent de tests positifs – illustrent la gravité et l’urgence de la situation».

Le ministre de la Santé du Pays de Galles, Vaughan Gething, a déclaré que les résultats positifs des tests au Pays de Galles s’élevaient à un taux massif de 25 pour cent.

Parlement, qui devait revenir la semaine prochaine d’une longue pause de Noël après avoir voté l’accord du Brexit le 30 décembre, est rappelé mercredi pour débattre des nouvelles mesures – principalement en ligne.

Le chef du Parti travailliste, sir Keir Starmer, s’est empressé de soutenir Johnson, poursuivant sa politique d’«opposition constructive» à un gouvernement détesté qu’il a contribué à soutenir depuis avril. «Ces mesures sont nécessaires et nous les soutenons», a-t-il tweeté.

Londres et le sud-est de l’Angleterre sont l’épicentre de la pandémie. Le journal i a rapporté dimanche que «plus d’une personne sur quatre testée pour la Covid-19 à Londres est infectée par le virus…» La «moyenne quotidienne au 29 décembre… montre un taux de positivité des tests de 26,8 pour cent, contre 24,3 pour cent la veille. Ce chiffre a fortement augmenté en une semaine, depuis le 22 décembre où le taux de positivité des cas était de 15,7 pour cent».

Pendant la période de Noël, le nombre de cas a augmenté dans les deux tiers des 32 arrondissements de Londres. Le nombre de patients atteints de Covid dans les hôpitaux de la capitale atteignant un pic de 5.524 le 30 décembre. Le plus grand nombre de patients hospitalisés à Londres au plus fort de la première vague, le 9 avril, était de 5.201.

Dans le grand sud-est de l’Angleterre (Londres, sud-est et est), les admissions à l’hôpital pour la Covid sont de 16 pour cent supérieurs au pic de la crise du printemps. Dans le sud-est de l’Angleterre, près de 50 pour cent de patients de plus qui sont atteints de la Covid-19 dans les hôpitaux que pendant le pic du printemps.

La moyenne des nouveaux cas dans toute l’Angleterre est de 400 pour 100.000 habitants. À Londres, elle a atteint plus du double de ce taux avec un record de 902,5 pour 100.000 enregistré jusqu’en décembre 30, contre 817 il y a une semaine. L’Evening Standard de Londres a rapporté que «le quartier le plus touché proportionnellement est celui de Barking & Dagenham, avec 2.764 nouveaux cas en une semaine. C’est le taux le plus élevé de nouveaux cas à Londres, avec 1.298 pour 100.000 habitants».

Une fois de plus, Johnson prend des mesures limitées et tardives en raison de l’opposition croissante de l’opinion publique. Depuis qu’il a imposé un confinement complet en mars, (confinement qu’il a abandonné en juin en mentant sur le fait que le virus était sur une «pente descendante» pour rouvrir l’économie), ses restrictions partielles et le confinement d’urgence largement inadéquat de novembre ont permis la propagation rapide du virus et de sa nouvelle variante mortelle. Les lieux de travail non essentiels sont ouverts depuis des mois et, malgré les avertissements des scientifiques – dont le groupe consultatif scientifique pour les situations d’urgence du gouvernement –, les écoles, collèges et universités sont ouverts depuis septembre.

Johnson a reconnu lundi que les écoles font partie des principaux vecteurs de propagation de la maladie. Mais le gouvernement était déterminé à garder la grande majorité des écoles primaires ouvertes au niveau national cette semaine pour le nouveau trimestre, afin qu’elles puissent servir d’enclos pour les enfants pendant que les parents vont travailler. Dans son discours, Johnson a dû excuser le fait qu’il ait insisté pour que les écoles ouvrent plus tôt ce jour-là en affirmant que chaque jour d’école était «important».

Malgré les diktats du gouvernement, des centaines d’écoles primaires à travers le Royaume-Uni n’ont pas ouvert lundi parce que le personnel refusait d’y aller. Le Manchester Evening News a fait état d’une épidémie de Covid dans une école primaire locale: «le directeur par intérim de l’école primaire catholique Holy Family à Seedley, Salford, et un autre membre du personnel seraient tous les deux “gravement malades à l’hôpital”. Un certain nombre d’autres membres du personnel ont également été déclarés positifs pour le virus, et sont devenus “très malades” pendant les vacances de Noël et sont “trop malades pour retourner au travail”».

Dans le comté de Norfolk, plus de 130 écoles primaires n’ont pas ouvert complètement. Dans la région du Grand Manchester, une cinquantaine d’écoles primaires n’ont pas ouvert et on en a fermé 23 dans le Merseyside voisin. Plus de 40 écoles n’ont pas ouvert dans la ville de Durham, 21 dans le North Tyneside, 26 à Newcastle, 10 à Reading et 9 dans le Northumberland.

Et ce malgré le sabotage perpétré par les syndicats de l’éducation, dont la principale revendication – jusqu’au week-end dernier – était que Johnson ne retarde la réouverture des écoles secondaires que pour permettre le dépistage des élèves de cette tranche d’âge. Lundi, alors même que l’on parlait partout d’un confinement national imminent, les syndicats ont intensifié leur collaboration avec le gouvernement. Le Syndicat de l’éducation nationale (NEU) NAHT, NASUWT, GMB, Unison et Unite ont signé une déclaration commune coordonnée par le Congrès des syndicats, demandant au premier ministre, dont le gouvernement est responsable de la mort d’au moins 75.000 personnes, et en réalité de bien plus de 90.000 et se rapprochant des 100.000, de «s’asseoir avec les syndicats pour discuter d’une approche commune visant à garantir des conditions de travail sûres dans toutes les écoles…»

(Article paru en anglais le 5 janvier 2021)

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