Deux propriétaires d'entreprise arrêtés pour avoir agressé l'agent de la police du Capitole qui est décédé à la suite de l'attaque du 6 janvier

Dimanche, deux propriétaires de restaurant ont été arrêtés et accusés d’avoir agressé l’agent de la police du Capitole Brian Sicknick et deux autres agents de la police du Capitole avec un répulsif à ours lors de l’attaque du 6 janvier au Capitole américain. Sicknick est décédé le soir suivant. Toutefois, on n’a pas encore déterminé la cause du décès.

Le général William Walker, commandant de la Garde nationale du District de Columbia, prend la parole lors d’une audience commune de la Commission sénatoriale de la sécurité intérieure et des affaires gouvernementales et de la Commission sénatoriale des règles et de l’administration, le mercredi 3 mars 2021, pour examiner l’attaque du 6 janvier contre le Capitole des États-Unis à Washington. (Greg Nash/Pool via AP) [AP Photo/Greg Nash/Pool via AP]

Julian Elie Khater, 32 ans, de Pennsylvanie, et George Pierre Tanios, 39 ans, de Virginie occidentale, font chacun face à neuf chefs d’accusation, dont agression avec une arme mortelle, trouble civil et obstruction à une procédure du Congrès. S’ils sont reconnus coupables, les deux hommes pourraient passer jusqu’à 20 ans en prison.

Alors que la plainte fédérale désigne Khater comme celui qui a utilisé le répulsif à ours, Tanios fait l’objet d’une accusation similaire, car les deux hommes ont travaillé ensemble, selon les procureurs américains qui ont fait référence à des vidéos de l’incident sur les médias sociaux et prises par des caméras corporelles. La plainte pénale déposée lundi allègue que les preuves en ligne et visuelles révèlent «que les deux personnes travaillaient de concert et avaient un plan pour utiliser le vaporisateur toxique contre les forces de l’ordre».

Khater aurait été enregistré à 14h14 en train de demander à Tanios «donne-moi ce truc à ours», alors que les deux hommes cherchaient à prendre d’assaut la terrasse inférieure ouest du Capitole. Ils ont affronté Sicknick et deux autres officiers, identifiés comme étant l’officier C. Edwards de la police du Capitole et l’officier B. Chapman de la police métropolitaine de DC. Les trois se tenaient les uns à côté des autres derrière des porte-vélos.

La caméra corporelle de l'officier de la police métropolitaine de DC D. Chapman montre Khater tenant un aérosol. (Gouvernement américain)

La vidéo montre prétendument Khater qui fouille dans le sac à dos de Tanios et Tanios qui dit: «Attends, attends, pas encore, pas encore… il est encore tôt». Khater réplique avec colère: «Ils viennent de m’asperger, putain», et on le voit tenir une «bonbonne blanche avec un bouchon qui semble être une bonbonne de vaporisateur chimique».

Les documents du tribunal citent la caméra corporelle de l’officier Chapman qui montre qu’à 14h23, les «émeutiers commencent à tirer sur un porte-vélos à la gauche de Chapman à l’aide de cordes et avec leurs mains pour éloigner le porte-vélos». Les documents poursuivent: «Quelques secondes plus tard, Khater est vu avec son bras droit en l’air, semblant tenir une bonbonne dans sa main droite et la diriger vers les officiers, tout en agitant son bras droit d’un côté à l’autre».

Immédiatement après, les trois officiers sont vus en train de réagir «un par un, à quelque chose qui les frappe au visage», selon l’affidavit, qui note que les policiers ne se tenaient qu’à «cinq à huit pieds».

Khater aurait continué à vaporiser en direction des policiers alors qu’ils battaient en retraite, ce qui a incité le lieutenant Jason Bagshaw de la police métropolitaine de DC à pulvériser du gaz poivre sur Khater. L’affidavit indique que Sicknick, Edwards et Chapman ont tous nécessité des soins médicaux, Edwards ayant déclaré avoir eu des croûtes sous les yeux pendant des semaines après l’exposition.

Un examen des comptes de médias sociaux de Tanios et Khater révèle que tous deux sont d’ardents partisans de Trump et propriétaires de petits restaurants. L’affidavit indique que les deux «se connaissaient et ont grandi ensemble dans le New Jersey».

Photos de George Tanios sur les médias sociaux. (Gouvernement américain)

Tanios est propriétaire d’un établissement de restauration rapide à Morgantown, en Virginie-Occidentale, appelé Sandwich U. Le FBI a cité des photos et une vidéo prises le 6 janvier de Tanios qui porte un sweat-shirt noir à capuche avec le logo de son entreprise bien en évidence sur sa poitrine.

Une page LinkedIn liée à Khater indique qu’il est le directeur général et copropriétaire d’une entreprise appelée Frutta Bowls à State College, en Pennsylvanie.

Près de 350 personnes ont été arrêtées à ce jour en rapport avec l’assaut du 6 janvier contre le Capitole. Les charges les plus graves ont été retenues contre des fascistes affiliés aux milices des Oath Keepers et des Proud Boys qui sont majoritairement d’anciens et d’actuels policiers et militaires. Les représentants républicains Matt Gaetz (Floride), Lauren Boebert (Colorado) et Marjorie Taylor-Greene (Géorgie) se sont vantés d’avoir utilisé des membres de ces deux groupes d’extrême droite pour assurer la «sécurité» lors d’événements de campagne.

