Le PCF et Mélenchon épaulent la loi «anti-séparatiste» fascisante de Macron

Le «projet de loi confortant le respect des principes républicains», qui restreint drastiquement la liberté d’association et de culte sous prétexte de lutter contre le séparatisme islamique, est examiné en première lecture depuis le 1er février dans une ambiance de surenchère fascisante. Le Parti communiste français (PCF) stalinien et la France insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon ont apporté leur concours à cette loi ultra-réactionnaire.

Le jeudi 4 février, l’Assemblée nationale a voté l’article 4 du projet de loi, qui crée un délit de séparatisme. Il punit de 5 ans d’emprisonnement et de 75.000 d’amende tout usage de menaces, violences ou «intimidation» visant à obtenir «une exemption totale ou partielle ou une application différenciée» des règles régissant un service public. Cette définition ultra-répressive se prête à toutes les manipulations par l’État ou les forces de l’ordre.

Proposé suite à l’assassinat terroriste du professeur de lycée Samuel Paty qui avait montré à une classe une caricature obscène de Mohamed, ce délit est si vaguement défini qu’il pourrait se voir appliqué même à des élèves qui demanderaient avec insistance à ne pas manger du porc à l’école. Il ouvre la voie à une dérive antimusulmane et à l’incitation permanente par l’élite dirigeante de haines confessionnelles et ethniques. C’est une atteinte profonde au principe de laïcité.

Or, l’article 4 a été adopté sans un seul vote contre: le groupe parlementaire PCF a voté l’article, et le groupe parlementaire LFI s’est abstenu. Ces partis se rendent ainsi complices de l’agenda législatif fascisant dévoilé par le gouvernement Macron depuis le début de la pandémie.

L'Assemblée a voté le vendredi 5 l'article 6, qui prévoit le «contrat d'engagement républicain» pour les associations loi de 1901, une mesure phare du projet. Selon les propos outranciers de Marlène Schiappa, repris par les autres ministres et les députés LREM, ce contrat garantira qu’il n’y a «Pas un euro d'argent public pour les ennemis de la République. Les subventions, donc l'argent des Français, ne doivent pas financer des organisations qui sont le terreau du terrorisme».

Ces propos grotesques ne s'appuient sur aucune réalité tangible. Les associations sont déjà tenues de respecter les lois françaises. Le but de cet article de la loi est de modifier profondément le droit qui régit le versement des subventions en y apportant des restrictions majeures. Il s'agit d'ajouter des critères sans rapport avec l’utilité sociale de l’action menée par l’association.

La loi va viser directement les opinions religieuses et politiques des dirigeants et des adhérents des associations pour bloquer les subventions. Le contrat d'engagement républicain sera fixé dans un décret à paraître, que l’État pourra durcir à chaque vague sécuritaire, et qui permettra d’étrangler les libertés associatives. Les associations subventionnées devront adhérer et collaborer à l'agenda sécuritaire du gouvernement.

Or, des dispositions librement négociées avec le mouvement associatif existent déjà. La Charte des engagements réciproques entre l’État, les collectivités territoriales et les associations avait été élaborée en 2001 à l’occasion du centenaire de la loi de 1901, puis rénovée en 2014 pour inclure les collectivités locales. Elle définit un cadre général à respecter pour l’octroi de subventions publiques.

Depuis, le lien entre séparatisme islamique et libertés associatives a été concocté pour justifier le virage répressif du gouvernement. Le gouvernement a déclenché unilatéralement une guerre d'agression contre les associations pour les priver de leurs libertés fondamentales.

Le rapport de présentation de la loi transmis au Conseil d'État déclare: «Les activités associatives, de par l'immense liberté dont elles bénéficient, sont utilisées par les acteurs séparatistes de manière très active, notamment dans les champs sociaux, culturels ou périscolaires.» Le gouvernement a visiblement prévu de priver de très nombreuses associations de financement. De plus, il ne vise pas que le supposé radicalisme musulman; les mesures répressives concerneront toutes sortes d’associations militantes.

Certaines dispositions sont encore plus attentatoires aux libertés. L'article 8 de la loi étend considérablement les motifs de dissolution et surtout permet d’imputer à une association la responsabilité des agissements de ses membres. Cet article a été discuté et adopté le 8 février. C'est une mesure digne d’un régime fasciste, qui permettra des dissolutions en masse d'associations, y compris les partis et organisations politiques organisés selon la loi de 1901.

Dans ce contexte fascisant, les partis établis font de la surenchère. Le Rassemblement national a déposé un contre-projet de loi qui réprime encore plus durement les droits des musulmans.

Les députés LR sont aussi sur une ligne antimusulmane, souvent encore plus à droite que celle du RN. Éric Ciotti, l'un des principaux orateurs de LR sur le texte a ainsi déclaré pendant les débats que: «Le voile n’est pas un vêtement anodin, c’est l’étendard de l’islamisme et de son idéologie.»

Comme dans tout régime autoritaire, Macron établit un contrôle policier étroit à toutes les étapes du droit de s'associer et d'agir en commun. La suppression de tels contrôles au début du XXe Siècle, au bénéfice d'une liberté de création et de gestion des associations, assorti d'un contrôle a posteriori en cas de besoin, a été une conquête démocratique, tout comme la loi de 1905 sur la laïcité. Ces avancées sont ressorties de l’activité politique de représentants socialistes de la classe ouvrière, qui luttaient contre les forces antisémites et bourgeoises dans l’Affaire Dreyfus.

Ce tournant politique fascisant découle de la profonde crise mondiale du capitalisme. La mort de masse comme nouvelle norme avec la Covid-19, les inégalités sociales ahurissantes et le caractère sans cesse plus parasitaire du système capitaliste, la prolifération des guerres néocoloniales et la préparation de conflits ouverts entre les grandes puissances sont incompatibles avec la démocratie. Les élites dirigeantes du monde entier se tournent vers des formes de gouvernement dictatoriales et encouragent des idéologies néofascistes.

Macron veut créer l’État policier nécessaire à la poursuite de sa politique en faveur de l'oligarchie financière, ce qui nécessite l'écrasement de l'opposition sociale. L'accumulation des lois sécuritaires est devenue la priorité de la fin de son mandat.

Ce tournant se fait dans le contexte d'un pacte politique conclu dans les coulisses entre les principaux partis parlementaires y compris le PCF et LFI. La création de l'épouvantail du séparatisme islamique contre lequel lutterait un front républicain, censé être distinct et même opposé au racisme d'extrême droite traditionnel, renforce et légitime en réalité des conceptions fascistes. Ainsi, elle accélère le déplacement vers l'extrême droite de toute la classe politique.

Ce discours de propagande a été minutieusement préparé par les milieux politiques en collaboration avec les milieux intellectuels hostiles à l'Islam. En prétendant défendre la République, il légitime en réalité un programme d'attaques systématiques contre les droits démocratiques. La défense des droits démocratiques ne peut être menée par des appels à l'élite dirigeante, mais seulement à travers la mobilisation indépendante de la classe ouvrière.

Le Parti de l'égalité socialiste appelle à lutter sans relâche contre les mensonges éhontés de la classe dirigeante et des médias sur le séparatisme islamique et à rappeler les enjeux historiques et actuels des droits démocratiques contenus dans les lois de 1901 et de 1905. Nous appelons les travailleurs à exiger le retrait intégral et immédiat de la loi confortant le respect des principes républicains lors des les luttes politiques et sociales en cours et à venir.

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