Les écoles au Canada ne sont pas «sûres»! Mettons sur pied des comités de la base pour fermer toutes les classes et arrêter l’enseignement en personne pour sauver des vies!

La présente déclaration a été adoptée à l’unanimité dimanche dernier lors d’une réunion du Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base, récemment mis sur pied.

Nous avons formé le Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base pour lutter pour la fermeture immédiate de toutes les écoles au pays. Cette action est nécessaire de toute urgence pour protéger la vie du personnel des écoles, des élèves et de leurs familles contre la pandémie de la COVID-19 qui fait rage.

Même le médecin-chef du gouvernement fédéral reconnaît qu’une troisième vague de la pandémie se développe rapidement, alimentée par de nouveaux variants plus contagieux du virus, et qu’elle menace d’être encore plus mortelle que les deux vagues précédentes.

Des études scientifiques du monde entier – dont une qui a montré que les infections scolaires ont joué un rôle majeur dans l’incubation et la propagation de la deuxième vague à Montréal – ont démontré que l’enseignement en personne est un vecteur important de la propagation de la COVID-19.

Pourtant, les gouvernements provinciaux de toutes tendances politiques, des conservateurs de droite de Ford en Ontario au régime de la CAQ au Québec, en passant par les néo-démocrates de la Colombie-Britannique, sont catégoriques sur le fait que les écoles doivent rester ouvertes et ont constamment cherché à minimiser la menace pour les enseignants, les élèves et leurs familles. En cela, ils ont bénéficié et continuent de bénéficier du soutien indéfectible du gouvernement libéral fédéral de Justin Trudeau.

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Manifestation d’enseignants de Westmount High School à Montréal le 18 janvier contre la politique imprudente du gouvernement du Québec de réouverture des écoles [Source: Robert Green]

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Les politiciens sont hostiles à une approche scientifique pour contenir et arrêter la propagation de la COVID-19, car ils représentent l’élite du monde des affaires pour qui les profits, et non la sécurité et la vie des travailleurs, sont la priorité. Ils considèrent qu’il est vital de maintenir les écoles ouvertes pour poursuivre l’enseignement en personne, car les parents peuvent alors être contraints de retourner au travail, ce qui permet aux grandes entreprises de réaliser des bénéfices.

Cela doit cesser! La gestion désastreuse de la pandémie par l’élite au pouvoir – une crise sanitaire à la fois prévisible et prévue – a déjà provoqué la contamination de 885.000 Canadiens par la COVID-19 et plus de 22.000 décès.

Loin de s’opposer à la politique meurtrière de l’élite au pouvoir pour le retour au travail et à l’école, les syndicats l’ont aidée et encouragée. Dans le dos des enseignants, ils ont négocié et contribué à la mise en place de mesures de sécurité totalement inadéquates, tout en appelant les gouvernements provinciaux à «rouvrir les écoles en toute sécurité», un exploit impossible en période de pandémie.

Les syndicats d’enseignants en Ontario, la CSQ au Québec, la BC Teachers’ Federation en Colombie-Britannique, l’Alberta Teachers’ Association dans la province du même nom et leurs homologues de tout le pays ont systématiquement réprimé l’opposition des enseignants et des parents à l’enseignement en classe. Dans la demi-douzaine de cas où les travailleurs de la base ont réagi à l’épidémie de la COVID-19 dans leurs écoles en débrayant, les syndicats ont isolé leurs luttes et y ont rapidement mis fin.

L’attitude de la bureaucratie syndicale est illustrée par le président de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (FEESO), Harvey Bischof. Lorsqu’on lui a demandé en septembre dernier quelles mesures la FEESO prendrait pour empêcher le gouvernement Ford de mettre en œuvre un plan de réouverture des écoles – alors que sa propre organisation qu’il représentait accusait le gouvernement de mettre la vie des enseignants en danger – Bischof s’est exclamé: «Si la question est de savoir si nous prévoyons mener une grève illégale en matière d’emploi, la réponse est un non catégorique!»

