Les ministres des Affaires étrangères du G7 discutent de leur programme anti-Russie et anti-Chine dans un contexte de pandémie mondiale

Les ministres des Affaires étrangères des pays du G7 – les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon et le Canada – se sont réunis à Londres cette semaine avant le sommet complet du G7 en juin. L’événement a clairement montré que la réunion du mois prochain sera utilisée pour renforcer un axe anti-Russie et anti-Chine, dirigé par les États-Unis.

La Grande-Bretagne profite de sa position d’hôte cette année pour confirmer son engagement total dans la politique étrangère agressive du président Joe Biden et à pousser les autres nations, en particulier les puissances européennes, à adopter la même position.

Lundi, le secrétaire d’État américain Antony Blinken et le ministre britannique des Affaires étrangères Dominic Raab ont tenu une conférence de presse conjointe. Raab a déclaré que les deux pays étaient «solidaires» et Blinken a salué leur «relation spéciale», affirmant que les États-Unis n’avaient «aucun allié ni partenaire plus proche». Blinken a rencontré le premier ministre Boris Johnson mardi et a discuté de «l’alignement étroit entre la politique étrangère du Royaume-Uni et des États-Unis», selon un porte-parole de Downing Street.

Le ministre britannique des Affaires étrangères, Dominic Raab, pose pour une photo aux côtés des ministres des Affaires étrangères du G7 à Lancaster House, Londres, Royaume-Uni. 5 mai 2021 (Photo Simon Dawson/No 10 Downing Street-FlickR)

Dans une déclaration avant les discussions, Raab a affirmé: «La présidence britannique du G7 est l’occasion de rassembler des sociétés ouvertes et démocratiques et de faire preuve d’unité à un moment où elle est très nécessaire pour relever les défis communs et les menaces croissantes.» Lors de sa conférence de presse avec Blinken, il a appelé à la création de «groupes flexibles de pays partageant les mêmes valeurs et souhaitant protéger le système multilatéral» et «l’ordre international fondé sur des règles»: c’est-à-dire basé sur l’hégémonie des États-Unis.

Le premier ministre britannique, Boris Johnson, préside une réunion bilatérale avec le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, au 10 Downing Street, le 4 mai 2021, à Londres, Royaume-Uni. (Photo: Simon Dawson/No 10 Downing Street-FlickR)

Tous deux ont souligné que le but d’une telle alliance serait une confrontation avec la Russie et la Chine. Raab a exigé du président russe, Vladimir Poutine, qu’il mette fin à sa «politique de la corde raide et du sabre à la frontière de l’Ukraine, aux cyberattaques et à la désinformation, ainsi qu’à l’empoisonnement d’Alexei Navalny: cela n’était pas seulement une violation des droits de l’homme, mais aussi une utilisation d’armes chimiques sur le sol russe». Blinken a averti que «si la Russie choisit d’agir de manière imprudente ou agressive, nous répondrons», tout en affirmant que les États-Unis «ne cherchent pas l’escalade».

Ce sont les États-Unis qui orchestrent les provocations contre la Russie par l’intermédiaire de l’OTAN et du gouvernement nationaliste de droite en Ukraine qui a approuvé une stratégie qui vise à «récupérer» la Crimée, territoire désormais détenu par la Russie. Blinken s’est rendu mercredi en Ukraine depuis le Royaume-Uni pour «réaffirmer» le «soutien indéfectible de l’Amérique à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine».

Le communiqué du G7 accuse la Russie de «comportement irresponsable et déstabilisant», notamment «le renforcement important des forces militaires russes aux frontières de l’Ukraine et en Crimée annexée illégalement; ses activités malveillantes qui visent à saper les systèmes démocratiques d’autres pays; sa cyberactivité malveillante et son utilisation de la désinformation». Il déclare de manière menaçante, en référence à Alexei Navalny, critique de Poutine et larbin de l’impérialisme, qui aurait été empoisonné: «Ceux qui utilisent des armes chimiques doivent rendre des comptes».

Pour aider à contrer l’opposition populaire au bellicisme des puissances impérialistes, Raab a encouragé le G7 à «mettre en place un mécanisme de réfutation rapide» afin de mettre un terme à la couverture médiatique et aux discussions qui vont à l’encontre des objectifs du groupe et qui sont qualifiés de «mensonges et propagande ou fausses nouvelles». Le communiqué s’engage à dissuader «ceux qui prennent pour cible nos institutions et processus démocratiques; cherchent à saper la confiance du public dans l’intégrité de nos démocraties et tentent d’interférer dans l’espace d’information».

La Chine a été le principal centre d’intérêt de la réunion des ministres des Affaires étrangères, avec un temps de discussion de deux heures, contre 90 minutes pour la Russie et 30 minutes pour le Myanmar et la Syrie, selon le South China Morning Post. Un dîner de travail a été organisé sur la région indopacifique.

Blinked a affirmé: «Notre objectif n’est pas d’essayer de contenir la Chine ou de la retenir. Ce que nous essayons de faire, c’est de faire respecter l’ordre international fondé sur des règles… Et lorsqu’un pays – la Chine ou un autre – agit de façon à remettre en cause, à saper ou à éroder cet ordre fondé sur des règles, et à ne pas respecter les engagements qu’ils ont pris à l’égard de cet ordre, nous allons intervenir pour défendre cet ordre».

