Conférence d’action politique conservatrice : Trump vitupère contre le «socialisme» et agite de plus belle le mensonge de l’« élection volée »

Lors de sa première apparition publique depuis qu’il a quitté ses fonctions le mois dernier, Donald Trump a prononcé le discours principal à la Conférence sur l’action politique des conservateurs (CPAC) à Orlando, en Floride, dimanche. Son discours fasciste était dans la ligne des débats de cette manifestation de quatre jours. La CPAC a réuni de hauts responsables républicains, des extrémistes de droite et des fanatiques pro-Trump. Il a montré la domination continue de l’ex-président sur le Parti républicain et son orientation de plus en plus fasciste.

La liste des orateurs comprenait des législateurs du GOP (Grand Old Party – le Parti républicain) qui ont joué un rôle central dans la conspiration visant à renverser les résultats des élections de 2020 et à faire de Trump un dictateur présidentiel, culminant avec le siège du Capitole américain le 6 janvier. Parmi eux, les sénateurs Josh Hawley et Ted Cruz, qui ont mené l’effort pour bloquer la certification du vote du Collège électoral le 6 janvier. Ils ont fourni une couverture politique aux groupes d’extrême droite qui ont mené l’attaque contre le Congrès pour le compte de Trump.

Parmi les autres personnes à être honorées il y avait Donald Trump Jr. Ce dernier a consacré une grande partie de son discours à attaquer Liz Cheney, députée va-t-en-guerre droitière, républicaine de troisième rang à la Chambre des représentants. Celle-ci fait partie des dix membres du GOP à la Chambre des représentants ayant voté pour la destitution de Trump.

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Légende: Le président Donald Trump s’exprime depuis la pelouse sud de la Maison-Blanche, le quatrième jour de la Convention nationale républicaine, le jeudi 27 août 2020, à Washington. (AP Photo/Alex Brandon)

Autre vedette de la conférence, le sénateur de l’Arkansas Tom Cotton qui a publié un article d’opinion dans le New York Times trois jours après le discours de Trump à la roseraie de la Maison-Blanche. Trump y avait menacé d’invoquer la loi sur l’insurrection et de mobiliser des troupes dans tout le pays pour réprimer les manifestations de masse contre les meurtres policiers. Dans son article, Cotton exhorta Trump à mettre sa menace à exécution et à imposer de fait la loi martiale.

Vendredi soir, le député Paul Gosar, l’un des républicains de la Chambre ayant voté contre la certification du vote du collège électoral dans les heures qui ont suivi la tentative de coup d’État du 6 janvier, s’est exprimé lors d’un événement distinct mais simultané, la Conférence d’action politique America First. La conférence fut organisée par Nick Fuentes, le suprématiste blanc et antisémite notoire.

Gosar était une figure de proue de la campagne «Arrêtez le vol [de l’élection]» qui a culminé avec l’insurrection du 6 janvier. Après le discours de Gosar, Fuentes a qualifié l’attaque du 6 janvier de «géniale» et a demandé la protection du «noyau démographique blanc» de l’Amérique.

Les tensions et les divisions au sein du Parti républicain se sont traduites par la décision de l’ancien vice-président Mike Pence de ne pas accepter l’invitation à prendre la parole à la conférence. Absent aussi étaient le leader de la minorité au Sénat, Mitch McConnell et l’ambassadrice de Trump aux Nations unies, Nikki Haley. Cependant, le parti s’est en grande partie rallié à l’organisateur de la tentative de renversement de la Constitution.

Dans son discours décousu de 90 minutes, Trump a perdu peu de temps pour mettre fin à des informations antérieures selon lesquelles il envisageait de se séparer du Parti républicain et de former son propre parti. Alors que la foule aboyait «USA! USA!», il a déclaré qu’il avait l’intention d’affirmer son leadership sur le parti et a exposé une extension du programme d’extrême droite qu’il poursuivait en tant que président. Enfin, il a laissé entrevoir une possible candidature à la Maison-Blanche en 2024.

En haut de la liste se trouve la lutte contre 'l’assaut du radicalisme' et du 'socialisme' qui, selon lui, mènent inévitablement au 'communisme'. Il attribue absurdement ce programme au Parti démocrate et à la Maison Blanche de Biden, qui, selon lui, a connu 'le pire premier mois de toute administration américaine'.

Il a ensuite passé en revue son menu habituel de charlataneries de droite: racisme anti-immigré, nationalisme économique, agitation anti-chinoise, loi et ordre, droits des armes à feu, démagogie anti-avortement. Conformément au titre de la CPAC, «l’Amérique non annulée», il a appelé au démantèlement des monopoles «Big Tech», qu’il a accusé de censurer le «mouvement conservateur». Il a dénoncé les attaques racialistes contre les Pères fondateurs, Lincoln et d’autres personnages historiques américains, non pas du point de vue de la vérité historique, mais sur la base d’un nationalisme américain enragé.