Les dirigeants des deux groupes, Henry «Enrique» Tarrio, président des Proud Boys, et Stewart Rhodes des Oath Keepers, ont tous deux été cités dans des documents judiciaires liés à l’assaut du Capitole. Ils entretiennent tous deux des relations étroites avec des associés de Trump tels que Roger Stone et Alex Jones, qui ont tous deux enrôlé des membres des Proud Boys et des Oath Keepers pour assurer leur «sécurité.»

Vendredi dernier, des agents du FBI ont arrêté Christopher Worrell, 49 ans, de East Naples, membre des Proud Boys, pour son rôle dans l’assaut du Capitole. Les procureurs allèguent que Worrell s’est rendu à DC le 6 janvier armé de vaporisateur au poivre, qu’il a utilisé contre la police. Worrell a également été photographié près du Capitole, portant un gilet tactique et une radio, avec d’autres membres des Proud Boys.

Worrell fait face à cinq chefs d’accusation fédéraux, dont obstruction aux procédures du Congrès, conduite désordonnée et entrée violente dans l’enceinte du Capitole. Après que le ministère de la Justice a fait appel et gagné une décision d’arrêter la libération de Worrell vendredi, l’avocat de Worrell, Landon Miller, a déclaré à CNN dans un courriel que «trop de charges» avaient été portées contre son client. Miller a affirmé que son client était venu à Washington DC uniquement «sur les instructions de l’ancien président Trump».

La plainte pénale comprend des photos de Worrell qui portait des équipements des «Proud Boys» et apparaissant dans des vidéos avec Tarrio dans un centre commercial de Naples, en Floride.

La facilité avec laquelle la foule d’extrême droite, menée par des membres des Proud Boys, des Oath Keepers, des III Percenters et d’autres forces fascistes a pu pénétrer dans le Capitole est attribuable à une mise en veille des forces de sécurité dirigée par la Maison-Blanche de Trump et mise en place par les plus hauts niveaux du Pentagone, en commençant par le secrétaire à la Défense en exercice à l’époque, Christopher Miller.

Trump a installé Miller le 9 novembre 2020, peu après que le démocrate, Joe Biden, a été déclaré vainqueur de l’élection du 3 novembre. Ancien béret vert et fidèle de Trump, Miller avait été nommé dans le cadre d’une purge des hauts responsables du Pentagone qui comprenait le licenciement du secrétaire à la Défense Mark Esper. Esper s’était attiré la colère de Trump pour s’être publiquement opposé à la menace de Trump d’invoquer la loi sur l’insurrection et de déployer des soldats en service actif contre les manifestants qui s’opposaient aux violences policières le 1er juin.

Ce jour-là, Trump a prononcé un discours dans la roseraie de la Maison-Blanche dans lequel il s’est déclaré «président de la loi et de l’ordre» et a mobilisé la police militaire pour disperser violemment les manifestants qui protestaient pacifiquement en face de la Maison-Blanche. Il s’agissait d’une tentative de coup d’État, qui n’a été déjouée que par les hauts gradés de l’armée, qui considéraient à l’époque qu’une telle mesure était prématurée et mal préparée.

Le 3 mars, le commandant de la Garde nationale de Washington, le général William Walker, a expliqué devant le Sénat comment, avant la certification par le Congrès, le 6 janvier, de la victoire électorale de Biden, Miller et Ryan McCarthy, alors secrétaire d’État à l’Armée, lui avaient retiré l’autorité de déployer ses troupes pour protéger le Capitole. Le jour de l’insurrection fasciste, alors que la foule de Trump envahissait le Capitole et menaçait de prendre en otage ou de tuer des législateurs, Miller et McCarthy ont retardé de plus de trois heures l’approbation de ses demandes d’envoi de forces contre les envahisseurs.

À ce jour, ni Miller ni McCarthy n’ont été convoqués par les dirigeants démocrates de la Chambre et du Sénat pour expliquer le fait qu’ils aient ignoré les appels désespérés de Walker et du chef de la police du Capitole à envoyer des forces pour protéger le Congrès de la foule.

La semaine dernière, dans une interview accordée au site Internet Vice, Miller a défendu ses actions autour du 6 janvier, niant qu’il y avait quoi que ce soit de suspect ou de douteux dans l’écart de 99 minutes entre les demandes de Walker et de la police du Capitole pour des renforts de la Garde nationale et leur déploiement final: bien après que Trump ait lancé un appel aux insurgés pour qu’ils quittent le Capitole.

«Il faut comprendre comment fonctionne l’armée», a déclaré Miller. «Ce n’est pas un jeu vidéo, ce n’est pas “Black Ops Call of Duty”». Miller a poursuivi en affirmant qu’il n’avait pas du tout parlé à Trump le 6 janvier, et a qualifié d’«hyperbole» toute suggestion de tentative de coup d’État.»

(Article paru en anglais le 16 mars 2021)

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