La moitié de la population canadienne est à moins de 200 dollars de l’insolvabilité alors que la richesse des milliardaires explose

Selon un récent sondage, 53 % des Canadiens sont à moins de 200 $ de l’insolvabilité ou sont déjà incapables de faire face à leurs obligations financières mensuelles.

Le dernier indice des dettes à la consommation de MNP montre que le nombre de Canadiens en situation de stress financier extrême a atteint son plus haut niveau depuis cinq ans. Depuis décembre 2020, c’est-à-dire en l’espace de quatre mois seulement, le nombre de personnes insolvables ou au bord de l’insolvabilité a bondi de 10 points de pourcentage.

Les syndicats d’enseignants de l’Ontario ont utilisé la pandémie comme prétexte pour saborder un mouvement croissant contre les coupes dans l’éducation du gouvernement Ford et imposer des reculs. Ci-dessus, une partie des dizaines de milliers d’enseignants qui ont défilé devant l’Assemblée législative de l’Ontario lors d’une journée de grève provinciale le 21 février dernier.

MNP Ltd, qui a recueilli les données, est la plus grande société d’insolvabilité du pays, avec quelque 200 bureaux à travers le pays. Ses chiffres indiquent que 30 %, soit près d’un Canadien sur trois, sont déjà insolvables.

Les résultats de l’enquête montrent que le Canadien moyen se retrouve avec seulement 625 $ après avoir payé ses factures mensuelles. Ce montant a diminué de 108 $, soit une baisse de 15 %, au cours des quatre derniers mois seulement. Cette forte baisse est probablement due au fait que le gouvernement libéral fédéral et les provinces ont réduit ou carrément éliminé les programmes de soutien du revenu de fortune qu’ils avaient mis en place au début de la pandémie.

La classe ouvrière est touchée à l’échelle nationale, mais le pourcentage de personnes confrontées à l’insolvabilité varie d’une province à l’autre. En Saskatchewan et au Manitoba, par exemple, 59 % des résidents sont à moins de 200 $ de l’insolvabilité. En Ontario, au Québec, en Colombie-Britannique et en Alberta, ce chiffre varie entre 52 et 54 %. Dans les quatre provinces de l’Atlantique – Terre-Neuve, l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse – 58 % des gens ne peuvent pas ou sont sur le point de ne pas pouvoir payer leurs factures.

Au cours des dernières décennies, les gains salariaux réels pour les travailleurs, en particulier les travailleurs non qualifiés moins bien rémunérés, ont été minimes, voire inexistants. Pendant ce temps, les revenus réels, corrigés de l’inflation, des 10 premiers et surtout des 1 % les plus riches ont fortement augmenté. En 2019, le 1 % des Canadiens les plus riches a gagné 14,8 % de tous les revenus, soit une augmentation de plus de 160 % par rapport à sa part de 9,1 % en 1986. Pendant ce temps, la part de revenu de la moitié la plus pauvre de tous les Canadiens est passée de 18,2 pour cent en 1986 à seulement 15,6 pour cent en 2019.

Une mesure de l’assaut des grandes entreprises et de l’État contre la classe ouvrière est l’érosion en termes réels des salaires minimums fédéraux et provinciaux. La Saskatchewan a actuellement le plus bas salaire du pays, soit 11,45 $ l’heure. Un travailleur qui travaille 40 heures par semaine au salaire minimum de 11,75 $ de l’heure au Nouveau-Brunswick ne gagnerait que 470 $ par semaine. Pourtant, selon la plus grande base de données sur le coût de la vie au monde, le coût de la vie estimé pour une famille de quatre personnes à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, est de 4212 $ par mois, avant la prise en compte du loyer.

Les augmentations du prix des aliments devraient encore comprimer les revenus des travailleurs dans les mois à venir. Le 2021 Food Price Report de l’Université Dalhousie prévoit que les prix des aliments à travers le pays augmenteront de 3 à 5 % cette année, soit la plus forte hausse depuis la création du rapport il y a 11 ans. Selon le rapport, la famille canadienne moyenne peut s’attendre à payer 695 $ de plus pour l’épicerie cette année.

Ces prévisions sont très inquiétantes pour les ménages de tout le pays qui ont subi des pertes d’emploi, des réductions de salaire, des pertes de petites entreprises, ainsi que la maladie et la mort de membres de leur famille à cause de la pandémie de COVID-19 et de la politique insensible de l’élite dirigeante qui fait passer les profits avant les vies.

Alors que les gouvernements à tous les niveaux et de toutes les tendances politiques ont fait en sorte que l’économie reste ouverte pour que les grandes entreprises puissent continuer à faire des profits à tour de bras, ils ont refusé de fournir un soutien financier adéquat pour aider les travailleurs à traverser la crise. Pendant ce temps, le grand patronat et l’oligarchie financière, après avoir reçu des centaines de milliards de dollars en renflouements gouvernementaux, ont intensifié leur effort de plusieurs décennies pour augmenter leur marge bénéficiaire par des suppressions d’emplois, des accélérations de la cadence au travail et des réductions des pensions et autres avantages.