Lorsqu’un enseignant de la base au Québec a présenté une motion à la fin janvier demandant une réunion d’urgence de sa section locale de la CSQ, forte de 10.000 membres, pour discuter de ce qu’il fallait faire pour remédier aux conditions dangereuses prévalant dans les écoles de la Rive-Sud de Montréal, la direction du syndicat a déclaré la motion irrecevable. Selon l’exécutif du Syndicat de Champlain, une discussion sur la réponse des travailleurs à la pandémie ne pouvait avoir lieu au plus tôt que dans deux mois.

Non, les écoles ne sont pas «sûres»!

Des études menées au Canada et dans le monde entier ont montré que les écoles sont des vecteurs importants de la transmission de la COVID-19. Une étude menée par la Dre Simona Bignami de l’Université de Montréal et le Dr John F. Sandberg de l’Université George Washington a révélé que ce sont les enfants de Montréal qui ont infecté leurs parents l’automne dernier, et non l’inverse, transformant une fois de plus la deuxième plus grande ville du Canada en un épicentre de la COVID-19.

Tous les travailleurs savent que le concept des «bulles-classes» n’est que de la poudre aux yeux. Malgré tous nos efforts, des mesures essentielles telles que le port d’un masque et la distanciation physique sont impossibles à appliquer et à faire respecter systématiquement. Elles sont d’autant plus inefficaces dans les écoles qui, en raison de décennies d’austérité capitaliste, sont généralement surpeuplées, délabrées et mal ventilées.

Selon les données du gouvernement – qui sous-estiment sans aucun doute la gravité de la situation en raison de l’insuffisance des tests et de la recherche des contacts – plus de 30 000 élèves et membres du personnel scolaire ont été infectés par la COVID-19, et au moins une éducatrice a perdu la vie en Ontario. Plus de 7500 écoles canadiennes ont enregistré au moins un cas de la maladie et il y a actuellement plus de 2000 foyers actifs. Dans de nombreuses régions, le nombre total d’éclosions dans les écoles et les garderies dépasse celui sur les lieux de travail.

L’affirmation, soutenue par l’establishment politique et les médias du monde des affaires, selon laquelle la COVID-19 ne représente pas un risque sérieux pour la santé des enfants et des jeunes est un mensonge. Alors que la deuxième vague a atteint son apogée vers la fin décembre et le début de janvier, les cas de syndrome inflammatoire multisystémique liés à la COVID-19, potentiellement mortels, ont enregistré un pic. «Nous avons vu plus de cas au cours des dernières semaines et les enfants sont plus malades, a expliqué la Dre Marie-Paule Morin, rhumatologue pédiatrique à l’hôpital Sainte-Justine de Montréal. Nous avons eu plus de cas qui sont allés à l’unité de soins intensifs, qui avaient une atteinte cardiaque, qui avaient besoin d’un traitement.»

De plus, les conséquences à long terme de la COVID-19 pour les enfants et les adultes sont inconnues.

Pour éviter une troisième vague, la classe ouvrière doit intervenir en tant que force indépendante

À chaque étape de la pandémie au Canada, les gouvernements des divers paliers ont donné la priorité aux intérêts de classe égoïstes de l’élite capitaliste plutôt qu’à la protection de la vie des travailleurs. Alors que plus de 650 milliards de dollars ont été canalisés vers les marchés financiers, les banques et les grandes entreprises pour garantir la richesse et les profits des super-riches, les travailleurs ont reçu une aide misérable et totalement inadéquate en plus d’être contraints de retourner à des emplois dangereux. Ignorant les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, les lieux de travail et les écoles ont été rouverts sans que des investissements massifs ne soient consentis dans le système de soins de santé, alors que celui-ci souffre déjà d’un manque chronique de ressources, notamment pour développer des tests de masse systématiques, la recherche des contacts et la capacité de pointe. De même, les gouvernements ont refusé de financer les mesures de santé publique les plus élémentaires au pays, comme la fourniture de dispositifs de filtration d’air et de systèmes de climatisation, pour rendre les écoles et autres bâtiments plus sûrs.