Tentant d’exploiter un large sentiment anti-guerre, Trump a dénoncé Biden qui s’apprêtait à inverser sa tendance à la réduction de la présence militaire américaine au Moyen-Orient et en Afghanistan.

Il a consacré une bonne partie de ses remarques à faire l’éloge de son programme de production de vaccins, affirmant qu’il avait sauvé des millions de vies, puis il a dénoncé Biden pour ne pas avoir agi assez rapidement pour rouvrir les écoles.

À un moment donné, Trump a nommément désigné les dix membres républicains de la Chambre qui ont voté pour le destituer pour avoir incité à l’insurrection du 6 janvier, et les sept sénateurs qui ont voté pour le condamner, exigeant que le Parti républicain les empêche d’être réélu.

La plus grande partie de son discours à servi à répéter ses allégations mensongères d’une «élection volée». Ceci était le thème central utilisé pour mobiliser les forces d’extrême droite dans sa tentative de renverser l’élection, remportée par Biden à une large majorité.

En utilisant plus que jamais ce récit bidon, Trump reprenait les discours et discussions de groupe tout au long de la conférence, où les allégations d’«élection truquée» et de gouvernement Biden illégitime étaient omniprésentes.

Comme les autres orateurs, Trump a omis toute mention de l’attaque fasciste du Congrès le 6 janvier, lui donnant ainsi son assentiment tacite. De plus, il ne laissa guère de doute sur le fait que si la horde fasciste avait réussi son objectif de prendre des otages, et d’exécuter probablement des législateurs pour empêcher le Congrès de certifier la victoire de Biden, le Parti républicain aurait soutenu ses demandes.

Trump a exigé que le Parti républicain impose des restrictions massives au droit de vote, au nom de la garantie d’élections «libres et équitables». Il a appelé à la quasi-élimination des bulletins de vote par correspondance, à des exigences plus strictes en matière d’identification des électeurs et à une preuve de citoyenneté aux bureaux de vote. De nombreux États contrôlés par les républicains sont déjà en train de mettre en œuvre de telles mesures, qui visent les électeurs pauvres et de la classe ouvrière.

Le discours de Trump et la conférence de la CPAC dans son ensemble doivent être considérés par la classe ouvrière comme une mise en garde claire. En plaidant pour 'l’unité', en appelant à un 'parti républicain fort' et en s’efforçant de dissimuler la complicité du GOP et de forces au sein de l’armée, de la police et de l’oligarchie financière dans la tentative de coup d’État fasciste, Biden et la direction du Parti démocrate ont renforcé Trump et ses amis comploteurs républicains.

Le discours de Trump a eu lieu à peine deux semaines après que les démocrates aient capitulé dans le procès de destitution au Sénat. Ils ont mené leur procès de façon à camoufler le rôle du GOP, notamment celui de sénateurs tels que Cruz et Hawley, qui ont voté pour bloquer la certification, et celui de Mitch McConnell qui, en tant que leader de la majorité au Sénat, a donné foi aux mensonges de fraude électorale de Trump.

Le dernier jour du procès au Sénat, le 13 février, les responsables démocrates de la Chambre ont refusé, sous la pression de la Maison-Blanche, de faire témoigner la députée républicaine de l’État de Washington, Jaime Herrera Beutler. Celle-ci avait dit vouloir témoigner sur une conversation téléphonique le jour de l’attentat qui prouvait le soutien de Trump aux insurgés. Elle a déclaré à la presse qu’elle avait entendu le leader de la minorité à la Chambre Kevin McCarthy parler à Trump et le supplier de rappeler la horde des attaquants, et d’envoyer des renforts au Capitole ; elle avait alors entendu le président dire à McCarthy que les assaillants étaient «plus fâchés de l’élection que vous».

Comme en a prévenu le World Socialist Web Site le 7 janvier :

***BEGIN BLOCKQUOTE*** (Pris du même article du même jour sur le site français à la fin du deuxième paragraphe)

Non seulement un coup d’État fasciste peut se produire ici. Il s’est produit ici, dans l’après-midi du 6 janvier 2021. De plus, même si l’effort initial n’a pas atteint son but, ce ne sera pas le dernier.

***END BLOCKQUOTE***

S’appuyer sur Biden et le Parti démocrate pour s’opposer à la croissance des forces fascistes au sein et autour du Parti républicain, et à la dérive vers la dictature d’une partie croissante de la classe dirigeante, serait une erreur catastrophique.

Le Parti démocrate, comme le Parti républicain, est un parti de Wall Street, de l’armée et de la CIA. Il poursuit essentiellement la même politique meurtrière d’immunité collective que celle menée par Trump, axée sur la réouverture des écoles et l’obligation pour les travailleurs de travailler dans des lieux dangereux afin de produire des profits pour l’élite patronale. Il appelle à l’unité avec le Parti républicain et minimise sa politique fasciste dans le but de forger un front commun avec lui contre la montée de l’opposition sociale dans la classe ouvrière.

(Article paru d’abord en anglais le 1er mars 2021)