«Le nombre de Canadiens qui n’ont pratiquement aucune marge de manœuvre dans le budget de leur ménage a atteint son plus haut niveau depuis cinq ans», a déclaré Grant Bazian, président de MNP Ltd, lors de la publication le mois dernier de l’indice des dettes à la consommation de MNP. «L’anxiété que ressentent les Canadiens à l’idée de joindre les deux bouts – ou d’être déjà dans l’incapacité de le faire – nous indique que nous pourrions assister à une avalanche de ménages en retard dans leurs paiements ou en défaut de paiement sur des prêts, des hypothèques, des paiements de voiture ou des cartes de crédit.»

Selon MNP, un quart des Canadiens ont contracté de nouvelles dettes pendant la pandémie. Alors que les intérêts hypothécaires sont à des niveaux historiquement bas, il y a de plus en plus d’indications d’un pic d’inflation mondial à venir qui pourrait conduire à une forte augmentation des taux d’intérêt, et les sociétés de cartes de crédit qui s’attaquent particulièrement aux pauvres continuent à facturer régulièrement des taux de 20 % et plus.

Un sondage réalisé en mars pour Global News a révélé que les jeunes et les chômeurs canadiens ont été les plus durement touchés financièrement par la pandémie. Le sondage a révélé que 42 % des Canadiens âgés de 18 à 34 ans ont déclaré que leur situation financière s’était détériorée au cours de la dernière année.

Les jeunes constituent une grande partie de la main-d’œuvre dans de nombreux secteurs qui ont procédé à des licenciements massifs pendant la pandémie, notamment les secteurs de la vente au détail, de la restauration et de l’hôtellerie, ainsi que ceux dans lesquels le modèle précaire de l’«économie des petits boulots» est de plus en plus répandu.

Alors que la classe ouvrière est aux prises avec une généralisation de l’appauvrissement, de la mort et de la maladie, conséquence directe des politiques de la classe dirigeante, l’oligarchie financière canadienne a vu sa richesse monter en flèche.

Les données tirées des rapports annuels des milliardaires «Real Time Billionaires» du 7 avril et 2020 de Forbes indiquent que les 47 milliardaires canadiens ont vu leur richesse augmenter de 78 milliards de dollars l’année dernière, ce qui leur confère une richesse combinée de 270 milliards de dollars.

La famille milliardaire la plus riche du Canada, les Thomson, principaux propriétaires de la Thomson Reuters Corporation et du Globe and Mail, a vu sa richesse augmenter de 14,4 milliards de dollars. D’autres personnes ont enregistré des augmentations massives de leur richesse dans le contexte de la pandémie: Tobi Lutke, fondateur de la société de commerce électronique Shopify, dont la richesse a augmenté de 8,8 milliards de dollars, et Jim Pattison, de Colombie-Britannique. Ce dernier a vu sa fortune augmenter de 7,2 milliards de dollars au cours de la pandémie, faisant passer sa valeur nette à 12,6 milliards de dollars. Pattison est le président, le PDG et l’unique propriétaire du Jim Pattison Group, un conglomérat qui possède et exploite de nombreuses entreprises d’emballage, d’alimentation, de foresterie et de médias.

Pattison possède plusieurs chaînes d’épiceries qui opèrent dans l’Ouest canadien. Alors qu’il a augmenté sa fortune personnelle de plus de 500 millions de dollars au cours des trois premiers mois de la pandémie, il a tristement réduit la prime de risque de 2 dollars des travailleurs de première ligne de ses épiceries en mai 2020. Interrogé sur cette impitoyable récupération des salaires, Pattison a rejeté la responsabilité sur d’autres personnes, déclarant effrontément à la presse: «Je ne suis pas impliqué. Nous possédons et finançons l’entreprise, mais nous ne la dirigeons pas.»

La classe dirigeante ne fera que continuer à sacrifier les vies et les moyens de subsistance des travailleurs au nom du profit alors que la pandémie fait rage. Cette situation ne pourra être rectifiée que par la mobilisation de la classe ouvrière en tant que force politique indépendante. Les travailleurs de toutes les industries du Canada doivent former des comités de base indépendants des syndicats procapitalistes et lutter pour la fermeture de toutes les entreprises non essentielles et la suspension de tous les cours en classe jusqu’à ce que la propagation du COVID-19 soit arrêtée. Les vastes richesses accumulées par l’oligarchie financière doivent être expropriées selon les principes socialistes afin de financer les mesures nécessaires pour protéger la vie et les moyens de subsistance des travailleurs.

(Article paru en anglais le 5 mai 2021)

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