L’explosion des cas de la COVID-19 et des décès provoqués par cette volonté imprudente des gouvernements de rouvrir l’économie les a finalement obligés à réimposer certaines mesures de confinement à la fin de 2020, notamment un retour à l’enseignement en ligne dans certaines provinces. Mais à peine les cas de COVID-19 ont-ils commencé à retomber d’un niveau trois fois plus élevé que le «pic» du printemps dernier que les divers paliers de gouvernement se sont empressés de supprimer toutes les restrictions, la réouverture des écoles étant une fois de plus la première mesure à prendre pour que les parents puissent être poussés à retourner au travail.

Tout cela souligne que la lutte contre la pandémie n’est pas avant tout une question de santé, mais bien une lutte politique. Pour éviter une troisième vague meurtrière, les enseignants et l’ensemble de la classe ouvrière doivent prendre les choses en main et intervenir en tant que force indépendante.

À cette fin, ils doivent construire de nouvelles organisations de lutte: des comités de la base, indépendants et opposés politiquement aux syndicats procapitalistes. Le Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base a été créé pour mener et coordonner la lutte pour la création de tels comités dans chaque école et institution d’enseignement. La tâche principale de ces comités sera de mobiliser les enseignants et leurs partisans afin de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé et la vie tant du personnel scolaire que des élèves et étudiants.

Les ressources nécessaires pour la mise en place d’un enseignement en ligne de haute qualité et la fourniture à tous de soins de santé et d’une protection sur le lieu de travail adéquats sont abondantes. Mais elles sont monopolisées par une élite fabuleusement riche qui profite de l’infection massive et des décès et qui considère que toute dépense consacrée à la prévention des pandémies nuit à ses richesses. Ainsi, au cours de la première année de la pandémie, les 40 milliardaires du Canada ont vu leur richesse combinée augmenter de plus de 50 milliards de dollars.

Comme toujours, la classe dirigeante cherche à frustrer l’opposition de la classe ouvrière en essayant de dresser les travailleurs les uns contre les autres. Ainsi, les politiciens et les médias tentent de dépeindre les enseignants comme des égoïstes parce qu’ils veulent fermer les écoles pourtant dangereuses, en invoquant cyniquement les difficultés que doivent supporter les parents qui travaillent. Cela ne fait que souligner que les luttes des enseignants et du personnel de soutien scolaire sont inséparables d’une lutte pour mobiliser tous les travailleurs afin de lutter pour l’adoption des mesures nécessaires pour arrêter la propagation de la COVID-19.

En luttant pour que les écoles ne servent pas de vecteurs à la pandémie mortelle, les travailleurs de l’enseignement se battent au nom de toute la classe ouvrière.

La lutte pour mettre un terme à l’enseignement en personne doit être liée à l’appel pour un arrêt de toute production non essentielle, avec la garantie du plein salaire versé à tous les travailleurs, ainsi que la mise en place de services de garde d’enfants gratuits et sûrs pour tous les travailleurs de la santé et autres travailleurs essentiels. En mettant de l’avant cette demande essentielle, les comités de la base des enseignants prendront la tête de l’opposition croissante des travailleurs de la santé, de l’industrie, de la construction, de la logistique et d’autres secteurs de la classe ouvrière contre la réponse catastrophique de la classe dominante à la pandémie.

Nous fondons notre comité sur une base pancanadienne parce qu’il est essentiel que les travailleurs – qu’ils soient anglophones, francophones, immigrants ou autochtones – s’unissent tous dans une lutte politique. Un élément clé du sabotage de l’opposition de la classe ouvrière à l’austérité au cours des quatre dernières décennies est les efforts systématiques des syndicats pour isoler ces luttes sur le plan provincial et les subordonner aux systèmes de relations de travail et de négociations collectives propatronaux réglementés par les provinces.

En Ontario, les syndicats s’inclinent devant la décision de la Commission des relations de travail de l’Ontario en demandant aux enseignants de déposer des griefs concernant leurs conditions de travail dangereuses en pleine pandémie de la COVID-19 – au niveau de chaque école ou même de chaque classe. Les enseignants se retrouvent confrontés partout aux mêmes conditions pour faire face à un virus qui ne peut être correctement contenu qu’à l’échelle mondiale.

