Dimanche, les travailleurs de l'usine Volvo Trucks de New River Valley à Dublin, en Virginie, ont rejeté à une écrasante majorité un accord salarial de cinq ans proposé par le syndicat United Auto Workers (UAW). Selon l'UAW, 91 pour cent des travailleurs votants de Volvo ont rejeté l'accord.
À chaque tournant de leur lutte, les quelque 3 000 travailleurs de l'usine Volvo se sont heurtés à la trahison de l'UAW. Les travailleurs ont fait grève à l'usine de fabrication de camions le 17 avril, déterminés à annuler les concessions que l'UAW avait accordées à la multinationale suédoise au cours des quatre derniers accords. L'UAW a brutalement mis fin à la grève de deux semaines le 30 avril, affirmant avoir conclu un accord avec des «avancées significatives» pour les travailleurs. L'UAW a immédiatement ordonné aux travailleurs de reprendre leur travail sans qu’ils aient vu l’accord, sans parler d’avoir voté sur lui.
Au fur et à mesure que les détails de l'accord commençaient à paraître, l'opposition s'est développée contre l'UAW. Avec l'aide du Socialist Equality Party (Parti de l’égalité socialiste aux États-unis) et du World Socialist Web Site, des militants ont formé le comité de la base des travailleurs de Volvo (VWRFC). Le comité a publié des déclarations, lues par des milliers de travailleurs, appelant au rejet de l’accord qui prévoyait des augmentations de salaire inférieures au taux d'inflation, des salaires proches du seuil de pauvreté pour les travailleurs ayant peu d’ancienneté, des attaques contre les prestations de santé et les retraites, et une nouvelle journée de travail de 10 heures.
Comme ils l'ont fait au moyen de nombreuses trahisons pendant des décennies, les responsables de l'UAW ont tenté d’intimider les travailleurs en insistant pour dire que rien de mieux ne pouvait être obtenu et que le rejet de l’accord entraînerait une longue grève futile et le transfert d'emplois au Mexique. Malgré les prédictions arrogantes des hauts dirigeants de l'UAW que leur accord recueillerait 60 pour cent de voix favorables, les travailleurs de Volvo se sont mobilisés en nombre record et ont voté «non» presque à l'unanimité.
Maintenant, l'UAW insiste pour que les travailleurs restent au travail après l'échec de l’accord. Après avoir saboté la première grève, l'UAW insiste pour que les travailleurs aident Volvo à constituer son stock de camions pour résister à une autre grève. Pendant ce temps, les responsables de l'UAW sillonnent l'usine pour «enquêter» sur ce que les travailleurs veulent dans une nouvelle proposition d’accord – afin qu'ils puissent à nouveau le brader.
Les travailleurs de Volvo ont pris position contre la classe dirigeante et ses apparatchiks dans l'UAW. C'est une avancée importante. Maintenant, la question est de savoir comment développer et étendre cette lutte.
Premièrement, aucune confiance ne peut être accordée à aucune partie du Comité de négociation de l'UAW International ou du Local 2069. Un nouveau comité de négociation, élu par les travailleurs, doit être formé pour faire avancer les revendications des travailleurs.
Le WSWS Autoworker Newsletter (Bulletin d’information des travailleurs de l’automobile) appelle tous les travailleurs à rejoindre le VWRFC et à formuler des revendications qui répondent aux besoins des travailleurs, y compris une augmentation de salaire substantielle pour compenser les quatre derniers accords au rabais de l'UAW; une clause de salaire indexé sur le coût de la vie; l'abolition du système salarial différentiel à deux niveaux; l'application de la journée de huit heures et des congés payés suffisants; et les soins de santé et les pensions de retraite entièrement pris en charge par l'employeur.
La lutte des travailleurs de Volvo doit être élargie et liée au développement de la lutte de classe aux États-Unis et à l’international. L’opposition massive à l'UAW est un signe parmi les nombreux signes indéniables de la montée du militantisme de la classe ouvrière.
Le mois dernier, les mineurs en grève de Warrior Met Coal en Alabama ont voté 1.006 contre 45 voix pour rejeter un accord promu par l'United Mine Workers (UMW), qui manquait à rétablir les réductions de salaire passées. Les infirmières du Massachusetts, les travailleurs du Texas ExxonMobil, les métallurgistes d'Allegheny Technology en Pennsylvanie et dans d'autres États, ainsi que les étudiants diplômés de l'Université de New York et de l'Université de Columbia, ont tous été engagés dans des grèves prolongées et des lock-out, où ils affrontent non seulement les employeurs et le gouvernement, mais la traîtrise des syndicats.