L’«ordre» auquel Blinken fait référence est celui dans lequel les États-Unis et leurs alliés cherchent à isoler la Chine sur le plan international et à organiser des provocations répétées en mer de Chine méridionale et à Taïwan, tout en déployant des forces militaires toujours plus importantes dans la région. Les États-Unis poursuivent leurs projets de déploiement de missiles précédemment interdits par le traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) au Japon, à Taïwan et aux Philippines. Le Royaume-Uni augmente le nombre de ses ogives nucléaires et envoie un groupe d’attaque, comprenant un porte-avions et un sous-marin nucléaire, en mer de Chine méridionale.

Les deux pays ont eu le culot de signer un communiqué qui affirme: «Nous sommes attachés à l’objectif ultime d’un monde sans armes nucléaires» et fait l’éloge du traité de non-prolifération nucléaire.

Selon une déclaration de l’Union européenne, le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, a tenu une réunion privée avec Blinken au cours de la semaine pour discuter des relations avec la Chine. Les principales puissances européennes, notamment l’Allemagne et la France, sont réticentes à adhérer pleinement à la stratégie anti-chinoise de Biden, car cela impliquerait le sacrifice d’importants intérêts économiques. Mardi, dans une indication de la dispute en cours en Europe sur cette question et une concession claire aux États-Unis, l’UE a annoncé qu’elle avait arrêté les progrès sur un accord d’investissement avec la Chine. L’Allemagne, qui a d’importants intérêts commerciaux en Chine, était à l’origine de cet accord, mais les nations européennes les plus proches des États-Unis s’y sont opposées.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Mass, a fait allusion à ces divisions dans une déclaration faite avant la réunion, faisant remarquer qu’il était «grand temps» pour le G7 de «contrer les États autoritaires qui tentent de nous monter les uns contre les autres et où la violation des règles devient la norme».

Le communiqué du G7 a adopté un ton moins belliqueux qu’à l’égard de la Russie, mais il a néanmoins fait part de sa «préoccupation» concernant «les violations des droits de l’homme et les abus au Xinjiang et au Tibet»; «la décision de la Chine d’éroder fondamentalement les éléments démocratiques du système électoral à Hong Kong»; et «les pratiques qui sapent les systèmes économiques libres et équitables, notamment en matière de commerce, d’investissement et de financement du développement». Il a appelé la Chine à «respecter ses engagements à agir de manière responsable dans le cyberespace, notamment en s’abstenant de commettre ou de soutenir des vols de propriété intellectuelle dans le cyberespace».

Pour élargir l’axe anti-chinois, le Royaume-Uni a invité les ministres des Affaires étrangères de l’Australie, de l’Inde, de l’Afrique du Sud et de la Corée du Sud aux discussions, ainsi que le président de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Raab a expliqué que cette invitation reflétait «l’importance croissante de la région indopacifique pour le G7». La liste élargie des ministres des Affaires étrangères comprenait les quatre membres de la «Quadrilatérale», une alliance des États-Unis, du Japon, de l’Australie et de l’Inde, dirigée contre la Chine.

L’invitation du ministre indien des Affaires étrangères a mis en évidence le mépris total des effets de la pandémie partagé par les puissances du G7. Représentant près de la moitié de l’économie mondiale, avec un PIB combiné d’environ 40.000 milliards de dollars, les représentants de l’Inde ont à peine mentionné le coronavirus et n’ont prononcé que des paroles creuses lorsqu’ils l’ont fait, dans des conditions où le virus tue au moins 13.000 personnes par jour. Pas un instant il n’a été question de renoncer aux brevets privés sur les vaccins. On n’a pas invité l’Inde, épicentre de cette catastrophe humanitaire mondiale à discuter de mesures d’urgence pour sauver des millions de vies, mais de plans de guerre qui menacent d’innombrables autres millions.

L’engagement du G7 en faveur de la politique meurtrière d’«immunité collective», ou «apprendre à vivre avec le virus», a été mis en évidence par l’intervention du ministre britannique des Transports, Grant Shapps. Le ministre du gouvernement a présidé une réunion de ses homologues du G7 et de la Commission européenne pour organiser la réouverture des voyages internationaux. Quelques heures auparavant, toute la délégation indienne au Royaume-Uni avait été contrainte de s’auto-isoler après que plusieurs d’entre elles avaient été déclarées positives au Covid-19.

En ce qui concerne la catastrophe économique qui menace des milliards de personnes dans le monde, la somme totale des nouveaux engagements du G7 en faveur d’une «reprise durable» se résume à un fonds de 15 milliards de dollars «pour offrir aux femmes des pays en développement… de meilleures opportunités économiques» et à un objectif de scolarisation de 40 millions de filles supplémentaires d’ici 2026. Dans une année où des milliers de milliards de dollars ont été pillés à la classe ouvrière et remis aux sociétés et aux super-riches, c’est, au mieux, de la poudre aux yeux.

(Article paru d’abord en anglais le 6 mai 2021)

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