La pleine puissance sociale de la classe ouvrière ne peut être mobilisée que dans la mesure où les barrières artificielles promues par l’establishment politique sont balayées, et où les travailleurs sont unifiés derrière des revendications et un programme politique communs. Nous adressons un appel particulier aux étudiants de tous les niveaux d’enseignement, ainsi qu’aux enseignants, au personnel administratif, aux concierges et aux travailleurs de la restauration présents dans les écoles, les collèges et les universités. Tous les travailleurs du secteur de l’enseignement, dont beaucoup ont des contrats précaires et ne bénéficient pratiquement d’aucune protection d’emploi, partagent les mêmes intérêts fondamentaux que les enseignants dans le contexte de la réouverture imprudente des campus universitaires, des collèges et des écoles.

Le Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base propose les revendications suivantes aux enseignants de tout le pays comme point de départ pour la lutte actuelle et à venir:

  • Halte à tout enseignement en personne, de l’école primaire à l’université, tant que la pandémie n’est pas maîtrisée!
  • Non à toute production non essentielle!
  • Plein salaire à tous les travailleurs touchés afin de pouvoir rester à la maison tant que la pandémie n’est pas terminée! Soutien financier total aux familles afin qu’elles puissent assurer le bien-être de leurs enfants!
  • Des milliards de dollars pour le système d’éducation afin de renforcer l’enseignement en ligne, protéger l’éducation publique contre la privatisation et fournir aux étudiants, aux familles et aux enseignants tout soutien social et psychologique nécessaire!
  • Toute décision concernant les ouvertures et les fermetures d’écoles doit être supervisée par des comités de la base formés par les travailleurs et les parents, en consultation avec les scientifiques de leur choix et sans l’implication des conseils scolaires ou des syndicats!

Ces demandes ne sont pas fondées sur ce que la classe dirigeante et ses porte-parole médiatiques prétendent pouvoir se permettre, mais sur ce qui est vraiment nécessaire et scientifiquement possible pour protéger des vies et répondre aux besoins des gens. En fin de compte, pour obtenir ces revendications, il faut mobiliser toute la puissance sociale de la classe ouvrière en déclenchant une grève générale partout au Canada. Cette grève doit être menée et organisée par un réseau interconnecté de comités de sécurité de la base dans chaque lieu de travail.

Pour réaliser ce programme, le Comité pancanadien pour la sécurité du personnel enseignant mènera une campagne agressive au cours des semaines et des mois à venir. Cette campagne comprendra :

  • Le partage d’informations sur les luttes des enseignants dans les écoles et autres établissements d’enseignement avec les travailleurs tant canadiens que du reste du monde, y compris des nouvelles sur les infections, les protestations et autres initiatives.
  • La mise en évidence de la complicité des syndicats dans la facilitation du retour à l’école et leur opposition à toute action indépendante des enseignants.
  • La lutte pour fusionner les luttes des enseignants à celles des autres catégories de travailleurs, comme les travailleurs des salaisons industrielles, les employés du secteur des services, les travailleurs de la santé et les travailleurs de l’automobile, qui sont tous confrontés à des conditions similaires menaçantes de vie et de mort à cause de la COVID-19.

La situation à laquelle sont confrontés les travailleurs de l’enseignement au Canada n’est pas différente de celle des autres travailleurs ailleurs dans le monde. Que ce soit au Brésil, en Allemagne, en France ou aux États-Unis, les enseignants sont envoyés en première ligne de la pandémie dans des conditions dangereuses. La pandémie étant mondiale, la classe ouvrière doit apporter une solution internationale.

Le Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base travaillera en solidarité avec les comités de la base mis sur pied aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Turquie, en Australie et ailleurs, en partageant ses expériences et en vue de mener une lutte commune. Tous les enseignants, travailleurs, parents et étudiants intéressés à joindre notre lutte pour mobiliser les travailleurs de l’enseignement afin d’arrêter la propagation de la pandémie et sauver des vies peuvent nous contacter à l’adresse suivante: cersc.csppb@gmail.com

(Article paru en anglais le 8 mars 2021)

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