Partout dans le monde, de la Turquie et de l'Allemagne à la Colombie et au Sri Lanka, les travailleurs sont engagés dans une vague montante de luttes de classe contre la réponse criminelle de la classe dirigeante à la pandémie. Ils combattent les mesures d'austérité imposées par les gouvernements capitalistes qui ont renforcé le marché boursier et les fortunes privées des milliardaires. La montée de la résistance de la classe ouvrière est en outre alimentée par la forte hausse des prix de la nourriture et de l’essence et d'autres frais de subsistance.
La crainte dans la classe dirigeante d'un mouvement social croissant de la classe ouvrière a été exprimée par le comité de rédaction du Wall Street Journal dans un communiqué de dimanche. Le journal s’y plaignait amèrement de la hausse des «attentes» salariales, d'autant plus que les travailleurs gagnaient en confiance en raison d'une pénurie de main-d'œuvre. «Le risque est qu'au fur et à mesure que les anticipations d'inflation augmentent, elles s'intègrent dans le comportement des consommateurs et les décisions commerciales. Les travailleurs exigent des salaires plus élevés pour suivre les prix, quelle que soit la productivité sous-jacente; les entreprises paient pour garder ces travailleurs et augmentent ensuite les prix pour compenser. Les travailleurs exigent alors des salaires élevés, car il est difficile de casser ces attentes. »
Les porte-parole de l'oligarchie financière au Wall Street Journal ont choisi d'ignorer le fait qu'au cours des 40 dernières années, la productivité du travail a augmenté de 70 pour cent tandis que la rémunération horaire stagnait. La thésaurisation de ces gains de productivité par l'élite financière et industrielle – qui n’apporte rien à la société – a coûté aux travailleurs environ 50.000 milliards de dollars durant les quatre dernières décennies. Si les salaires suivaient les gains de productivité, chaque travailleur parmi les 90 pour cent les plus pauvres de la population gagnerait 1 144 $ de plus par mois, 12 mois par an, année après année.
Une éruption sociale massive se développe, qui oppose la classe ouvrière à l'élite dirigeante et à l'ensemble du système capitaliste. La pandémie mondiale de coronavirus et la réponse mortifère de la classe dirigeante ont contribué à une énorme montée de la colère et de l'opposition.
Dans ces conditions, une partie de la classe dirigeante voit dans les syndicats un instrument essentiel pour la répression de l'opposition.
Il est à noter que les grands médias ont pratiquement ignoré le vote des travailleurs de Volvo. Comparez cela à la couverture incessante que le New York Times, le Washington Post et d' autres médias ont donné à la campagne de syndicalisation chez Amazon à Bessemer, en Alabama.
Malgré la promotion médiatique et le soutien de l'administration Biden au Syndicat du commerce de détail, de gros et des grands magasins (RWDSU), les travailleurs d'Amazon ont rejeté à une écrasante majorité le RWDSU, car ils n'avaient aucune confiance dans des syndicats officiels qui ont passé les quarante dernières années à imposer les diktats des grands groupes.
Biden – qui se rendra aujourd'hui à une usine Ford aux côtés de dirigeants de l'UAW qui ont forcé les travailleurs à rester au travail pendant la pandémie – cherche à fortifier les syndicats contre la croissance de l'opposition de la classe ouvrière et la radicalisation politique à gauche. En cela, la Maison Blanche est soutenue par divers groupes de la classe moyenne, des Socialistes démocrates d'Amérique (DSA) à Left Voice, dont les membres ont de plus en plus investi des postes et des carrières lucratives dans l'appareil syndical. Cela inclut la Fédération américaine des enseignants, sur laquelle Biden compte pour rouvrir les écoles alors même que le COVID-19 continue de se propager.
Les travailleurs dans ces luttes – de Warrior Met Coal, de l'hôpital St. Vincent de Worcester, Massachusetts, aux métallurgistes d'ATI, et aux travailleurs d'ExxonMobil, en passant par les travailleurs d’Amazon et de l'automobile – sont tous confrontés au même défi. Pour faire avancer leur combat, de nouvelles organisations de lutte, contrôlées démocratiquement par la base et défendant les méthodes de la lutte de classe, et non de la collaboration de classe, doivent être construites.
Le Socialist Equality Party, SEP (Parti de l’égalité socialiste) et le WSWS donneront aux travailleurs les informations dont ils ont besoin, aideront à établir les lignes de communication pour coordonner l'action commune et fourniront toute l'aide nécessaire pour développer et étendre la lutte des classes. Nous encourageons vivement les travailleurs de Volvo à rejoindre et à élargir le comité de base des travailleurs de Volvo et le réseau croissant de comités de base aux États-Unis et dans le monde entier.
(Article paru en anglais le 18 mai 2021)